Déclaration de Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie, sur la politique énergetique de la France et le développement des réseaux de transport d'électricité, Paris le 29 août 2002.

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Circonstance : 39ème conférence du Conseil International des Grands Réseaux Electriques à Paris le 29 août 2002

Texte intégral


Le CIGRE vient d'achever sa 39ème conférence qui a réuni 2 300 spécialistes des grands réseaux de transport représentant plus de 80 pays. Plus de 300 communications techniques présentées à l'occasion de cette session ont permis de faire un bilan des connaissances techniques et des réalisations marquantes concernant les réseaux de transport d'électricité modernes. Les conclusions de ces travaux vous seront décrites par le président du CIGRE et le Président de son Comité Technique et je tiens à remercier ses membres pour le travail qu'ils accomplissent dans ce domaine.
Avant de leur laisser la parole je souhaiterais rappeler ou souligner certaines orientations de la politique énergétique française :
- La France est favorable à la constitution d'un marché unique de l'énergie en Europe et non de 15 marchés juxtaposés ;
- La politique énergétique doit s'inscrire dans une dynamique de développement durable ;
- La sécurité d'approvisionnement notamment électrique des Français est un souci constant de notre politique énergétique et il convient de la préserver.
Merci M. CROFT et M. MERLIN pour vos exposés qui montrent bien l'implication de la France au niveau international pour faire progresser la coopération en matière d'énergie. C'est le cas pour le CIGRE dont les structures permanentes sont installées à Paris depuis sa création et dont le Secrétaire Général a toujours été français ou de langue française. ou pour l'Agence Internationale de l'Energie dont la présidence est actuellement assurée par D.Maillard, DGEMP.
C'est aussi le cas dans le cadre du dialogue consommateur / producteur organisé dans le domaine pétrolier. J'irai ainsi représenter la France au prochain colloque du Forum International de l'Energie qui se tient à OSAKA, les 21 et 22 septembre 2002.
Je pense que cette implication est tout à fait nécessaire tant les problématiques se posent soit au niveau international - développement durable, effet de serre ou de sécurité d'approvisionnement soit de manière similaire dans de nombreux pays - ouverture des marchés énergétiques.
En ce qui concerne les réseaux électriques, je souhaiterais aborder 3 thèmes.
1 - Le développement et une régulation efficace des réseaux de transport d'électricité en Europe sont les conditions indispensables de la constitution d'un marché unique de l'énergie dont je souhaite l'avènement.
Sans ce développement, l'Europe resterait en effet la juxtaposition de 15 marchés nationaux certes ouverts à la concurrence mais de taille insuffisante pour que nous tirions le plein bénéfice de l'ouverture des marchés.
Premier point le développement des réseaux : Les interconnexions ont donc un rôle déterminant et sont appelées à se renforcer avec l'accroissement prévisible des échanges.
Comme cela a été le cas pour les transports de marchandises au cours des trente dernières années, la possibilité de recourir à différents producteurs d'électricité va se traduire par une pression de plus en plus forte sur les réseaux de transport de l'énergie électrique. Si nous voulons éviter que ne se produisent dans le domaine électrique des situations aussi difficiles que celles que nous avons connu dans le transport routier, il nous faut examiner dès à présent les réponses à apporter à ces problèmes.
Il faut en effet anticiper les problèmes de "congestion" pour avoir le temps de trouver les solutions appropriées et de les mettre en oeuvre. il faut en effet 10 ans pour créer une interconnexion entre le réseau de transport français et celui d'un pays voisin.
Je veillerai donc à ce que RTE en étroite concertation avec les collectivités territoriales et avec mes services trouve les moyens de mener à bien les projets d'interconnexion avec nos voisins notamment avec l'Espagne, la Belgique ou l'Allemagne.
Un effort tout particulier est également nécessaire en matière de communication entre gestionnaires de réseau, non seulement pour mieux prendre en compte les contraintes techniques d'exploitation et mieux répondre au nombre croissant d'intervenants, mais aussi pour garantir une égalité de traitement entre tous et assurer la transparence des relations comme le prévoient les textes européens.
Deuxièmement la régulation : si les gestionnaires des grands réseaux de transport sont au coeur même de l'ouverture des marchés de l'électricité, ce sont les organismes de régulation les contrôlant qui permettent de garantir un accès transparent et non discriminatoire de tous clients comme fournisseurs aux réseaux de transport et de distribution. La régulation est donc indispensable pour s'assurer qu'une ouverture du marché dans la loi se traduise bien par une ouverture du marché dans les faits.
A cet égard, la France n'a pas à rougir de sa position en Europe et la qualité du travail de la CRE a permis une ouverture effective du marché. Le Gouvernement entend donc souligner dans la négociation qui se poursuit à Bruxelles sur le deuxième paquet de directives gaz et électricité l'importance qu'elle attache à la régulation.
2 - De par son impact sur l'environnement mais aussi de par son rôle dans le développement des énergies renouvelables, le développement des réseaux de transport doit s'intégrer dans une démarche de développement durable. Je lancerai bientôt un grand débat national d'orientation énergétique.
La France s'est en effet engagé à accroître de 16% à 21% la part d'énergie renouvelable dans la production d'électricité. Je rappelle que le développement de l'énergie hydroélectrique, qui est encore aujourd'hui la première ressource énergétique renouvelable en France et en Europe, a été permise par la construction des premiers grands réseaux de transport d'électricité.
Le développement des autres ressources renouvelables impliquera sans doute un renforcement et une adaptation des réseaux de transport existants aux contraintes nouvelles associées à ce type de production "décentralisée". Les coûts de développement de ces réseaux et leur impact environnemental devront être pris en compte pour arrêter nos choix en matière d'énergies renouvelables.
Quant au développement de lignes nouvelles ou au renforcement de lignes actuelles, je connais les difficultés liées à l'impact sur les paysages de ces ouvrages. Malheureusement, il n'existe pas encore aujourd'hui de solution opérationnelle pour enfouir les ouvrages aériens destinés au transport à grande distance de quantités importantes d'énergie électrique.
Une concertation approfondie avec les habitants des secteurs concernés par les futurs ouvrages et qui n'en profitent pas toujours directement est donc indispensable.
Il s'agit bien sûr d'une question difficile à laquelle je souhaite que tous nous attachions une attention toute particulière. C'est pourquoi j'adresserai dans les prochains jours de nouvelles instructions destinées aux Préfets, qui sont en première ligne pour mener cette concertation et conduire ensuite les procédures administratives. Je tiens personnellement à ce que cette concertation soit menée dans un souci permanent de transparence sans préjugé et sans démagogie.
3 - La sécurité d'alimentation ne doit pas être oubliée
Nous avons à nouveau connu au cours des dernières semaines en Europe des situations tragiques à la suite de phénomènes naturels exceptionnels. Dans le cas de la France, les deux tempêtes qui ont marqué la fin de 1999 nous ont rappelé l'importance de réseaux électriques de bonne qualité et suffisamment fiables pour le maintien des conditions de vie auxquelles les Français sont attachés.
Pour faire face à ces risques, deux développements sont nécessaires :
- des renforcements des lignes actuelles sont nécessaires et doivent être mise en oeuvre ;
- l'interconnexion des réseaux européens est également une réponse
Je voudrai conclure en soulignant que, au-delà des moyens financiers, des structures et des règlements, la capacité des réseaux de transport d'électricité à répondre aux attentes des utilisateurs, que ce soient de grands clients professionnels directement raccordés à ces réseaux de transport ou de simples particuliers, au travers des réseaux de distribution, repose sur la qualité et la compétence des femmes et des hommes qui ont en charge la conception, la construction et l'exploitation de ces réseaux. Dans le cas de la France, je tiens donc à souligner la qualité du personnel de RTE et plus généralement d'EDF.
Je me réjouis de voir que le CIGRE a tenu également à souligner lors de cette conférence le rôle essentiel de la formation et de la recherche dans ce secteur industriel de pointe.
(source http://www.industrie.gouv.fr, le 10 septembre 2002)