Texte intégral
Q - La visite du président Chirac en janvier 1998 a constitué une étape importante dans les relations franco-indiennes. Quelles sont les perspectives aujourd'hui ?
R - La visite d'Etat du président Jacques Chirac en janvier 1998 marque une relance des relations franco-indiennes dans tous les domaines de coopération. Elle a été suivie de nombreuses visites ministérielles des deux côtés.
Plusieurs instances de coopération ont été mises en place à cette occasion. Elles poursuivent aujourd'hui encore leurs travaux : le Forum d'initiatives franco-indien, qui se réunira en novembre prochain en Inde, ouvre nos deux sociétés civiles l'une à l'autre. Le dialogue stratégique nous permet pour sa part d'améliorer notre compréhension mutuelle et de partager nos analyses politiques et diplomatiques. Les travaux de ces instances débouchent sur des propositions concrètes, que nous avons à coeur de mettre en oeuvre : nos échanges techniques dans le domaine de la sûreté nucléaire en sont une illustration.
Pour mon premier déplacement en Asie le 2 août dernier, j'ai tenu à me rendre en Inde. C'était pour moi l'occasion de retrouver votre pays pour lequel je conserve, depuis mes années passées en poste en Inde, une affection toute particulière.
L'objectif de ma visite était clair : je souhaitais renforcer la coopération avec votre pays dans les mois à venir, dans les domaines économique et commercial, mais aussi culturel, scientifique et technique. J'ai pu mesurer à cette occasion la qualité du dialogue établi entre la France et l'Inde, qui va bien au-delà des seules relations entre Etats.
L'Inde continue d'exercer sur notre pays une véritable fascination, nourrie des rencontres passées et d'un désir mutuel de partage et de connaissance. L'attention portée par un large public français aux productions cinématographiques indiennes, comme "Lagaan" ou 'Le Mariage des moussons", les nombreux déplacements de touristes français en Inde, le développement de l'intérêt pour la musique indienne témoignent du maintien et du renouvellement constant de cet intérêt.
Dans les mois à venir, le ministre délégué à la Recherche et aux nouvelles Technologies se rendra en Inde. Au début de l'année prochaine, le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, ira également dans votre pays à l'occasion du lancement de la "Saison de la France en Inde". Cette importante manifestation souligne la densité des liens qui unissent nos deux pays et la variété des projets que nous menons en commun.
Q - Le début des années 90 a été marqué par un refroidissement de nos relations bilatérales. Comment se prémunir contre le retour de cette situation ?
R - Entre deux grandes puissances comme l'Inde et la France, qui entretiennent des relations très anciennes, il est naturel que nous traversions des périodes au cours desquelles l'intensité de la coopération peut sembler moins forte.
Mais il faut lire cette histoire dans la durée. Les liens qui nous unissent plongent leurs racines dans un passé nourri du dialogue séculaire de nos deux cultures. C'est une base solide pour lancer de nouvelles initiatives.
Regardez les projets qui ont été lancés, ou qui le seront à l'occasion de la "Saison de la France en Inde" : ils touchent tous les domaines, de la culture à la science, de la haute technologie à l'éducation, et ont vocation à se développer d'année en année.
Q - Comment voyez-vous l'évolution de la coopération entre nos deux pays ?
R - Notre relation avec l'Inde se développe dans des domaines multiples. J'y vois le signe de la richesse de notre coopération et de la diversité de nos intérêts.
J'ai déjà mentionné le dialogue stratégique : ces échanges de vues réguliers entre deux grands Etats dépassent le cadre de la seule relation bilatérale. Ils apportent une contribution significative au renforcement de la stabilité dans le monde.
Les domaines éducatif et culturel sont également une priorité : nous faisons un effort particulier pour augmenter le nombre de bourses octroyées à des étudiants et chercheurs indiens et pour mettre à disposition une large information sur les lieux d'excellence universitaire français. Les échanges entre artistes seront également facilités par un programme de résidence pour des artistes indiens et français intitulé "Le voyage". Nous souhaitons enfin poursuivre nos efforts dans le cadre des laboratoires mixtes de recherche pour accroître notre coopération en recherche appliquée ou industrielle.
Q - Comment développer l'idée d'un monde multipolaire ?
R - La France et l'Inde sont deux grandes puissances qui jouent un rôle important sur la scène mondiale et qui peuvent apporter leur contribution à la construction des nouveaux équilibres stratégiques. Nos deux pays sont soucieux de bâtir un monde plus solidaire, respectueux du droit international et attentif aux nouveaux défis sociaux ou environnementaux.
Cette convergence de vue se traduit déjà dans des projets concrets. En matière d'environnement par exemple, la France et l'Inde défendent activement la mise en oeuvre du protocole de Kyoto. La tenue à Delhi, du 23 au 31 octobre prochain, de la Conférence des Parties souligne l'implication de l'Inde sur ce dossier. La France est à ses côtés.
Q - Comment renforcer notre sécurité et développer les moyens de lutte contre le terrorisme ?
R - La lutte contre le terrorisme s'impose à tous les Etats. Elle doit être conduite avec détermination et résolution. Car la menace est d'une nature et d'une ampleur nouvelle. N'en doutons pas, ces hommes qui agissent dans l'ombre, ces fanatiques qui associent les idéologies les plus archaïques aux réseaux de communication les plus modernes ont lancé un défi que nous ne pouvons pas ignorer. C'est un combat que la France mène depuis de nombreuses années et que nous poursuivons sans relâche. Nous condamnons avec force tous les actes terroristes de quelque nature qu'ils soient. Nous l'avons fait à la suite de l'attentat odieux du 24 septembre dernier contre un temple hindou au Gujarat.
Cela exige bien sûr une coopération accrue entre les différents services concernés. L'Inde et la France ont mis en place un groupe de travail conjoint sur ce sujet majeur. Cette instance s'est réunie pour la troisième fois, à Paris, au mois de septembre. C'est une bonne illustration du partenariat franco-indien en la matière.
Q - Comment jugez-vous l'évolution de la situation dans la région de l'Asie du sud ?
R - La région de l'Asie du sud reste au cur de nos préoccupations actuelles. Nous suivons avec beaucoup d'attention l'évolution de la situation, notamment le déroulement des élections.
Je l'ai répété à plusieurs reprises lors de ma visite à Delhi le 2 août dernier : il n'existe plus aujourd'hui de crise circonscrite. Les tensions entre l'Inde et le Pakistan sont susceptibles d'avoir des répercussions sur l'ensemble des grands équilibres stratégiques. Il y a donc un intérêt légitime de la France et de la communauté internationale pour la recherche de la stabilité dans cette zone.
Toutefois, comme je l'ai dit à mes interlocuteurs à New Delhi et à Islamabad, la solution de ce conflit ancien et complexe appartient en premier à l'Inde et au Pakistan.
La seule issue est donc la reprise du dialogue, dans l'esprit des accords de Simla et de Lahore. En s'engageant dans cette voie, les deux pays témoigneront de leur sens des responsabilités et de leur souci de la stabilité régionale. Ils nourriront un esprit de coopération qui permettra de développer les relations économiques, commerciales et culturelles.
Les échéances électorales du moment sont une étape importante du retour à la stabilité. Nous condamnons les actes de violence, qui sont non seulement un obstacle à la reprise du dialogue, mais également une atteinte aux principes de liberté et de démocratie.
Q - La France s'est accommodée d'une Inde nucléaire. Mais il n'a pas été possible que les deux pays coopèrent en vue de la construction de centrales nucléaires. Quelles sont les perspectives dans ce domaine ?
La France considère l'Inde comme une puissance responsable. En 1998, c'est important de le souligner, nous n'avons pas souhaité sanctionner votre pays et notre approche a toujours été guidée par ce principe de confiance.
Comme vous le savez, en ce qui concerne les exportations de ce type, elles sont régies par des règles internationales que la France respecte très scrupuleusement. C'est dans ce cadre, pour tenir compte de la situation particulière de l'Inde et dans l'esprit d'amitié qui lie nos deux pays, que la France a développé une coopération en matière de sûreté nucléaire. Nous espérons accroître encore cette dimension de notre relation, dans le respect de nos engagements internationaux.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 1 octobre 2002)
R - La visite d'Etat du président Jacques Chirac en janvier 1998 marque une relance des relations franco-indiennes dans tous les domaines de coopération. Elle a été suivie de nombreuses visites ministérielles des deux côtés.
Plusieurs instances de coopération ont été mises en place à cette occasion. Elles poursuivent aujourd'hui encore leurs travaux : le Forum d'initiatives franco-indien, qui se réunira en novembre prochain en Inde, ouvre nos deux sociétés civiles l'une à l'autre. Le dialogue stratégique nous permet pour sa part d'améliorer notre compréhension mutuelle et de partager nos analyses politiques et diplomatiques. Les travaux de ces instances débouchent sur des propositions concrètes, que nous avons à coeur de mettre en oeuvre : nos échanges techniques dans le domaine de la sûreté nucléaire en sont une illustration.
Pour mon premier déplacement en Asie le 2 août dernier, j'ai tenu à me rendre en Inde. C'était pour moi l'occasion de retrouver votre pays pour lequel je conserve, depuis mes années passées en poste en Inde, une affection toute particulière.
L'objectif de ma visite était clair : je souhaitais renforcer la coopération avec votre pays dans les mois à venir, dans les domaines économique et commercial, mais aussi culturel, scientifique et technique. J'ai pu mesurer à cette occasion la qualité du dialogue établi entre la France et l'Inde, qui va bien au-delà des seules relations entre Etats.
L'Inde continue d'exercer sur notre pays une véritable fascination, nourrie des rencontres passées et d'un désir mutuel de partage et de connaissance. L'attention portée par un large public français aux productions cinématographiques indiennes, comme "Lagaan" ou 'Le Mariage des moussons", les nombreux déplacements de touristes français en Inde, le développement de l'intérêt pour la musique indienne témoignent du maintien et du renouvellement constant de cet intérêt.
Dans les mois à venir, le ministre délégué à la Recherche et aux nouvelles Technologies se rendra en Inde. Au début de l'année prochaine, le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, ira également dans votre pays à l'occasion du lancement de la "Saison de la France en Inde". Cette importante manifestation souligne la densité des liens qui unissent nos deux pays et la variété des projets que nous menons en commun.
Q - Le début des années 90 a été marqué par un refroidissement de nos relations bilatérales. Comment se prémunir contre le retour de cette situation ?
R - Entre deux grandes puissances comme l'Inde et la France, qui entretiennent des relations très anciennes, il est naturel que nous traversions des périodes au cours desquelles l'intensité de la coopération peut sembler moins forte.
Mais il faut lire cette histoire dans la durée. Les liens qui nous unissent plongent leurs racines dans un passé nourri du dialogue séculaire de nos deux cultures. C'est une base solide pour lancer de nouvelles initiatives.
Regardez les projets qui ont été lancés, ou qui le seront à l'occasion de la "Saison de la France en Inde" : ils touchent tous les domaines, de la culture à la science, de la haute technologie à l'éducation, et ont vocation à se développer d'année en année.
Q - Comment voyez-vous l'évolution de la coopération entre nos deux pays ?
R - Notre relation avec l'Inde se développe dans des domaines multiples. J'y vois le signe de la richesse de notre coopération et de la diversité de nos intérêts.
J'ai déjà mentionné le dialogue stratégique : ces échanges de vues réguliers entre deux grands Etats dépassent le cadre de la seule relation bilatérale. Ils apportent une contribution significative au renforcement de la stabilité dans le monde.
Les domaines éducatif et culturel sont également une priorité : nous faisons un effort particulier pour augmenter le nombre de bourses octroyées à des étudiants et chercheurs indiens et pour mettre à disposition une large information sur les lieux d'excellence universitaire français. Les échanges entre artistes seront également facilités par un programme de résidence pour des artistes indiens et français intitulé "Le voyage". Nous souhaitons enfin poursuivre nos efforts dans le cadre des laboratoires mixtes de recherche pour accroître notre coopération en recherche appliquée ou industrielle.
Q - Comment développer l'idée d'un monde multipolaire ?
R - La France et l'Inde sont deux grandes puissances qui jouent un rôle important sur la scène mondiale et qui peuvent apporter leur contribution à la construction des nouveaux équilibres stratégiques. Nos deux pays sont soucieux de bâtir un monde plus solidaire, respectueux du droit international et attentif aux nouveaux défis sociaux ou environnementaux.
Cette convergence de vue se traduit déjà dans des projets concrets. En matière d'environnement par exemple, la France et l'Inde défendent activement la mise en oeuvre du protocole de Kyoto. La tenue à Delhi, du 23 au 31 octobre prochain, de la Conférence des Parties souligne l'implication de l'Inde sur ce dossier. La France est à ses côtés.
Q - Comment renforcer notre sécurité et développer les moyens de lutte contre le terrorisme ?
R - La lutte contre le terrorisme s'impose à tous les Etats. Elle doit être conduite avec détermination et résolution. Car la menace est d'une nature et d'une ampleur nouvelle. N'en doutons pas, ces hommes qui agissent dans l'ombre, ces fanatiques qui associent les idéologies les plus archaïques aux réseaux de communication les plus modernes ont lancé un défi que nous ne pouvons pas ignorer. C'est un combat que la France mène depuis de nombreuses années et que nous poursuivons sans relâche. Nous condamnons avec force tous les actes terroristes de quelque nature qu'ils soient. Nous l'avons fait à la suite de l'attentat odieux du 24 septembre dernier contre un temple hindou au Gujarat.
Cela exige bien sûr une coopération accrue entre les différents services concernés. L'Inde et la France ont mis en place un groupe de travail conjoint sur ce sujet majeur. Cette instance s'est réunie pour la troisième fois, à Paris, au mois de septembre. C'est une bonne illustration du partenariat franco-indien en la matière.
Q - Comment jugez-vous l'évolution de la situation dans la région de l'Asie du sud ?
R - La région de l'Asie du sud reste au cur de nos préoccupations actuelles. Nous suivons avec beaucoup d'attention l'évolution de la situation, notamment le déroulement des élections.
Je l'ai répété à plusieurs reprises lors de ma visite à Delhi le 2 août dernier : il n'existe plus aujourd'hui de crise circonscrite. Les tensions entre l'Inde et le Pakistan sont susceptibles d'avoir des répercussions sur l'ensemble des grands équilibres stratégiques. Il y a donc un intérêt légitime de la France et de la communauté internationale pour la recherche de la stabilité dans cette zone.
Toutefois, comme je l'ai dit à mes interlocuteurs à New Delhi et à Islamabad, la solution de ce conflit ancien et complexe appartient en premier à l'Inde et au Pakistan.
La seule issue est donc la reprise du dialogue, dans l'esprit des accords de Simla et de Lahore. En s'engageant dans cette voie, les deux pays témoigneront de leur sens des responsabilités et de leur souci de la stabilité régionale. Ils nourriront un esprit de coopération qui permettra de développer les relations économiques, commerciales et culturelles.
Les échéances électorales du moment sont une étape importante du retour à la stabilité. Nous condamnons les actes de violence, qui sont non seulement un obstacle à la reprise du dialogue, mais également une atteinte aux principes de liberté et de démocratie.
Q - La France s'est accommodée d'une Inde nucléaire. Mais il n'a pas été possible que les deux pays coopèrent en vue de la construction de centrales nucléaires. Quelles sont les perspectives dans ce domaine ?
La France considère l'Inde comme une puissance responsable. En 1998, c'est important de le souligner, nous n'avons pas souhaité sanctionner votre pays et notre approche a toujours été guidée par ce principe de confiance.
Comme vous le savez, en ce qui concerne les exportations de ce type, elles sont régies par des règles internationales que la France respecte très scrupuleusement. C'est dans ce cadre, pour tenir compte de la situation particulière de l'Inde et dans l'esprit d'amitié qui lie nos deux pays, que la France a développé une coopération en matière de sûreté nucléaire. Nous espérons accroître encore cette dimension de notre relation, dans le respect de nos engagements internationaux.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 1 octobre 2002)