Interview de M. Jacques Barrot, président du groupe parlementaire UMP à l'Assemblée nationale, à RTL le 30 septembre 2002, sur le résultat du premier tour de l'élection municipale à Vitrolles, les journées parlementaires de l'UMP, la situation sociale et l'éventuel changement de dénomination de l'UMP.

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Circonstance : Journée parlementaire de l'UMP à Paris le 30 septembre 2002

Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

R. Elkrief.- A Vitrolles, est-ce que vous renvoyez "l'ascenseur de la présidentielle" ? C'est l'expression du candidat de la gauche qui est arrivé devant C. Mégret. Tout simplement, est-ce que vous appelez à voter pour le candidat socialiste contre C. Mégret ?
- "Il faut que les responsables locaux de l'UMP choisissent la meilleure stratégie pour faire barrage à un nouvel avatar d'un scrutin qui conduit aux extrêmes, parce qu'il y a eu division à droite et à gauche, parce que le choix des candidats dans les élections municipales doit être extrêmement bien fait. A cet égard, l'UMP, qui permet de regrouper l'ensemble des forces de droite et du centre, permettra à l'avenir, je pense, de faire de très bons choix."
Mais votre conseil, aujourd'hui, à ceux qui restent et aux électeurs de Vitrolles ?
- "Je ne suis pas électeur de Vitrolles, donc je ne peux pas dire quelle est la meilleure stratégie. Une fois, le candidat de droite s'est retirée, une autre fois, il s'est maintenu et malheureusement, dans les deux cas, cela n'a pas empêché l'extrême droite. Ce qu'il faut, c'est être efficace. C'est en effet souhaiter que Vitrolles puisse retrouver une vie vraiment démocratique telle que nous l'avons souhaitée, telle que les Français l'ont souhaitée massivement au second tour de l'élection présidentielle."
Comprenne qui pourra... Les électeurs comprendront à Vitrolles ?
- "Je regrette, nous sommes dans un pays décentralisé. Il faut aussi que les responsables de l'UMP locale fassent des propositions et la position sera connue clairement. Il ne s'agit pas de tergiverser, il s'agit simplement, pour un responsable que je suis, ce matin, de laisser un peu aussi les régionaux de l'étape voir quelle est la meilleure stratégie, pour une finalité que nous connaissons, qui est celle de trouver dans ce pays le moyen d'éliminer ces tentations extrémistes qui ne mènent à rien."
Voilà qui est plus clair. On parle aussi de la tenue, aujourd'hui à Paris, de vos journées parlementaires, les premières de l'UMP. C'est un méga groupe de 365 députés.
- "Vous pouvez même en rajouter un : 366."
366, pardon. Votre objectif, aujourd'hui, va-t-il être de calmer les impatients, les originaux, les effrontés ? Allez-vous leur dire "Attention ! Marchez droit, sinon ça va être difficile !" ?
- "Non, c'est une approche beaucoup plus positive. Ce que je veux créer, c'est une relation très interactive, très dynamique entre l'exécutif et le législatif. Trop longtemps, les gouvernements ont eu face à eux des groupes parlementaires en quelque sorte divisés, ou tout au moins très différents les uns des autres. Et d'une certaine manière, le Gouvernement a négocié avec chacun des groupes. Aujourd'hui, le Gouvernement est face à une groupe qui rassemble l'ensemble de sa majorité. Donc, on peut créer des liens, si je puis dire, de vis-à-vis. Il faut que les ministres - et ils le feront au cours des quatre ateliers qui auront lieu aujourd'hui - répondent à des questions concrètes, expliquent.. Je veux dire, "écoutent" les parlementaires et puissent leur expliquer ce qu'ils veulent faire."
C'est pas un lapsus, ça ?
- "C'est un lapsus qui montre bien les vieux penchants qu'il faut absolument combattre : d'abord écoute du Gouvernement, car nos réunions sont prévues de telle manière que les députés posent des questions avant d'écouter les grandes homélies gouvernementales."
Il y aura des députés qui, on le sait déjà, dans la discussion budgétaire par exemple, trouvent que la réduction du nombre de fonctionnaires n'est pas suffisante, certains pensent qu'il faut supprimer l'impôt sur la fortune. On sent bien que dans un grand groupe comme celui-là, il y a des plus libéraux, des moins libéraux, il y a un certain nombre de tensions qui peuvent exister.
- "Oui, mais nous avons une chance : nous avons été élus tous ensemble sur un projet d'alternance pour dynamiser la France, sortir ce pays de tous les carcans, de tous les règlements qui étouffent l'initiative - l'initiative économique mais aussi l'initiative sociale. Nous n'allons pas recommencer avec les problématiques d'hier ou d'avant hier. L'exemple, ce n'est pas d'essayer de freiner artificiellement les licenciements, c'est de prévenir les licenciements. Il faut changer les problématiques. Je suis frappé de voir combien il y a de convergences au sein de cet ensemble UMP, parce que les gens ont été élus sur un vrai projet, sur un cap, sur l'idéal d'une France dynamique."
On reste sur les licenciements parce que c'est un des problèmes principaux, cruciaux. Le chômage a augmenté légèrement, des plans sociaux s'annoncent... On a parlé d'un groupe de travail pour prévenir les licenciements en amont. Cela va-t-il exister ?
- "Nous avons décidé de faire confiance au dialogue social. Dans une entreprise, plutôt que d'attendre les catastrophes, il faut, quelques années avant, quand on sent les mutations technologiques qui vont poser problème quelques années après, on peut imaginer une vie contractuelle qui fait que l'on commence à réfléchir aux salariés qui doivent compléter leur formation pour pouvoir ensuite affronter les changements sans peur. On peut créer au sein de l'entreprise des réserves qui permettront, le moment venu, s'il doit y avoir licenciements, de leur offrir des primes qui soient plus intéressantes."
Ce que vous décrivez, c'est quand la situation est assez calme et apaisée, on peut prévoir alors. Mais là, ça s'accélère, il y a des plans sociaux très importants...
- "Mais nous sommes plongés dans une économie de marché où les changements, hélas, seront nombreux. Il faut que les salariés abordent ces changements sans peur, en ayant la possibilité de pouvoir trouver le réemploi facile suivent leurs compétences. Encore faut-il valider les compétences et leur donner à tous un accès à la formation continue."
Cette semaine est une semaine sociale assez chargée. Il y a la discussion des 35 heures à l'Assemblée, il y a aussi une grande manifestation contre les privatisations qui doit se dérouler le 3 octobre à l'appel de tous les syndicats. S'il y a beaucoup de monde, le 3 octobre, cela modifiera-t-il votre calendrier de privatisations ?
- "Cette manifestation sera l'expression d'une certaine peur, et on le comprend. Les gens ont peur d'un avenir qui est un peu incertain. Mais en même temps, on ne va pas changer une démarche qui paraît pleine de justifications. Quand on voit combien une entreprise sous statut public comme France Télécom a été gênée par ce statut pour faire des acquisitions qui auraient pu être faites dans de bien meilleures conditions, si elle a avait eu un statut privé."
Donc, on ne change rien même s'il y a beaucoup de salariés dans les rues ?
- "On dialogue, on concerte, on explique. Evidemment, les gens peuvent avoir peur, si on ne leur dit pas où on va. Je crois qu'il y a chez le Premier ministre, J.-P. Raffarin, et au sein de notre majorité, suffisamment de raisons d'expliquer que nous ne sommes pas des idéologues mais des pragmatiques, et que ce que nous voulons, c'est essayer d'appliquer en France ce qui marche ailleurs."
Dernière question : la "Maison Bleue", ça vous plaît comme nom pour l'UMP ?
- "Je verrais bien ma permanence au Puy s'appeler la Maison Bleue, parce que la Maison c'est un concept très riche. Une maison ça rassemble, c'est un peu une ruche et, en même temps, il faut la colorier un peu, c'est joli le bleu de France ! Maintenant, pour appeler le parti lui-même, on peut très bien imaginer que la lettre P, au lieu de correspondre à l'élection présidentielle elle-même, qui est ponctuelle, puisse correspondre à un concept de progrès. Car c'est le progrès que nous voulons."
L'Union pour le progrès ?
- "L'Union pour une Majorité de Progrès."
(Source :premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 30 sept 2002