Déclaration de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, sur la non-ratification du traité d'interdiction des essais nucléaires (TICE) par le Sénat américain, à l'Assemblée nationale le 27 octobre 1999.

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Circonstance : Refus du Sénat américain de ratifier le traité sur l'interdiction des essais nucléaires, le 13 octobre 1999

Texte intégral

Madame la Députée,
Comme vous, nous avons jugé infiniment regrettable le vote du Sénat américain, à tout point de vue. D'abord parce que cela contredit les engagements pris par le président des Etats-Unis, et c'est extrêmement préoccupant de voir un pays qui occupe dans le monde actuel la place que l'on sait ne pas être capable, pour des raisons purement internes, purement politiciennes, purement locales, de tenir des engagements, alors que depuis l'après seconde guerre mondiale aux Etats-Unis, en tout cas sur ce plan, il y avait une volonté de consensus qui prévalait entre l'exécutif et le législatif sur toutes les querelles internes. C'est donc un très mauvais signal, à la fois sur ce sujet, comme sur les autres engagements que l'on voudrait obtenir des Etats-Unis, aussi bien par rapport à la Cour pénale, que par rapport aux négociations OMC, ou par rapport à la Convention sur les mines anti-personnel. C'est donc une vraie préoccupation dans notre relation, dans notre dialogue avec les Etats-Unis, compte tenu du rôle qu'ils ont ; je pense d'ailleurs que le prochain président des Etats-Unis, après Bill Clinton, sera obligé de reprendre ce dossier. C'est évidemment un mauvais signal par rapport à certains pays dans le monde, qui heureusement ne sont pas très nombreux, mais qui existent malgré tout et qui se posent des questions, qui sont à la marge : ceux que l'on appelle les pays du seuil. Ce que nous allons faire, après avoir exprimé très clairement notre regret, notre consternation, notre désapprobation par rapport à ce qui s'est passé, c'est tout simplement de rappeler que le traité peut encore être ratifié par les pays qui ne l'ont pas encore fait et que les pays qui l'ont signé - dont certains l'ont ratifié, comme la France - ont décidé de continuer à l'appliquer comme s'il était ratifié par le nombre de pays suffisant, et que, après tout, cela dépend de la décision des gouvernements responsables de l'ensemble de ces pays que cette orientation prenne corps, malgré ce vote, que je voudrais ne considérer comme un accident de parcours, si nous avons tous la volonté de continuer à mener cette politique.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 octobre 1999)