Texte intégral
Q - La guerre n'est-elle pas désormais inévitable ?
R - Il faut tout faire pour l'éviter. Malgré des préparatifs de plus en plus lourds, la France maintient le cap, et elle n'est pas seule. Nous pensons toujours que le désarmement de l'Iraq ne passe pas automatiquement par une guerre. Même si le désarmement complet ne doit pas prendre un temps infini
Q - Quelles seraient les conséquences du veto dans nos relations avec les Américains ?
R - La crise que connaît le monde est grave. Celle que risque de subir l'ONU l'est tout autant. Chacun a conscience des responsabilités qui sont les siennes. On a bâti la Charte des Nations unies après la Seconde guerre mondiale. Il serait très regrettable que ce système fondé sur le droit international chancelle, voire disparaisse, alors qu'au contraire nous avons absolument besoin d'un système de légalité internationale qui ne peut plus être celui de la division du monde en deux blocs.
Q - Les Américains sont-ils toujours nos alliés ?
R - Non seulement nos alliés, mais nos amis ! Nous avons simplement une vision très différente des équilibres du monde. Des équilibres qui dépendent de tous : des Etats-Unis, de l'ONU, de l'Europe et aussi de chaque pays européen.
Q - On sent une montée de l'antiaméricanisme
R - Je ne crois pas que l'on puisse, aujourd'hui, parler d'antiaméricanisme en France. En tout cas, il y en a moins qu'à l'époque où j'étais étudiante. Ce qui est contesté, c'est la tentation des Américains d'imposer seuls un modèle culturel et social de mondialisation.
Q - Et les attaques contre la France ?
R - Je les trouve extrêmement inquiétantes. Les invectives des tabloïds britanniques font partie du mode d'expression d'une presse poubelle en vigueur là-bas. Mais aux Etats-Unis, la francophobie, c'est autre chose : cela restera une blessure.
Q - L'Europe vient d'étaler ses divisions à l'occasion de la crise iraquienne
R - Je suis choquée d'entendre des gens se prétendant pro-européens dire à la façon des anti-européens : "Il n'y a pas de consensus permanent. Alors, arrêtons tout. Faisons une croix sur la future Constitution, sur les politiques communes et même sur l'élargissement". La réponse à la crise, c'est qu'il faut, au contraire, faire mieux et plus vite. Sûrement pas revenir en arrière.
Q - C'est pourtant un constat d'échec
R - Mais pas du tout ! Globalement, l'Europe a été, pour les Européens, un espace de paix, de croissance et de sécurité. Elle est plus utile encore aujourd'hui qu'hier : il s'agit de bâtir quelque chose qui réponde aux interrogations des peuples. Les mêmes interrogations qu'après la Seconde guerre mondiale.
Q - L'Europe n'est pas près de parler d'une seule voix.
R - Ne l'oublions pas : c'est seulement en 1992, en pleine crise des Balkans et alors que l'Europe était totalement déchirée, que la Politique étrangère et de sécurité commune a été inscrite dans le Traité de Maastricht. Cette politique-là était alors inexistante. Depuis, elle a commencé à émerger. Il faut aller de l'avant. La position prise aujourd'hui par la France dans la crise iraquienne doit aider à l'émergence d'une conscience européenne.
Q - La visite en Algérie de Jacques Chirac a été triomphale...
R - Il y a un lien sentimental entre Français et Algériens. Les mains tendues par les jeunes, à Alger comme à Oran, symbolisent la volonté des deux nations de se rejoindre.
Q - Des mains tendues qui réclament des visas ?
R - Cela veut dire qu'ils ont envie de venir chez nous. Que la France représente pour eux le pays de cocagne, c'est formidable. C'est un signe que les blessures de la guerre d'Algérie, l'incompréhension et le rejet de la France qui existaient chez une partie des dirigeants et de la population appartiennent désormais à l'Histoire.
()./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 mars 2003)
R - Il faut tout faire pour l'éviter. Malgré des préparatifs de plus en plus lourds, la France maintient le cap, et elle n'est pas seule. Nous pensons toujours que le désarmement de l'Iraq ne passe pas automatiquement par une guerre. Même si le désarmement complet ne doit pas prendre un temps infini
Q - Quelles seraient les conséquences du veto dans nos relations avec les Américains ?
R - La crise que connaît le monde est grave. Celle que risque de subir l'ONU l'est tout autant. Chacun a conscience des responsabilités qui sont les siennes. On a bâti la Charte des Nations unies après la Seconde guerre mondiale. Il serait très regrettable que ce système fondé sur le droit international chancelle, voire disparaisse, alors qu'au contraire nous avons absolument besoin d'un système de légalité internationale qui ne peut plus être celui de la division du monde en deux blocs.
Q - Les Américains sont-ils toujours nos alliés ?
R - Non seulement nos alliés, mais nos amis ! Nous avons simplement une vision très différente des équilibres du monde. Des équilibres qui dépendent de tous : des Etats-Unis, de l'ONU, de l'Europe et aussi de chaque pays européen.
Q - On sent une montée de l'antiaméricanisme
R - Je ne crois pas que l'on puisse, aujourd'hui, parler d'antiaméricanisme en France. En tout cas, il y en a moins qu'à l'époque où j'étais étudiante. Ce qui est contesté, c'est la tentation des Américains d'imposer seuls un modèle culturel et social de mondialisation.
Q - Et les attaques contre la France ?
R - Je les trouve extrêmement inquiétantes. Les invectives des tabloïds britanniques font partie du mode d'expression d'une presse poubelle en vigueur là-bas. Mais aux Etats-Unis, la francophobie, c'est autre chose : cela restera une blessure.
Q - L'Europe vient d'étaler ses divisions à l'occasion de la crise iraquienne
R - Je suis choquée d'entendre des gens se prétendant pro-européens dire à la façon des anti-européens : "Il n'y a pas de consensus permanent. Alors, arrêtons tout. Faisons une croix sur la future Constitution, sur les politiques communes et même sur l'élargissement". La réponse à la crise, c'est qu'il faut, au contraire, faire mieux et plus vite. Sûrement pas revenir en arrière.
Q - C'est pourtant un constat d'échec
R - Mais pas du tout ! Globalement, l'Europe a été, pour les Européens, un espace de paix, de croissance et de sécurité. Elle est plus utile encore aujourd'hui qu'hier : il s'agit de bâtir quelque chose qui réponde aux interrogations des peuples. Les mêmes interrogations qu'après la Seconde guerre mondiale.
Q - L'Europe n'est pas près de parler d'une seule voix.
R - Ne l'oublions pas : c'est seulement en 1992, en pleine crise des Balkans et alors que l'Europe était totalement déchirée, que la Politique étrangère et de sécurité commune a été inscrite dans le Traité de Maastricht. Cette politique-là était alors inexistante. Depuis, elle a commencé à émerger. Il faut aller de l'avant. La position prise aujourd'hui par la France dans la crise iraquienne doit aider à l'émergence d'une conscience européenne.
Q - La visite en Algérie de Jacques Chirac a été triomphale...
R - Il y a un lien sentimental entre Français et Algériens. Les mains tendues par les jeunes, à Alger comme à Oran, symbolisent la volonté des deux nations de se rejoindre.
Q - Des mains tendues qui réclament des visas ?
R - Cela veut dire qu'ils ont envie de venir chez nous. Que la France représente pour eux le pays de cocagne, c'est formidable. C'est un signe que les blessures de la guerre d'Algérie, l'incompréhension et le rejet de la France qui existaient chez une partie des dirigeants et de la population appartiennent désormais à l'Histoire.
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(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 mars 2003)