Déclaration de Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie, sur l'impact de la compétitivité des entreprises sur le développement durable, notamment grâce à leur maîtrise des consommations d'énergie, à Nice le 16 avril 2003.

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Circonstance : 3è rencontre du débat national sur les énergies à Nice, le 16 avril 2003

Texte intégral

C'est avec joie que je me trouve aujourd'hui parmi vous pour cette troisième rencontre du débat national sur les énergies. J'ai été très sensible à l'émoi légitime qu'a pu soulever dans cette région la récente attribution des créneaux aériens par l'Association de coordination des horaires. Je tiens à dire que le Ministre des transports, Dominique Bussereau et moi-même sommes conscients des difficultés que le département pourrait rencontrer si les choses n'étaient pas modifiées : une table ronde sera donc organisée étudier les solutions alternatives.
Le thème de ce débat est délicat : comment la compétitivité des entreprises et les responsabilités environnementales de ces dernières peuvent se combiner ? Ces deux thèmes sont également complémentaires et doivent permettre de faire de l'entreprise le premier acteur du développement durable.
Je souhaite insister sur deux constats. Les consommations d'énergie évoluent à un rythme nous conduisant à une double impasse :
- environnementale:
Au rythme actuel, les émissions de gaz à effet de serre seront triplées d'ici 2050. Il est donc impératif de diviser les émissions de gaz à effet de serre par 2, voire par 4 pour les pays industrialisés
- économique:
Alors que les réserves de pétrole ou de gaz s'amenuisent de plus en plus, la consommation d'énergie ne cesse d'augmenter. La perspective d'une extinction des ressources pétrolières à un horizon prévisible est donc réaliste. Il faut ajouter que la concentration des ressources dans un certain nombre de pays présente de nombreux risques.
Le modèle actuel de notre développement n'est donc pas durable. Il nous faut maîtriser nos dépenses.
Comment concilier compétitivité et maîtrise des consommations ? Tel est l'enjeu de ce débat. Grâce notamment à vos nombreuses contributions, nos entreprises disposent des atouts nécessaires pour atteindre cet objectif. Le plan éco-énergie, qui associe l'Etat, les collectivités locales de la Région, EDF, l'Ademe et les Conseils Généraux, devrait également contribuer à l'atteinte de cet objectif. Le développement de l'énergie solaire - et je tiens à féliciter ici l'initiative de l'hôtel Novotel de Sophia-Antipolis- est à cet égard exemplaire.
La première table ronde a montré que l'industrie avait su faire des économies importantes dans le domaine énergétique, sa part dans la consommation totale d'énergie n'ayant cessé de croître, tant en valeur absolue que relative. Outre la tertiarisation de notre économie, cette évolution s'explique par les efforts réalisés par les industriels. C'est ainsi que la France est 6 fois plus performante que la Chine.
Ce relatif succès ne doit pas masquer de grosses différences. Aujourd'hui, 0,3 % des entreprises de 6 secteurs (chimie, agro-alimentaire, papier, ciment, etc) consomment plus de la moitié des énergies ! J'ai bien entendu les demandes des entreprises de disposer de l'énergie la moins cher possible et les espoirs nés de l'ouverture à la concurrence. Il est de notre responsabilité que le développement de l'énergie renouvelable ne se traduise pas par un accroissement des coûts et, à terme, une délocalisation. Soyez assuré que notre gouvernement en est tout à fait conscient.
Des solutions existent. J'ai ainsi noté la généralisation des audits énergétiques, le soutien à la recherche, la diffusion des bonnes pratiques, la réalisation d'opérations pilotes ou le développement des actions de l'ADEME. Ces pistes devront enrichir le projet de loi d'orientation sur les énergies que je présenterai au Parlement.
Nous devons également élargir notre réflexion à l'ensemble du cycle de vie d'un produit, de la conception au recyclage, en passant par la fabrication et l'utilisation. Nous constatons ainsi un certain nombre de nouveautés : le recours systématique au remplacement plutôt qu'à l'entretien et la réparation, la délocalisation, le recours aux flux tendus... Dès lors, comment mobiliser les moyens de la puissance publique pour apporter des réponses au développement des tendances que je viens de rappeler ? Comment favoriser l'éco-conception ? Quelle place donner aux consommateurs et à leur information ? N'est-il pas temps pour les industriels d'aller plus loin ?
Enfin, évoquons la question des transports. Ce secteur est celui dont l'évolution est la plus préoccupante : il représente 30 % de nos consommations et 35 % des émissions de CO2, ces évolutions allant en outre de manière croissante. Comment diminuer la demande de transport ? Doit-on augmenter le prix et la fiscalité (mais cela pénalisera nos entreprises par rapport aux concurrents européens) ? Que penser du péage pour les poids lourds mis en place en Allemagne ? Qu'attendre de la recherche sur les véhicules ? Comment rééquilibrer la répartition du transport entre la route, le rail et la voie fluviale.
Les questions sont encore nombreuses ; j'attends que la troisième table ronde éclaire les réponses à apporter.
Je ne peux que vous encourager à faire preuve d'imagination pour inventer les voies d'un développement durable. Nous savons tous que, par chance, l'intelligence est la première des énergies renouvelables qui ne s'use que lorsque l'on ne s'en sert pas.
Il nous faudra apprendre à maîtriser la demande énergétique. Pour y parvenir, des innovations scientifiques et technologiques sont nécessaires. J'ai ainsi lancé récemment un plan de nature à encourager les innovations industrielles en la matière ; ce sera un gage de compétitivité pour notre économie, et donc nos entreprises. Un effort doit être engagé, effort nécessitant des relations étroites entre les entreprises et les associations. A ce titre, Sophia-Antipolis me paraît bien placé pour être un des pôles choisis pour cette concertation. Je m'y rendrai au mois de mai 2003 pour étudier comment faire travailler ce pôle en synergie avec le groupe de travail que j'ai mis en place en vue d'identifier certaines recommandations.
La maîtrise de l'énergie s'inscrit pleinement dans la marche en avant de l'économie contemporaine. Votre collaboration, la collaboration de toute la région, nous sera précieuse. Je vous remercie.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 22 avril 2003)