Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Mesdames et Messieurs,
Je vous remercie, Monsieur le Sénateur, de m'avoir demandé de clôturer vos travaux aujourd'hui et de me permettre ainsi de participer aux débats que contribue à nourrir le travail remarquable qui a été réalisé sous votre présidence au nom de la Commission des Affaires économiques et du Plan.
Vin, santé, Alimentation, trois mots chargés de sens.
La modification des modes de vie, le poids croissant des exigences personnelles en matière de santé, la place que prennent aujourd'hui les préoccupations collectives sur la sécurité alimentaire, enfin le développement des échanges : autant de facteurs qui ont profondément modifié la relation que le consommateur entretient avec son alimentation.
Cette relation, sensible par nature, prend une dimension plus complexe encore dès lors qu'il s'agit du vin.
Car le vin, c'est un art de vivre.
C'est bien autre chose qu'un simple produit agricole ou qu'une vague " commodity " que l'on peut échanger sur un marché désincarné à Londres ou à Chicago. D'ailleurs, le vin aujourd'hui est de moins en moins considéré comme un aliment : il accompagne, met en valeur, complète et parfois sublime notre table et nos plats. Mais il ne peut pas non plus être réduit au seul univers de la gastronomie. Le vin, c'est beaucoup plus que tout cela.
Le vin, c'est tout un monde. Chargé d'une forte dimension culturelle et patrimoniale, le vin a marqué notre histoire, dessiné nos paysages, façonné notre géographie et continue de faire battre le coeur économique et social d'innombrables régions.
Sur un peu plus de 3 % de la surface agricole, la viticulture assure 15 % des livraisons et pèse pour plus de 40 % dans le solde agroalimentaire français : ces chiffres, que vous connaissez tous, se passent de commentaires.
Grande utilisatrice de main d'oeuvre, grande gestionnaire d'espace et de territoires, fleuron de notre économie nationale et de nos exportations, ambassadrice de notre puissance agroalimentaire, la viticulture française demeure, à bien des égards, la référence mondiale que le monde entier nous envie pour sa qualité et son authenticité.
Mais, vous le savez, aucun leadership n'est définitivement acquis, aussi ancien et légitime soit-il. Et le nôtre est aujourd'hui contesté.
C'est le constat sans ambiguïté qu'établit de façon très claire le rapport du groupe de travail sénatorial sur l'avenir de la viticulture française dont vous avez présenté les conclusions essentielles ce matin.
Les faits sont là.
Le marché intérieur continue son repli, lent mais régulier pendant qu'une concurrence acharnée se développe chaque jour un peu plus sur les marchés d'exportation. Cette évolution, chacun de nous peut en mesurer la portée jour après jour.
Elle est le fait de ces nouveaux pays producteurs dont la part dans le vignoble mondial a doublé en 10 ans et dont l'exiguïté de leur propre marché domestique les pousse mécaniquement sur les marchés les plus solvables.
Dans ce contexte nouveau, où l'offre élargie est devenue globalement excédentaire, la clé, bien sûr, c'est le consommateur. Mais aussi toute la sensibilité qui l'entoure.
Là dessus soyons clairs, les problèmes d'alcoolisation liés à une consommation excessive et leurs effets sur la santé ne peuvent, et ne doivent pas être niés. Ils doivent au contraire être dénoncés, partout et par tous.
Mais sur ce point, je sais que la filière française est aujourd'hui convaincue de la responsabilité qui est la sienne dans la lutte contre les méfaits de l'alcoolisme et en particulier contre la violence routière, dont le Président de la République, je le rappelle, a fait une de ses principales priorités.
A cet égard, je me félicite que les professionnels rassemblés sous la bannière "Vins et société" aient entrepris de se rapprocher de la ligue pour la sécurité routière pour jeter les bases d'un vrai partenariat. Je sais qu'une réunion a déjà eu lieu et qu'une autre se tiendra dans les jours prochains.
C'est ainsi, en prenant part à un combat commun et concerté, que la filière viticole pourra s'associer à une politique de santé publique fondée sur l'éducation du consommateur, et participer à une prévention ciblée sur les comportements, plus que sur la stigmatisation de tel ou tel produit.
A cet égard, chacun est bien obligé de constater que depuis 30 ans, la consommation de vin a fortement diminué en France et qu'elle continue encore de se contracter. Nos modes de vie changent, notre alimentation aussi et cela se traduit, entre autre, par une diminution globale de la consommation d'alcool.
Mais cela se traduit aussi, en même temps, par une diminution significative de la part de vin dans la consommation d'alcool des français ce qui confirme, s'il était besoin, que le vin ne peut pas être rendu seul responsable de tous les maux liés à une consommation excessive d'alcool.
Des travaux que plusieurs intervenants ont évoqué aujourd'hui tendraient à montrer qu'une consommation régulière et modérée de vin, pourrait avoir des effets bénéfiques en réduisant le risque d'apparition de certaines pathologies.
Toutefois comme cela a été commenté aujourd'hui, ces différents travaux sont parfois contestés. Quelle que soit l'appréciation que l'on peut porter sur ce débat, cela doit inciter la filière, me semble-t-il, à ne pas le faire interférer avec les campagnes de communication qui sont conduites pour promouvoir nos vins dans le monde.
Je pense que nous avons bien d'autres atouts à faire valoir pour vanter la qualité de nos vins sans avoir recours à des arguments que contesteraient, ou contestent déjà les prescripteurs d'opinion sur tous les marchés que nous cherchons à développer.
Il paraît important néanmoins de solliciter les scientifiques de toutes les disciplines concernées et de les inciter à poursuivre leurs travaux en pleine et totale indépendance dans toutes les instances publiques ou privées, nationales ou internationales qui se sont déjà engagées dans cette recherche.
D'une façon plus générale, je crois que la demande de transparence et la mise à disposition du consommateur d'une information claire sur la nature, la valeur ou les effets de tel ou tel produit alimentaire est une tendance de fond avec laquelle il faut désormais compter.
Tous les débats qui mobilisent régulièrement les enceintes communautaires sur l'étiquetage et l'information fiable et traçable du consommateur en sont, je crois, la claire illustration.
Pour autant, s'il est devenu essentiel de se mettre en position de mieux faire connaître le produit, ce n'est évidemment pas suffisant pour gagner de nouveaux consommateurs, surtout dans des pays qui n'ont pas de tradition viticole.
C'est là le véritable défi que doit aujourd'hui relever la viticulture française : gagner ou regagner des parts de marché, séduire de nouveaux consommateurs chez nous et plus encore hors de nos frontières, là où précisément nous sommes de plus en plus fortement concurrencés.
En disant cela je n'invente rien, Monsieur le Sénateur, je ne fais que résumer le diagnostic établi par le groupe de travail dont vous avez présidé les travaux, diagnostic qui me paraît aujourd'hui très largement partagé.
La réalité de l'enjeu ne fait plus de doute pour personne : il est de taille puisqu'il s'agit de savoir si nous voulons relever le défi de la concurrence internationale.
La qualité du travail remarquable que vous avez réalisé en fait une contribution précieuse à la réflexion complexe et difficile que réclame l'avenir de notre viticulture.
Je considère pour ma part qu'une plus grande prise en compte des préoccupations du consommateur doit être le fil conducteur de cette réflexion.
Partant de là, certaines orientations que votre groupe a tracé me paraissent pouvoir être retenues sans états d'âme.
Tout d'abord, la nécessité d'un investissement large dans la qualité me semble donc fondamentale. Comme le rappelle votre rapport, cela passe, notamment par la poursuite de la restructuration qualitative du vignoble, le contrôle de tous les vins en aval de la filière, mais également plus de rigueur dans la mise en oeuvre du suivi des conditions de production et de l'agrément. C'est d'ailleurs une nécessité pour renforcer l'image et la qualité de ces produits. Je sais que des démarches constructives et je crois, vertueuses sont en cours. Le Président RENOU nous en a parlé tout à l'heure pour ce qui relève des appellations. Je sais que des initiatives se mettent en place également dans le secteur des vins de pays.
Il convient également de développer une politique de communication qui permette au consommateur de mieux connaître et surtout de mieux reconnaître nos vins, les rendre plus "visibles" pour reprendre les termes de votre rapport.
Pour cela, il faut expliquer clairement et collectivement aux consommateurs étrangers sur quoi repose notre politique de signes de qualité, ce qu'elle apporte et ce qu'elle garantit.
Pour cela, il faut aussi coordonner les actions de communication en faveur des différents vins produits dans notre pays qui sont menées par les uns et par les autres, en France et plus encore à l'étranger où il est important de ne pas disperser nos efforts mais au contraire de les harmoniser, de les fédérer.
Il convient également que notre production soit plus " lisible " pour le consommateur, qui souvent, notamment à l'étranger, considère que l'offre française est trop complexe.
Faut-il procéder pour cela à un reclassement des différentes catégories de vins pour favoriser une nouvelle segmentation de l'offre française ? Faut-il regrouper au sein des vins de qualité produits dans des régions déterminées (VQPRD) les vins assis sur une logique de terroir, gage d'authenticité et, à côté, développer une nouvelle catégorie de vin bénéficiant d'un espace de plus grande liberté, pour une plus grande compétitivité face aux produits concurrents des pays tiers ?
Faut-il qu'à côté des signes distinctifs que sont les appellations d'origine ou les vins de pays, se développent de grandes marques de vins qui pourraient constituer des identifiants forts pour les consommateurs ?
Ce sont là des questions essentielles, déterminantes pour l'avenir. Je sais que beaucoup y voient la clé de tous les problèmes que la viticulture française connaît depuis plusieurs années.
Ces options, vous le savez, représentent des choix lourds et durables pour l'ensemble du secteur bien sûr, mais aussi pour l'ensemble de nos régions viticoles.
Cela mérite, je crois, qu'on y réfléchisse bien et que l'on s'entoure de tous les avis, en particulier de ceux qui, sur le terrain, observent les évolutions en cours, les vivent et souvent s'en inquiètent.
C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité prendre le temps de la consultation, car je n'imagine pas que sur des sujets aussi fondamentaux, une quelconque option puisse être prise ici à Paris sans une volonté partagée et une ambition commune.
J'ai donc demandé à la filière de se saisir des différentes propositions qui se dégagent du document stratégique du groupe "CAP 2010", maintenant bien connu sous le nom de "Groupe BERTHOMEAU" ainsi que de votre rapport sénatorial afin que les professionnels partout et à chaque maillon de la filière puissent s'exprimer sur leur avenir.
J'attends leurs conclusions dans les toutes prochaines semaines.
En même temps, je souhaite que la filière viticole française puisse disposer des outils réglementaires les plus pertinents. Or le moins que l'on puisse dire c'est que l'OCM, depuis la réforme de 1999, n'a pas vraiment fait la preuve de son efficacité, tant par son incapacité à traiter les crises conjoncturelles qui se sont succédées au cours des dernières campagnes que par la faiblesse de ses instruments structurels.
C'est face à ce constat que dès le mois de juin , j'ai saisi le Commissaire FISCHLER d'une demande d'adaptation de l'OCM afin que les améliorations nécessaires soient apportées aux instruments de gestion de marché et que le volet structurel soit complété par les mesures efficaces que réclame l'adaptation du vignoble : je pense évidemment à l'arrachage temporaire que chacun, je crois, reconnaît aujourd'hui comme un besoin.
Sur ce point en particulier, les discussions sont encore en cours avec la Commission et mes services comme moi-même ne ménageons aucun effort pour convaincre Bruxelles. J'espère, je dis bien j'espère, être en mesure d'apporter des réponses concrètes au viticulteurs ainsi qu'à l'ensemble du secteur avant la fin de l'année.
Pour conclure, je voudrais faire le commentaire suivant.
Je crois que les travaux conduits par le Sénat, un colloque comme celui d'aujourd'hui offrant une tribune de choix à des élus et des professionnels fortement mobilisés, une filière qui se saisit sans hésitation et avec responsabilité d'une réflexion de fond sur son avenir : tout ça n'est pas un hasard. Ce sont autant de signes et d'événements qui méritent d'être soulignés.
Ils traduisent la maturité d'une filière, son aptitude à élaborer un diagnostic sans complaisance et à envisager une stratégie mobilisatrice.
Pour le ministre de l'Agriculture, c'est un signal fort et un encouragement supplémentaire pour construire en faveur de cette filière l'environnement réglementaire communautaire et international le plus favorable à son développement.
Je vous remercie de votre attention.
(source http://www.agriculture.gouv.fr, le 12 novembre 2002)
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Mesdames et Messieurs,
Je vous remercie, Monsieur le Sénateur, de m'avoir demandé de clôturer vos travaux aujourd'hui et de me permettre ainsi de participer aux débats que contribue à nourrir le travail remarquable qui a été réalisé sous votre présidence au nom de la Commission des Affaires économiques et du Plan.
Vin, santé, Alimentation, trois mots chargés de sens.
La modification des modes de vie, le poids croissant des exigences personnelles en matière de santé, la place que prennent aujourd'hui les préoccupations collectives sur la sécurité alimentaire, enfin le développement des échanges : autant de facteurs qui ont profondément modifié la relation que le consommateur entretient avec son alimentation.
Cette relation, sensible par nature, prend une dimension plus complexe encore dès lors qu'il s'agit du vin.
Car le vin, c'est un art de vivre.
C'est bien autre chose qu'un simple produit agricole ou qu'une vague " commodity " que l'on peut échanger sur un marché désincarné à Londres ou à Chicago. D'ailleurs, le vin aujourd'hui est de moins en moins considéré comme un aliment : il accompagne, met en valeur, complète et parfois sublime notre table et nos plats. Mais il ne peut pas non plus être réduit au seul univers de la gastronomie. Le vin, c'est beaucoup plus que tout cela.
Le vin, c'est tout un monde. Chargé d'une forte dimension culturelle et patrimoniale, le vin a marqué notre histoire, dessiné nos paysages, façonné notre géographie et continue de faire battre le coeur économique et social d'innombrables régions.
Sur un peu plus de 3 % de la surface agricole, la viticulture assure 15 % des livraisons et pèse pour plus de 40 % dans le solde agroalimentaire français : ces chiffres, que vous connaissez tous, se passent de commentaires.
Grande utilisatrice de main d'oeuvre, grande gestionnaire d'espace et de territoires, fleuron de notre économie nationale et de nos exportations, ambassadrice de notre puissance agroalimentaire, la viticulture française demeure, à bien des égards, la référence mondiale que le monde entier nous envie pour sa qualité et son authenticité.
Mais, vous le savez, aucun leadership n'est définitivement acquis, aussi ancien et légitime soit-il. Et le nôtre est aujourd'hui contesté.
C'est le constat sans ambiguïté qu'établit de façon très claire le rapport du groupe de travail sénatorial sur l'avenir de la viticulture française dont vous avez présenté les conclusions essentielles ce matin.
Les faits sont là.
Le marché intérieur continue son repli, lent mais régulier pendant qu'une concurrence acharnée se développe chaque jour un peu plus sur les marchés d'exportation. Cette évolution, chacun de nous peut en mesurer la portée jour après jour.
Elle est le fait de ces nouveaux pays producteurs dont la part dans le vignoble mondial a doublé en 10 ans et dont l'exiguïté de leur propre marché domestique les pousse mécaniquement sur les marchés les plus solvables.
Dans ce contexte nouveau, où l'offre élargie est devenue globalement excédentaire, la clé, bien sûr, c'est le consommateur. Mais aussi toute la sensibilité qui l'entoure.
Là dessus soyons clairs, les problèmes d'alcoolisation liés à une consommation excessive et leurs effets sur la santé ne peuvent, et ne doivent pas être niés. Ils doivent au contraire être dénoncés, partout et par tous.
Mais sur ce point, je sais que la filière française est aujourd'hui convaincue de la responsabilité qui est la sienne dans la lutte contre les méfaits de l'alcoolisme et en particulier contre la violence routière, dont le Président de la République, je le rappelle, a fait une de ses principales priorités.
A cet égard, je me félicite que les professionnels rassemblés sous la bannière "Vins et société" aient entrepris de se rapprocher de la ligue pour la sécurité routière pour jeter les bases d'un vrai partenariat. Je sais qu'une réunion a déjà eu lieu et qu'une autre se tiendra dans les jours prochains.
C'est ainsi, en prenant part à un combat commun et concerté, que la filière viticole pourra s'associer à une politique de santé publique fondée sur l'éducation du consommateur, et participer à une prévention ciblée sur les comportements, plus que sur la stigmatisation de tel ou tel produit.
A cet égard, chacun est bien obligé de constater que depuis 30 ans, la consommation de vin a fortement diminué en France et qu'elle continue encore de se contracter. Nos modes de vie changent, notre alimentation aussi et cela se traduit, entre autre, par une diminution globale de la consommation d'alcool.
Mais cela se traduit aussi, en même temps, par une diminution significative de la part de vin dans la consommation d'alcool des français ce qui confirme, s'il était besoin, que le vin ne peut pas être rendu seul responsable de tous les maux liés à une consommation excessive d'alcool.
Des travaux que plusieurs intervenants ont évoqué aujourd'hui tendraient à montrer qu'une consommation régulière et modérée de vin, pourrait avoir des effets bénéfiques en réduisant le risque d'apparition de certaines pathologies.
Toutefois comme cela a été commenté aujourd'hui, ces différents travaux sont parfois contestés. Quelle que soit l'appréciation que l'on peut porter sur ce débat, cela doit inciter la filière, me semble-t-il, à ne pas le faire interférer avec les campagnes de communication qui sont conduites pour promouvoir nos vins dans le monde.
Je pense que nous avons bien d'autres atouts à faire valoir pour vanter la qualité de nos vins sans avoir recours à des arguments que contesteraient, ou contestent déjà les prescripteurs d'opinion sur tous les marchés que nous cherchons à développer.
Il paraît important néanmoins de solliciter les scientifiques de toutes les disciplines concernées et de les inciter à poursuivre leurs travaux en pleine et totale indépendance dans toutes les instances publiques ou privées, nationales ou internationales qui se sont déjà engagées dans cette recherche.
D'une façon plus générale, je crois que la demande de transparence et la mise à disposition du consommateur d'une information claire sur la nature, la valeur ou les effets de tel ou tel produit alimentaire est une tendance de fond avec laquelle il faut désormais compter.
Tous les débats qui mobilisent régulièrement les enceintes communautaires sur l'étiquetage et l'information fiable et traçable du consommateur en sont, je crois, la claire illustration.
Pour autant, s'il est devenu essentiel de se mettre en position de mieux faire connaître le produit, ce n'est évidemment pas suffisant pour gagner de nouveaux consommateurs, surtout dans des pays qui n'ont pas de tradition viticole.
C'est là le véritable défi que doit aujourd'hui relever la viticulture française : gagner ou regagner des parts de marché, séduire de nouveaux consommateurs chez nous et plus encore hors de nos frontières, là où précisément nous sommes de plus en plus fortement concurrencés.
En disant cela je n'invente rien, Monsieur le Sénateur, je ne fais que résumer le diagnostic établi par le groupe de travail dont vous avez présidé les travaux, diagnostic qui me paraît aujourd'hui très largement partagé.
La réalité de l'enjeu ne fait plus de doute pour personne : il est de taille puisqu'il s'agit de savoir si nous voulons relever le défi de la concurrence internationale.
La qualité du travail remarquable que vous avez réalisé en fait une contribution précieuse à la réflexion complexe et difficile que réclame l'avenir de notre viticulture.
Je considère pour ma part qu'une plus grande prise en compte des préoccupations du consommateur doit être le fil conducteur de cette réflexion.
Partant de là, certaines orientations que votre groupe a tracé me paraissent pouvoir être retenues sans états d'âme.
Tout d'abord, la nécessité d'un investissement large dans la qualité me semble donc fondamentale. Comme le rappelle votre rapport, cela passe, notamment par la poursuite de la restructuration qualitative du vignoble, le contrôle de tous les vins en aval de la filière, mais également plus de rigueur dans la mise en oeuvre du suivi des conditions de production et de l'agrément. C'est d'ailleurs une nécessité pour renforcer l'image et la qualité de ces produits. Je sais que des démarches constructives et je crois, vertueuses sont en cours. Le Président RENOU nous en a parlé tout à l'heure pour ce qui relève des appellations. Je sais que des initiatives se mettent en place également dans le secteur des vins de pays.
Il convient également de développer une politique de communication qui permette au consommateur de mieux connaître et surtout de mieux reconnaître nos vins, les rendre plus "visibles" pour reprendre les termes de votre rapport.
Pour cela, il faut expliquer clairement et collectivement aux consommateurs étrangers sur quoi repose notre politique de signes de qualité, ce qu'elle apporte et ce qu'elle garantit.
Pour cela, il faut aussi coordonner les actions de communication en faveur des différents vins produits dans notre pays qui sont menées par les uns et par les autres, en France et plus encore à l'étranger où il est important de ne pas disperser nos efforts mais au contraire de les harmoniser, de les fédérer.
Il convient également que notre production soit plus " lisible " pour le consommateur, qui souvent, notamment à l'étranger, considère que l'offre française est trop complexe.
Faut-il procéder pour cela à un reclassement des différentes catégories de vins pour favoriser une nouvelle segmentation de l'offre française ? Faut-il regrouper au sein des vins de qualité produits dans des régions déterminées (VQPRD) les vins assis sur une logique de terroir, gage d'authenticité et, à côté, développer une nouvelle catégorie de vin bénéficiant d'un espace de plus grande liberté, pour une plus grande compétitivité face aux produits concurrents des pays tiers ?
Faut-il qu'à côté des signes distinctifs que sont les appellations d'origine ou les vins de pays, se développent de grandes marques de vins qui pourraient constituer des identifiants forts pour les consommateurs ?
Ce sont là des questions essentielles, déterminantes pour l'avenir. Je sais que beaucoup y voient la clé de tous les problèmes que la viticulture française connaît depuis plusieurs années.
Ces options, vous le savez, représentent des choix lourds et durables pour l'ensemble du secteur bien sûr, mais aussi pour l'ensemble de nos régions viticoles.
Cela mérite, je crois, qu'on y réfléchisse bien et que l'on s'entoure de tous les avis, en particulier de ceux qui, sur le terrain, observent les évolutions en cours, les vivent et souvent s'en inquiètent.
C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité prendre le temps de la consultation, car je n'imagine pas que sur des sujets aussi fondamentaux, une quelconque option puisse être prise ici à Paris sans une volonté partagée et une ambition commune.
J'ai donc demandé à la filière de se saisir des différentes propositions qui se dégagent du document stratégique du groupe "CAP 2010", maintenant bien connu sous le nom de "Groupe BERTHOMEAU" ainsi que de votre rapport sénatorial afin que les professionnels partout et à chaque maillon de la filière puissent s'exprimer sur leur avenir.
J'attends leurs conclusions dans les toutes prochaines semaines.
En même temps, je souhaite que la filière viticole française puisse disposer des outils réglementaires les plus pertinents. Or le moins que l'on puisse dire c'est que l'OCM, depuis la réforme de 1999, n'a pas vraiment fait la preuve de son efficacité, tant par son incapacité à traiter les crises conjoncturelles qui se sont succédées au cours des dernières campagnes que par la faiblesse de ses instruments structurels.
C'est face à ce constat que dès le mois de juin , j'ai saisi le Commissaire FISCHLER d'une demande d'adaptation de l'OCM afin que les améliorations nécessaires soient apportées aux instruments de gestion de marché et que le volet structurel soit complété par les mesures efficaces que réclame l'adaptation du vignoble : je pense évidemment à l'arrachage temporaire que chacun, je crois, reconnaît aujourd'hui comme un besoin.
Sur ce point en particulier, les discussions sont encore en cours avec la Commission et mes services comme moi-même ne ménageons aucun effort pour convaincre Bruxelles. J'espère, je dis bien j'espère, être en mesure d'apporter des réponses concrètes au viticulteurs ainsi qu'à l'ensemble du secteur avant la fin de l'année.
Pour conclure, je voudrais faire le commentaire suivant.
Je crois que les travaux conduits par le Sénat, un colloque comme celui d'aujourd'hui offrant une tribune de choix à des élus et des professionnels fortement mobilisés, une filière qui se saisit sans hésitation et avec responsabilité d'une réflexion de fond sur son avenir : tout ça n'est pas un hasard. Ce sont autant de signes et d'événements qui méritent d'être soulignés.
Ils traduisent la maturité d'une filière, son aptitude à élaborer un diagnostic sans complaisance et à envisager une stratégie mobilisatrice.
Pour le ministre de l'Agriculture, c'est un signal fort et un encouragement supplémentaire pour construire en faveur de cette filière l'environnement réglementaire communautaire et international le plus favorable à son développement.
Je vous remercie de votre attention.
(source http://www.agriculture.gouv.fr, le 12 novembre 2002)