Texte intégral
F. Laborde - En quoi consistent les états généraux du sport ? C'est pour dire aux Français de se bouger, de faire du sport ?
- "Oui, pourquoi pas. Mais c'est surtout la possibilité pour l'ensemble du mouvement sportif, mais aussi les collectivités locales, les élus, les intervenants privés dans le domaine du sport de se réunir, de déterminer un diagnostic partagé du fonctionnement du sport en France et de pouvoir, le 8 décembre prochain, tracer de grandes lignes pour que l'organisation du sport, qui est assez originale par rapport aux pays européens ou au reste du monde, trouve sa voie, trouve de nouveaux modes de fonctionnement, toujours dans un respect du monde amateur et du monde professionnel. Pour l'instant, ces deux mondes se regardent un peu en chiens de faïence."
Le président d'honneur de ces états généraux est une personnalité forte et symbolique : P. Mazeaud.
- "C'est un peu le symbole de notre pratique sportive en France : à la fois l'aventure - on se souviendra de ses exploits en tant qu'himalayste - et puis aussi cette implication de l'Etat dans la pratique sportive."
C'est aussi un homme politique, membre du Conseil constitutionnel, ancien député.
- "Dans ce cadre, l'Etat est partenaire du mouvement sportif. C'est d'ailleurs dans cet esprit que nous organisons les états généraux : il s'agit bien d'un partenariat entre le mouvement sportif et l'Etat."
On met toujours en avant la fonction éducative du sport. Vous êtes ministre des Sports, et pas de la Jeunesse. Ce n'est pas embêtant ? Cela veut dire que la jeunesse n'est plus une priorité dans le sport ?
- "C'est un des éléments, mais le sport est pratiqué par les seniors, par les adultes, par toutes les catégories d'âge. Le fait d'avoir rapproché la Jeunesse de L. Ferry, de l'Education nationale, lui permet d'avoir un message clair. Cela nous a permis de clarifier les missions des uns et des autres."
Vous gardez un regard particulier sur cette fonction ?
- "Surtout sur la partie éducative du sport, bien évidemment."
Le sport dans les programmes scolaires : on est un pays où les enfants font du sport à l'école, mais en font plutôt moins que dans les autres. Peut-on améliorer cela ?
- "C'est vrai que la pratique sportive se fait surtout les clubs. On a de l'éducation physique à l'école et une certaine pratique sportive, mais c'est vrai que le socle des pratiques sportives se déroule plutôt dans les clubs. L'idée d'essayer d'augmenter le nombre d'heures, de faire en sorte que les enfants pratiquent plus de sport est un peu compliquée, car cela nous obligerait à modifier les rythmes scolaires - journée de quatre ou de cinq jours ? C'est une discussion que l'on pourra de nouveau avoir mais c'est très compliqué. Donc, je préfère avoir une démarche différente, qui est d'améliorer la pratique sportive périscolaire : quand l'enfant a terminé son temps scolaire, vers 16h30, on lui donne la possibilité de pratiquer un sport, grâce à des éducateurs venant des clubs."
Ce serait gratuit ? Parce que souvent, les clubs coûtent cher...
- "C'est pratiquement tout le temps gratuit. Les collectivités locales participent beaucoup à cet effort et c'est surtout un pont entre le club sportif et l'école."
Ce sont donc les éducateurs sportifs des clubs qui se déplaceront après les classes ?
- "Très souvent. C'est bien évidemment la collectivité, très souvent la commune, qui prend en charge le temps périscolaire et le fait que cet éducateur..."
Donc chaque enfant pourrait expérimenter une catégorie de sport, faire du tennis pendant une année et ensuite de l'escrime ?
- "C'est ce qui se passe déjà ; c'est ce que l'on appelle "les contrats éducatifs locaux". Il faut les renforcer et surtout créer ces passerelles entre l'école et le club sportif."
On a le sentiment, en France, que les équipements ne sont pas au niveau où ils pourraient l'être - les stades, les piscines... Peut-on mettre en place un plan pour qu'on rattrape un peu le niveau d'équipement que la population est en droit d'espérer ?
- "Ce sera typiquement un des sujets débattus pendant les états généraux. C'est ce que l'on appellera "l'aménagement du territoire en matière d'équipements sportifs". Nous manquons, c'est évident, d'équipements sportifs. Encore faut-il les implanter dans des bassins de vie, c'est-à-dire qu'il est hors de question que deux communes limitrophes construisent chacune leur piscine. Il faut travailler - et c'est le rôle de l'Etat -, tout en laissant leur liberté aux élus dans cette dynamique, dans cette initiative pour construire des équipements, mais l'Etat doit être là comme un régulateur, pour savoir où implanter pour que cet équipement puisse servir à une communauté de communes, avec une logique de loisirs, mais également de pratiques de compétition. C'est un des vrais enjeux dans les dix ans qui viennent, de création de cet aménagement du territoire. On a déjà des textes, mais ils sont peu appliqués dans les faits."
M.-G. Buffet avait fait de la lutte contre le dopage une de ses priorités ; j'imagine que le ministre et l'ancien sportif que vous êtes va continuer ce travail. Dans quelle direction lutter ? On est tous frappés, par exemple, que sur le Tour de France, il y a un nombre considérable d'asthmatiques... Ils ont tous des ordonnances de médecins longues comme le bras, ce qui est tout de même étonnant pour de grands cyclistes ! Pourquoi y a-t-il autant d'asthmatiques chez les grands sportifs ?
- "C'est aux experts de le dire ! Il y a trois éléments dans la lutte contre le dopage, qui reste bien évidemment une priorité : c'est le suivi médical, savoir à quel moment un sportif est capable de supporter un entraînement dur ou un rythme de compétition important, les contrôles dont vous avez parlés tout à l'heure et la lutte contre les trafics. On se rend compte que cela devient un trafic très lucratif et que les produits traversent les frontières comme si de rien n'était. [...] Ce sont trois volets indissociables. Pour cela, nous avons un cadre législatif bon, il faut simplement l'appliquer dans toute sa rigueur et surtout qu'il soit en cohérence avec ce qui se passe autour de nous, aux niveaux européen et mondial. Vous avez parlé des prises de produits interdits mais tolérés quand il y a une ordonnance ; j'attends beaucoup de la rédaction du code mondial antidopage qui, normalement, devrait apporter de la cohérence à la fois sur la liste des produits interdits et surtout dans leur mode de prescription. Ce code devrait être rédigé pour le printemps 2003 et vraiment, j'en attends beaucoup."
Ce code s'appliquera à tous, partout dans le monde et dans tous les sports ?
- "C'est en tout cas l'idée et l'objectif. Je pense que cela prendra du temps, mais c'est vraiment la solution."
Est-ce qu'on mettra à jouer certain produit ? On se rappelle que L. Flessel, épéiste française et médaillée olympique, a été contrôlée positif à la coramine glucose...
- "Oui, qui contient un principe interdit..."
On nous a expliqué que ce n'était pas vraiment un produit dopant lourd et que c'est plutôt un stimulant. Faut-il revoir la liste des produits interdits ?
- "Je ne suis pas un expert dans ce domaine. il faut laisser les experts se débrouiller entre eux pour établir la liste, tout en respectant l'éthique de la pratique sportive et éviter ce que vous avez appelé "l'interprétation des règles". Quant au cas de L. Flessel, le kinésithérapeute a dit que ce fut une erreur de lui avoir donné cette plaquette."
Mais elle sera quand même condamnée ?
- "Elle risque de subir une sanction d'environ trois mois. J'espère pour elle qu'elle bénéficiera d'un sursis."
(source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 16 septembre 202)
Vous êtes le ministre des Sports. Pour expliquer à quoi servent ces assises nationales, vous dites qu'elles doivent créer les conditions - je vous cite - "d'un vrai dialogue pour réfléchir et proposer les évolutions permettant de relever collectivement les défis auxquels le sport français est confronté". Mais encore ? Plus concrètement, qu'est-ce que cela veut dire ?
" Cela veut dire également un processus. Vous avez rappelé la mise en place des groupes de travail. Mais ce sont également 26 états généraux en régions qui solliciteront les acteurs locaux du sport - les clubs, les collectivités locales, les représentants des fédérations - pour faire remonter à la fois leurs attentes mais également leurs propositions dans le cadre justement de ce que je vais appeler une modernisation du modèle fédéral en France et du mode d'organisation du sport français. Je vais vous en citer un exemple puisque vous le souhaitez : le Premier ministre qui parlait tout à l'heure sur votre antenne a fait de la décentralisation l'un des thèmes majeurs du Gouvernement. Le sport s'inscrit totalement dans cette démarche. Comment faire pour que l'Etat et les fédérations sportives soient au plus près des préoccupations des clubs locaux ? Aujourd'hui - je crois qu'il faut bien le dire - à la fois les services de l'Etat et les fédérations n'ont plus des modèles véritablement adaptés pour répondre aux besoins et aux sollicitations des clubs. Voilà par exemple une démarche de réflexion qui s'engage aujourd'hui et qui se terminera par une journée de synthèse le 8 décembre à Paris."
Ces assises vont-elles prendre des décisions ou proposer des directions ? En d'autres termes, va-t-on faire mousser ou va-t-on agir ?
"Des décisions : le fonds national de développement du sport qui injecte plus 1,3 milliard de francs par an sur de l'investissement pour construire des équipements sportifs est aujourd'hui remis en cause par une loi organique qui interdit finalement que ce genre de fonds, qui bénéficie d'un prélèvement sur le chiffre d'affaires de la Française des Jeux, puisse continuer. Nous allons trouver ensemble un autre support, une autre façon, peut-être sous la forme d'une fondation, d'aider le sport français pour se développer. Nous trouverons une solution pour le 8 décembre. Je vous ai parlé tout à l'heure de la décentralisation. Voilà un sujet qui demandera très certainement - parce qu'il n'y a pas que le sport qui nécessite de la décentralisation, les autres secteurs d'activité de notre pays le souhaitent également. Concernant la décentralisation, nous continuerons à avancer dans notre réflexion longtemps après sous forme d'expérimentations dans les régions et ensuite de généralisations. Donc, les deux : à la fois des dispositions immédiatement applicables et des sujets qui nécessiteront un peu plus de réflexion mais toujours en partenariat avec le mouvement sportif. C'est l'une des clés d'ailleurs de la réussite de ces états généraux du sport."
Les sujets épineux dans le sport : il y a le dopage - on peut en parler. On peut parler d'abord de l'argent roi, dans le football par exemple, qui dénature le sport et l'esprit du sport. Est-ce qu'on va prendre des décisions à ce niveau-là?
"Oui, il y a beaucoup d'argent dans le sport, il y a beaucoup d'argent dans le football, il y en a aussi dans la culture. Je crois qu'il faut voir les choses de façon générale. La seule spécificité du modèle français en termes d'organisation, c'est la solidarité qui existe entre sport professionnel et sport amateur. Et c'est cela qu'il faut préserver, bien évidemment sous l'égide de la fédération mais il faut qu'il y ait un flux financier et au-delà d'un flux financier, de relations étroites entre le monde professionnel et le monde amateur. C'est ce vers quoi nous allons aller dans la réflexion des états généraux. Je pense que tous les acteurs - et vous parliez du football, je crois que c'est un thème d'actualité : on voit bien que le football amateur demande beaucoup d'argent de la part du football professionnel. Le football professionnel, selon certains critères, est d'accord pour l'offrir au football amateur. Je crois que c'est vers ce genre de convention qu'il faut aller, des conventions qui sont validées, un diagnostic partagé par tous. Et ensuite trouver, si c'est nécessaire, des aménagements législatifs ou réglementaires pour adapter la loi à ce nouveau mode de conventionnement. Moi, sur ce sujet-là, football, rugby et d'autres sports collectifs, je suis persuadé que nous trouverons des solutions."
Autre problème qui gangrène le sport, c'est le dopage bien sûr. Est-ce que cela va être abordé ? Est-ce que c'est l'un des sujets ?
"C'est l'un des sujets. L'un des thèmes est "Sport et santé" et d'ailleurs ces six thèmes sont à égale importance dans la tenue des états généraux. Il n'y a pas un premier et un sixième. Ce sont six thèmes d'égale importance et bien évidemment, dans le thème "Sport et santé", nous aborderons ce sujet du dopage. Pour résumer, je dirai que la France dispose d'un outil législatif, d'un cadre législatif remarquable, très en avance d'ailleurs par rapport à nos partenaires européens ou mondiaux."
Cela veut dire qu'il ne faut pas changer la loi Buffet ?
" Cela veut dire qu'il faut faire en sorte que la loi Buffet soit appliquée. Or aujourd'hui, nous avons trois volets indissociables. Ce qu'on appelle le suivi médical : en résumé, il s'agit de vérifier qu'un athlète, sous la forme d'un certain nombre de contrôles ou d'examens médicaux, tout au long de l'année, est capable de supporter et l'entraînement et les compétitions auxquelles il est astreint. Le deuxième sujet, c'est le contrôle anti-dopage, le contrôle inopiné, fait lors de l'entraînement et le contrôle lors des compétitions. Ça, je crois que, bien évidemment, c'est la recherche des différents produits dopants qui va nous faire avancer dans ce domaine. Et le troisième sujet, qui est également indissociable, c'est la lutte contre les trafics de produits dopants. Là, je dirai qu'il y a, aujourd'hui, encore quelques manques. Je crois qu'il faut que les différents services de l'Etat concernés par ces trafics soient capables de coordonner leurs efforts ; je parle des Douanes par exemple mais également de la Justice et bien évidemment le ministère des Sports. Un décret devait être sorti, suite à la loi sur le dopage de 1999 ; cela n'a pas été le cas. J'ai engagé une réflexion et normalement, elle devrait aboutir très rapidement, avant la fin de l'automne, à la rédaction de ce fameux décret. Et le quatrième élément qui est très important, c'est une cohérence au niveau mondial de la lutte anti-dopage. C'est-à-dire que tout le monde s'appuie sur les mêmes textes pour lutter contre le dopage, ce qui n'est pas le cas encore aujourd'hui."
Deux questions d'actualité : un mot sur L. Flessel. Vous êtes un ancien champion d'escrime vous-même ; L. Flessel est convaincue de dopage. Est-ce qu'elle doit être sanctionnée?
"Elle est contrôlée positive et très vite d'ailleurs la fédération et - je crois - le kinésithérapeute qui lui a donné le produit interdit a bien évidemment dit que c'était de sa faute et entièrement de sa faute. C'est une faute grossière, une faute terrible qui entache le parcours de L. Flessel. L'examen de contrôle, la contre-expertise a bien évidemment confirmé la première analyse. Je crois qu'il faut que dans ce genre de domaine, la fédération internationale prenne connaissance du dossier et statue de façon à la fois concertée avec les différents acteurs - la fédération et l'athlète elle-même - et peut-être estime à un niveau juste la sanction qui devrait être appliquée à L. Flessel."
Vous appartenez à l'UMP ?
"Non, je n'appartiens pas à l'UMP ; je n'appartenais pas au RPR et aujourd'hui encore je n'appartiens pas à l'UMP."
Je voulais savoir ce que vous pensiez du nom "Maison bleue"
"On était vraiment dans la préparation des états généraux. Je n'ai pas eu le temps, véritablement, de me pencher sur cette information. Je l'ai vu effectivement dans les journaux. Je crois qu'au-delà de la "Maison bleue" dont vous me parliez, l'union a démontré, lors des législatives, qu'elle faisait la force d'un Gouvernement, Gouvernement qui s'appuie justement sur cette UMP pour avancer dans la réforme de l'Etat. Je crois qu'il faut continuer à avancer sur cette voie. Les Français le demandent. Ils demandent l'union ; ils demandent un Gouvernement qui s'appuie sur une majorité forte pour faire avancer les choses. Je crois que c'est la principale chose qu'il faut retenir de la création de l'UMP aujourd'hui."
(source http://www.jeunesse-sports.gouv.fr, le 18 septembre 2002)
- "Oui, pourquoi pas. Mais c'est surtout la possibilité pour l'ensemble du mouvement sportif, mais aussi les collectivités locales, les élus, les intervenants privés dans le domaine du sport de se réunir, de déterminer un diagnostic partagé du fonctionnement du sport en France et de pouvoir, le 8 décembre prochain, tracer de grandes lignes pour que l'organisation du sport, qui est assez originale par rapport aux pays européens ou au reste du monde, trouve sa voie, trouve de nouveaux modes de fonctionnement, toujours dans un respect du monde amateur et du monde professionnel. Pour l'instant, ces deux mondes se regardent un peu en chiens de faïence."
Le président d'honneur de ces états généraux est une personnalité forte et symbolique : P. Mazeaud.
- "C'est un peu le symbole de notre pratique sportive en France : à la fois l'aventure - on se souviendra de ses exploits en tant qu'himalayste - et puis aussi cette implication de l'Etat dans la pratique sportive."
C'est aussi un homme politique, membre du Conseil constitutionnel, ancien député.
- "Dans ce cadre, l'Etat est partenaire du mouvement sportif. C'est d'ailleurs dans cet esprit que nous organisons les états généraux : il s'agit bien d'un partenariat entre le mouvement sportif et l'Etat."
On met toujours en avant la fonction éducative du sport. Vous êtes ministre des Sports, et pas de la Jeunesse. Ce n'est pas embêtant ? Cela veut dire que la jeunesse n'est plus une priorité dans le sport ?
- "C'est un des éléments, mais le sport est pratiqué par les seniors, par les adultes, par toutes les catégories d'âge. Le fait d'avoir rapproché la Jeunesse de L. Ferry, de l'Education nationale, lui permet d'avoir un message clair. Cela nous a permis de clarifier les missions des uns et des autres."
Vous gardez un regard particulier sur cette fonction ?
- "Surtout sur la partie éducative du sport, bien évidemment."
Le sport dans les programmes scolaires : on est un pays où les enfants font du sport à l'école, mais en font plutôt moins que dans les autres. Peut-on améliorer cela ?
- "C'est vrai que la pratique sportive se fait surtout les clubs. On a de l'éducation physique à l'école et une certaine pratique sportive, mais c'est vrai que le socle des pratiques sportives se déroule plutôt dans les clubs. L'idée d'essayer d'augmenter le nombre d'heures, de faire en sorte que les enfants pratiquent plus de sport est un peu compliquée, car cela nous obligerait à modifier les rythmes scolaires - journée de quatre ou de cinq jours ? C'est une discussion que l'on pourra de nouveau avoir mais c'est très compliqué. Donc, je préfère avoir une démarche différente, qui est d'améliorer la pratique sportive périscolaire : quand l'enfant a terminé son temps scolaire, vers 16h30, on lui donne la possibilité de pratiquer un sport, grâce à des éducateurs venant des clubs."
Ce serait gratuit ? Parce que souvent, les clubs coûtent cher...
- "C'est pratiquement tout le temps gratuit. Les collectivités locales participent beaucoup à cet effort et c'est surtout un pont entre le club sportif et l'école."
Ce sont donc les éducateurs sportifs des clubs qui se déplaceront après les classes ?
- "Très souvent. C'est bien évidemment la collectivité, très souvent la commune, qui prend en charge le temps périscolaire et le fait que cet éducateur..."
Donc chaque enfant pourrait expérimenter une catégorie de sport, faire du tennis pendant une année et ensuite de l'escrime ?
- "C'est ce qui se passe déjà ; c'est ce que l'on appelle "les contrats éducatifs locaux". Il faut les renforcer et surtout créer ces passerelles entre l'école et le club sportif."
On a le sentiment, en France, que les équipements ne sont pas au niveau où ils pourraient l'être - les stades, les piscines... Peut-on mettre en place un plan pour qu'on rattrape un peu le niveau d'équipement que la population est en droit d'espérer ?
- "Ce sera typiquement un des sujets débattus pendant les états généraux. C'est ce que l'on appellera "l'aménagement du territoire en matière d'équipements sportifs". Nous manquons, c'est évident, d'équipements sportifs. Encore faut-il les implanter dans des bassins de vie, c'est-à-dire qu'il est hors de question que deux communes limitrophes construisent chacune leur piscine. Il faut travailler - et c'est le rôle de l'Etat -, tout en laissant leur liberté aux élus dans cette dynamique, dans cette initiative pour construire des équipements, mais l'Etat doit être là comme un régulateur, pour savoir où implanter pour que cet équipement puisse servir à une communauté de communes, avec une logique de loisirs, mais également de pratiques de compétition. C'est un des vrais enjeux dans les dix ans qui viennent, de création de cet aménagement du territoire. On a déjà des textes, mais ils sont peu appliqués dans les faits."
M.-G. Buffet avait fait de la lutte contre le dopage une de ses priorités ; j'imagine que le ministre et l'ancien sportif que vous êtes va continuer ce travail. Dans quelle direction lutter ? On est tous frappés, par exemple, que sur le Tour de France, il y a un nombre considérable d'asthmatiques... Ils ont tous des ordonnances de médecins longues comme le bras, ce qui est tout de même étonnant pour de grands cyclistes ! Pourquoi y a-t-il autant d'asthmatiques chez les grands sportifs ?
- "C'est aux experts de le dire ! Il y a trois éléments dans la lutte contre le dopage, qui reste bien évidemment une priorité : c'est le suivi médical, savoir à quel moment un sportif est capable de supporter un entraînement dur ou un rythme de compétition important, les contrôles dont vous avez parlés tout à l'heure et la lutte contre les trafics. On se rend compte que cela devient un trafic très lucratif et que les produits traversent les frontières comme si de rien n'était. [...] Ce sont trois volets indissociables. Pour cela, nous avons un cadre législatif bon, il faut simplement l'appliquer dans toute sa rigueur et surtout qu'il soit en cohérence avec ce qui se passe autour de nous, aux niveaux européen et mondial. Vous avez parlé des prises de produits interdits mais tolérés quand il y a une ordonnance ; j'attends beaucoup de la rédaction du code mondial antidopage qui, normalement, devrait apporter de la cohérence à la fois sur la liste des produits interdits et surtout dans leur mode de prescription. Ce code devrait être rédigé pour le printemps 2003 et vraiment, j'en attends beaucoup."
Ce code s'appliquera à tous, partout dans le monde et dans tous les sports ?
- "C'est en tout cas l'idée et l'objectif. Je pense que cela prendra du temps, mais c'est vraiment la solution."
Est-ce qu'on mettra à jouer certain produit ? On se rappelle que L. Flessel, épéiste française et médaillée olympique, a été contrôlée positif à la coramine glucose...
- "Oui, qui contient un principe interdit..."
On nous a expliqué que ce n'était pas vraiment un produit dopant lourd et que c'est plutôt un stimulant. Faut-il revoir la liste des produits interdits ?
- "Je ne suis pas un expert dans ce domaine. il faut laisser les experts se débrouiller entre eux pour établir la liste, tout en respectant l'éthique de la pratique sportive et éviter ce que vous avez appelé "l'interprétation des règles". Quant au cas de L. Flessel, le kinésithérapeute a dit que ce fut une erreur de lui avoir donné cette plaquette."
Mais elle sera quand même condamnée ?
- "Elle risque de subir une sanction d'environ trois mois. J'espère pour elle qu'elle bénéficiera d'un sursis."
(source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 16 septembre 202)
Vous êtes le ministre des Sports. Pour expliquer à quoi servent ces assises nationales, vous dites qu'elles doivent créer les conditions - je vous cite - "d'un vrai dialogue pour réfléchir et proposer les évolutions permettant de relever collectivement les défis auxquels le sport français est confronté". Mais encore ? Plus concrètement, qu'est-ce que cela veut dire ?
" Cela veut dire également un processus. Vous avez rappelé la mise en place des groupes de travail. Mais ce sont également 26 états généraux en régions qui solliciteront les acteurs locaux du sport - les clubs, les collectivités locales, les représentants des fédérations - pour faire remonter à la fois leurs attentes mais également leurs propositions dans le cadre justement de ce que je vais appeler une modernisation du modèle fédéral en France et du mode d'organisation du sport français. Je vais vous en citer un exemple puisque vous le souhaitez : le Premier ministre qui parlait tout à l'heure sur votre antenne a fait de la décentralisation l'un des thèmes majeurs du Gouvernement. Le sport s'inscrit totalement dans cette démarche. Comment faire pour que l'Etat et les fédérations sportives soient au plus près des préoccupations des clubs locaux ? Aujourd'hui - je crois qu'il faut bien le dire - à la fois les services de l'Etat et les fédérations n'ont plus des modèles véritablement adaptés pour répondre aux besoins et aux sollicitations des clubs. Voilà par exemple une démarche de réflexion qui s'engage aujourd'hui et qui se terminera par une journée de synthèse le 8 décembre à Paris."
Ces assises vont-elles prendre des décisions ou proposer des directions ? En d'autres termes, va-t-on faire mousser ou va-t-on agir ?
"Des décisions : le fonds national de développement du sport qui injecte plus 1,3 milliard de francs par an sur de l'investissement pour construire des équipements sportifs est aujourd'hui remis en cause par une loi organique qui interdit finalement que ce genre de fonds, qui bénéficie d'un prélèvement sur le chiffre d'affaires de la Française des Jeux, puisse continuer. Nous allons trouver ensemble un autre support, une autre façon, peut-être sous la forme d'une fondation, d'aider le sport français pour se développer. Nous trouverons une solution pour le 8 décembre. Je vous ai parlé tout à l'heure de la décentralisation. Voilà un sujet qui demandera très certainement - parce qu'il n'y a pas que le sport qui nécessite de la décentralisation, les autres secteurs d'activité de notre pays le souhaitent également. Concernant la décentralisation, nous continuerons à avancer dans notre réflexion longtemps après sous forme d'expérimentations dans les régions et ensuite de généralisations. Donc, les deux : à la fois des dispositions immédiatement applicables et des sujets qui nécessiteront un peu plus de réflexion mais toujours en partenariat avec le mouvement sportif. C'est l'une des clés d'ailleurs de la réussite de ces états généraux du sport."
Les sujets épineux dans le sport : il y a le dopage - on peut en parler. On peut parler d'abord de l'argent roi, dans le football par exemple, qui dénature le sport et l'esprit du sport. Est-ce qu'on va prendre des décisions à ce niveau-là?
"Oui, il y a beaucoup d'argent dans le sport, il y a beaucoup d'argent dans le football, il y en a aussi dans la culture. Je crois qu'il faut voir les choses de façon générale. La seule spécificité du modèle français en termes d'organisation, c'est la solidarité qui existe entre sport professionnel et sport amateur. Et c'est cela qu'il faut préserver, bien évidemment sous l'égide de la fédération mais il faut qu'il y ait un flux financier et au-delà d'un flux financier, de relations étroites entre le monde professionnel et le monde amateur. C'est ce vers quoi nous allons aller dans la réflexion des états généraux. Je pense que tous les acteurs - et vous parliez du football, je crois que c'est un thème d'actualité : on voit bien que le football amateur demande beaucoup d'argent de la part du football professionnel. Le football professionnel, selon certains critères, est d'accord pour l'offrir au football amateur. Je crois que c'est vers ce genre de convention qu'il faut aller, des conventions qui sont validées, un diagnostic partagé par tous. Et ensuite trouver, si c'est nécessaire, des aménagements législatifs ou réglementaires pour adapter la loi à ce nouveau mode de conventionnement. Moi, sur ce sujet-là, football, rugby et d'autres sports collectifs, je suis persuadé que nous trouverons des solutions."
Autre problème qui gangrène le sport, c'est le dopage bien sûr. Est-ce que cela va être abordé ? Est-ce que c'est l'un des sujets ?
"C'est l'un des sujets. L'un des thèmes est "Sport et santé" et d'ailleurs ces six thèmes sont à égale importance dans la tenue des états généraux. Il n'y a pas un premier et un sixième. Ce sont six thèmes d'égale importance et bien évidemment, dans le thème "Sport et santé", nous aborderons ce sujet du dopage. Pour résumer, je dirai que la France dispose d'un outil législatif, d'un cadre législatif remarquable, très en avance d'ailleurs par rapport à nos partenaires européens ou mondiaux."
Cela veut dire qu'il ne faut pas changer la loi Buffet ?
" Cela veut dire qu'il faut faire en sorte que la loi Buffet soit appliquée. Or aujourd'hui, nous avons trois volets indissociables. Ce qu'on appelle le suivi médical : en résumé, il s'agit de vérifier qu'un athlète, sous la forme d'un certain nombre de contrôles ou d'examens médicaux, tout au long de l'année, est capable de supporter et l'entraînement et les compétitions auxquelles il est astreint. Le deuxième sujet, c'est le contrôle anti-dopage, le contrôle inopiné, fait lors de l'entraînement et le contrôle lors des compétitions. Ça, je crois que, bien évidemment, c'est la recherche des différents produits dopants qui va nous faire avancer dans ce domaine. Et le troisième sujet, qui est également indissociable, c'est la lutte contre les trafics de produits dopants. Là, je dirai qu'il y a, aujourd'hui, encore quelques manques. Je crois qu'il faut que les différents services de l'Etat concernés par ces trafics soient capables de coordonner leurs efforts ; je parle des Douanes par exemple mais également de la Justice et bien évidemment le ministère des Sports. Un décret devait être sorti, suite à la loi sur le dopage de 1999 ; cela n'a pas été le cas. J'ai engagé une réflexion et normalement, elle devrait aboutir très rapidement, avant la fin de l'automne, à la rédaction de ce fameux décret. Et le quatrième élément qui est très important, c'est une cohérence au niveau mondial de la lutte anti-dopage. C'est-à-dire que tout le monde s'appuie sur les mêmes textes pour lutter contre le dopage, ce qui n'est pas le cas encore aujourd'hui."
Deux questions d'actualité : un mot sur L. Flessel. Vous êtes un ancien champion d'escrime vous-même ; L. Flessel est convaincue de dopage. Est-ce qu'elle doit être sanctionnée?
"Elle est contrôlée positive et très vite d'ailleurs la fédération et - je crois - le kinésithérapeute qui lui a donné le produit interdit a bien évidemment dit que c'était de sa faute et entièrement de sa faute. C'est une faute grossière, une faute terrible qui entache le parcours de L. Flessel. L'examen de contrôle, la contre-expertise a bien évidemment confirmé la première analyse. Je crois qu'il faut que dans ce genre de domaine, la fédération internationale prenne connaissance du dossier et statue de façon à la fois concertée avec les différents acteurs - la fédération et l'athlète elle-même - et peut-être estime à un niveau juste la sanction qui devrait être appliquée à L. Flessel."
Vous appartenez à l'UMP ?
"Non, je n'appartiens pas à l'UMP ; je n'appartenais pas au RPR et aujourd'hui encore je n'appartiens pas à l'UMP."
Je voulais savoir ce que vous pensiez du nom "Maison bleue"
"On était vraiment dans la préparation des états généraux. Je n'ai pas eu le temps, véritablement, de me pencher sur cette information. Je l'ai vu effectivement dans les journaux. Je crois qu'au-delà de la "Maison bleue" dont vous me parliez, l'union a démontré, lors des législatives, qu'elle faisait la force d'un Gouvernement, Gouvernement qui s'appuie justement sur cette UMP pour avancer dans la réforme de l'Etat. Je crois qu'il faut continuer à avancer sur cette voie. Les Français le demandent. Ils demandent l'union ; ils demandent un Gouvernement qui s'appuie sur une majorité forte pour faire avancer les choses. Je crois que c'est la principale chose qu'il faut retenir de la création de l'UMP aujourd'hui."
(source http://www.jeunesse-sports.gouv.fr, le 18 septembre 2002)