Déclaration de M. François Hollande, premier secrétaire du PS, sur sur les raisons de la défaite de la gauche et des socialistes aux élections de 2002 et sur le débat nécessaire à la rénovation du parti socialiste, à Lomme (Nord) le 14 septembre 2002.

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Circonstance : Université de rentrée de la fédération du Nord du PS, à Lomme le 14 septembre 2002

Texte intégral

Cher(e)s camarades,
Il est nécessaire, après le choc le choc du 21 avril, d'engager un débat approfondi, authentique, franc, loyal, respectant toutes les idées, toutes les personnes, sachant faire la part des choses, mesurer les acquis, les avancées. Et également exprimer avec netteté les manquements, les erreurs et parfois les limites de toute action humaine. C'est ce qu'on attend dans le Nord, mais aussi partout ailleurs, des socialistes. Je suis d'abord venu pour écouter. J'ai même été incité à le faire au point que je me suis même interrogé : devais-je parler en définitive ?
Sauf en tant que militant. J'en suis un, je le confirme car dans ce Parti, il n'y a que des militants ou il ne devrait y avoir que des militants !
Nous aurions pu, au lendemain d'une défaite, convoquer un Congrès et puis attendre le vote des militants, les motions et les conclusions du Congrès qui, parfois, ne débouchent que sur peu. Nous aurions pu convoquer nous aussi des Etats Généraux et faire des propositions statutaires qui, souvent, restent lettre morte.
Nous avons voulu faire différemment. D'abord parce que ce n'est pas n'importe quelle défaite qui nous a frappés. C'est une défaite lourde, dure, cruelle parce qu'inattendue. Nous avons eu dans notre histoire des échecs hélas programmés. Mais celui là convenons en, ne l'était pas. Je me souviens encore de cette formidable réunion publique à Lille, où vous étiez vous et tant d'autres, où nous partions avec cette ferme espérance que nous allions l'emporter. Nous sentions qu'il y avait dans notre pays, sans doute des inquiétudes et des frustrations, mais aussi cette espérance de nous voir poursuivre et amplifier, derrière Lionel JOSPIN, l'action commencée.
Puis cela ne s'est pas produit et nous devons donc en mesurer toutes les causes, en comprendre toutes les origines. Savoir s'il s'agissait simplement de facteurs conjoncturels liés à une campagne, à une division de la gauche - une de trop, après d'autres - ou s' il y avait dans notre échec des causes plus profondes, des tendances plus lourdes qui justifient aujourd'hui l'analyse implacable de notre échec.
Ce débat, nous l'avons voulu parce que la défaite n'est pas seulement celle de la gauche. C'est une défaite de la démocratie. Car, lorsqu'un tel évènement se produit (ce traumatisme de 21 avril), il s'agit d'une crise politique profonde que nous n'avons pas forcément voulu regarder en face quand il en était encore tant. Je pense aux élections municipales de 2001 et à cette montée de l'abstention, cette indifférence civique, ce niveau de l'extrême droite que nous pensions impossible à retrouver après ce qui s'était produit et qui s'était traduit par leur division, leurs querelles et leur incapacité à formuler la moindre proposition républicaine. Nous savions bien que ce mouvement existait, que ce terreau demeurait mais nous ne pensions pas qu'il pouvait encore atteindre un pallier de plus.
Et puis, il y a aussi cette succession des alternances depuis plus de 20 ans, qui fait que l'opinion change comme on change de produit, comme on change de chaîne à la Télévision.
Alors il y a cette analyse à mener. Nous devons la faire comme socialistes puisque nous avons été les premiers frappés. Nous devons la faire parce que nous sommes la force principale de la gauche et que nous avons de nouveau vocation à la rassembler et à la construire. Mais nous devons également la faire comme démocrates et comme républicains parce que c'est de nous que viendra l'avenir de la politique.
Je suis frappé depuis l'arrivée de la droite, par le fait qu'elle n'a pas compris l'origine de sa victoire. Elle pense avoir gagné sur son programme, sur ces idées et même sur son candidat. Elle pense que les suffrages qui se sont portés sur lui, le 5 mai - 82 %, les nôtres aussi - ont accordé je ne sais quel brevet de bonne conduite, et je n'ose pas dire : de certificat d'honnêteté. Mais la droite est incapable de comprendre qu'elle a été bénéficiaire d'un concours de circonstances mais que les phénomènes la menacent tout autant : l'extrême droite, l'abstention, le retrait civique, la succession des alternances.
C'est pourquoi notre débat n'est pas simplement lié à une nécessité de repartir.
Ce débat est indispensable pour le socialisme, pour la gauche, et pour la démocratie. C'est pourquoi, vous les militants et les sympathisants du PS, vous devez prendre toute votre place. C'est vrai qu'il y aura un congrès mais ce congrès dépend d'abord de vous. Qui vote dans les congrès ? Les militants. C'est vrai que quelquefois, ils votent sur des motions qu'ils n'ont pas eux même écrites. Je l'admets. Quelquefois ils votent même sur des motions qu'ils n'ont pas lues. Cela peut arriver et je le dis souvent : s'ils les avaient lues, ils ne les voteraient pas !
Donc, il faut que du débat militant, sortent les conclusions qui sont indispensables. Je ne dis pas que nous penserons la même chose, sinon nous ne serions pas socialistes. Mais nous devons faire en sorte que le constat qui à été fait, bien qu'il puisse mettre l'accent sur tel ou tel facteur, ou sur telle ou telle cause, soit encore approfondi. Il doit venir dans le débat militant et c'est pourquoi nous ne sommes encore qu'au début du processus.
Doit venir le temps des propositions, de toutes les propositions. Elles doivent être nombreuses et doivent porter - et les trois thèmes ont été choisis à juste raison - sur les trois enjeux. Après une défaite, après une crise de la politique, après la victoire de la droite dans les conditions que l'on sait, pour cinq ans, nous avons une triple exigence devant nous.
Nous devons d'abord former une grande force socialiste, ce qui suppose de la rénover profondément. Nous devons ensuite fixer clairement notre identité : que signifie être socialiste au début d'un siècle nouveau. Et enfin, nous devons assumer, parce que c'est notre responsabilité, la tâche de l'espérance, de l'alternance, celle que nous devons porter dans les prochaines années.
D'abord nous devons rénover notre formation politique. Cette formation politique - et je parle devant Pierre Mauroy qui a contribué à sa fondation - a toujours eu comme objectif d'être la grande force de la gauche française. Non pas la seule. Au congrès d'Epinay, nous avions le PC qui était plus fort que nous et nous devions d'abord devenir la première force de la gauche pour lui permettre d'être la force de gouvernement.
Ce fut le travail de François Mitterrand et de beaucoup d'autres avec Pierre Mauroy. Mais aujourd'hui, nous devons faire le constat que cette grande force socialiste que nous espérions n'a jamais été capable de dépasser 25 à 30 % des suffrages dans les meilleures années. Cette grande force socialiste n'a pas su véritablement s'ouvrir, sauf dans les grandes fédérations comme la vôtre, à des catégories sociales que nous avons vocation à représenter. Cette grande formation politique que nous appelions de nos vux, il y a maintenant plus de trente ans n'a pas non plus été capable d'occuper tout l'espace à gauche. Cette grande formation politique est donc encore à construire et à rénover, et il faudra aller aussi loin que vous le demandez sur la meilleure façon d'associer les militants. Quand nous sommes dans l'opposition, généralement, les voix se font connaître mais quand nous sommes aux responsabilités, c'est parfois plus difficile.
Mais essayons d'avoir un parti qui consulte régulièrement ses militants. Pas sur des questions qui seraient seulement théoriques mais sur des questions qui justifient l'intervention régulière de la direction du PS. Et il y en a beaucoup. Sur le plan international, ai-je besoin d'insister sur la gravité du moment que nous traversons et qui appelle aussi une large explication entre nous sur le rapport à la mondialisation où nous devons absolument fixer nos objectifs, notamment à la veille de grandes conférences internationales, sur l'Europe où nous aurons à prendre collectivement des décisions, sur l'élargissement et l'approfondissement de la construction européenne.
Voilà donc comment un parti doit associer ses adhérents aux décisions qu'il a à prendre, et bien au-delà simplement d'un congrès. Rénover le PS suppose d'être capable d'être présents sur tous les territoires, présents sur tous les lieux de vie, d'être capable de représenter toute la société, de renouveler les générations - et vous êtes sans doute là plus en avance que d'autres - d'être capables de faire la parité en résistant à des pressions, nombreuses, ou à des situations de fait. C'est aussi cela faire des choix.
Je suis donc prêt à entendre tout ce qui se dira dans ce débat. Non pas simplement en forme de critiques, acceptons-le, non pas simplement en termes de regrets, non pas simplement en termes d'anticipation lorsque nous reviendrons au pouvoir.
Comment aujourd'hui le PS peut-il rayonner ? ce qui est indispensable. Combien avons-nous d'adhérents ? Heureusement, nous avons enregistré nombre de nouvelles adhésions au lendemain du 21 avril. Mais enfin, nous n'allons pas attendre les défaites pour se renforcer. Donc combien avons-nous d'adhérents ? 110 000, 120 000, à l'échelle d'un pays comme le nôtre ! Nous devons nous ouvrir davantage. Mais il nous faut accueillir mieux que nous le faisons ces nouveaux adhérents. Nous devons avoir davantage de relais, là où se passent les évènements qui font quelquefois l'actualité.
Nous devons avoir des relais syndicaux aussi. C'est une des grandes faiblesses du mouvement socialiste français par rapport à ses homologues européens que de ne pas avoir de liens - pas forcément organiques, c'est un temps révolu - mais de liens physiques, affectifs et intellectuels avec le mouvement syndical français.
Et puis, il faut que nos élus, nombreux et qui font un travail remarquable de relais, le fassent aussi en tant que socialistes, si l'on veut en terminer avec la culture qui s'est installée depuis trop d'années de l'individualisme, du consumérisme - y compris à l'égard des élus. Combien de fois est-on confronté comme élu, à cette utilisation de la démocratie à des fins personnelles ou corporatistes.
Il faut faire une grande force socialiste. Celle qui sera le coeur de la gauche. N'inventons pas d'autre structure, n'imaginons pas d'autre parti. Le parti de la gauche, c'est le nôtre. Occupons nous d'abord des socialistes avant de savoir ce que les uns et les autres pensent à l'extérieur. Rayonnons, diffusons notre pensée et le reste viendra.
Je suis convaincu que si nous, socialistes, sommes le moteur de la gauche, nous rassemblerons sans peine ceux qui veulent nous suivre, et que nous n'avons pas à partager notre projet avec d'autres lorsque nous l'élaborons. Nous avons à le faire partager une fois que nous l'avons adopté nous même avec tous ceux qui voudrons l'appliquer en solidarité avec nous. Je le dis : en solidarité. Nous ne pouvons pas imaginer d'alliance dans le futur si elles ne sont pas fondées sur un pacte, sur un programme, sur un contrat, appliqués avec respect mais aussi en solidarité entre les forces politiques qui l'ont accepté. C'est essentiel pour l'avenir si nous ne voulons pas revoir les évènements qui ont porté le 21 avril.
Voilà ce qui doit être notre premier souci, notre premier combat dans le cadre d'un débat qui est ouvert : former une grande force socialiste.
Ensuite, il faut bien sûr fixer notre identité. C'est la tâche d'un congrès, savoir ce que nous sommes, ce que nous pensons, ce que nous voulons dire aux autres, comment les autres nous voient.
Une des difficultés que nous avons rencontrées dans la campagne présidentielle était notre visibilité, notre originalité face à une concurrence que nous n'avions jamais connue avec 16 candidats. Il y en avait un pour l'environnement - et même plusieurs - pour la chasse, pour la sécurité - ils étaient innombrables, sur la sécurité aussi ! Nous, nous pensions globalement. Nous affirmions une raison pour le pays. Etait ce suffisant ? Sans doute pas.
Il faut affirmer bien davantage. Utopie, peut-être, mais quand on est candidat à la Présidence de la République, ce n'est pas sur l'utopie que nous pouvons l'emporter. Il nous faut aussi un projet, une identité. Qu'est-ce qu'être socialiste au début d'un siècle, après avoir fondé cette grande pensée il y a maintenant deux siècles ?
Etre socialiste, c'est être capable de porter une pensée globale, de donner une explication du monde et un projet qui a vocation à durer. Vous aviez raison de dire que l'on ne peut pas simplement présenter un projet pour une législature. Les socialistes ne peuvent pas réduire leur volonté à un temps si court.
Etre socialiste, c'est affirmer que ce qui doit nous unir dans un monde éclaté, dans une société qui est devenue plus complexe, devant la dispersion même des intérêts et des enjeux, c'est d'abord une pensée internationale. C'est être capable pas simplement de résister au monde mais de l'organiser, pas simplement de vouloir un monde politique - ce qui est déjà beaucoup - mais un monde différent.
C'est être capable de définir des instruments à l'échelle de la mondialisation. Nous sommes en face d'un capitalisme qui n'a jamais été aussi fort et aussi peu contredit à l'échelle de la planète depuis l'effondrement du monde communiste. Nous devons donc nous situer par rapport à ce capitalisme. Non pas seulement le contester mais savoir comment le modifier, le transformer, le changer, peut être un jour pour en terminer avec lui sous cette forme. Tel est le sens de notre engagement et il est forcément universel et mondial.
Et puis, il y a l'Europe. Nous sommes tous européens au Parti Socialiste, mais encore faut-il savoir de quelle Europe nous voulons être les porteurs. D'une Europe plus forte sur le plan politique, c'est une évidence, fédérale sûrement, avec une constitution, c'est nécessaire, mais avec quel contenu ? C'est cela qui fait le sens de notre engagement européen. Une Europe capable de maîtriser son destin économique, de fixer des règles sociales et aussi de changer le monde et de s'organiser sur le plan de sa Défense. C'est indispensable aujourd'hui si on ne veut pas simplement regarder ce que font ou décident - au mieux dans le cadre des nations Unies - les Etats Unis d'amérique. Voilà pourquoi, notre première identité est celle de militants et d'acteurs voulant maîtriser le monde et affirmer l'exigence européenne.
Mais nous avons une autre originalité. Nous sommes le parti du travail, du travail partagé, et c'est en ce sens que nous avons voulu, et nous avons eu raison, la Réduction du Temps de Travail. C'était notre projet historique et nous n'avons pas là à recevoir de leçon. Il peut y avoir des problèmes d'application, il y en a toujours dans les grandes réformes. Mais c'était ce que nous voulions faire à la fois pour lutter contre le chômage et aussi pour changer la vie de bon nombre de salariés de notre pays. Mais le rapport au travail, c'est aussi la rémunération du travail,la dignité au travail, la promotion dans la vie sociale. C'est aussi ce que nous devons porter sans l'avoir suffisamment fait. C'est une exigence. Nous devons être le parti des salariés, des salariés acteurs sociaux. Et c'est en ce sens que sur le plan de la démocratie, nous devons créer des instruments à la disposition des salariés pour qu'ils pèsent dans les choix de leurs entreprises (et non pas qu'ils subissent, comme on le voit dans tant d'affaires récentes de Vivendi à France Télécom), des choix qui sont faits par d'autres et souvent à leur détriment.
Nous sommes aussi le parti de l'école, de l'éducation, de cette formidable utopie qui est de penser que rien n'est joué, que rien ne doit être joué selon la naissance et que tout est possible si nous savons nous organiser.
Si nous ne le faisons pas, qui le fera ? Qui établira cette priorité fondamentale : c'est dès le premier âge de la vie que les chances doivent être données à tous de pouvoir réussir chacune des vies concernées ? Et puis, il y a cette exigence de Service Public qu'il faudra modifier, réformer, imaginer. Il faudra en anticiper de nouveaux, voir ce qui s'éteint et ce qui doit au contraire émerger. Mais nous devons faire apparaître qu'à côté du monde de l'entreprise, qu'à côté du marché et des règles du capitalisme, il existe une autre façon de produire, de distribuer, et de rendre des services lorsque nous en décidons collectivement.
Et puis notre identité, y compris par rapport à la difficulté de vivre ensemble dans une société comme la nôtre, par rapport à des phénomènes que nous connaissons bien et qui ont fait tant de problèmes lors de la dernière campagne, et je pense à la question de l'insécurité. Nous devons affirmer les principes de la République laïque que nous devons bien sûr faire évoluer mais qui sont des principes essentiels dans une société organisée comme la nôtre.
Le débat qui doit s'engager porte sur cela. C'est là que vos propositions et contributions sont essentielles.
Enfin, il est nécessaire de ne pas oublier que nous sommes aujourd'hui dans l'opposition. Menons ce travail. Rénovons notre Parti et portons aussi notre attention sur ce qui se fait ou qui se défait. Nous ne sommes pas au repos parce que nous sommes revenus dans l'opposition.
Nous avons à reprendre contact avec tous ceux qui vont être victimes des décisions gouvernementales - et depuis quatre mois, je le dis à tous ceux qui s'interrogeaient sur l'effacement du clivage gauche/droite et à tous ceux qui nous ont fait la leçon pendant plusieurs semaines durant la campagne et qui ne voyaient pas de différences entre le projet de Lionel JOSPIN et le projet de jacques CHIRAC - Je pense que la réalité va les éclairer.
Il y a maintenant inversion des priorités budgétaires, où l'on met le paquet sur la loi de programmation militaire et le deuxième porte-avion. C'était sans doute ce que voulaient les Français. Je le disais durant la campagne quand il parlait déjà de la construction d'un deuxième sous-marin nucléaire. Avez-vous rencontré un seul Français, un seul citoyen sur un marché ou dans une entreprise, qui vous attrape par le veston et qui vous dit : " alors, quand allez-vous le construire, ce second porte-avion ? Sera-t-il à propulsion classique ou à propulsion nucléaire ". En avez-vous rencontré ?
Mais en revanche, ce qu'on a rencontré, ce sont des femmes et des hommes qui nous ont dit : " alors pour l'école, pour la santé, pour la solidarité, qu'est-ce que vous faites et en ferez-vous davantage ? "
C'est à ceux-là, maintenant, qu'il faut dire qu'il y a une inversion grave, préoccupante des priorités budgétaires et qu'il en est de même sur la fiscalité où l'on a baissé la fiscalité pour les uns et augmenté les prélèvements pour tout le monde.
Bien sûr, il y a la méthode Raffarin. La méthode Raffarin consiste - et doit sans doute être tirée de lois de la Communication dont il est expert - à apporter ou à faire passer comme une bonne nouvelle l'annulation d'une mauvaise nouvelle prévue par un de ses ministres. Par exemple, il y a quelques semaines, le Ministre de la Culture annonce la hausse de la redevance. Jean Pierre Raffarin dans sa grande bonté, dans sa grandeur d'âme parce qu'il pense aux modestes, annonce à la télévision qu'il n'y aura pas d'augmentation de la redevance. Merci Monsieur Raffarin !
Nous avons eu aussi cette même méthode concernant les tarifs EDF. Tout avait augmenté, la SNCF, la RATP etc et même France Télécom, mais on nous annonçait 5% d'augmentation de EDF. Et bien, grâce à Monsieur Rafarrin, l'augmentation prévue n'a pas eu lieu. Donc finalement, sa bonté consiste à ne pas écouter ses ministres !
C'est tout de même peu comme générosité et cela n'efface pas tous les choix faits en quatre mois et qui vont s'amplifier dans le prochain budget. Je n'oublie pas les emplois jeunes, les contrats éducatifs locaux, les emplois aidés qui vont être ou réduits ou supprimés, mettant tant de jeunes ou de moins jeunes dans la précarité.
C'est sur ces terrains-là aussi qu'il faut agir. On nous annonce un grand débat sur la Décentralisation -et je parle ici devant ceux qui ont lancé les grandes lois de décentralisation. Mais de quelle décentralisation s'agit-il ? D'une décentralisation où les collectivités locales auraient des responsabilités nouvelles avec les moyens correspondants ou d'une décentralisation où l'Etat se débarrasserait d'un certain nombre de charges pour les confier à d'autres et que les collectivités les plus riches fassent leurs affaires.
De quelle décentralisation s'agit-il ? D'une décentralisation où il y aurait une solidarité entre les régions riches et les régions pauvres ou d'une décentralisation où la loi du plus fort l'emporterait à travers l'expérimentation ?
Il faut aussi mener dans notre débat ce rapport à la droite. Nous ne sommes pas simplement dans un travail de rénovation et d'introspection. Nous sommes dans un travail politique où nous avons des adversaires. Il ne faut jamais l'oublier. Voilà pourquoi la responsabilité de notre formation politique n'a jamais été aussi grande.
Nous sommes à un moment clef de notre propre histoire socialiste, à un moment sans doute décisif de la gauche et des formes qu'elle prendra, face à un moment essentiel pour l'avenir de notre démocratie.
C'est pourquoi, vous, militants, si vous en décidez, si le débat -et je l'assure ici, cela prendra le temps qu'il faudra pour qu'il puisse accoucher du meilleur- si vous prenez la parole avec liberté et responsabilité, vous serez acteurs du Congrès.
Je sais bien qu'il y aura des porteurs de motions. C'est la vie du Parti. Mais qu'aucun ne puisse oublier ou négliger la parole militante !
Pour ce qui me concerne, comme Premier Secrétaire du PS, j'assure ici que ce temps du débat doit être non seulement le plus long possible mais qu'il ne doit pas se séparer du temps du congrès. Cela veut dire que je prendrai la responsabilité d'élaborer une motion, au nom des militants, si une cohérence et des lignes de force sortent de nos débats. C'est pourquoi vous devez le faire aussi avec responsabilité en vous souvenant de ce qu'a été une règle posée par Lionel JOSPIN, et que je n'oublierai pour ma part jamais, qui est de tenir nos engagements et de respecter notre parole.
C'est ce qui fera notre force également dans nos rapports avec la droite. Il faut que dans ce congrès, vous exprimiez vos positions, vos réflexions, vos propositions. Et je prendrai ma responsabilité pour que, dans la motion que j'élaborerai avec d'autres, vous puissiez vous reconnaître dans le travail qui aura été mené collectivement par le parti.
C'est la meilleure façon de rassembler les socialistes mais aussi de les écouter et de les entendre.
Nous avons aujourd'hui à assurer notre diversité et je crois qu'elle est réelle. Nous sommes conscients que notre unité est notre force essentielle et j'y veille. Nous savons aussi que nous devons affirmer notre identité. C'est la clef de tout. Mais nous devons aussi exprimer une volonté, celle de ne pas répéter les congrès d'antan. Nous en avons connu de nombreuses sortes, des bons parfois, qui restent dans l'histoire, mais des mauvais qui le restent aussi !!!
Nous devons donc faire un congrès nouveau. Il dépend de vous de le réussir. Nous devons aussi ne pas nous tromper d'échéance. J'ai bien entendu ce que disait Marc DOLEZ. Nous sortons d'une élection présidentielle et la prochaine est dans 5 ans. Nous avons donc le temps de travailler politiquement sans nous poser la question de savoir qui nous représentera le moment venu.
Certains ont le droit d'y penser mais qu'ils gardent cela pour eux pour le moment.
Ce sera, de toute façon, les militants qui choisiront le moment venu. Il ne s'agit pas de cela aujourd'hui. Il s'agit de nous collectivement et de notre organisation, de notre idéal commun et du sens de notre engagement.
C'est pourquoi, il faut y croire. Croire d'abord en notre parti qui est, si nous en décidons, la force à partir de laquelle tout repartira. Il faut croire en la force de notre engagement, de nos idées, de notre identité et surtout croire, au-delà de l'idéal que nous portons, à la nécessité de faire de la politique.
Faire de la politique est plus que jamais nécessaire. Faire de la politique, cela signifie s'adresser aux autres, donner du sens, fixer des repères, porter un idéal, donner une compréhension du monde, donner de l'espoir.
Voilà pourquoi les uns et les autres nous nous sommes engagés un jour dans le Parti Socialiste. Nous avons cru que c'était là que nous pouvions porter notre idéal le plus haut possible. Cet engagement-là est encore le mien, c'est toujours le vôtre et ce sera demain, je l'espère celui de beaucoup de Français.
(Source http://www.parti-socialiste.fr, le 1 octobre 2002)