Allocution prononcée par M. Jacques Chirac, Président de la République, à l'occasion de la réception des médaillés français aux XVIIIème Jeux Olympiques d'hiver et aux VIIème Jeux Paralympiques d'hiver de Nagano, à l'Elysée le 28 mars 1998.

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Circonstance : Réception des médaillés français des XVIIIèmes Jeux Olympiques d'hiver et VIIème Jeux Paralympiques d'hiver de Nagano (Japon) à l'Elysée le 28 mars 1998

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Champions,
Messieurs les membres du Comité International Olympique,
Monsieur le Délégué Interministériel aux handicapés, Cher Patrick Segal,
Monsieur le Président du Comité National Olympique et Sportif Français, cher Président Henri Sérandour,
Messieurs les Présidents des Fédérations,
Mesdames, Messieurs,
Mes chers Amis,
Soyez tous et toutes les bienvenus au Palais de lElysée. Cette grande maison de la République, de la France et des Français est naturellement la vôtre. Cest désormais une tradition que notre pays honore ses grands sportifs. Tradition qui me fait dautant plus plaisir quelle tend à se renouveler souvent depuis quelques temps. Ce qui est un bon signe.
Cest le signe que, décidément, le sport français se porte bien. Cest effectivement lun de ces moments où les Français se retrouvent. Cest un symbole fort, qui parle à tout un peuple, pour tout un peuple, très loin au-delà de nos frontières et cest tout notre pays qui se trouve entraîné dans lélan que vous avez donné.
Mais le sport, cest sans aucun doute plus que cela. Cest une certaine image de ce que nous voudrions être et de ce que nous devrions être plus souvent. Une image de lexcellence. Une image exigeante de lhomme et de la femme, de leur courage, de leur volonté, de leur désir daller au bout des choses et de réussir.
Cest aussi un message : rien ne sobtient sans travail, sans effort, sans sacrifice. Dans votre cas, ce sont des années et des années dentraînement, de persévérance, de rigueur, de patience, avec, à la clé, le succès, une performance, une médaille et, pour certains dentre vous, la plus haute marche du podium.
Le sport, cest aussi une certaine manière de vivre ensemble, solidaire, loyale, juste. Cest lidée que lon peut saffronter dans un esprit amical, que lon peut être le meilleur dans le respect de lautre.
Cest cette belle image, généreuse, que vous tous, athlètes olympiques et paralympiques, vous nous avez offerte tout au long de ces semaines de compétitions avec, en prime, lémotion et la fierté.
Cest la magie du sport où les succès, les déceptions, les malheurs dun seul sont ressentis par tous. Où une médaille, les couleurs qui sélèvent, une Marseillaise qui résonne, votre enthousiasme, vos sourires, vos larmes resteront gravés dans tous les coeurs.
Oui, nous avons été des millions à vivre ces semaines dans lattente de vos exploits. Vous ne nous avez pas déçus. Cette moisson dhiver fut une bonne moisson.
Huit médailles olympiques dont deux en or : deux fois seulement, à Grenoble et à Albertville, la France avait fait mieux, et encore se battait-elle chez elle. Là, vous étiez à Nagano, avec sur vos épaules la pression de plus en plus écrasante des grandes rencontres internationales. Mais vous étiez bien entourés. Vous pouviez compter sur vos entraîneurs, vos cadres techniques, vos fédérations. Et vos succès sont naturellement aussi les leurs.
Monsieur le Président, Henri Sérandour, nous avons tous aujourdhui une pensée pleine daffection pour notre ami Nelson Paillou qui nous a quittés il y a peu de temps et qui, pendant les onze années où il a présidé le Comité National Olympique et Sportif Français, a lancé cette dynamique du succès, avec un encadrement de haut niveau, des programmes de stages, une préparation pointue pour nos athlètes. Efforts poursuivis par vos soins et qui ont porté leurs fruits à Atlanta et maintenant à Nagano.
Lavenir, désormais, ce sont en 2000 les Jeux Olympiques dété de Sidney. Et cest en 2002 le rendez-vous de Salt Lake City. Un mouvement a été lancé. Nos équipes sont entrées de plain-pied dans une logique de conquête et de succès.
Et puis, il y a eu tous ceux, Mesdames et Messieur les Champions, qui vous ont soutenus de tout leur cur, depuis la France ou à Nagano, à vos côtés. Celles et ceux qui croient en vous, qui partagent vos joies mais aussi parfois vos déceptions. Celles et ceux qui vous encouragent jour après jour : vos parents, vos amis, mais aussi tout un quartier, tout un village, tout un pays.
Parmi les images qui resteront, il y a, chère Karine Ruby, celle de vos parents quand vous avez conquis, avec quelle fougue, la première médaille française qui était aussi notre première médaille dor. Nous nous souviendrons longtemps aussi, cher Jean-Luc Crétier, de laccueil triomphal que vous ont réservé vos amis et tout votre village de La Plagne quand vous êtes revenu avec votre médaille dor, la première en descente, trente ans après Jean-Claude Killy. Nous noublierons pas, cher Philippe Candeloro, la joie des vôtres à mesure que vous réussissiez ces quelques minutes où nous avons vibré, et dabord votre public, comme jai observé quil était particulièrement très féminin. Je crois quici personne ne men voudra dinsister sur ce superbe personnage de dArtagnan. Ça a été un grand coup de cur. Tout y était : la force, le rythme, la séduction, le panache, bref, quelque chose de très français.
Ce qui ne retire rien naturellement à toutes nos autres médailles, toutes magnifiques, médailles de la maturité, médailles de la grâce, médailles déquipes.
Et vingt-deux médailles paralympiques. Là encore, quel palmarès pour ces 7èmes Jeux Paralympiques qui pourtant ont été plus disputés que jamais.
A Nagano, les Jeux Paralympiques ont franchi, me semble-t-il, une nouvelle étape. Ce furent les Jeux de la reconnaissance et de la consécration. La consécration du public massivement présent tout au long des compétitions, plus que jamais, Monsieur le Président. La consécration des médias avec plus dun millier de journalistes couvrant lévénement, plus que jamais à nouveau. Et la consécration sportive, avec une compétition plus rude, avec trente-deux nations représentées, 1200 athlètes, des équipes de mieux en mieux encadrées, de mieux en mieux entraînées, de mieux en mieux équipées.
Jévoquais à linstant cette formidable école de courage, de volonté, de dépassement de soi quest lécole du sport. Se hisser sur un podium, cest se construire un moral dacier, cest se battre sans cesse contre les autres mais aussi et surtout contre soi-même. Cest vrai pour les athlètes olympiques. Ça lest bien davantage encore pour les athlètes paralympiques qui doivent triompher de leurs concurrents mais dabord vaincre leur propre corps, surmonter les blessures de la vie. Alors, quelle récompense ! Quelle émotion ! Quelle liberté !
Ces Jeux de Nagano ont aussi été marqués par la volonté des mondes olympique et paralympique français de progresser ensemble. Ils ont multiplié les entraînements communs et ce fut sans doute un élément du succès. Il y a là une leçon à méditer. Et cest aussi la raison pour laquelle jai souhaité vous recevoir tous ensemble.
Voilà, Mesdames et Messieurs les Champions, ce que je voulais vous dire aujourdhui, au nom de tous nos compatriotes qui vous admirent et qui vous aiment, vous le savez. Je vais maintenant vous remettre vos insignes dans lOrdre national de la Légion dhonneur et dans lOrdre national du Mérite comme il est dusage quand la République veut récompenser celles et ceux qui portent ses couleurs, et qui les portent si bien, si haut, avec tant de talent et de cur.
Laissez-moi vous dire encore à toutes et à tous ladmiration et la gratitude que nous ressentons pour ce magnifique spectacle que vous nous avez offert, pour ces moments inoubliables que nous avons vécus avec vous, pour cette formidable leçon de volonté, de passion, de tempérament qui est la première leçon du sport, et pour cet appel à nous dépasser à chaque instant de lexistence et à surmonter, lorsquelles sont là, les épreuves de la vie. Et merci pour cette image de la France, cette part de rêve que vous nous donnez à tous, à nous, Français, et que vous donnez au monde.
Je vous en remercie.