Texte intégral
F. Laborde-. Nous allons évidemment évoquer la réunion du Congrès qui a lieu aujourd'hui, à Versailles, pour parler de la décentralisation. Mais auparavant, j'aimerais vous interroger sur l'actualité, puisque le Président des Etats-Unis donne une sorte d'ultimatum. Est-ce que la réunion des Açores a servi à quelque chose ?
- "J'ai eu l'impression que cette réunion était bien confuse, bien irréelle, bien imprécise. C'était assez fascinant que de voir le Président des Etats-Unis ne pas évoquer le mot "guerre" et la préparer sur le terrain, donner un ultimatum aux Nations unies et puis voir le Premier ministre anglais très ennuyé, très confus, ne pas être sur la même longueur d'ondes que le Président des Etats-Unis. Bref, on a eu le sentiment qu'il y a deux méthodes pour éviter que dans le monde, il y ait une prolifération des armes de destruction massive : une bonne et une mauvaise méthodes. La bonne méthode, consiste à passer par les Nations unies, par la pression internationale, en Irak et ailleurs, pour faire en sorte qu'il n'y ait plus d'armes de destruction massive. Donc, la France dit "pas de recours automatique à la guerre, appliquons la résolution 1441 et donnons aux inspecteurs des Nations unies les moyens". Et la mauvaise méthode, c'est le recours systématique et automatique à la guerre car, quand on part dans ce système, on ne sait plus où on s'arrête."
Mais est-ce que maintenant, les dés ne sont pas jetés ? Pour reprendre l'expression du Président Bush, est-ce que "les cartes ne sont pas abattues" ? On apprend ce matin, par une dépêche, que les observateurs de l'ONU qui étaient stationnés dans cette zone tampon entre l'Irak et le Koweït, sont priés de quitter totalement le terrain, c'est-à-dire de laisser la place pour que les chars passent. Il y a un ultimatum ce soir, alors qu'H. Blix doit rendre son rapport demain. Au fond, est-ce que les Américains ne sont pas en train de faire un écran de fumée pour organiser l'offensive maintenant, tout ce que l'on dit étant nul et non avenu ?
- "Ce qui est absolument tragique dans cette affaire, c'est qu'on a le sentiment que les Américains ont leur logique, qui est la logique de guerre, et que le reste est un petit peu du détail, qu'on laisse les diplomates et le camp de la paix lutter, mais qu'on a décidé. Et que si vous n'êtes du camp des Etats-Unis, on ne tient pas compte de vos arguments. Ce que je trouve absolument paradoxal, c'est l'ultimatum donné au Conseil de sécurité jusqu'à ce soir, alors que demain, le chef des inspecteurs doit rendre compte de sa mission de désarmement. Pourquoi ne pas attendre au moins que le chef des inspecteurs ait rendu son rapport ? Pourquoi ne pas continuer, puisqu'il y a des progrès dans le désarmement, à faire pression pour éviter la guerre ? On a le sentiment que les Américains ont choisi, et ont choisi depuis longtemps, de faire la guerre. Je vous rappelle que cela fait plusieurs mois qu'ils amassent des troupes. Et s'ils amassent des troupes, ce n'est pas pour donner de la place à de la diplomatie ou à la pression internationale ; c'est pour faire la guerre."
Est-ce que la France maintiendra jusqu'au bout sa position, c'est-à-dire non à une résolution qui impliquerait un ultimatum, non à une offensive maintenant ?
- "La position définie par J. Chirac est très claire, depuis longtemps : il faut désarmer l'Irak, il faut faire en sorte que ce désarmement ne se fasse pas par la guerre, mais dans le cadre des Nations unies, par la pression internationale. Il ne doit pas y avoir de recours automatique à l'engagement militaire."
Vous qui connaissez bien le président de la République, il n'a jamais varié sur cela ? Il a toujours dit, dès le début, qu'il y aura un veto de la France ?
- "Il a toujours dit qu'il fallait arriver au désarmement de l'Irak par la pression, dans le cadre du Conseil de sécurité des Nations unies. Il y a une affaire de méthode car, comme il y a d'autres pays qui ont des armes de destruction massive, il faut que cette première opération soit exemplaire. Et c'est la communauté internationale - et non pas un pays - qui, par sa pression sur le pays qui est en fraude, aboutit à ce désarmement."
Il y a quand même dans vos "troupes", si je puis dire, un certain nombre de députés UMP qui ont un sentiment assez atlantiste. On a entendu P. Lellouche dire de faire attention à ne pas se fâcher avec les Américains. On a même pu croire, à un moment donné, que ces députés parlaient parce qu'ils avaient reçu consigne de ménager un peu nos alliés. Est-ce qu'il y a une différence d'appréciation au sein de l'UMP ? Est-ce qu'il faut ménager, d'une façon ou d'une autre, nos alliés et ne pas insulter l'avenir ?
- "Il n'est pas question de faire de l'anti-américanisme. Notre allié principal, ce sont les Etats-Unis. Mais l'Europe doit exprimer une politique, une position. Ces députés ne sont que marginaux et en plus, ils se trompent, car ils pensent que la position de la France se fait contre les Etats-Unis ; bien au contraire, nous expliquons à nos amis américains qu'ils ont intérêt à passer par le Conseil de sécurité."
La France, en tout état de cause, ne participera à aucune forme d'intervention militaire ?
- "La France est contre le recours automatique à la guerre."
Il y a aujourd'hui, à Versailles, la réunion du Congrès sur la réforme de l'Etat, la décentralisation. On a cru remarquer que la décentralisation n'était pas exactement votre tasse de thé. Est-ce que vous êtes content d'aller à Versailles aujourd'hui ? Est-ce que la date ne vous semble pas un peu pour le moins anachronique ?
- "Tout cela est un peu irréel, parce que les événements font qu'il faut se concentrer sur l'international. Mais il en a été décidé ainsi depuis longtemps, allons-y. La décentralisation n'est pas ma "tasse de thé", c'est évident, bien qu'elle soit nécessaire. Aujourd'hui, ce dont ont besoin les Français, c'est un Etat, un Etat qui se fait respecter, qui fait respecter ses lois, sa justice, sa volonté de solidarité et l'aménagement du territoire. Bref, on doit, aujourd'hui, non pas avoir moins d'Etat, mais un Etat plus capable de remplir ses missions. Dans ce cadre, il y a des orientations qu'il faut suivre. La déconcentration des services de l'Etat, le transfert de compétences, oui, j'y suis favorable, mais après avoir réaffirmé l'autorité de l'Etat..."
C'est-à-dire que ce que vous craignez, c'est qu'en fait, la décentralisation mette des strates successives de responsabilité et qu'il y ait une dilution du pouvoir central ?
- "Je crois que certains confondent décentralisation et simplification administrative. Mais la majorité des députés et des sénateurs ont décidé de réformer la Constitution ; eh bien, réformons la Constitution !"
J.-P. Raffarin, ce matin, reconnaît que la situation économique est évidemment moins florissante qu'on ne pouvait l'espérer, avec 1,3 % de croissance. Est-ce qu'il ne va pas y avoir une vraie difficulté pour le Gouvernement, de mener ses réformes, à commencer par la première, c'est-à-dire celle des retraites ?
- "Je crois que la réforme des retraites est nécessaire. On n'a que trop parlé, on n'a que trop tergiversé. On sait très bien qu'à partir de 2006-2007, il y aura un problème pour les règlements des retraites. Par conséquent, c'est l'honneur de ce Gouvernement et de J.-P. Raffarin de vouloir coûte que coûte essayer de réformer le système des retraites, pour que tous les Français, dans l'avenir, aient une retraite décente."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 17 mars 2003)
- "J'ai eu l'impression que cette réunion était bien confuse, bien irréelle, bien imprécise. C'était assez fascinant que de voir le Président des Etats-Unis ne pas évoquer le mot "guerre" et la préparer sur le terrain, donner un ultimatum aux Nations unies et puis voir le Premier ministre anglais très ennuyé, très confus, ne pas être sur la même longueur d'ondes que le Président des Etats-Unis. Bref, on a eu le sentiment qu'il y a deux méthodes pour éviter que dans le monde, il y ait une prolifération des armes de destruction massive : une bonne et une mauvaise méthodes. La bonne méthode, consiste à passer par les Nations unies, par la pression internationale, en Irak et ailleurs, pour faire en sorte qu'il n'y ait plus d'armes de destruction massive. Donc, la France dit "pas de recours automatique à la guerre, appliquons la résolution 1441 et donnons aux inspecteurs des Nations unies les moyens". Et la mauvaise méthode, c'est le recours systématique et automatique à la guerre car, quand on part dans ce système, on ne sait plus où on s'arrête."
Mais est-ce que maintenant, les dés ne sont pas jetés ? Pour reprendre l'expression du Président Bush, est-ce que "les cartes ne sont pas abattues" ? On apprend ce matin, par une dépêche, que les observateurs de l'ONU qui étaient stationnés dans cette zone tampon entre l'Irak et le Koweït, sont priés de quitter totalement le terrain, c'est-à-dire de laisser la place pour que les chars passent. Il y a un ultimatum ce soir, alors qu'H. Blix doit rendre son rapport demain. Au fond, est-ce que les Américains ne sont pas en train de faire un écran de fumée pour organiser l'offensive maintenant, tout ce que l'on dit étant nul et non avenu ?
- "Ce qui est absolument tragique dans cette affaire, c'est qu'on a le sentiment que les Américains ont leur logique, qui est la logique de guerre, et que le reste est un petit peu du détail, qu'on laisse les diplomates et le camp de la paix lutter, mais qu'on a décidé. Et que si vous n'êtes du camp des Etats-Unis, on ne tient pas compte de vos arguments. Ce que je trouve absolument paradoxal, c'est l'ultimatum donné au Conseil de sécurité jusqu'à ce soir, alors que demain, le chef des inspecteurs doit rendre compte de sa mission de désarmement. Pourquoi ne pas attendre au moins que le chef des inspecteurs ait rendu son rapport ? Pourquoi ne pas continuer, puisqu'il y a des progrès dans le désarmement, à faire pression pour éviter la guerre ? On a le sentiment que les Américains ont choisi, et ont choisi depuis longtemps, de faire la guerre. Je vous rappelle que cela fait plusieurs mois qu'ils amassent des troupes. Et s'ils amassent des troupes, ce n'est pas pour donner de la place à de la diplomatie ou à la pression internationale ; c'est pour faire la guerre."
Est-ce que la France maintiendra jusqu'au bout sa position, c'est-à-dire non à une résolution qui impliquerait un ultimatum, non à une offensive maintenant ?
- "La position définie par J. Chirac est très claire, depuis longtemps : il faut désarmer l'Irak, il faut faire en sorte que ce désarmement ne se fasse pas par la guerre, mais dans le cadre des Nations unies, par la pression internationale. Il ne doit pas y avoir de recours automatique à l'engagement militaire."
Vous qui connaissez bien le président de la République, il n'a jamais varié sur cela ? Il a toujours dit, dès le début, qu'il y aura un veto de la France ?
- "Il a toujours dit qu'il fallait arriver au désarmement de l'Irak par la pression, dans le cadre du Conseil de sécurité des Nations unies. Il y a une affaire de méthode car, comme il y a d'autres pays qui ont des armes de destruction massive, il faut que cette première opération soit exemplaire. Et c'est la communauté internationale - et non pas un pays - qui, par sa pression sur le pays qui est en fraude, aboutit à ce désarmement."
Il y a quand même dans vos "troupes", si je puis dire, un certain nombre de députés UMP qui ont un sentiment assez atlantiste. On a entendu P. Lellouche dire de faire attention à ne pas se fâcher avec les Américains. On a même pu croire, à un moment donné, que ces députés parlaient parce qu'ils avaient reçu consigne de ménager un peu nos alliés. Est-ce qu'il y a une différence d'appréciation au sein de l'UMP ? Est-ce qu'il faut ménager, d'une façon ou d'une autre, nos alliés et ne pas insulter l'avenir ?
- "Il n'est pas question de faire de l'anti-américanisme. Notre allié principal, ce sont les Etats-Unis. Mais l'Europe doit exprimer une politique, une position. Ces députés ne sont que marginaux et en plus, ils se trompent, car ils pensent que la position de la France se fait contre les Etats-Unis ; bien au contraire, nous expliquons à nos amis américains qu'ils ont intérêt à passer par le Conseil de sécurité."
La France, en tout état de cause, ne participera à aucune forme d'intervention militaire ?
- "La France est contre le recours automatique à la guerre."
Il y a aujourd'hui, à Versailles, la réunion du Congrès sur la réforme de l'Etat, la décentralisation. On a cru remarquer que la décentralisation n'était pas exactement votre tasse de thé. Est-ce que vous êtes content d'aller à Versailles aujourd'hui ? Est-ce que la date ne vous semble pas un peu pour le moins anachronique ?
- "Tout cela est un peu irréel, parce que les événements font qu'il faut se concentrer sur l'international. Mais il en a été décidé ainsi depuis longtemps, allons-y. La décentralisation n'est pas ma "tasse de thé", c'est évident, bien qu'elle soit nécessaire. Aujourd'hui, ce dont ont besoin les Français, c'est un Etat, un Etat qui se fait respecter, qui fait respecter ses lois, sa justice, sa volonté de solidarité et l'aménagement du territoire. Bref, on doit, aujourd'hui, non pas avoir moins d'Etat, mais un Etat plus capable de remplir ses missions. Dans ce cadre, il y a des orientations qu'il faut suivre. La déconcentration des services de l'Etat, le transfert de compétences, oui, j'y suis favorable, mais après avoir réaffirmé l'autorité de l'Etat..."
C'est-à-dire que ce que vous craignez, c'est qu'en fait, la décentralisation mette des strates successives de responsabilité et qu'il y ait une dilution du pouvoir central ?
- "Je crois que certains confondent décentralisation et simplification administrative. Mais la majorité des députés et des sénateurs ont décidé de réformer la Constitution ; eh bien, réformons la Constitution !"
J.-P. Raffarin, ce matin, reconnaît que la situation économique est évidemment moins florissante qu'on ne pouvait l'espérer, avec 1,3 % de croissance. Est-ce qu'il ne va pas y avoir une vraie difficulté pour le Gouvernement, de mener ses réformes, à commencer par la première, c'est-à-dire celle des retraites ?
- "Je crois que la réforme des retraites est nécessaire. On n'a que trop parlé, on n'a que trop tergiversé. On sait très bien qu'à partir de 2006-2007, il y aura un problème pour les règlements des retraites. Par conséquent, c'est l'honneur de ce Gouvernement et de J.-P. Raffarin de vouloir coûte que coûte essayer de réformer le système des retraites, pour que tous les Français, dans l'avenir, aient une retraite décente."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 17 mars 2003)