Texte intégral
Mesdames et Messieurs, sur tout ce que vient de dire mon collègue et ami Klaus Kinkel, je n'ai rien à ajouter. C'est vrai, cette initiative que nous avons prise ensemble, de nous exprimer aujourd'hui devant vous, en commun, je voudrais que vous le présentiez et ressentiez comme un acte politique. Nous sommes au début d'une année chargée, avec des échéances importantes, qu'il s'agisse de la Conférence intergouvernementale, de la préparation de la troisième phase de l'union monétaire, de l'élargissement, je pourrais aussi ajouter, quoique ce ne soit pas le lieu, des questions de sécurité en Europe. Dans toutes ces matières, la France et l'Allemagne ont, semble-t-il, trois préoccupations en commun.
D'abord, nous sommes conscients les uns et les autres de notre responsabilité particulière. La France et l'Allemagne ont toujours agi depuis de longues années en ayant conscience de cette responsabilité particulière qui est la leur. Ensuite, le fait est que nous avons une très grande convergence de nos vues, quand ce n'est pas tout simplement, des vues identiques. Aujourd'hui, nous avons parlé de la flexibilité, nous avons présenté, il y a déjà maintenant un peu plus de trois mois, un document commun qui exprime un point de vue commun. Devant nos collègues tout à l'heure, je dirai que ce n'est pas d'un côté la France et de l'autre côté l'Allemagne qui s'exprimeront mais, d'une certaine façon, une délégation franco-allemande. Klaus Kinkel expliquera le point de vue français et allemand sur la flexibilité. Je ferai peut-être quelques commentaires in fine mais, nous voulons bien montrer, à la fois vis-à-vis de vous, vis-à-vis de nos opinions publiques et vis-à-vis de nos collègues et amis, les ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne, notre détermination à agir en commun pour l'intérêt général de l'Europe.
Enfin, nous avons une volonté : c'est de faire en sorte que le "moteur franco-allemand de l'Europe" démontre sa performance. Nous sommes à la fin du Dakar. Nous avons nous l'intention de gagner le Dakar européen ensemble. Nous pensons que, pour cela, en effet, notre moteur est performant et que nous sommes capables de le montrer. C'est donc un geste politique. Nous aurons aujourd'hui à parler, au sein de la réunion de la Conférence intergouvernementale d'un sujet tout à fait important concernant les coopérations renforcées. Je ne crois pas devoir ajouter à ce qu'a dit Klaus Kinkel. Il a évoqué ce que seront les principales questions, c'est-à-dire, la nécessité d'une clause générale et sans doute, un clause particulière à chacun des trois piliers, le fait que cette coopération renforcée doit revenir à l'initiative des Etats membres, avec naturellement le concours de la Commission en tant que gardienne de nos institutions communautaires. Il s'agit pour nous de faire en sorte que les progrès de l'Union, y compris de ceux qui voudraient aller plus vite, plus loin, se fassent dans le cadre des Traités. C'est très exactement l'inverse de l'Europe à deux vitesses, qui est une Europe qui progressivement se sépare alors que nous voulons agir à l'intérieur du système, en permettant tout de même à un certain nombre d'Etats membres d'aller de l'avant. La flexibilité comme l'a dit Klaus Kinkel est un élément très important dans la perspective de l'élargissement de l'Union européenne. Sur l'élargissement, nous avons des vues communes, c'est ce que le président de la République a dit à Varsovie, puis il y a quelques jours à Budapest, et c'est ce que je suis allé dire à Prague, deux jours avant que le chancelier Kohl se rende à Prague. La déclaration tchéco-allemande a une très grande importance politique pour les Allemands et pour les Tchèques mais aussi pour l'ensemble de l'Europe, pour tous les Européens. Tout cela montre l'extrême convergence qu'il y a entre nous sur toutes ces questions.
Ensemble, Klaus Kinkel et moi, souhaitons plein succès à la présidence néerlandaise. Nous l'abordons avec amitié pour notre collègue Van Mierlo et avec optimisme pour les tâches à accomplir dans cette période. La présidence de l'Union échoit pour ces six mois à la Hollande, qui est comme nous, l'un des Etats fondateurs de l'Union européenne. Je suis persuadé que la présidence hollandaise réussira, dans les défis qui sont les siens et les nôtres en particulier à faire en sorte que le délai de la CIG soit tenu, Elle peut compter sur le soutien franco-allemand sans aucun doute.
Nous avons déjà évoqué ce matin un certain nombre de sujets importants, qui n'ont pas donné lieu à de grandes décisions mais qui marquent, je crois la détermination de l'Europe, qu'il s'agisse du suivi de la conférence ministérielle de l'OMC à Singapour qui a été pour l'Europe un succès, pour laquelle nous avons confirmé nos positions en vue des prochaines rencontres. Nous avons préparé les réunions qui auront lieu à Singapour dans trois semaines maintenant entre l'Union européenne d'un côté, les pays de l'ASEAN puis les pays membres de l'ASEM de l'autre. Ce sont des réunions très importantes car, pour nous tous, la relation euro-asiatique est une priorité majeure. Il m'est arrivé de dire que l'Asie serait la nouvelle frontière de la diplomatie française. Je crois qu'on pourrait dire pour l'Europe que l'Asie est sans aucun doute notre nouvelle frontière commune. Nous y avons de très grands intérêts économiques d'abord, mais aussi des intérêts politiques et de sécurité. Nous avons évoqué la politique méditerranéenne, qu'il s'agisse du processus de Barcelone auquel nous sommes attachés, qu'il s'agisse de la négociation des accords de la nouvelle génération avec les pays du Sud de la Méditerranée. Il reste en cours de négociation, l'Egypte, la Jordanie et le Liban. Ce sont des négociations qui posent des problèmes techniques comme toutes les négociations mais pas de problèmes insurmontables, et il y a à ouvrir des négociations avec l'Algérie et avec la Syrie. Nous souhaitons naturellement que ce dispositif global d'accords avec l'ensemble des pays du Sud de la Méditerranée soit achevé dans les meilleurs délais. Ce sera certainement un des grands objectifs des mois qui viennent.
Nous allons parler du processus de paix au Moyen-Orient. Nous ne pouvons tous que nous féliciter très vivement du paraphe de l'Accord sur Hébron, tant attendu depuis bientôt cinq mois, et qui constitue sans aucun doute un élément d'une très grande importance sur la voie du processus de paix. Nous pouvons nous réjouir, à la fois de la maturité et de la capacité à décider des deux parties mais aussi, du concours apporté par les Etats-Unis et, quoique plus discret, du rôle qui a été et qui sera de plus en plus joué par l'Europe dans cette partie du monde. La désignation d'un émissaire européen, un excellent diplomate espagnol M. Moratinos a déjà produit des effets positifs puisque, comme vous le savez, la présidence européenne a adressé aux deux parties à l'accord, Israël et l' Autorité Palestinienne, une lettre qui manifeste la détermination de l'Union européenne d'apporter tout le poids politique et moral qui est le sien pour que les accords signés soient mis en oeuvre scrupuleusement par les uns et les autres.
Nous attacherons dans les mois qui viennent beaucoup d'importance à la solution de quelques problèmes importants comme la mise en route du chantier du port de Gaza qui soulève des problèmes politiques qu'il faut résoudre car il s'agit d'un point très important dans la mise en oeuvre pratique des espoirs de paix dans cette région. Bien entendu, nous souhaitons que, cette étape franchie, je parle de l'accord d'Hébron, puisse être engagées dans les meilleures conditions les négociations définitives entre Israël et la Palestine afin que puisse se dégager l'horizon concernant la reprise des discussions sur le volet syrien et sur le volet libanais.
Nous évoquerons la question de la situation à Belgrade, et je voudrais devant vous confirmer que nous adressons un pressant appel aux autorités de Belgrade afin soit mis en oeuvre sans délai et sans réserve l'ensemble des recommandations faites par M. Felipe Gonzalez dans le cadre de la mission qui lui a été confiée par l'OSCE, à la demande des autorités de Belgrade, à propos des élections municipales qui ont eu lieu en novembre dernier en Serbie.
S'agissant de la Croatie et de la Bosnie, nous sommes également attentifs. Nous souhaitons en particulier que le blocage actuel du Conseil des ministres en Bosnie soit levé et je rappelle à cette occasion que nous avons clairement décidé, aux conférences de Paris et de Londres, que l'aide internationale était strictement conditionnée au respect par toutes les parties de leurs engagements.
Enfin, puisque la question de la situation au Zaïre et dans la région des Grands lacs sera évoquée , je crois que l'Union européenne marquera clairement notre souhait commun que la convocation d'une conférence des Grands lacs soit menée le plus rapidement possible car dans cette région comme ailleurs, seules des négociations, seule la voie politique sont susceptibles de permettre de ramener la paix et la sérénité.
Enfin, si vous me le permettez, puisque j'ai le plaisir d'avoir Klaus Kinkel avec moi, je voudrais vous dire à titre personnel, combien j'ai été choqué par la lecture d'une lettre ouverte parue le 9 janvier dans le Herald Tribune, faisant au bénéfice douteux de l'Eglise de Scientologie l'amalgame entre l'Allemagne d'hier et l'Allemagne d'aujourd'hui. Je voudrais dire combien je partage les appréhensions des Autorités allemandes à l'égard des sectes et combien je soutiens l'attitude de nos amis d'outre Rhin, merci.
{^#200>^Union européenne - Royaume-Uni^}
Q - A propos de l'attitude britannique. Les Britanniques veulent pour chaque action où se mettraient en oeuvre les coopérations renforcées un droit de veto ?
M. Rifkind vous a demandé de lui donner les assurances que d'ici 10/15 ans, l'Europe à laquelle vous aspirez ne sera pas fédérale. Que répondez-vous à cela ?
R - Je ne sais pas pourquoi vous insistez à ce point sur les positions britanniques. Nous sommes actuellement dans une phase de discussions, de négociations. Forcément, il y a encore, au sein des Quinze, un certain nombre de questions non négligeables qui n'ont pas encore fait l'objet d'un consensus. Sinon la Conférence serait terminée. On est à l'abri de ce risque. On a un certain nombre de questions à trancher. Vous en avez évoqué une, qui est de savoir si oui ou non, il faut l'unanimité pour lancer une coopération renforcée. Très clairement, le point de vue franco-allemand est que l'unanimité ne peut pas être acceptée. Cela voudrait dire qu'il n'y aurait pas de coopération renforcée. Donc, ce serait une mauvaise décision. Nous avons fait d'autres propositions que celle-là. Laissez la discussion cheminer. A la fin de la discussion, il y aura une réponse. Ensuite, quelle sera l'Europe dans 10/15 ans ? Nous verrons bien. Ce sera une Europe élargie. Et dans cette Europe élargie, je crois qu'enfin les esprits seront différents de ce qu'ils sont aujourd'hui. Chacun peut avoir son idée, son projet. Mais à moi on ne fera pas dire que je ne souhaite pas qu'il y ait un progrès de l'intégration de l'Europe.
Q - Il y a quelques jours, à La Haye, le ministre des Finances des Pays-Bas a clairement dit qu'il n'estimait pas souhaitable que les pays méditerranéens fassent partie de la première vague de l'UEM. Ces propos ont été ensuite nuancés par le Premier ministre, Wim Kok, mais de manière très peu convaincante. Que pensez-vous de l'opportunité politique d'une telle déclaration ?
R - Le plus grand nombre de pays doit faire partie du premier groupe. C'est notre plus grand souhait et nous ferons tout pour cela..
{^#200>^Banque centrale européenne^}
Q - (sur la présidence de la Banque centrale européenne)
R - Nous ne pouvons pas réagir à tous les échos qui paraissent dans les journaux, même dans les journaux allemands au demeurant bien sympathiques. Je ne pense pas que vous pouvez nous entraîner sur ce point. Naturellement, toutes ces questions font partie de toutes celles qui sont devant nous dans les mois qui viennent pour poursuivre la préparation de l'entrée dans la troisième phase de la monnaie unique, de surcroît de l'union monétaire. Qui sera le Président de la nouvelle Banque Centrale est une question forte intéressante, j'en conviens....
Q - (sur la flexibilité)
R - Sur l'affaire de la flexibilité, il y a aujourd'hui plusieurs positions sur la table. C'est vrai qu'il y a les positions britanniques, Les Italiens ont envoyé un papier, les Portugais, les Espagnols ont exprimé un point de vue, Bref, il y a plusieurs positions qui ne sont pas toutes les mêmes. Vous mettez l'accent sur la position britannique. On pourrait mettre l'accent sur les autres. Autrement dit, nous sommes dans une phase je crois très utile et très concrète dans laquelle les quinze Etats membres travaillent, réfléchissent, avancent, font des propositions des contre-propositions. C'est très bien, et c'est un peu le fruit de la démarche franco-allemande. C'est parce qu'il y a eu un document commun que Klaus Kinkel et moi-même avons présenté que le débat est vraiment entré dans le vif du sujet. Je ne suis pas pessimiste car j'ai l'impression qu'aujourd'hui, s'il y a un point qui est acquis, ce serait, je le dis avec prudence, que chacun maintenant se rend bien compte qu'en effet il faut que les choses avancent. Cette question du droit de veto est naturellement une question forte. Je vous ai dit ce que j'en pensais tout à l'heure. Je vois plutôt ce qui progresse personnellement que les difficultés. Ensuite, les déclarations extérieures, le fait que chacun s'exprime, personnellement je ne trouve pas opportun de ma part de commenter ce que dit le gouverneur de la banque centrale française, a fortiori allemande. Je trouve très bien que dans le monde démocratique, la vie procède, progresse grâce aux débats, et je dirai qu'il ne faut pas refuser la discussion et le débat dans des moments aussi importants que ceux que nous vivons. Il y a aussi des gens qui s'expriment en France, quand je les entends, je ne dis pas, "ah ! mais qu'ils se taisent", je suis content de les entendre parler. Parfois je suis ravi.
Q - Pourriez-vous nous dire quels sont les derniers points de divergence qui vous inquiètent encore ?
R - Je vois bien, c'est ce que vous aimeriez n'est-ce pas, au nom d'un principe que j'avais entendu énoncer par un grand journaliste français qui avait dit : "une bonne nouvelle n'est pas une nouvelle". Aujourd'hui nous avons voulu mettre l'accent sur la détermination franco-allemande, en ce début de l'année 1997, pour travailler ensemble pour les grandes échéances qui sont devant nous. Vous verrez au fil des mois que tout cela, je l'espère, je le crois vraiment, se traduira pas des actes précis. Nous serons amenés, Klaus Kinkel et moi, comme le font le président Chirac et le chancelier, à exprimer nos vues communes sur d'autres sujets qui sont en négociation au sein de la CIG sur lesquels nous n'avons pas encore exprimé des vues communes. Comme vous êtes très bons experts je suis sûr que vous trouverez à quoi je fais allusion.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 octobre 2001)
D'abord, nous sommes conscients les uns et les autres de notre responsabilité particulière. La France et l'Allemagne ont toujours agi depuis de longues années en ayant conscience de cette responsabilité particulière qui est la leur. Ensuite, le fait est que nous avons une très grande convergence de nos vues, quand ce n'est pas tout simplement, des vues identiques. Aujourd'hui, nous avons parlé de la flexibilité, nous avons présenté, il y a déjà maintenant un peu plus de trois mois, un document commun qui exprime un point de vue commun. Devant nos collègues tout à l'heure, je dirai que ce n'est pas d'un côté la France et de l'autre côté l'Allemagne qui s'exprimeront mais, d'une certaine façon, une délégation franco-allemande. Klaus Kinkel expliquera le point de vue français et allemand sur la flexibilité. Je ferai peut-être quelques commentaires in fine mais, nous voulons bien montrer, à la fois vis-à-vis de vous, vis-à-vis de nos opinions publiques et vis-à-vis de nos collègues et amis, les ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne, notre détermination à agir en commun pour l'intérêt général de l'Europe.
Enfin, nous avons une volonté : c'est de faire en sorte que le "moteur franco-allemand de l'Europe" démontre sa performance. Nous sommes à la fin du Dakar. Nous avons nous l'intention de gagner le Dakar européen ensemble. Nous pensons que, pour cela, en effet, notre moteur est performant et que nous sommes capables de le montrer. C'est donc un geste politique. Nous aurons aujourd'hui à parler, au sein de la réunion de la Conférence intergouvernementale d'un sujet tout à fait important concernant les coopérations renforcées. Je ne crois pas devoir ajouter à ce qu'a dit Klaus Kinkel. Il a évoqué ce que seront les principales questions, c'est-à-dire, la nécessité d'une clause générale et sans doute, un clause particulière à chacun des trois piliers, le fait que cette coopération renforcée doit revenir à l'initiative des Etats membres, avec naturellement le concours de la Commission en tant que gardienne de nos institutions communautaires. Il s'agit pour nous de faire en sorte que les progrès de l'Union, y compris de ceux qui voudraient aller plus vite, plus loin, se fassent dans le cadre des Traités. C'est très exactement l'inverse de l'Europe à deux vitesses, qui est une Europe qui progressivement se sépare alors que nous voulons agir à l'intérieur du système, en permettant tout de même à un certain nombre d'Etats membres d'aller de l'avant. La flexibilité comme l'a dit Klaus Kinkel est un élément très important dans la perspective de l'élargissement de l'Union européenne. Sur l'élargissement, nous avons des vues communes, c'est ce que le président de la République a dit à Varsovie, puis il y a quelques jours à Budapest, et c'est ce que je suis allé dire à Prague, deux jours avant que le chancelier Kohl se rende à Prague. La déclaration tchéco-allemande a une très grande importance politique pour les Allemands et pour les Tchèques mais aussi pour l'ensemble de l'Europe, pour tous les Européens. Tout cela montre l'extrême convergence qu'il y a entre nous sur toutes ces questions.
Ensemble, Klaus Kinkel et moi, souhaitons plein succès à la présidence néerlandaise. Nous l'abordons avec amitié pour notre collègue Van Mierlo et avec optimisme pour les tâches à accomplir dans cette période. La présidence de l'Union échoit pour ces six mois à la Hollande, qui est comme nous, l'un des Etats fondateurs de l'Union européenne. Je suis persuadé que la présidence hollandaise réussira, dans les défis qui sont les siens et les nôtres en particulier à faire en sorte que le délai de la CIG soit tenu, Elle peut compter sur le soutien franco-allemand sans aucun doute.
Nous avons déjà évoqué ce matin un certain nombre de sujets importants, qui n'ont pas donné lieu à de grandes décisions mais qui marquent, je crois la détermination de l'Europe, qu'il s'agisse du suivi de la conférence ministérielle de l'OMC à Singapour qui a été pour l'Europe un succès, pour laquelle nous avons confirmé nos positions en vue des prochaines rencontres. Nous avons préparé les réunions qui auront lieu à Singapour dans trois semaines maintenant entre l'Union européenne d'un côté, les pays de l'ASEAN puis les pays membres de l'ASEM de l'autre. Ce sont des réunions très importantes car, pour nous tous, la relation euro-asiatique est une priorité majeure. Il m'est arrivé de dire que l'Asie serait la nouvelle frontière de la diplomatie française. Je crois qu'on pourrait dire pour l'Europe que l'Asie est sans aucun doute notre nouvelle frontière commune. Nous y avons de très grands intérêts économiques d'abord, mais aussi des intérêts politiques et de sécurité. Nous avons évoqué la politique méditerranéenne, qu'il s'agisse du processus de Barcelone auquel nous sommes attachés, qu'il s'agisse de la négociation des accords de la nouvelle génération avec les pays du Sud de la Méditerranée. Il reste en cours de négociation, l'Egypte, la Jordanie et le Liban. Ce sont des négociations qui posent des problèmes techniques comme toutes les négociations mais pas de problèmes insurmontables, et il y a à ouvrir des négociations avec l'Algérie et avec la Syrie. Nous souhaitons naturellement que ce dispositif global d'accords avec l'ensemble des pays du Sud de la Méditerranée soit achevé dans les meilleurs délais. Ce sera certainement un des grands objectifs des mois qui viennent.
Nous allons parler du processus de paix au Moyen-Orient. Nous ne pouvons tous que nous féliciter très vivement du paraphe de l'Accord sur Hébron, tant attendu depuis bientôt cinq mois, et qui constitue sans aucun doute un élément d'une très grande importance sur la voie du processus de paix. Nous pouvons nous réjouir, à la fois de la maturité et de la capacité à décider des deux parties mais aussi, du concours apporté par les Etats-Unis et, quoique plus discret, du rôle qui a été et qui sera de plus en plus joué par l'Europe dans cette partie du monde. La désignation d'un émissaire européen, un excellent diplomate espagnol M. Moratinos a déjà produit des effets positifs puisque, comme vous le savez, la présidence européenne a adressé aux deux parties à l'accord, Israël et l' Autorité Palestinienne, une lettre qui manifeste la détermination de l'Union européenne d'apporter tout le poids politique et moral qui est le sien pour que les accords signés soient mis en oeuvre scrupuleusement par les uns et les autres.
Nous attacherons dans les mois qui viennent beaucoup d'importance à la solution de quelques problèmes importants comme la mise en route du chantier du port de Gaza qui soulève des problèmes politiques qu'il faut résoudre car il s'agit d'un point très important dans la mise en oeuvre pratique des espoirs de paix dans cette région. Bien entendu, nous souhaitons que, cette étape franchie, je parle de l'accord d'Hébron, puisse être engagées dans les meilleures conditions les négociations définitives entre Israël et la Palestine afin que puisse se dégager l'horizon concernant la reprise des discussions sur le volet syrien et sur le volet libanais.
Nous évoquerons la question de la situation à Belgrade, et je voudrais devant vous confirmer que nous adressons un pressant appel aux autorités de Belgrade afin soit mis en oeuvre sans délai et sans réserve l'ensemble des recommandations faites par M. Felipe Gonzalez dans le cadre de la mission qui lui a été confiée par l'OSCE, à la demande des autorités de Belgrade, à propos des élections municipales qui ont eu lieu en novembre dernier en Serbie.
S'agissant de la Croatie et de la Bosnie, nous sommes également attentifs. Nous souhaitons en particulier que le blocage actuel du Conseil des ministres en Bosnie soit levé et je rappelle à cette occasion que nous avons clairement décidé, aux conférences de Paris et de Londres, que l'aide internationale était strictement conditionnée au respect par toutes les parties de leurs engagements.
Enfin, puisque la question de la situation au Zaïre et dans la région des Grands lacs sera évoquée , je crois que l'Union européenne marquera clairement notre souhait commun que la convocation d'une conférence des Grands lacs soit menée le plus rapidement possible car dans cette région comme ailleurs, seules des négociations, seule la voie politique sont susceptibles de permettre de ramener la paix et la sérénité.
Enfin, si vous me le permettez, puisque j'ai le plaisir d'avoir Klaus Kinkel avec moi, je voudrais vous dire à titre personnel, combien j'ai été choqué par la lecture d'une lettre ouverte parue le 9 janvier dans le Herald Tribune, faisant au bénéfice douteux de l'Eglise de Scientologie l'amalgame entre l'Allemagne d'hier et l'Allemagne d'aujourd'hui. Je voudrais dire combien je partage les appréhensions des Autorités allemandes à l'égard des sectes et combien je soutiens l'attitude de nos amis d'outre Rhin, merci.
{^#200>^Union européenne - Royaume-Uni^}
Q - A propos de l'attitude britannique. Les Britanniques veulent pour chaque action où se mettraient en oeuvre les coopérations renforcées un droit de veto ?
M. Rifkind vous a demandé de lui donner les assurances que d'ici 10/15 ans, l'Europe à laquelle vous aspirez ne sera pas fédérale. Que répondez-vous à cela ?
R - Je ne sais pas pourquoi vous insistez à ce point sur les positions britanniques. Nous sommes actuellement dans une phase de discussions, de négociations. Forcément, il y a encore, au sein des Quinze, un certain nombre de questions non négligeables qui n'ont pas encore fait l'objet d'un consensus. Sinon la Conférence serait terminée. On est à l'abri de ce risque. On a un certain nombre de questions à trancher. Vous en avez évoqué une, qui est de savoir si oui ou non, il faut l'unanimité pour lancer une coopération renforcée. Très clairement, le point de vue franco-allemand est que l'unanimité ne peut pas être acceptée. Cela voudrait dire qu'il n'y aurait pas de coopération renforcée. Donc, ce serait une mauvaise décision. Nous avons fait d'autres propositions que celle-là. Laissez la discussion cheminer. A la fin de la discussion, il y aura une réponse. Ensuite, quelle sera l'Europe dans 10/15 ans ? Nous verrons bien. Ce sera une Europe élargie. Et dans cette Europe élargie, je crois qu'enfin les esprits seront différents de ce qu'ils sont aujourd'hui. Chacun peut avoir son idée, son projet. Mais à moi on ne fera pas dire que je ne souhaite pas qu'il y ait un progrès de l'intégration de l'Europe.
Q - Il y a quelques jours, à La Haye, le ministre des Finances des Pays-Bas a clairement dit qu'il n'estimait pas souhaitable que les pays méditerranéens fassent partie de la première vague de l'UEM. Ces propos ont été ensuite nuancés par le Premier ministre, Wim Kok, mais de manière très peu convaincante. Que pensez-vous de l'opportunité politique d'une telle déclaration ?
R - Le plus grand nombre de pays doit faire partie du premier groupe. C'est notre plus grand souhait et nous ferons tout pour cela..
{^#200>^Banque centrale européenne^}
Q - (sur la présidence de la Banque centrale européenne)
R - Nous ne pouvons pas réagir à tous les échos qui paraissent dans les journaux, même dans les journaux allemands au demeurant bien sympathiques. Je ne pense pas que vous pouvez nous entraîner sur ce point. Naturellement, toutes ces questions font partie de toutes celles qui sont devant nous dans les mois qui viennent pour poursuivre la préparation de l'entrée dans la troisième phase de la monnaie unique, de surcroît de l'union monétaire. Qui sera le Président de la nouvelle Banque Centrale est une question forte intéressante, j'en conviens....
Q - (sur la flexibilité)
R - Sur l'affaire de la flexibilité, il y a aujourd'hui plusieurs positions sur la table. C'est vrai qu'il y a les positions britanniques, Les Italiens ont envoyé un papier, les Portugais, les Espagnols ont exprimé un point de vue, Bref, il y a plusieurs positions qui ne sont pas toutes les mêmes. Vous mettez l'accent sur la position britannique. On pourrait mettre l'accent sur les autres. Autrement dit, nous sommes dans une phase je crois très utile et très concrète dans laquelle les quinze Etats membres travaillent, réfléchissent, avancent, font des propositions des contre-propositions. C'est très bien, et c'est un peu le fruit de la démarche franco-allemande. C'est parce qu'il y a eu un document commun que Klaus Kinkel et moi-même avons présenté que le débat est vraiment entré dans le vif du sujet. Je ne suis pas pessimiste car j'ai l'impression qu'aujourd'hui, s'il y a un point qui est acquis, ce serait, je le dis avec prudence, que chacun maintenant se rend bien compte qu'en effet il faut que les choses avancent. Cette question du droit de veto est naturellement une question forte. Je vous ai dit ce que j'en pensais tout à l'heure. Je vois plutôt ce qui progresse personnellement que les difficultés. Ensuite, les déclarations extérieures, le fait que chacun s'exprime, personnellement je ne trouve pas opportun de ma part de commenter ce que dit le gouverneur de la banque centrale française, a fortiori allemande. Je trouve très bien que dans le monde démocratique, la vie procède, progresse grâce aux débats, et je dirai qu'il ne faut pas refuser la discussion et le débat dans des moments aussi importants que ceux que nous vivons. Il y a aussi des gens qui s'expriment en France, quand je les entends, je ne dis pas, "ah ! mais qu'ils se taisent", je suis content de les entendre parler. Parfois je suis ravi.
Q - Pourriez-vous nous dire quels sont les derniers points de divergence qui vous inquiètent encore ?
R - Je vois bien, c'est ce que vous aimeriez n'est-ce pas, au nom d'un principe que j'avais entendu énoncer par un grand journaliste français qui avait dit : "une bonne nouvelle n'est pas une nouvelle". Aujourd'hui nous avons voulu mettre l'accent sur la détermination franco-allemande, en ce début de l'année 1997, pour travailler ensemble pour les grandes échéances qui sont devant nous. Vous verrez au fil des mois que tout cela, je l'espère, je le crois vraiment, se traduira pas des actes précis. Nous serons amenés, Klaus Kinkel et moi, comme le font le président Chirac et le chancelier, à exprimer nos vues communes sur d'autres sujets qui sont en négociation au sein de la CIG sur lesquels nous n'avons pas encore exprimé des vues communes. Comme vous êtes très bons experts je suis sûr que vous trouverez à quoi je fais allusion.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 octobre 2001)