Déclaration de M. Christian Poncelet, président du Sénat, sur les enjeux des transports publics, la nécessité de développer les réseaux de communication européens et le ferroutage et sur la sécurité des marchandises et des voyageurs, au Sénat le 8 décembre 1999.

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Circonstance : Colloque "Quels enjeux pour les transports publics ?" au Sénat le 8 décembre 1999

Texte intégral

Mesdames, messieurs les parlementaires,
Monsieur le maire de Strasbourg,
Mesdames, messieurs,
D'emblée je voudrais féliciter le sénateur Charles Descours d'avoir choisi cette date du 8 décembre pour organiser un colloque consacré aux enjeux des transports publics. Il apporte ainsi la démonstration de la capacité du Sénat à anticiper sur les grands dossiers d'avenir, et celui des transports publics, outils majeurs d'aménagement du territoire, en est à l'évidence un. Capacité d'anticipation, disais-je puisque le conseil européen des Transports ne débattra que demain des questions que vous aurez, vous, évoquées aujourd'hui. Je veux parler, vous l'aurez compris, du transport des marchandises, du fret européen et du ferroutage.
Les propositions de la Commission européenne qui seront discutées demain visent à développer le transport européen de fret tout en exigeant un haut niveau de sécurité tant en ce qui concerne la qualification du personnel que le matériel roulant et l'organisation. Et je tiens à saluer à cette occasion la détermination du ministre des Transports, M. Jean-Claude Gayssot, qui a défendu le projet de création d'un réseau de fret ferroviaire transeuropéen. En effet, ce n'est que si l'on créé des conditions d'exploitation compétitives en mettant en place une véritable interopérabilité des réseaux et une tarification qui prenne en compte ce que les experts appellent les "effets externes", c'est-à-dire notamment les nuisances environnementales, afin d'assurer une concurrence équitable entre le rail et la route, que le ferroutage aura véritablement toute ses chances. Nous sommes tous convaincus de ce que mettre des remorques de camions ou des conteneurs sur des trains est préférable, au regard de la sécurité, à une circulation de ces mêmes marchandises par la route. Encore faut-il faire en sorte que cette solution constitue pour l'entrepreneur un choix économique pertinent.
Je viens de parler de la sécurité des marchandises. Mais vous avez aussi choisi de consacrer une partie de vos travaux à la sécurité des voyageurs dans les transports publics. Je crois qu'il faut ici dépasser le constat pour adapter l'offre de transport à ce risque nouveau tout en s'efforçant d'en éradiquer les causes. Les grandes entreprises de transport public ont déjà imaginé des solutions : la RATP a ainsi commencé à faire circuler dans le métro un matériel à rame unique. Je sais que la SNCF étudie, en Ile-de-France, la possibilité, aux heures de faible fréquentation, notamment en fin de soirée, d'adapter la longueur des trains pour éviter que des voyageurs, peu nombreux, ne soient disséminés dans des voitures presque vides. Aux élus et aux pouvoirs publics de créer parallèlement, par des politiques adaptées, notamment en matière d'aménagement urbain, un environnement plus propice à la sécurité tout court.
Cet après-midi, vous aborderez le problème du développement des véhicules propres. Je ne veux pas allonger abusivement mon propos introductif, mais permettez-moi d'en aborder seulement un aspect qui concerne directement le Parlement : je veux parler de la fiscalité des transports publics. Je pense qu'il faut être cohérent sur ce point : le gouvernement se dit favorable au développement des transports publics, notamment parce qu'il est plus protecteur de l'environnement. Lors de la discussion budgétaire à l'Assemblée nationale, ce même gouvernement a pourtant fait repousser, par une seconde délibération, un amendement du rapporteur du budget des transports terrestres qui visait précisément à encourager les transports publics en leur permettant d'être remboursés de la hausse de la TIPP prévue cette année. Le gouvernement a ainsi refusé pour les transports publics ce qu'il a accepté pour les poids lourds ! Depuis 1992 les opérateurs de transports publics urbains de neuf pays européens bénéficient d'une exonération totale ou partielle de taxe sur les carburants. Si le gouvernement français entend véritablement favoriser les transports publics, pourquoi refuse-t-il de s'engager dans la voie d'une incitation fiscale largement pratiquée en Europe ?
Par ces quelques réflexions j'ai voulu souligner tout l'intérêt que j'attachais à vos travaux et combien j'étais heureux de pouvoir les accueillir au Sénat. Je vous souhaite donc bon travail à tous !
(source http://www.senat.fr, le 25 janvier 2000)