Texte intégral
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, conformément aux dispositions du code électoral, trois élections générales doivent avoir lieu en mars 1998 :
- le renouvellement de l'Assemblée nationale, celui des conseils régionaux et l'élection des conseillers généraux de la série de cantons renouvelée en 1992.
Il s'y ajoute, dans la collectivité territoriale de Corse, le renouvellement de l'Assemblée de Corse.
Seuls deux conseils généraux ne sont pas concernés par le rendez-vous de mars 1998 :
il s'agit, d'une part, de celui de la collectivité territoriale de Mayotte et, d'autre part, de celui de la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon.
Quoi qu'il en soit, la concomitance dans le même mois de trois consultations générales est sans précédent dans notre pays.
Il est clair que ces trois élections ne pourraient se dérouler simultanément sans soulever des difficultés matérielles extrêmement graves ni susciter des risques sérieux de confusion dans l'esprit des électeurs.
Par ailleurs, il faut maintenir à sa date normale le renouvellement de l'Assemblée nationale.
Tout le monde est d'accord sur ce constat, ce qui implique le report de l'une ou des deux consultations locales, conformément à un usage qui a déjà donné lieu à plusieurs précédents sous la Ve République.
C'est sur les modalités de ce report que se sont manifestées, ici ou là, des divergences d'appréciation.
La prorogation de la durée du mandat d'une catégorie d'élus locaux et le report consécutif de la date de leur élection constituent une entorse au principe du renouvellement à intervalles réguliers des assemblées délibérantes des collectivités locales qui résulte lui-même du principe inscrit à l'article 72 de la Constitution, selon lequel les collectivités territoriales de la République " s'administrent librement par des conseils élus ".
Ce faisant, le législateur doit donc s'assurer qu'il n'excède pas les limites définies par le cadre constitutionnel.
A cet égard, la jurisprudence du Conseil constitutionnel reste peu abondante. Ce dernier, en effet, n'a été saisi qu'à cinq reprises de textes de cette nature et les seules décisions intervenues en ce domaine sont les suivantes :
la décision du 5 janvier 1988 à propos de la loi du 8 janvier 1988 prorogeant de six mois le mandat des conseillers généraux renouvelables en 1988 ;
la décision du 6 décembre 1990 relative à la loi du 11 décembre 1990 organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux ;
la décision du 13 janvier 1994 concernant la loi du 18 janvier 1994 rétablissant le renouvellement triennal par moitié des conseils généraux ;
la décision du 6 juillet 1994 à propos de la loi du 15 juillet 1994 relative à la date du renouvellement des conseillers municipaux ; enfin,
la décision du 6 février 1996 relative à la loi organique de la même date relative au renouvellement des membres de l'assemblée territoriale de la Polynésie française.
Tout en rappelant que le législateur reste compétent pour déterminer le régime électoral des assemblées locales, le Conseil constitutionnel a énoncé cinq règles dont le respect conditionne la conformité de la mesure aux principes constitutionnels.
Premièrement, le report de l'élection doit répondre à un motif d'intérêt général ;
deuxièmement, il doit revêtir un caractère exceptionnel ;
troisièmement, la durée de la prorogation du mandat doit être limitée ;
quatrièmement, le choix opéré par le législateur ne doit pas être inapproprié aux objectifs qu'il s'est fixés ;
enfin, cinquièmement, ce choix ne doit créer, ni dans son principe ni dans ses modalités matérielles d'organisation, de confusion dans l'esprit des électeurs avec d'autres consultations électorales.
Mais il va de soi que le législateur doit aussi tenir compte des circonstances.
Certaines peuvent avoir un caractère permanent. Il serait, en effet, particulièrement inopportun, par exemple, d'organiser des élections durant les mois de juillet et d'août.
D'autres tiennent à des données plus ponctuelles. C'est ainsi, des élections doivent se tenir en septembre 1998, pour renouveler les sénateurs de la série A.
La participation de plein droit des conseillers régionaux et généraux aux collèges électoraux sénatoriaux exclut que des élections locales se tiennent en septembre.
Ces données de fait et ces principes m'ont conduit à solliciter l'avis du Conseil d'Etat. L'assemblée générale du Conseil d'Etat a rendu son avis le 30 janvier dernier.
Elle n'a relevé aucun obstacle constitutionnel à deux formules d'aménagement du calendrier : l'une consisterait à reporter les élections régionales et cantonales au mois de juin 1998 ; l'autre maintiendrait la date des élections régionales au mois de mars, en même temps que les élections législatives, et ne décalerait en juin que les seules élections cantonales.
En revanche, et il est important de le souligner, le Conseil d'Etat a exprimé les plus vives réserves à l'égard d'une solution qui impliquerait d'organiser tout ou partie des scrutins locaux à une date postérieure à celle des élections sénatoriales de septembre.
S'il est vrai que des prorogations de mandat d'importance comparable ont été pratiquées dans le passé, une mesure identique, souligne le Conseil d'Etat, aurait pour conséquence, en 1998, que participeraient aux élections sénatoriales un certain nombre de " grands électeurs " maintenus en fonction plusieurs mois après la fin normale de leur mandat.
Elle mettrait donc en cause, toujours selon le Conseil d'Etat, pour l'élection du Sénat, l'application du principe du droit au suffrage garanti par l'article 3 de la Constitution.
C'est à la lumière des observations ainsi formulées par le Conseil d'Etat que le Gouvernement a arrêté son choix, qui consiste à vous proposer le simple report en juin de la date des seules élections cantonales.
Ce faisant, le Gouvernement est motivé par un double souci : il souhaite, d'une part, procéder à une modification a minima et, d'autre part, limiter les désagréments et les contraintes qui peuvent en résulter pour les électeurs.
Ce dispositif est, en outre, de nature à assurer la meilleure participation aux élections régionales, qui seraient couplées avec le rendez-vous politique essentiel que constitue l'élection des députés.
Telles sont donc les dispositions essentielles qui sont prévues dans le présent projet de loi et qui figurent à l'article 1er.
Les trois autres mesures mentionnées dans ce texte n'en sont que les conséquences directes.
En premier lieu, le second alinéa de l'article 1er dispose que le renouvellement ultérieur de la série des conseillers généraux affectée par le report aura lieu en mars 2004, et ce afin de rétablir la périodicité normale des élections cantonales.
En second lieu, l'article 2 traite de la période durant laquelle peuvent être recueillis des fonds en vue de la campagne des candidats aux élections cantonales, en portant la durée de cette période de douze à quinze mois.
Toutefois, afin de ne pas pénaliser les candidats ayant engagé des dépenses de campagne dès le 1er mars 1997, comme ils étaient fondés à le faire avant que soit décidé le report de la date des élections cantonales, il est précisé que les comptes de campagne ne devront retracer que les dépenses engagées au cours de l'année précédant la date effective du scrutin.
Ces dispositions ne sont que le " décalque " de celles qui ont été insérées dans la loi du 15 juillet 1994 reportant la date des élections municipales de 1995 ; elles avaient, je le rappelle, recueilli l'aval du Conseil constitutionnel.
En troisième lieu, le dernier article du projet de loi vise à reporter après le second tour des élections législatives la date de la réunion de plein droit des conseils régionaux.
Au cours de cette réunion, en effet, doivent notamment être désignés le président et la commission permanente de chaque assemblée régionale.
Il importe que ces désignations puissent s'opérer dans la sérénité, sans possibilité d'interférence avec le déroulement de la campagne électorale en vue du second tour des élections législatives.
Telles sont, brièvement analysées, mesdames, messieurs les sénateurs, les dispositions du projet de loi sur lequel le Gouvernement vous invite maintenant à délibérer.
(Source http://www.senat.gouv.fr, le 19 février 2002)
- le renouvellement de l'Assemblée nationale, celui des conseils régionaux et l'élection des conseillers généraux de la série de cantons renouvelée en 1992.
Il s'y ajoute, dans la collectivité territoriale de Corse, le renouvellement de l'Assemblée de Corse.
Seuls deux conseils généraux ne sont pas concernés par le rendez-vous de mars 1998 :
il s'agit, d'une part, de celui de la collectivité territoriale de Mayotte et, d'autre part, de celui de la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon.
Quoi qu'il en soit, la concomitance dans le même mois de trois consultations générales est sans précédent dans notre pays.
Il est clair que ces trois élections ne pourraient se dérouler simultanément sans soulever des difficultés matérielles extrêmement graves ni susciter des risques sérieux de confusion dans l'esprit des électeurs.
Par ailleurs, il faut maintenir à sa date normale le renouvellement de l'Assemblée nationale.
Tout le monde est d'accord sur ce constat, ce qui implique le report de l'une ou des deux consultations locales, conformément à un usage qui a déjà donné lieu à plusieurs précédents sous la Ve République.
C'est sur les modalités de ce report que se sont manifestées, ici ou là, des divergences d'appréciation.
La prorogation de la durée du mandat d'une catégorie d'élus locaux et le report consécutif de la date de leur élection constituent une entorse au principe du renouvellement à intervalles réguliers des assemblées délibérantes des collectivités locales qui résulte lui-même du principe inscrit à l'article 72 de la Constitution, selon lequel les collectivités territoriales de la République " s'administrent librement par des conseils élus ".
Ce faisant, le législateur doit donc s'assurer qu'il n'excède pas les limites définies par le cadre constitutionnel.
A cet égard, la jurisprudence du Conseil constitutionnel reste peu abondante. Ce dernier, en effet, n'a été saisi qu'à cinq reprises de textes de cette nature et les seules décisions intervenues en ce domaine sont les suivantes :
la décision du 5 janvier 1988 à propos de la loi du 8 janvier 1988 prorogeant de six mois le mandat des conseillers généraux renouvelables en 1988 ;
la décision du 6 décembre 1990 relative à la loi du 11 décembre 1990 organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux ;
la décision du 13 janvier 1994 concernant la loi du 18 janvier 1994 rétablissant le renouvellement triennal par moitié des conseils généraux ;
la décision du 6 juillet 1994 à propos de la loi du 15 juillet 1994 relative à la date du renouvellement des conseillers municipaux ; enfin,
la décision du 6 février 1996 relative à la loi organique de la même date relative au renouvellement des membres de l'assemblée territoriale de la Polynésie française.
Tout en rappelant que le législateur reste compétent pour déterminer le régime électoral des assemblées locales, le Conseil constitutionnel a énoncé cinq règles dont le respect conditionne la conformité de la mesure aux principes constitutionnels.
Premièrement, le report de l'élection doit répondre à un motif d'intérêt général ;
deuxièmement, il doit revêtir un caractère exceptionnel ;
troisièmement, la durée de la prorogation du mandat doit être limitée ;
quatrièmement, le choix opéré par le législateur ne doit pas être inapproprié aux objectifs qu'il s'est fixés ;
enfin, cinquièmement, ce choix ne doit créer, ni dans son principe ni dans ses modalités matérielles d'organisation, de confusion dans l'esprit des électeurs avec d'autres consultations électorales.
Mais il va de soi que le législateur doit aussi tenir compte des circonstances.
Certaines peuvent avoir un caractère permanent. Il serait, en effet, particulièrement inopportun, par exemple, d'organiser des élections durant les mois de juillet et d'août.
D'autres tiennent à des données plus ponctuelles. C'est ainsi, des élections doivent se tenir en septembre 1998, pour renouveler les sénateurs de la série A.
La participation de plein droit des conseillers régionaux et généraux aux collèges électoraux sénatoriaux exclut que des élections locales se tiennent en septembre.
Ces données de fait et ces principes m'ont conduit à solliciter l'avis du Conseil d'Etat. L'assemblée générale du Conseil d'Etat a rendu son avis le 30 janvier dernier.
Elle n'a relevé aucun obstacle constitutionnel à deux formules d'aménagement du calendrier : l'une consisterait à reporter les élections régionales et cantonales au mois de juin 1998 ; l'autre maintiendrait la date des élections régionales au mois de mars, en même temps que les élections législatives, et ne décalerait en juin que les seules élections cantonales.
En revanche, et il est important de le souligner, le Conseil d'Etat a exprimé les plus vives réserves à l'égard d'une solution qui impliquerait d'organiser tout ou partie des scrutins locaux à une date postérieure à celle des élections sénatoriales de septembre.
S'il est vrai que des prorogations de mandat d'importance comparable ont été pratiquées dans le passé, une mesure identique, souligne le Conseil d'Etat, aurait pour conséquence, en 1998, que participeraient aux élections sénatoriales un certain nombre de " grands électeurs " maintenus en fonction plusieurs mois après la fin normale de leur mandat.
Elle mettrait donc en cause, toujours selon le Conseil d'Etat, pour l'élection du Sénat, l'application du principe du droit au suffrage garanti par l'article 3 de la Constitution.
C'est à la lumière des observations ainsi formulées par le Conseil d'Etat que le Gouvernement a arrêté son choix, qui consiste à vous proposer le simple report en juin de la date des seules élections cantonales.
Ce faisant, le Gouvernement est motivé par un double souci : il souhaite, d'une part, procéder à une modification a minima et, d'autre part, limiter les désagréments et les contraintes qui peuvent en résulter pour les électeurs.
Ce dispositif est, en outre, de nature à assurer la meilleure participation aux élections régionales, qui seraient couplées avec le rendez-vous politique essentiel que constitue l'élection des députés.
Telles sont donc les dispositions essentielles qui sont prévues dans le présent projet de loi et qui figurent à l'article 1er.
Les trois autres mesures mentionnées dans ce texte n'en sont que les conséquences directes.
En premier lieu, le second alinéa de l'article 1er dispose que le renouvellement ultérieur de la série des conseillers généraux affectée par le report aura lieu en mars 2004, et ce afin de rétablir la périodicité normale des élections cantonales.
En second lieu, l'article 2 traite de la période durant laquelle peuvent être recueillis des fonds en vue de la campagne des candidats aux élections cantonales, en portant la durée de cette période de douze à quinze mois.
Toutefois, afin de ne pas pénaliser les candidats ayant engagé des dépenses de campagne dès le 1er mars 1997, comme ils étaient fondés à le faire avant que soit décidé le report de la date des élections cantonales, il est précisé que les comptes de campagne ne devront retracer que les dépenses engagées au cours de l'année précédant la date effective du scrutin.
Ces dispositions ne sont que le " décalque " de celles qui ont été insérées dans la loi du 15 juillet 1994 reportant la date des élections municipales de 1995 ; elles avaient, je le rappelle, recueilli l'aval du Conseil constitutionnel.
En troisième lieu, le dernier article du projet de loi vise à reporter après le second tour des élections législatives la date de la réunion de plein droit des conseils régionaux.
Au cours de cette réunion, en effet, doivent notamment être désignés le président et la commission permanente de chaque assemblée régionale.
Il importe que ces désignations puissent s'opérer dans la sérénité, sans possibilité d'interférence avec le déroulement de la campagne électorale en vue du second tour des élections législatives.
Telles sont, brièvement analysées, mesdames, messieurs les sénateurs, les dispositions du projet de loi sur lequel le Gouvernement vous invite maintenant à délibérer.
(Source http://www.senat.gouv.fr, le 19 février 2002)