Interview de M. Alain Madelin, président de Démocratie libérale, dans "Le Parisien" du 30 octobre 1999, sur l'état du libéralisme et de la droite en France.

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Circonstance : 10ème anniversaire de la chute du Mur de Berlin le 9 novembre 1989

Média : Le Parisien

Texte intégral

Le 9 novembre, à la Mutualité, à Paris, Démocratie libérale fêtera " dans la joie " le dixième anniversaire de la chute du mur de Berlin. A quelques jours de ce rendez-vous, son président évoque l'état du libéralisme et de la droite en France.
Pourquoi une telle manifestation ?
Car c'est l'événement le plus important du siècle. Et il y a dix ans, trop timides, la France et l'Occident n'ont pas été à la hauteur de ce rendez-vous que nous donnait l'histoire. Il faut se rappeler l'immense tragédie qu'a représentée le bloc communiste avec ses goulags. Ce siècle a été tragique, deux guerres mondiales, deux totalitarismes, le nazisme et le communisme.
Une façon de célébrer la victoire du libéralisme ?
Une façon de tirer une leçon : la fin ne justifie pas les moyens. On ne peut, au nom d'une idéologie ou d'une utopie, asservir l'homme. Ce qu'on appelle l'idée libérale, c'est l'idée que l'homme a en tant que tel des droits supérieurs à tout pouvoir.
A droite, à part vous, plus personne à l'UDF et au RPR n'ose s'afficher libéral...
C'est vrai. Il y a un certain paradoxe à voir toute une partie de l'opposition être moins libérale que les travaillistes britanniques ou les socialistes allemands. Si la droite veut assumer la modernité, elle doit défendre les idées libérales ou alors qu'elle adhère au PS !
N'êtes-vous pas désespéré par les querelles de l'opposition ?
Elle a vocation à s'unir pour préparer les prochaines échéances. L'addition de toutes ses composantes est une condition nécessaire. Mais cette volonté d'union n'existe pas ! Beaucoup cherchent plus à se distinguer qu'à additionner leur force. Mais comme personne ne peut prétendre aujourd'hui l'emporter seul, la stratégie d'addition qui est la nôtre est la seule stratégie gagnante. Nous, notre carte d'identité est claire, d'autres se cherchent.
Et elle va, sans réel projet, d'échec en échec...
Parce qu'elle n'incarne pas la modernité, elle a peur d'être libérale. Il est quand même étonnant de constater que la gauche apparaît moderne chaque fois qu'elle se libéralise ! J'en conclus que la droite apparaît très ringarde à vouloir faire un retour en arrière dans l'étatisme, le dirigisme, les solutions sociales-démocrates d'une autre époque.
Jacques Chirac a-t-il un rôle à jouer ?
Nous devons respecter le président de la République et sa fonction. Mais à l'évidence le chef de l'Etat étant enfermé dans la cohabitation, l'opposition doit se reconstruire par elle-même.
Ne faut-il pas un renouvellement des têtes ?
Oui. Il y a un besoin profond de renouvellement des idées, des attitudes et, bien sûr, des hommes et des femmes. Les élections municipales devraient en donner l'occasion. C'est, en tout cas, ce que nous voulons à Démocratie libérale. " A Paris, il m'apparaît difficile pour le RPR d'incarner le renouveau. "
Notamment à Paris ?
Pour la capitale, il y a manifestement tout un système qui est, aujourd'hui, à bout de souffle et que symbolise le nom de Tiberi. Il me paraît injuste d'en faire le seul bouc émissaire, mais ceci étant dit, à Paris, le renouvellement est plus nécessaire qu'ailleurs.
Comment ?
Il m'apparaît évident aujourd'hui qu'il est difficile pour le RPR d'incarner ce renouveau. Aussi je pense que nous allons vers des élections municipales où nous aurons, d'un côté, une liste RPR, sans doute avec quelqu'un d'autre que Tiberi, mais ça c'est l'affaire du RPR, et, de l'autre, une liste de renouvellement largement ouverte qui serait la liste non RPR, et dans laquelle les libéraux ont un rôle moteur à jouer.
Vous serez candidat ?
Je suis déjà maire de Redon.
Et à la présidentielle de 2002 ?
C'est une élection où ont vocation à s'affirmer les grands courants de la vie politique française. Nous représentons un grand courant, il est donc logique que nous envisagions d'être présents à cette élection.
Propos recueillis par Bernard Mazières

(Source http://www.demlib.com, le 7 février 2001)