Texte intégral
C'est pour la France un très grand honneur et un privilège de vous recevoir, ainsi que votre délégation, au Palais des Affaires étrangères.
C'est pour moi-même un plaisir de vous accueillir aujourd'hui à Paris, alors qu'il y a environ une année, en janvier 1996, j'avais la chance d'être si amicalement reçu dans votre pays et d'en découvrir les beautés et la culture tout autant que les remarquables réalisations sociales et économiques. Je me réjouis aussi de recevoir ce soir, parmi les éminents membres de votre délégation, ceux que j'avais rencontrés à Harare : M. Herbert Murerwa, ministre des Finances, M. Chen Chimutengwende, ministre du Tourisme et de l'Environnement.
De nombreux Français, hommes d'affaires, experts, touristes m'avaient précédé à Harare, notamment à l'occasion des Jeux panafricains en septembre 1995, mais depuis ma visite, le nombre de visiteurs français au Zimbabwe a fortement augmenté.
Je n'en suis certes pas le seul responsable, si j'en juge par l'immense succès qu'a connu, récemment, un long et passionnant programme de télévision consacré au Zimbabwe et qui a été vu par plus de 8 millions de téléspectateurs français.
Monsieur le Président, vous dirigez le Zimbabwe depuis son accession à l'indépendance, il y aura 17 ans en avril prochain et, à ce titre, vous êtes l'artisan et le garant de la réconciliation nationale et du respect des principes de la démocratie que l'on peut résumer dans le concept de la bonne gouvernance.
Vous avez eu l'occasion de vous rendre en France à trois reprises. Mais c'est la première fois que vous y venez en visite officielle bilatérale, en tant que président de la République.
Cette visite symbolise certes des liens et une amitié de grande qualité, mais elle marque aussi une étape décisive dans nos relations. Elle consacre une concertation politique à haut niveau ainsi qu'une prometteuse coopération économique, technique et culturelle, conduite dans un esprit de respect mutuel.
En même temps que le chef d'Etat d'un Zimbabwe stable et moderne, c'est aussi le combattant de la liberté et l'ancien dirigeant de la lutte anti-apartheid que la France est fière d'accueillir.
Ce sont aussi, bien entendu, vos multiples et importantes responsabilités internationales - et celles de votre pays - que nous célébrons. Vous êtes, en effet, Monsieur le Président, à la tête de l'organe politique de sécurité et de défense de la SADC.
La présidence de l'OUA vous sera bientôt confiée. Nous savons tous qu'à la présidence du G15, au sein du mouvement des non-alignés, au sein du Commonwealth et des Nations unies, votre autorité et votre expérience donnent à votre pays, sur la scène internationale, une place éminente et respectée, que la France se plaît à saluer.
Membre actif des Nations unies, le Zimbabwe a contribué très efficacement aux opérations de maintien de la paix en Somalie et, encore aujourd'hui, en Angola, où un général zimbabwéen est à la tête de l'UNAVEM.
Au sein de la SADC, le rôle du Zimbabwe a été, et demeure déterminant en matière de prévention des conflits et de consolidation de la démocratie, que ce soit en Afrique australe ou sur le continent.
Les crises que connaît actuellement la région des Grands lacs appellent au premier chef des efforts et des décisions des Etats africains et de l'OUA.
La France n'ignore pas que la gravité de ces crises et leurs conséquences prévisibles sont pour vous un sujet de préoccupation majeure, tout comme elles le sont pour la communauté internationale.
La France, Monsieur le Président, n'a pas ménagé ses efforts pour que des actions internationales soient conduites d'urgence afin de répondre aux drames humanitaires de la région des Grands lacs, ainsi qu'aux risques d'extension des conflits, de déstabilisation politique et de recul de la démocratie au-delà de cette région.
Nous nous félicitons de pouvoir évoquer avec vous ces problèmes urgents ainsi, bien entendu, que d'autres questions internationales, politiques, mais aussi économiques, comme par exemple celles liées au développement et à la coopération internationale.
La France, comme vous le savez, connaît et aime l'Afrique et les Africains ! Outre la solution des problèmes politiques que subit ce continent, nous souhaitons également que son développement demeure un objectif prioritaire pour la communauté internationale, y compris, bien entendu, l'Union européenne, via le FED, auquel, il faut le souligner, la France contribue pour 25 %.
A l'occasion du dernier G7, présidé par M. Jacques Chirac, un dialogue particulier s'est établi avec vous-même, en qualité de président du G15 et les problèmes des rapports Nord-Sud ont été conjointement abordés.
A cette occasion, a été démontrée notre opiniâtreté à promouvoir une aide plus importante à l'Afrique où, au demeurant, un constat de croissance doit être dressé dans de nombreux pays.
C'est le cas du Zimbabwe où la progression de l'économie, en même temps que son souci de bonne gouvernance, appelle nos encouragements.
Malgré ses difficultés et ses problèmes, l'Afrique ne doit pas être considérée ou présentée comme "un continent perdu", où ne séviraient que des maux - le sida, la guerre, la corruption, les violations des Droits de l'Homme.
L'Afrique, c'est essentiellement des femmes et des hommes qui méritent non seulement notre aide, mais aussi notre respect et notre amitié.
A Paris, vous êtes dans la capitale de "l'afro-optimisme", c'est-à-dire de la confiance dans le destin des nations africaines.
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Monsieur le Président, de même que les relations politiques bilatérales, la coopération entre la France et le Zimbabwe s'est largement développé depuis l'indépendance.
Le champ de cette coopération est très varié et je ne peux ici que le survoler rapidement.
Dans le domaine économique, les échanges sont croissants dans les deux sens. Ils doivent progresser. Les chefs d'entreprises françaises, du secteur public comme du secteur privé, sont et seront encouragés à être encore plus présents et plus actifs au Zimbabwe.
Demain matin, vous-même et votre délégation, allez rencontrer, lors d'un "forum économique", de nombreux industriels, banquiers et hommes d'affaires français. Plusieurs sont présents ici ce soir. Je ne doute pas que ces rencontres préluderont à des missions au Zimbabwe et à des projets communs.
Reprenant des propositions que j'ai formulées à Windhoek le mois dernier, lors de la conférence consultative de la SADC, je confirme ici que la France souhaite développer un climat favorable aux investissements et qu'elle est prête à participer à une initiative européenne pour établir un fonds régional de garantie pour le secteur privé en Afrique australe.
En outre, je crois que, ce soir, je peux annoncer une bonne nouvelle, puisque, après la convention fiscale entre nos deux pays, maintenant signée et entrée en vigueur, c'est la convention bilatérale sur la protection des investissements qui devrait être très prochainement conclue.
La coopération bilatérale, Monsieur le Président, est aussi celle conduite depuis plus de quinze années dans le domaine financier. Principalement orientée vers le soutien et le développement d'infrastructures publiques, elle s'est développée par le biais de sept protocoles dont le total représente 1,7
milliard de francs.
Je suis heureux d'annoncer qu'un huitième protocole financier vient d'être décidé et que sa négociation conjointe est en cours. Un autre élément important de cette coopération financière bilatérale est l'intervention récente, mais en croissance, de la Caisse française de développement - puis-je, ici, rappeler que la CFD a d'ores et déjà engagé dans les pays de la SADC plus de 520 millions de francs en 1996 -. Les opérations de la Caisse au Zimbabwe commenceront dès cette année, en soutien au développement rural et aux fermiers communaux, mais d'autres secteurs seront concernés. Le directeur général de la CFD, M. Antoine Pouillieute, qui est parmi nous ce soir, se rendra à Harare en mai prochain et je ne doute pas que ses entretiens n'ouvrent la voie au financement de nouveaux projets.
Je précise "nouveaux" car, dans les domaines techniques et culturels, une forte coopération conduite par le ministère des Affaires étrangères existe depuis l'indépendance votre pays. Les secteurs prioritaires en sont : le tourisme, l'environnement, le patrimoine et l'enseignement du français.
Je pense, en particulier, au projet de maintien de la biodiversité et développement durable dans la moyenne vallée du Zambèze, que j'ai eu l'honneur de "lancer" conjointement avec M. Chen Chimutengwende, ministre de l'Environnement et du Tourisme, lors de ma première visite au Zimbabwe.
S'agissant du patrimoine naturel, historique et culturel, il faut se féliciter des liens déjà établis entre, d'une part, la Direction du patrimoine et des monuments nationaux de votre gouvernement et le magnifique musée d'Histoire naturelle de Bulawayo, et d'autre part, le muséum d'Histoire naturelle de Paris et celui de Saint-Denis de la Réunion.
Demain après-midi, malgré votre programme très chargé, vous avez accepté, Monsieur le Président, de visiter la "Grande galerie de l'évolution" de notre muséum d'Histoire naturelle, visite au cours de laquelle vous serez accompagné par Mme Margie Sudre, secrétaire d'Etat chargé de la Francophonie.
Cette visite symbolisera non seulement les multiples facettes de notre coopération dans les domaines de l'environnement et du patrimoine, mais aussi dans celui de la culture puisque, dans les jardins du muséum, seront exposées, pendant les mois de mars et avril, les oeuvres du sculpteur zimbabwéen, Bernard Matemera, dont je salue aussi la présence parmi nous. Cette exposition, dans ce lieu prestigieux et au moment de votre visite officielle en France, est un hommage de la France à la culture et à l'art contemporain du Zimbabwe.
Enfin, la France est très sensible, Monsieur le Président, à votre souci de voir l'enseignement de sa langue se développer au Zimbabwe, facilitant ainsi ses capacités d'échanges avec l'Afrique francophone. La France poursuivra donc son soutien au ministère zimbabwéen de l'Education en matière de formation de professeurs et de cours spéciaux à l'attention des fonctionnaires, diplomates et hommes d'affaires.
Vous conviendrez que pour faciliter les échanges interafricains, une approche multilatérale et régionale s'impose en matière de développement du français (et également du portugais) dans les pays africains anglophones, et notamment ceux de la SADC. Les initiatives et les propositions du Zimbabwe - auprès de l'Union européenne, de l'UNESCO et d'autres organisations internationales - seraient certainement les bienvenues et la France, quant à elle, est prête à contribuer à des programmes communs.
Monsieur le Président, nous connaissons la réputation sportive du Zimbabwe. La récente victoire de votre pays sur l'Angleterre en cricket en est le symbole. Pour nous, Français, qui pratiquons plus volontiers le rugby que le cricket, nous avons suivi votre exemple, samedi dernier, à Twickenham. Mais nous avons tous en commun le football. Comme vous le savez, la prochaine Coupe du monde ne 1998, aura lieu en France. Auparavant, la Coupe d'Afrique des nations se déroulera avec, je le souhaite, de nouveaux succès pour l'équipe du Zimbabwe.
Je vous propose donc, au nom de Canal France international (CFI), de réaliser un nouveau partenariat avec votre télévision nationale, la ZBC, et la Fédération de football pour que soient diffusées en Afrique (et donc au Zimbabwe) les images télévisées de la Coupe africaine des nations et de la Coupe du monde de football. Cette proposition, j'en suis convaincu, répondra aux attentes du public africain et zimbabwéen.
Le domaine sportif a cela de particulier qu'il privilégie l'amitié et la compréhension entre les peuples.
C'est cette même amitié, partagée et durable, qu'à l'occasion de votre visite officielle à Paris, nous voulons célébrer.
C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, je vous invite à lever votre verre avec moi, en exprimant à son Excellence, le président Robert Gabriel Mugabe, nos meilleurs souhaits de santé et de bonheur pour lui-même et pour sa famille, et en formulant tous nos voeux de prospérité au peuple zimbabwéen.
"Pamberi nehu shamwari hwe Zimbabwe ne France".
Vive l'amitié entre la France et le Zimbabwe
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 16 octobre 2001)