Texte intégral
F. Laborde.-L'Irlande a dit "oui". J'imagine que l'Européen que vous êtes est satisfait ?
- "J'allais vous dire "oui" aussi... Mais il faut élargir, bien sûr ; il faut accueillir ceux qui étaient en dehors de l'Europe, non pas parce qu'ils ne l'auraient pas voulu, mais parce qu'ils ne le pouvaient pas. Rappelons-nous le Mur de Berlin, rappelons-nous ce qui existait dans cette Europe, il y a maintenant à peine quinze ans. Donc, il faut accueillir, il faut donc élargir, mais il faut aussi avoir des garanties. C'est là que je veux être le plus sévère sur les conditions avec lesquelles ont été préparées ces négociations d'élargissement. Il aurait fallu lier élargissement et réforme des institutions européennes. Il y a une discussion qui est engagée ; elle vient tard, et il faut y mettre tout notre poids si on veut qu'il y ait une véritable constitution européenne avec une clarté pour les citoyens, pour savoir qui fait quoi."
Le Traité de Nice, la préparation de l'élargissement etc., c'était L. Jospin ?
- "C'était des pondérations, ce n'était pas un changement des institutions européennes qu'il faut faire maintenant dans une Europe à 25. [Il ne s'agit] pas simplement de savoir combien va peser tel ou tel pays. Là, il faut faire - c'est le sens de ce qui se prépare à la Convention - une réforme des institutions européennes profonde pour donner de la démocratie et de la clarté. Deuxièmement, il faut aussi avoir une négociation sur les financements. Il n'est pas possible de dire qu'on pourra faire à 25 ce que l'on faisait à Quinze. Et troisièmement, il faut prendre un certain nombre de priorités sociales, parce qu'il y a effectivement une harmonisation à avoir dans cette Europe-là. Je dis "oui" à l'élargissement, bien sûr, c'est notre vocation, mais en même temps, je dis "oui" à l'Europe, et l'Europe, pour avancer, il faut qu'elle fixe elle-même ses priorités, ses objectifs. Tel n'est pas le cas aujourd'hui. Et donc, les socialistes français, européens, j'espère, doivent être à l'initiative pour fixer ces conditions et ces garanties. Nous le faisons au nom de l'Europe, pas parce que ce serait des intérêts de tel ou tel pays, non, nous le faisons au nom de l'Europe et de l'idéal que l'Europe peut représenter - un idéal politique. Nous avons voulu l'Europe pour éviter la guerre et aussi affirmer - on le voit bien par rapport aux Etats Unis - une nécessité d'être plus forts dans le monde et par l'Europe, et deuxièmement, une volonté sociale, parce que nous voulons vivre dans un modèle social qui n'est pas le modèle américain, qui n'est pas le modèle anglo-saxon, qui n'est pas le modèle du marché."
Bizarrement, pourtant, à l'intérieur du PS, on a le sentiment que ce sentiment très européen que vous venez de développer devant nous n'est pas totalement partagé, qu'il y a des gens à la gauche du parti, autour d'Emmanuelli et de Mélenchon, qui ne sont pas follement enthousiasmés par le projet européen ?
- "Tous les socialistes sont européens, mais c'est vrai qu'ils veulent poser des conditions, c'est vrai qu'ils ne veulent pas d'une fuite en avant, qu'ils ne veulent pas d'une Europe qui serait, en définitive, un non-être politique, qui n'existerait pas, mais qui, en plus, sur le plan économique, serait là pour mettre en cause un certain nombre d'acquis sociaux ou de principes de services publics. Donc, nous voulons une Europe plus forte, plus politique aussi, où les citoyens pourraient davantage dire leur mot au-delà des élections au Parlement européen, une Europe qui soit à l'image de ce que nous voulons faire aussi en France ou dans nos pays, c'est-à-dire une Europe plus sociale, plus volontariste, et plus respectueuse aussi d'un certain nombre de principes comme ceux des services publics."
Revenons au conseil national de ce week-end. Vous avez dit, entre autres, "être à gauche autant qu'il est souhaitable, aussi réformiste que nécessaire". Aussitôt, H. Emmanuelli a dit : qu'est-ce que c'est que cette espèce de "ni-ni" inventée par F. Hollande. Alors, qu'est-ce que cela veut dire ?
- "Ce n'est pas du "ni-ni", c'est du "et il faut être de gauche, parce que je crois que c'est ce qui correspond à notre identité..."
Autant qu'il est souhaitable, c'est-à-dire un peu mais pas trop ?
- "Autant que nous pouvons ; nous devons être de gauche ! On voit bien, notamment après ce qui s'est produit, qu'il y a un éloignement du peuple, des catégories notamment les plus modestes, de la politique. Il faut donc les réconcilier avec la politique, avec des mesures qui doivent prendre en compte le travail, le pouvoir d'achat mais aussi la protection - et c'est ce qui nous a été demandé -, la protection collective par rapport à des risques, y compris par rapport à la sécurité. Et puis, nous devons être réformistes, parce que nous savons bien que c'est par la réforme que nous pouvons changer une société. C'est sur ce point-là que je veux défendre le bilan de L. Jospin. Non pas qu'il ait été parfait, il y a eu des erreurs. Est-ce qu'il fallait baisser des impôts à un moment où on avait besoin de plus de services publics ? C'est une question qui peut se poser, qui s'est posée. Est-ce qu'il fallait faire les 35 heures comme nous les avons faites ? Oui, il fallait faire les 35 heures, peut-être aurait-on dû mieux les appliquer, mais c'était une grande réforme. C'est une grande réforme et on voit bien qu'elle est remise en cause. Mais il faut procéder par réforme. Et qu'est-ce que nous disait L. Jospin ? Qu'il faut respecter la parole qu'on a donnée. Et ce principe-là, je ne veux surtout pas que les socialistes l'oublient. Enfin, il y a une grande leçon du 21 avril, la seule majeure : c'est qu'il faut être uni. Quand on n'est pas unis, on perd. Mon devoir, dans le Parti socialiste et au-delà du Parti socialiste, c'est d'unir les socialistes et de rassembler la gauche."
Vous dites qu'il faut passer de l'inventaire à l'invention ? Considérez-vous qu'il n'y a plus de leçons à tirer, puisque vous dites "la grande leçon du 21 avril" ? Mais la grande leçon du 21 avril, c'est que pour la première fois de l'histoire, un candidat socialiste a quand même été battu au premier tour de l'élection présidentielle et a laissé la place au FN.
- "Bien sûr, il y a des leçons à tirer de ce que nous avons fait ou pas fait. Je pense que la première leçon, c'est que nous n'avons pas suffisamment protégé les Français à un moment où ils avaient de nouveau peur de l'avenir."
Protéger sur le plan économique, sur la plan de la sécurité ou sur le plan social ?
- "Economique, social, sur le plan de l'avenir. Deuxièmement, nous n'avons pas suffisamment pris en compte les catégories qui travaillent et qui attendaient du pouvoir d'achat, même si nous avons créé 2 millions d'emplois, fait baisser le chômage, il y a une partie très importante de la population qui voulait davantage de pouvoir d'achat. Nous avons entendu cette leçon. Troisièmement, nous n'avons pas suffisamment défendu, non pas l'idée du service public - nous l'avons promue -, mais les principes dans leur application du service public. De tout cela, nous avons tiré les leçons. Maintenant, quand je dis qu'il faut passer à l'invention, c'est qu'il faut regarder vers l'avenir. Nous avons eu une défaite, elle a été cruelle, elle a été difficile..."
Historique.
- "Historique. Nous devons en tirer toutes les conclusions et passer à l'avenir. Ce que les Français nous disent, c'est : "Très bien, faites encore l'inventaire de votre 21 avril, mais passez quand même à la suite !"
On a le sentiment que les socialistes sont toujours un peu orphelins de L. Jospin. Est-ce que ce n'est pas malsain ? Quand on voit le dernier sondage, notamment auprès des militants socialistes, qui a été fait samedi, ils disent en gros : "Lionel, reviens !". Est-ce qu'il n'y a pas quelque chose d'extrêmement malsain là-dedans ?
- "Je ne m'en plains pas. C'est quand même plutôt satisfaisant de voir, après ce qui s'est passé - vous disiez une défaite lourde, historique -, qu'ils aient de L. Jospin une très bonne image, même s'ils peuvent avoir des reproches à lui faire. : fallait-il qu'il parte, fallait-il qu'il ne parte pas ?..."
Mais alors cela veut dire qu'ils sont totalement schizophrènes ! S'ils le trouvaient tellement formidable, pourquoi ils ne sont pas allés voter pour lui ?
- "C'est effectivement parce que nous - nous, collectivement - n'avons pas suffisamment fixé notre identité, donné un projet d'avenir, donné l'envie d'aller voter. Je ne suis pas là pour me plaindre des Français, je suis là pour dire qu'il faut qu'on affirme davantage ce que nous sommes, ce que nous voulons faire, et par rapport à la droite notamment. Quand on a une droite qui défait un certain nombre d'avancées - les emplois-jeunes, les 35 heures, les services publics -, il faut absolument que la gauche, toute la gauche soit en avant."
La droite, aujourd'hui, va aussi piocher un peu dans votre jardin. Quand on voit les contrats d'intégration, le projet de supprimer la double peine pour les étrangers condamnés parce qu'ils trouvent cela injuste, le droit de vote aux étrangers... C'est typiquement le genre d'idées que la gauche aurait pu ou dû avoir, qu'elle n'a pas eu, ou qu'elle n'a pas osé avoir et que ce Gouvernement sort.
- "Ce Gouvernement, je ne le crois pas. Je dis : si sur le droit de vote des étrangers, on peut avancer, très bien, faisons-le tout de suite ! Sur l'intégration, au-delà des mots, s'il doit y avoir un projet qui permette une meilleure intégration, nous en avons besoin dans la République, allons-y ! Sur la décentralisation, s'il s'agit de donner des compétences claires aux collectivités locales sans augmentation de la fiscalité locale et avec le souci de l'égalité territoriale, c'est-à-dire le fait d'avoir les mêmes droits et le même accès aux services publics, qu'on habite dans le Limousin ou en région Ile-de-France, allons-y ! Je connais suffisamment J. Chirac pour savoir qu'il sait utiliser les mots, mais dans les actes, il sait quelquefois les oublier."
Un petit quizz pour faire tendance et terminer : le tandem Emmanuelli-Mélenchon et le triumvirat Montebourg-Dray-Peillon, c'est quoi ? L'ambition des personnes, l'amertume des vaincus, la relève des idées ? Vous avez droit à une réponse.
- "Ce sont des socialistes, et moi j'emmène tous les socialistes."
Même ceux qui vous traitent un peu de vieille...
- "Je crois qu'ils ont tort d'utiliser des mots
Désobligeants, à votre égard...
- "...qui n'ont pas lieu d'être dans un Parti socialiste ; les mots qu'ils utilisent, il faut les avoir par rapport à la droite. Mais ce sont des socialistes, nous avons besoin de tout le monde. Je ne suis pas là pour faire le tri entre les socialistes, je suis là pour les emmener tous."
Vous dites : laissez venir à moi les socialistes, jeunes, vieux, contestataires ou pas...
- "Nous avons besoin d'eux tous, parce que les Français, je crois, auront besoin de nous. Mais à nous de montrer qu'on a des idées pour demain. Je crois que c'est le cas."
Le Congrès de Dijon sera chaud quand même...
- "Je pense qu'il y aura de la moutarde, mais suffisamment, pas trop."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 21 octobre 2002)
- "J'allais vous dire "oui" aussi... Mais il faut élargir, bien sûr ; il faut accueillir ceux qui étaient en dehors de l'Europe, non pas parce qu'ils ne l'auraient pas voulu, mais parce qu'ils ne le pouvaient pas. Rappelons-nous le Mur de Berlin, rappelons-nous ce qui existait dans cette Europe, il y a maintenant à peine quinze ans. Donc, il faut accueillir, il faut donc élargir, mais il faut aussi avoir des garanties. C'est là que je veux être le plus sévère sur les conditions avec lesquelles ont été préparées ces négociations d'élargissement. Il aurait fallu lier élargissement et réforme des institutions européennes. Il y a une discussion qui est engagée ; elle vient tard, et il faut y mettre tout notre poids si on veut qu'il y ait une véritable constitution européenne avec une clarté pour les citoyens, pour savoir qui fait quoi."
Le Traité de Nice, la préparation de l'élargissement etc., c'était L. Jospin ?
- "C'était des pondérations, ce n'était pas un changement des institutions européennes qu'il faut faire maintenant dans une Europe à 25. [Il ne s'agit] pas simplement de savoir combien va peser tel ou tel pays. Là, il faut faire - c'est le sens de ce qui se prépare à la Convention - une réforme des institutions européennes profonde pour donner de la démocratie et de la clarté. Deuxièmement, il faut aussi avoir une négociation sur les financements. Il n'est pas possible de dire qu'on pourra faire à 25 ce que l'on faisait à Quinze. Et troisièmement, il faut prendre un certain nombre de priorités sociales, parce qu'il y a effectivement une harmonisation à avoir dans cette Europe-là. Je dis "oui" à l'élargissement, bien sûr, c'est notre vocation, mais en même temps, je dis "oui" à l'Europe, et l'Europe, pour avancer, il faut qu'elle fixe elle-même ses priorités, ses objectifs. Tel n'est pas le cas aujourd'hui. Et donc, les socialistes français, européens, j'espère, doivent être à l'initiative pour fixer ces conditions et ces garanties. Nous le faisons au nom de l'Europe, pas parce que ce serait des intérêts de tel ou tel pays, non, nous le faisons au nom de l'Europe et de l'idéal que l'Europe peut représenter - un idéal politique. Nous avons voulu l'Europe pour éviter la guerre et aussi affirmer - on le voit bien par rapport aux Etats Unis - une nécessité d'être plus forts dans le monde et par l'Europe, et deuxièmement, une volonté sociale, parce que nous voulons vivre dans un modèle social qui n'est pas le modèle américain, qui n'est pas le modèle anglo-saxon, qui n'est pas le modèle du marché."
Bizarrement, pourtant, à l'intérieur du PS, on a le sentiment que ce sentiment très européen que vous venez de développer devant nous n'est pas totalement partagé, qu'il y a des gens à la gauche du parti, autour d'Emmanuelli et de Mélenchon, qui ne sont pas follement enthousiasmés par le projet européen ?
- "Tous les socialistes sont européens, mais c'est vrai qu'ils veulent poser des conditions, c'est vrai qu'ils ne veulent pas d'une fuite en avant, qu'ils ne veulent pas d'une Europe qui serait, en définitive, un non-être politique, qui n'existerait pas, mais qui, en plus, sur le plan économique, serait là pour mettre en cause un certain nombre d'acquis sociaux ou de principes de services publics. Donc, nous voulons une Europe plus forte, plus politique aussi, où les citoyens pourraient davantage dire leur mot au-delà des élections au Parlement européen, une Europe qui soit à l'image de ce que nous voulons faire aussi en France ou dans nos pays, c'est-à-dire une Europe plus sociale, plus volontariste, et plus respectueuse aussi d'un certain nombre de principes comme ceux des services publics."
Revenons au conseil national de ce week-end. Vous avez dit, entre autres, "être à gauche autant qu'il est souhaitable, aussi réformiste que nécessaire". Aussitôt, H. Emmanuelli a dit : qu'est-ce que c'est que cette espèce de "ni-ni" inventée par F. Hollande. Alors, qu'est-ce que cela veut dire ?
- "Ce n'est pas du "ni-ni", c'est du "et il faut être de gauche, parce que je crois que c'est ce qui correspond à notre identité..."
Autant qu'il est souhaitable, c'est-à-dire un peu mais pas trop ?
- "Autant que nous pouvons ; nous devons être de gauche ! On voit bien, notamment après ce qui s'est produit, qu'il y a un éloignement du peuple, des catégories notamment les plus modestes, de la politique. Il faut donc les réconcilier avec la politique, avec des mesures qui doivent prendre en compte le travail, le pouvoir d'achat mais aussi la protection - et c'est ce qui nous a été demandé -, la protection collective par rapport à des risques, y compris par rapport à la sécurité. Et puis, nous devons être réformistes, parce que nous savons bien que c'est par la réforme que nous pouvons changer une société. C'est sur ce point-là que je veux défendre le bilan de L. Jospin. Non pas qu'il ait été parfait, il y a eu des erreurs. Est-ce qu'il fallait baisser des impôts à un moment où on avait besoin de plus de services publics ? C'est une question qui peut se poser, qui s'est posée. Est-ce qu'il fallait faire les 35 heures comme nous les avons faites ? Oui, il fallait faire les 35 heures, peut-être aurait-on dû mieux les appliquer, mais c'était une grande réforme. C'est une grande réforme et on voit bien qu'elle est remise en cause. Mais il faut procéder par réforme. Et qu'est-ce que nous disait L. Jospin ? Qu'il faut respecter la parole qu'on a donnée. Et ce principe-là, je ne veux surtout pas que les socialistes l'oublient. Enfin, il y a une grande leçon du 21 avril, la seule majeure : c'est qu'il faut être uni. Quand on n'est pas unis, on perd. Mon devoir, dans le Parti socialiste et au-delà du Parti socialiste, c'est d'unir les socialistes et de rassembler la gauche."
Vous dites qu'il faut passer de l'inventaire à l'invention ? Considérez-vous qu'il n'y a plus de leçons à tirer, puisque vous dites "la grande leçon du 21 avril" ? Mais la grande leçon du 21 avril, c'est que pour la première fois de l'histoire, un candidat socialiste a quand même été battu au premier tour de l'élection présidentielle et a laissé la place au FN.
- "Bien sûr, il y a des leçons à tirer de ce que nous avons fait ou pas fait. Je pense que la première leçon, c'est que nous n'avons pas suffisamment protégé les Français à un moment où ils avaient de nouveau peur de l'avenir."
Protéger sur le plan économique, sur la plan de la sécurité ou sur le plan social ?
- "Economique, social, sur le plan de l'avenir. Deuxièmement, nous n'avons pas suffisamment pris en compte les catégories qui travaillent et qui attendaient du pouvoir d'achat, même si nous avons créé 2 millions d'emplois, fait baisser le chômage, il y a une partie très importante de la population qui voulait davantage de pouvoir d'achat. Nous avons entendu cette leçon. Troisièmement, nous n'avons pas suffisamment défendu, non pas l'idée du service public - nous l'avons promue -, mais les principes dans leur application du service public. De tout cela, nous avons tiré les leçons. Maintenant, quand je dis qu'il faut passer à l'invention, c'est qu'il faut regarder vers l'avenir. Nous avons eu une défaite, elle a été cruelle, elle a été difficile..."
Historique.
- "Historique. Nous devons en tirer toutes les conclusions et passer à l'avenir. Ce que les Français nous disent, c'est : "Très bien, faites encore l'inventaire de votre 21 avril, mais passez quand même à la suite !"
On a le sentiment que les socialistes sont toujours un peu orphelins de L. Jospin. Est-ce que ce n'est pas malsain ? Quand on voit le dernier sondage, notamment auprès des militants socialistes, qui a été fait samedi, ils disent en gros : "Lionel, reviens !". Est-ce qu'il n'y a pas quelque chose d'extrêmement malsain là-dedans ?
- "Je ne m'en plains pas. C'est quand même plutôt satisfaisant de voir, après ce qui s'est passé - vous disiez une défaite lourde, historique -, qu'ils aient de L. Jospin une très bonne image, même s'ils peuvent avoir des reproches à lui faire. : fallait-il qu'il parte, fallait-il qu'il ne parte pas ?..."
Mais alors cela veut dire qu'ils sont totalement schizophrènes ! S'ils le trouvaient tellement formidable, pourquoi ils ne sont pas allés voter pour lui ?
- "C'est effectivement parce que nous - nous, collectivement - n'avons pas suffisamment fixé notre identité, donné un projet d'avenir, donné l'envie d'aller voter. Je ne suis pas là pour me plaindre des Français, je suis là pour dire qu'il faut qu'on affirme davantage ce que nous sommes, ce que nous voulons faire, et par rapport à la droite notamment. Quand on a une droite qui défait un certain nombre d'avancées - les emplois-jeunes, les 35 heures, les services publics -, il faut absolument que la gauche, toute la gauche soit en avant."
La droite, aujourd'hui, va aussi piocher un peu dans votre jardin. Quand on voit les contrats d'intégration, le projet de supprimer la double peine pour les étrangers condamnés parce qu'ils trouvent cela injuste, le droit de vote aux étrangers... C'est typiquement le genre d'idées que la gauche aurait pu ou dû avoir, qu'elle n'a pas eu, ou qu'elle n'a pas osé avoir et que ce Gouvernement sort.
- "Ce Gouvernement, je ne le crois pas. Je dis : si sur le droit de vote des étrangers, on peut avancer, très bien, faisons-le tout de suite ! Sur l'intégration, au-delà des mots, s'il doit y avoir un projet qui permette une meilleure intégration, nous en avons besoin dans la République, allons-y ! Sur la décentralisation, s'il s'agit de donner des compétences claires aux collectivités locales sans augmentation de la fiscalité locale et avec le souci de l'égalité territoriale, c'est-à-dire le fait d'avoir les mêmes droits et le même accès aux services publics, qu'on habite dans le Limousin ou en région Ile-de-France, allons-y ! Je connais suffisamment J. Chirac pour savoir qu'il sait utiliser les mots, mais dans les actes, il sait quelquefois les oublier."
Un petit quizz pour faire tendance et terminer : le tandem Emmanuelli-Mélenchon et le triumvirat Montebourg-Dray-Peillon, c'est quoi ? L'ambition des personnes, l'amertume des vaincus, la relève des idées ? Vous avez droit à une réponse.
- "Ce sont des socialistes, et moi j'emmène tous les socialistes."
Même ceux qui vous traitent un peu de vieille...
- "Je crois qu'ils ont tort d'utiliser des mots
Désobligeants, à votre égard...
- "...qui n'ont pas lieu d'être dans un Parti socialiste ; les mots qu'ils utilisent, il faut les avoir par rapport à la droite. Mais ce sont des socialistes, nous avons besoin de tout le monde. Je ne suis pas là pour faire le tri entre les socialistes, je suis là pour les emmener tous."
Vous dites : laissez venir à moi les socialistes, jeunes, vieux, contestataires ou pas...
- "Nous avons besoin d'eux tous, parce que les Français, je crois, auront besoin de nous. Mais à nous de montrer qu'on a des idées pour demain. Je crois que c'est le cas."
Le Congrès de Dijon sera chaud quand même...
- "Je pense qu'il y aura de la moutarde, mais suffisamment, pas trop."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 21 octobre 2002)