Texte intégral
Monsieur le Président
Mesdames, Messieurs,
C'est avec beaucoup de plaisir que je viens clôturer les travaux de votre Assemblée Générale. J'en mesure - croyez le bien - toute l'importance et les enjeux.
C'est pour moi l'occasion de revenir en Normandie, une région qui a été à l'honneur au Salon de l'Agriculture, qui m'est familière, et présente de nombreux points communs avec la Savoie.
Plus qu'ailleurs, les éleveurs, et notamment les éleveurs laitiers, ont contribué depuis des siècles à façonner les paysages et les sites bas-normands, et a conforter la vigueur de cette filière et à valoriser ses productions.
Au cours de votre congrès, vous avez réfléchi à l'avenir de cette filière sous deux aspects, qui, d'ailleurs, se rejoignent : quel prix pour le produit du travail et quelle organisation économique derrière les projets de réforme des politiques agricoles ?
Je reviendrai moi-même sur ces questions. Mais, cette fin mars marque la fin de campagne, et vous comprendrez - j'en suis sûr - que je veuille vous en dire également quelques mots.
Dès le début de cette campagne, la production s'est avérée supérieure à celle de l'année précédente, dont le niveau était déjà très élevé. Cet été, la perspective d'un important dépassement semblait inéluctable aux acteurs de la filière comme à l'administration. Vous avez alors décidé de communiquer fortement, sous l'égide de l'ONILAIT, de façon à modérer la collecte. En janvier, vous m'avez demandé d'intervenir, à mon tour, pour diffuser un message d'alerte et de fermeté.
J'ai entendu vos arguments, et j'ai pensé qu'il ne fallait pas privilégier ceux qui spéculeraient sur la sagesse des autres. Il y avait, il n'y a pas encore si longtemps, un slogan que la FNPL faisait sien : " Respectons ceux qui respectent les règles ". Celui-ci conserve encore toute sa pertinence.
Le communiqué commun que nous avons adressé, pour la première fois dans l'histoire des quotas, à l'ensemble des producteurs n'a pas fait que des heureux. Mais, force est de constater qu'il a porté ses fruits : depuis plusieurs semaines nous enregistrons, en effet, une baisse importante de la collecte. Un grande nombre d'éleveurs a accepté de sacrifier une partie de leur production, pour remplir l'objectif que nous nous étions fixés, et je veux les en remercier.
Il est, encore, trop tôt pour savoir si cet effort sera suffisant. Mais certains me demandent déjà, si cette opération s'avérait réussie, de réexaminer les grandes lignes de cette fin de campagne, au moins au niveau de certaines zones ou pour certains types de producteurs.
Alors que nous saurons d'ici une semaine si la France sera ou non en dépassement, je ne veux laisser subsister aucun doute à ce sujet. Sachez que, si je suis sensible aux situations les plus difficiles, j'entends m'en tenir à ce qui a été prévu, pour autant que les disponibilités de fin de campagne le permettent. Pour votre part, je vous invite à ne pas relâcher vos efforts dans les jours qui viennent.
Mais, quel que soit le résultat final, nous pourrons, je crois, nous réjouir, une nouvelle fois, de l'esprit de cohésion et de discipline qui a prévalu.
Cette cohésion de la filière laitière m'a beaucoup impressionné. Au fil des années, votre interprofession a pu conclure de nombreux accords, dont les plus connus portent sur les prix. Son fonctionnement constitue, de mon point de vue, une référence pour d'autres filières.
Vous avez consacré vos travaux, Mesdames, Messieurs, a cette question du prix. Malgré certaines interrogations, le bilan de votre interprofession demeure largement positif sur ce point, particulièrement si on compare ce secteur à d'autres.
L'élu savoyard que je suis ne peut ignorer combien la réflexion des acteurs de votre filière sera importante, pour que la question d'un prix rémunérateur soit non seulement un résultat, mais aussi un objectif. Un objectif partagé par tous.
L'équilibre à trouver est complexe. Car si les prix ne sont pas rémunérateurs - chacun de vous le sait - la production sera sévèrement amputée de la majeure partie de ses forces vives, en l'espace d'une génération.
Les agriculteurs aspirent - on le comprend - à plus de temps libre et à des conditions de travail comparables à celles du reste de la société. Au delà, la dévalorisation des métiers agricoles tient également à la dévalorisation des valeurs du travail dans la société.
Si l'augmentation du prix du lait à la production n'apportera pas, seule, de réponse satisfaisante, des prix bas ne viendraient qu'aggraver ce phénomène. L'intérêt bien compris de la filière consiste donc à préserver un " juste prix du lait ". Dans une économie rendue fortement concurrentielle par l'ouverture des marchés, et la concentration de la distribution, conserver un prix adéquat semble pourtant une gageure.
En combinant une indexation sur les marchés et un dispositif qui en atténue les variations, votre interprofession a apporté une réponse à la fois originale et efficace. Elle est parvenue à stabiliser les prix sans pour autant les déconnecter de la concurrence. Elle a ainsi favorisé à la fois les investissements et le renouvellement des générations.
Ces derniers mois, au terme de longues négociations, vous avez, une nouvelle fois, fait évoluer votre indexation, votre modal prix, en lui intégrant les produits de grande consommation, les " PGC ".
Ces PGC sont des produits qui doivent moins leur valeur aux ingrédients qu'ils contiennent qu'à l'emballage, aux frais commerciaux, ou de publicité, et à la pratique des marges arrières Sur ce dernier point, je crois être en mesure de vous rassurer, Monsieur le Président : d'une part, les actions pénales seront poursuivies ; d'autre part, Renaud DUTREIL et moi tiendrons notre engagement de prévenir toute pratique de prix abusivement bas, notamment en période de crise. Nous présenterons prochainement un texte au Parlement, en ce sens.
Vous avez trouvé une clé de répartition tenant compte de leur contribution dans l'écoulement de la production, et je veux vous en féliciter ...
Cette évolution me semble extrêmement heureuse. Quel que soit, en effet, le résultat des prochaines négociations de la PAC et de l'OMC, les prix de ces PGC devraient être moins affectés par des bouleversements artificiels que ceux du beurre ou de la poudre.
Ainsi, votre filière a-t-elle anticipé des évolutions, d'ailleurs inéluctables. Elle offre également une image positive de dynamisme et de stabilité, aux jeunes qui souhaiteraient embrasser une carrière dans le secteur laitier.
Lors de mes déplacements en régions - et je visite chaque semaine un nouveau département -, je suis toujours frappé par les craintes suscitées - faute de perspectives et d'une attractivité suffisante - par un non-renouvellement des générations.
Cela ne m'empêche pas de souvent rencontrer des jeunes enthousiastes et toujours prêts " à y aller ".
Pour relever le défi des installations, il nous faudra toutefois beaucoup d'énergie. Car ce dont les producteurs ont besoin, ce sont avant tout de perspectives à long terme pour notre agriculture et leurs exploitations. Après une négociation difficile avec Bruxelles, mon collègue chargé des Finances et mon collègue chargé du Budget, je peux aujourd'hui vous assurer que le système des prêts bonifiés à l'agriculture sera maintenu avec un taux équivalent pour tous les agriculteurs. S'agissant des prêts spéciaux à l'élevage, leur taux sera même abaissé de 4,5 % à 4 %.
Comme vous le savez, cette visibilité est d'autant plus faible que l'avenir des filières agricoles, va fortement dépendre des négociations engagées devant l'OMC et, par contrecoup, à Bruxelles, au sein de l'Union Européenne.
Penser globalement, agir localement, telle est la difficulté, mais peut être aussi la beauté des missions d'un Ministre de l'Agriculture. Car c'est en demeurant toujours au contact du terrain que je serai le plus pertinent dans les négociations où se joue l'avenir de l'agriculture française, et, c'est en étant fortement présent à l'étranger que je défendrai le plus efficacement les agriculteurs de notre pays.
Il ne faut pas se cacher, nous sommes engagés dans un débat très dur, à la fois au niveau communautaire et dans le cadre de l'OMC. Nous ne l'emporterons véritablement que si nous voulons et avons la capacité de nouer des alliances. Car la France ne peut décider seule. Mais, elle n'est pas, pour autant, isolée comme on l'entend trop souvent.
Une première étape a été franchie, l'an dernier. Certains voulaient alors lier la revue à mi-parcours de la PAC aux négociations concernant l'élargissement. Mais, l'accord conclu à Bruxelles entre le Président Jacques CHIRAC et le Chancelier Gerhärd SCHRODER a marqué un tournant pour la Politique Agricole Commune. Soumise jusque là à une lente dérive vers la récession, la PAC a alors retrouvé une impulsion politique. Cet accord, que j'avais activement préparé avec mon homologue allemand, a, en effet, permis de stabiliser les ressources de la PAC jusqu'en 2013 et de lui redonner les perspectives qu'elle ne pouvait trouver dans les projets de la Commission.
Nous sommes désormais engagés dans la négociation de la revue à mi-parcours. A cette occasion, nous avons obtenu le maintien des quotas, et cet acquis fondamental ne sera pas remis en cause par le Conseil. Cela nous a été confirmé mardi.
Depuis longtemps, l'organisation communautaire du marché du lait et des produits laitiers, l'OCM lait, a fait la preuve de son efficacité. Celle-ci a constamment fait l'objet d'ajustements, mais les principes sur lesquels elle repose sont demeurés inchangés depuis 1984. Avec les quotas laitiers, l'Europe s'est dotée d'un moyen de régulation de l'offre, qui est venu s'ajouter aux instruments plus classiques d'intervention et d'exportations avec restitutions.
En France, où nous sommes les seuls en Europe à avoir adopté une gestion non marchande et départementalisée, le système des quotas a très efficacement contribué à l'aménagement de notre territoire.
Le maintien de la production laitière dans chaque département n'a pas empêché une importante restructuration interne. Personne ne peut contester que le bilan des quotas laitiers est excellent dans ce domaine. La Commission elle-même en faisait récemment le constat.
Pour autant, un petit groupe d'états membres veut en finir avec ce régime. Il avait cru l'emporter à Berlin, lors des discussions de l'Agenda 2000. Sous l'impulsion du Président CHIRAC, la France avait alors obtenu que toute réforme en ce sens soit repoussée à 2008, après l'organisation d'un débat en 2003.
En proposant, en revanche, d'avancer d'un an la baisse des prix de soutien et d'augmenter le niveau des quotas encore plus que cela n'était le cas à Berlin, la Commission poursuit clairement un objectif de prix intérieurs bas.
C'est pourquoi, je partage, Monsieur le Président, votre analyse : avec cette réforme, c'est bien le principe fondateur des quotas que l'on remettrait en cause.
La France ne peut accepter un tel bouleversement de la politique laitière européenne. Car il porterait un coup fatal au maintien de prix stables et rémunérateurs, d'une production largement répartie sur notre territoire, et d'un cadre stable pour les jeunes souhaitant s'installer.
Vous avez accepté les contraintes des quotas, et les avez intégrées dans votre gestion, vos investissements, et l'organisation même de votre profession.
Vous l'avez fait, parce que ce système offrait une perspective de prix rémunérateurs et stables. Ces prix rémunérateurs qui font tellement - je l'ai dit - pour la confiance des investisseurs et pour le renouvellement des générations.
J'ai défendu cette position lundi dernier, devant Conseil des ministres européens de l'Agriculture. Dans son refus de la proposition de la Commission, la France est loin d'être isolée. Et rien dans la situation des marché n'offre de justification à une baisse des prix et des quotas.
L'an prochain, l'Europe accueillera 10 nouveaux Etats membres, parmi lesquels la Pologne, le quatrième producteur laitier de notre continent. Je compte sur l'appui de vos organisations, dans les enceintes européennes où elles sont représentées, pour faire prévaloir notre vision commune de la politique laitière.
Je ne veux pas feindre d'ignorer les difficultés que nous avons rencontré pour maintenir ce régime de quotas. Je sais que ceux-ci ont produit des effets pervers, dans la plupart des pays où un système marchand est en vigueur. Je pense notamment au fameux problème des sofa milkers qui - soit dit en passant - devrait faire réfléchir tous les partisans d'un découplage total.
Je sais également que le niveau actuel des prix est supérieur à celui des commodities sur le marché mondial et qu'il le demeurerait, fût-ce après une baisse de 15 %. Mais je conteste totalement les principe qui sous-tend cet argument et son exploitation dans les négociations devant l'OMC.
Les nombreuses études conduites par l'INRA, l'ONILAIT, le CFCE, l'Institut de l'Elevage et votre interprofession l'ont montré. Les travaux de CONGRILAIT - et je voudrais rendre une nouvelle fois hommage à ceux d'entre vous qui ont pris une part active à son organisation - l'ont également souligné : les produits laitiers sont avant tout des produits domestiques, mais qui, quelle que soit leur forme, demeurent périssables, riches en eau, et difficiles à transporter.
Chaque région du monde a des habitudes alimentaires et des produits laitiers spécifiques. L'organisation de la filière varie également selon les pays et, avec elle, le prix du lait.
Seuls 6 % de la production mondiale, commercialisée sous forme de produits secs, font l'objet d'une cotation mondiale. Ce " cours mondial " se situe toujours en deçà des prix intérieurs. C'est le cas, même en Nouvelle-Zélande, où une prime spéciale vient compenser l'inconvénient de devoir désaisonner la production pour la consommation intérieure.
Dans ce pays, la grande majorité du lait est utilisée pour la fabrication de commodities. Elle est vendue à un prix proche du " cours mondial ". C'est la seule exception dans le monde.
Or, au nom de l'orthodoxie libérale, on prétend que les cours intérieurs doivent d'aligner sur ce cours mondial, pour que l'économie progresse.
Il n'y aurait alors plus de droits de douane, plus d'aides aux agriculteurs, pour entraver les échanges. Tous les producteurs surnuméraires auraient alors disparu. Voilà la chimère que certains poursuivent à l'OMC.
En matière laitière, cela reviendrait à aligner 94 % des échanges sur le régime des 6 % restants. Ce serait croire que ce qui est bon pour la Nouvelle Zélande serait également bon pour le reste du monde et vouloir que le monde entier suive son régime.
Je m'opposerai - je vous le dis avec conviction - à ce que la politique européenne dérive dans ce sens.
Car le prix mondial est un " leurre meurtrier ". Il n'est le résultat ni d'un équilibre social, ni d'un équilibre environnemental. Il réduit l'agriculture à une seule activité de production et d'échanges de biens marchands.
Or, l'agriculture, l'alimentation et la ruralité occupent en France une importance historique et culturelle bien supérieure à celle des autres pays. Nous n'avons pas à rougir de ce que les générations qui nous précèdent, nous ont transmis, et il n'y a aucune raison que nous soyons empêchés à l'OMC de conduire une politique agricole.
C'est là un message que nous devons populariser au sein des enceintes de l'OMC. Sachez que je m'y emploie avec ardeur et détermination.
La deuxième mouture des propositions de Stuart HARBINSON ne me paraît pas satisfaisante, car elle ne comporte aucune des avancées que nous réclamions, et fait exagérément prévaloir les positions du groupe de Cairns et des Etats-Unis. Elle ne peut constituer une base acceptable de négociation et n'apporte aucune réponse aux problèmes des pays les plus pauvres.
Durant cette assemblée générale, vous avez souhaité, Monsieur le Président, redonner des perspectives aux éleveurs laitiers, et notamment aux plus jeunes d'entre eux. Je sais que les discussions communautaires les inquiètent, mais je voudrais leur dire que leur évolution, ces derniers mois, doit plutôt les rassurer : car la PAC sera financée, les quotas seront maintenus, et l'élargissement ne condamnera pas son économie générale.
Je suis parfaitement conscient que le danger d'un mauvais accord à l'OMC subsiste. Mais, je vous le dis solennellement et avec la pleine conscience de mes responsabilités, ni le Président de la République, ni le Premier ministre, ni moi-même ne ménagerons nos efforts pour préserver la PAC et notamment son régime laitier.
D'autres inquiétudes nuisent également au moral des jeunes. Vous avez vous-mêmes évoqué la multiplication de la paperasserie et la mise en oeuvre sans nuance des prescriptions environnementales.
Les exigences des consommateurs et des citoyens, ou plutôt de ce qui en tient lieu dans les instances communautaires, génère une prolifération de règles et de normes. Je suis toujours surpris que l'on édicte autant de normes, en même temps qu'on réclame un alignement sur la base du cours mondial. Car la première est l'antithèse du second.
L'harmonisation des tarifs et des normes devraient aller de pair. Je suis reconnaissant à la Commission d'avoir fait, en son temps, des propositions en ce sens. Hélas, nos partenaires à l'OMC leur ont opposé une fin de non-recevoir. Cette expérience devrait nous dissuader de toute précipitation en matière de concessions tarifaires.
Quoi qu'il en soit, les contraintes européennes, nationales, et parfois locales, les exigences de plus en plus pointilleuses du voisinage participent de ce malaise.
J'en ai très vite pris conscience, et j'ai souhaité me déplacer sur le terrain avec ma collègue, Roselyne BACHELOT, afin de le dissiper. Le 18 juillet dernier, nous nous sommes ainsi rendus à Rennes, pour visiter une exploitation laitière, particulièrement représentative et bien gérée.
Nous avons pu mesurer combien les éleveurs n'étaient pas hostiles aux améliorations environnementales. Comment pourrait-il en être autrement d'ailleurs ? Car ce sont eux qui ont jusqu'ici le plus préservé notre environnement dans les zones rurales, et sont les premiers à souffrir d'éventuelles dégradations.
Ce qu'ils acceptent, en revanche, avec difficulté, c'est d'une part les effets de la sur-administration : des règlements complexes, des contrôles pointilleux ...
Et d'autre part, un climat général de défiance entretenu par la multiplication des contrôles, mais aussi parfois par les prises de positions publiques de certains de mes prédécesseurs.
Ensemble, Roselyne BACHELOT et moi avons voulu mettre un terme à ce climat, et vous aurez constaté que nous marchons désormais la main dans la main, et pleinement à l'écoute des agriculteurs.
Dans le même temps, nous avons voulu profondément simplifier les dispositifs en vigueur. Nous avons travaillé sur ces questions avec les organisations professionnelles, et cette entreprise s'est avérée aussi ardue qu'on pouvait le craindre.
Car rendre plus complexe, c'est facile ; mais rendre plus simple, c'est toujours beaucoup plus difficile.
La contrainte européenne demeure forte. Des décisions de justice nous obligent, et d'autres viendront renforcer ces contraintes.
Le comité de simplification mis en place l'été dernier a accompli un travail important. Lors de sa dernière réunion le 4 mars, il a validé des orientations. D'ici Pâques, une circulaire sera publiée conjointement avec le Ministère de l'Ecologie et du Développement durable. Elle comportera des mesures concrètes et immédiates de simplification administrative. Elle s'attachera également à la coordination entre les procédures PMPOA, nitrates et ICPE. Elle légitimera, par ailleurs, les modes de traitement à moindre coût. C'est le cas des filtres à pailles ou des bassins tampons avec épandage mécanisé pour les prairies. Enfin, d'autres procédés pour les petits et moyens élevages sont en cours d'examen et devraient m'être adressées cet été.
Dans le même esprit, la procédure de diagnostic DEXEL, mis au point par l'Institut de l'Elevage, a été revu et simplifié. Ses points de référence passeront de 11 à 5.
J'ai, par ailleurs, été très attentif - je veux vous le dire - à votre proposition d'introduire un audit unique. Certaines de vos propositions vont dans le sens des aménagements déjà préconisés par les comités de simplification. C'est notamment le cas des contrôles uniques pour les aides et pour l'identification. Mais votre proposition va beaucoup plus loin, puisqu'elle ajoute aux contrôles liés aux exigences administratives des contrôles, facultatifs, des signes de qualité.
Votre filière s'est déjà distinguée, à cet égard, par la mise en place d'une Charte des bonnes pratiques. Vous m'avez demandé de soutenir cette démarche. Le Premier ministre et moi-même lui avons apporté notre soutien à l'occasion du Salon de l'Agriculture, et, croyez bien, que nous continuerons à le faire.
Aujourd'hui, c'est à une étape de convergence supplémentaire que vous nous appelez. Comme vous le savez, une partie des contrôles que nous évoquons sont effectués par des organisations professionnelles ou en application de règles voulues par celles-ci. C'est donc, dans le prolongement des travaux en cours du comité de simplification, à un travail conjoint que nous devons nous atteler.
Ce travail devrait, si vous en êtes d'accord, être engagé dès le deuxième semestre, lorsque les groupes de travail seront parvenus à des résultats sur les signes de qualité du Conseil National de l'Alimentation (CNA) et sur les propositions du Comité de simplification.
Je suis confiant que si nous savons travailler en concertation dans ce domaine, nous parviendrons très vite à des résultats significatifs.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Je voudrais conclure mon propos en faisant preuve de la même franchise que celle que vous m'avez témoignée. Votre assemblée générale constitue un moment important pour votre profession, qui - vous l'avez dit - est frappée par une profonde morosité. Pour faire simple, je crois que vous avez voulu me demander si l'on doit " encore y croire ".
Sachez qu'une immense majorité des Français jugent les paysans travailleurs et courageux. C'est également mon cas. Mais, je sais que ceux-ci voient leur avenir de façon sombre.
Je suis néanmoins confiant qu'ensemble nous pourrons une nouvelle fois surmonter les épreuves que vous avez évoquées. Que ce soit au plan international ou au plan intérieur, le Gouvernement travaille dans le sens que vous souhaitez. Au-delà des premiers résultats déjà perceptibles, nous avons toutes les raisons de croire en l'avenir de la filière laitière.
Alors, ma réponse est sans hésitation : " oui, il faut continuer ! "
Je vous remercie.
(Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 21 mars 2003)
Mesdames, Messieurs,
C'est avec beaucoup de plaisir que je viens clôturer les travaux de votre Assemblée Générale. J'en mesure - croyez le bien - toute l'importance et les enjeux.
C'est pour moi l'occasion de revenir en Normandie, une région qui a été à l'honneur au Salon de l'Agriculture, qui m'est familière, et présente de nombreux points communs avec la Savoie.
Plus qu'ailleurs, les éleveurs, et notamment les éleveurs laitiers, ont contribué depuis des siècles à façonner les paysages et les sites bas-normands, et a conforter la vigueur de cette filière et à valoriser ses productions.
Au cours de votre congrès, vous avez réfléchi à l'avenir de cette filière sous deux aspects, qui, d'ailleurs, se rejoignent : quel prix pour le produit du travail et quelle organisation économique derrière les projets de réforme des politiques agricoles ?
Je reviendrai moi-même sur ces questions. Mais, cette fin mars marque la fin de campagne, et vous comprendrez - j'en suis sûr - que je veuille vous en dire également quelques mots.
Dès le début de cette campagne, la production s'est avérée supérieure à celle de l'année précédente, dont le niveau était déjà très élevé. Cet été, la perspective d'un important dépassement semblait inéluctable aux acteurs de la filière comme à l'administration. Vous avez alors décidé de communiquer fortement, sous l'égide de l'ONILAIT, de façon à modérer la collecte. En janvier, vous m'avez demandé d'intervenir, à mon tour, pour diffuser un message d'alerte et de fermeté.
J'ai entendu vos arguments, et j'ai pensé qu'il ne fallait pas privilégier ceux qui spéculeraient sur la sagesse des autres. Il y avait, il n'y a pas encore si longtemps, un slogan que la FNPL faisait sien : " Respectons ceux qui respectent les règles ". Celui-ci conserve encore toute sa pertinence.
Le communiqué commun que nous avons adressé, pour la première fois dans l'histoire des quotas, à l'ensemble des producteurs n'a pas fait que des heureux. Mais, force est de constater qu'il a porté ses fruits : depuis plusieurs semaines nous enregistrons, en effet, une baisse importante de la collecte. Un grande nombre d'éleveurs a accepté de sacrifier une partie de leur production, pour remplir l'objectif que nous nous étions fixés, et je veux les en remercier.
Il est, encore, trop tôt pour savoir si cet effort sera suffisant. Mais certains me demandent déjà, si cette opération s'avérait réussie, de réexaminer les grandes lignes de cette fin de campagne, au moins au niveau de certaines zones ou pour certains types de producteurs.
Alors que nous saurons d'ici une semaine si la France sera ou non en dépassement, je ne veux laisser subsister aucun doute à ce sujet. Sachez que, si je suis sensible aux situations les plus difficiles, j'entends m'en tenir à ce qui a été prévu, pour autant que les disponibilités de fin de campagne le permettent. Pour votre part, je vous invite à ne pas relâcher vos efforts dans les jours qui viennent.
Mais, quel que soit le résultat final, nous pourrons, je crois, nous réjouir, une nouvelle fois, de l'esprit de cohésion et de discipline qui a prévalu.
Cette cohésion de la filière laitière m'a beaucoup impressionné. Au fil des années, votre interprofession a pu conclure de nombreux accords, dont les plus connus portent sur les prix. Son fonctionnement constitue, de mon point de vue, une référence pour d'autres filières.
Vous avez consacré vos travaux, Mesdames, Messieurs, a cette question du prix. Malgré certaines interrogations, le bilan de votre interprofession demeure largement positif sur ce point, particulièrement si on compare ce secteur à d'autres.
L'élu savoyard que je suis ne peut ignorer combien la réflexion des acteurs de votre filière sera importante, pour que la question d'un prix rémunérateur soit non seulement un résultat, mais aussi un objectif. Un objectif partagé par tous.
L'équilibre à trouver est complexe. Car si les prix ne sont pas rémunérateurs - chacun de vous le sait - la production sera sévèrement amputée de la majeure partie de ses forces vives, en l'espace d'une génération.
Les agriculteurs aspirent - on le comprend - à plus de temps libre et à des conditions de travail comparables à celles du reste de la société. Au delà, la dévalorisation des métiers agricoles tient également à la dévalorisation des valeurs du travail dans la société.
Si l'augmentation du prix du lait à la production n'apportera pas, seule, de réponse satisfaisante, des prix bas ne viendraient qu'aggraver ce phénomène. L'intérêt bien compris de la filière consiste donc à préserver un " juste prix du lait ". Dans une économie rendue fortement concurrentielle par l'ouverture des marchés, et la concentration de la distribution, conserver un prix adéquat semble pourtant une gageure.
En combinant une indexation sur les marchés et un dispositif qui en atténue les variations, votre interprofession a apporté une réponse à la fois originale et efficace. Elle est parvenue à stabiliser les prix sans pour autant les déconnecter de la concurrence. Elle a ainsi favorisé à la fois les investissements et le renouvellement des générations.
Ces derniers mois, au terme de longues négociations, vous avez, une nouvelle fois, fait évoluer votre indexation, votre modal prix, en lui intégrant les produits de grande consommation, les " PGC ".
Ces PGC sont des produits qui doivent moins leur valeur aux ingrédients qu'ils contiennent qu'à l'emballage, aux frais commerciaux, ou de publicité, et à la pratique des marges arrières Sur ce dernier point, je crois être en mesure de vous rassurer, Monsieur le Président : d'une part, les actions pénales seront poursuivies ; d'autre part, Renaud DUTREIL et moi tiendrons notre engagement de prévenir toute pratique de prix abusivement bas, notamment en période de crise. Nous présenterons prochainement un texte au Parlement, en ce sens.
Vous avez trouvé une clé de répartition tenant compte de leur contribution dans l'écoulement de la production, et je veux vous en féliciter ...
Cette évolution me semble extrêmement heureuse. Quel que soit, en effet, le résultat des prochaines négociations de la PAC et de l'OMC, les prix de ces PGC devraient être moins affectés par des bouleversements artificiels que ceux du beurre ou de la poudre.
Ainsi, votre filière a-t-elle anticipé des évolutions, d'ailleurs inéluctables. Elle offre également une image positive de dynamisme et de stabilité, aux jeunes qui souhaiteraient embrasser une carrière dans le secteur laitier.
Lors de mes déplacements en régions - et je visite chaque semaine un nouveau département -, je suis toujours frappé par les craintes suscitées - faute de perspectives et d'une attractivité suffisante - par un non-renouvellement des générations.
Cela ne m'empêche pas de souvent rencontrer des jeunes enthousiastes et toujours prêts " à y aller ".
Pour relever le défi des installations, il nous faudra toutefois beaucoup d'énergie. Car ce dont les producteurs ont besoin, ce sont avant tout de perspectives à long terme pour notre agriculture et leurs exploitations. Après une négociation difficile avec Bruxelles, mon collègue chargé des Finances et mon collègue chargé du Budget, je peux aujourd'hui vous assurer que le système des prêts bonifiés à l'agriculture sera maintenu avec un taux équivalent pour tous les agriculteurs. S'agissant des prêts spéciaux à l'élevage, leur taux sera même abaissé de 4,5 % à 4 %.
Comme vous le savez, cette visibilité est d'autant plus faible que l'avenir des filières agricoles, va fortement dépendre des négociations engagées devant l'OMC et, par contrecoup, à Bruxelles, au sein de l'Union Européenne.
Penser globalement, agir localement, telle est la difficulté, mais peut être aussi la beauté des missions d'un Ministre de l'Agriculture. Car c'est en demeurant toujours au contact du terrain que je serai le plus pertinent dans les négociations où se joue l'avenir de l'agriculture française, et, c'est en étant fortement présent à l'étranger que je défendrai le plus efficacement les agriculteurs de notre pays.
Il ne faut pas se cacher, nous sommes engagés dans un débat très dur, à la fois au niveau communautaire et dans le cadre de l'OMC. Nous ne l'emporterons véritablement que si nous voulons et avons la capacité de nouer des alliances. Car la France ne peut décider seule. Mais, elle n'est pas, pour autant, isolée comme on l'entend trop souvent.
Une première étape a été franchie, l'an dernier. Certains voulaient alors lier la revue à mi-parcours de la PAC aux négociations concernant l'élargissement. Mais, l'accord conclu à Bruxelles entre le Président Jacques CHIRAC et le Chancelier Gerhärd SCHRODER a marqué un tournant pour la Politique Agricole Commune. Soumise jusque là à une lente dérive vers la récession, la PAC a alors retrouvé une impulsion politique. Cet accord, que j'avais activement préparé avec mon homologue allemand, a, en effet, permis de stabiliser les ressources de la PAC jusqu'en 2013 et de lui redonner les perspectives qu'elle ne pouvait trouver dans les projets de la Commission.
Nous sommes désormais engagés dans la négociation de la revue à mi-parcours. A cette occasion, nous avons obtenu le maintien des quotas, et cet acquis fondamental ne sera pas remis en cause par le Conseil. Cela nous a été confirmé mardi.
Depuis longtemps, l'organisation communautaire du marché du lait et des produits laitiers, l'OCM lait, a fait la preuve de son efficacité. Celle-ci a constamment fait l'objet d'ajustements, mais les principes sur lesquels elle repose sont demeurés inchangés depuis 1984. Avec les quotas laitiers, l'Europe s'est dotée d'un moyen de régulation de l'offre, qui est venu s'ajouter aux instruments plus classiques d'intervention et d'exportations avec restitutions.
En France, où nous sommes les seuls en Europe à avoir adopté une gestion non marchande et départementalisée, le système des quotas a très efficacement contribué à l'aménagement de notre territoire.
Le maintien de la production laitière dans chaque département n'a pas empêché une importante restructuration interne. Personne ne peut contester que le bilan des quotas laitiers est excellent dans ce domaine. La Commission elle-même en faisait récemment le constat.
Pour autant, un petit groupe d'états membres veut en finir avec ce régime. Il avait cru l'emporter à Berlin, lors des discussions de l'Agenda 2000. Sous l'impulsion du Président CHIRAC, la France avait alors obtenu que toute réforme en ce sens soit repoussée à 2008, après l'organisation d'un débat en 2003.
En proposant, en revanche, d'avancer d'un an la baisse des prix de soutien et d'augmenter le niveau des quotas encore plus que cela n'était le cas à Berlin, la Commission poursuit clairement un objectif de prix intérieurs bas.
C'est pourquoi, je partage, Monsieur le Président, votre analyse : avec cette réforme, c'est bien le principe fondateur des quotas que l'on remettrait en cause.
La France ne peut accepter un tel bouleversement de la politique laitière européenne. Car il porterait un coup fatal au maintien de prix stables et rémunérateurs, d'une production largement répartie sur notre territoire, et d'un cadre stable pour les jeunes souhaitant s'installer.
Vous avez accepté les contraintes des quotas, et les avez intégrées dans votre gestion, vos investissements, et l'organisation même de votre profession.
Vous l'avez fait, parce que ce système offrait une perspective de prix rémunérateurs et stables. Ces prix rémunérateurs qui font tellement - je l'ai dit - pour la confiance des investisseurs et pour le renouvellement des générations.
J'ai défendu cette position lundi dernier, devant Conseil des ministres européens de l'Agriculture. Dans son refus de la proposition de la Commission, la France est loin d'être isolée. Et rien dans la situation des marché n'offre de justification à une baisse des prix et des quotas.
L'an prochain, l'Europe accueillera 10 nouveaux Etats membres, parmi lesquels la Pologne, le quatrième producteur laitier de notre continent. Je compte sur l'appui de vos organisations, dans les enceintes européennes où elles sont représentées, pour faire prévaloir notre vision commune de la politique laitière.
Je ne veux pas feindre d'ignorer les difficultés que nous avons rencontré pour maintenir ce régime de quotas. Je sais que ceux-ci ont produit des effets pervers, dans la plupart des pays où un système marchand est en vigueur. Je pense notamment au fameux problème des sofa milkers qui - soit dit en passant - devrait faire réfléchir tous les partisans d'un découplage total.
Je sais également que le niveau actuel des prix est supérieur à celui des commodities sur le marché mondial et qu'il le demeurerait, fût-ce après une baisse de 15 %. Mais je conteste totalement les principe qui sous-tend cet argument et son exploitation dans les négociations devant l'OMC.
Les nombreuses études conduites par l'INRA, l'ONILAIT, le CFCE, l'Institut de l'Elevage et votre interprofession l'ont montré. Les travaux de CONGRILAIT - et je voudrais rendre une nouvelle fois hommage à ceux d'entre vous qui ont pris une part active à son organisation - l'ont également souligné : les produits laitiers sont avant tout des produits domestiques, mais qui, quelle que soit leur forme, demeurent périssables, riches en eau, et difficiles à transporter.
Chaque région du monde a des habitudes alimentaires et des produits laitiers spécifiques. L'organisation de la filière varie également selon les pays et, avec elle, le prix du lait.
Seuls 6 % de la production mondiale, commercialisée sous forme de produits secs, font l'objet d'une cotation mondiale. Ce " cours mondial " se situe toujours en deçà des prix intérieurs. C'est le cas, même en Nouvelle-Zélande, où une prime spéciale vient compenser l'inconvénient de devoir désaisonner la production pour la consommation intérieure.
Dans ce pays, la grande majorité du lait est utilisée pour la fabrication de commodities. Elle est vendue à un prix proche du " cours mondial ". C'est la seule exception dans le monde.
Or, au nom de l'orthodoxie libérale, on prétend que les cours intérieurs doivent d'aligner sur ce cours mondial, pour que l'économie progresse.
Il n'y aurait alors plus de droits de douane, plus d'aides aux agriculteurs, pour entraver les échanges. Tous les producteurs surnuméraires auraient alors disparu. Voilà la chimère que certains poursuivent à l'OMC.
En matière laitière, cela reviendrait à aligner 94 % des échanges sur le régime des 6 % restants. Ce serait croire que ce qui est bon pour la Nouvelle Zélande serait également bon pour le reste du monde et vouloir que le monde entier suive son régime.
Je m'opposerai - je vous le dis avec conviction - à ce que la politique européenne dérive dans ce sens.
Car le prix mondial est un " leurre meurtrier ". Il n'est le résultat ni d'un équilibre social, ni d'un équilibre environnemental. Il réduit l'agriculture à une seule activité de production et d'échanges de biens marchands.
Or, l'agriculture, l'alimentation et la ruralité occupent en France une importance historique et culturelle bien supérieure à celle des autres pays. Nous n'avons pas à rougir de ce que les générations qui nous précèdent, nous ont transmis, et il n'y a aucune raison que nous soyons empêchés à l'OMC de conduire une politique agricole.
C'est là un message que nous devons populariser au sein des enceintes de l'OMC. Sachez que je m'y emploie avec ardeur et détermination.
La deuxième mouture des propositions de Stuart HARBINSON ne me paraît pas satisfaisante, car elle ne comporte aucune des avancées que nous réclamions, et fait exagérément prévaloir les positions du groupe de Cairns et des Etats-Unis. Elle ne peut constituer une base acceptable de négociation et n'apporte aucune réponse aux problèmes des pays les plus pauvres.
Durant cette assemblée générale, vous avez souhaité, Monsieur le Président, redonner des perspectives aux éleveurs laitiers, et notamment aux plus jeunes d'entre eux. Je sais que les discussions communautaires les inquiètent, mais je voudrais leur dire que leur évolution, ces derniers mois, doit plutôt les rassurer : car la PAC sera financée, les quotas seront maintenus, et l'élargissement ne condamnera pas son économie générale.
Je suis parfaitement conscient que le danger d'un mauvais accord à l'OMC subsiste. Mais, je vous le dis solennellement et avec la pleine conscience de mes responsabilités, ni le Président de la République, ni le Premier ministre, ni moi-même ne ménagerons nos efforts pour préserver la PAC et notamment son régime laitier.
D'autres inquiétudes nuisent également au moral des jeunes. Vous avez vous-mêmes évoqué la multiplication de la paperasserie et la mise en oeuvre sans nuance des prescriptions environnementales.
Les exigences des consommateurs et des citoyens, ou plutôt de ce qui en tient lieu dans les instances communautaires, génère une prolifération de règles et de normes. Je suis toujours surpris que l'on édicte autant de normes, en même temps qu'on réclame un alignement sur la base du cours mondial. Car la première est l'antithèse du second.
L'harmonisation des tarifs et des normes devraient aller de pair. Je suis reconnaissant à la Commission d'avoir fait, en son temps, des propositions en ce sens. Hélas, nos partenaires à l'OMC leur ont opposé une fin de non-recevoir. Cette expérience devrait nous dissuader de toute précipitation en matière de concessions tarifaires.
Quoi qu'il en soit, les contraintes européennes, nationales, et parfois locales, les exigences de plus en plus pointilleuses du voisinage participent de ce malaise.
J'en ai très vite pris conscience, et j'ai souhaité me déplacer sur le terrain avec ma collègue, Roselyne BACHELOT, afin de le dissiper. Le 18 juillet dernier, nous nous sommes ainsi rendus à Rennes, pour visiter une exploitation laitière, particulièrement représentative et bien gérée.
Nous avons pu mesurer combien les éleveurs n'étaient pas hostiles aux améliorations environnementales. Comment pourrait-il en être autrement d'ailleurs ? Car ce sont eux qui ont jusqu'ici le plus préservé notre environnement dans les zones rurales, et sont les premiers à souffrir d'éventuelles dégradations.
Ce qu'ils acceptent, en revanche, avec difficulté, c'est d'une part les effets de la sur-administration : des règlements complexes, des contrôles pointilleux ...
Et d'autre part, un climat général de défiance entretenu par la multiplication des contrôles, mais aussi parfois par les prises de positions publiques de certains de mes prédécesseurs.
Ensemble, Roselyne BACHELOT et moi avons voulu mettre un terme à ce climat, et vous aurez constaté que nous marchons désormais la main dans la main, et pleinement à l'écoute des agriculteurs.
Dans le même temps, nous avons voulu profondément simplifier les dispositifs en vigueur. Nous avons travaillé sur ces questions avec les organisations professionnelles, et cette entreprise s'est avérée aussi ardue qu'on pouvait le craindre.
Car rendre plus complexe, c'est facile ; mais rendre plus simple, c'est toujours beaucoup plus difficile.
La contrainte européenne demeure forte. Des décisions de justice nous obligent, et d'autres viendront renforcer ces contraintes.
Le comité de simplification mis en place l'été dernier a accompli un travail important. Lors de sa dernière réunion le 4 mars, il a validé des orientations. D'ici Pâques, une circulaire sera publiée conjointement avec le Ministère de l'Ecologie et du Développement durable. Elle comportera des mesures concrètes et immédiates de simplification administrative. Elle s'attachera également à la coordination entre les procédures PMPOA, nitrates et ICPE. Elle légitimera, par ailleurs, les modes de traitement à moindre coût. C'est le cas des filtres à pailles ou des bassins tampons avec épandage mécanisé pour les prairies. Enfin, d'autres procédés pour les petits et moyens élevages sont en cours d'examen et devraient m'être adressées cet été.
Dans le même esprit, la procédure de diagnostic DEXEL, mis au point par l'Institut de l'Elevage, a été revu et simplifié. Ses points de référence passeront de 11 à 5.
J'ai, par ailleurs, été très attentif - je veux vous le dire - à votre proposition d'introduire un audit unique. Certaines de vos propositions vont dans le sens des aménagements déjà préconisés par les comités de simplification. C'est notamment le cas des contrôles uniques pour les aides et pour l'identification. Mais votre proposition va beaucoup plus loin, puisqu'elle ajoute aux contrôles liés aux exigences administratives des contrôles, facultatifs, des signes de qualité.
Votre filière s'est déjà distinguée, à cet égard, par la mise en place d'une Charte des bonnes pratiques. Vous m'avez demandé de soutenir cette démarche. Le Premier ministre et moi-même lui avons apporté notre soutien à l'occasion du Salon de l'Agriculture, et, croyez bien, que nous continuerons à le faire.
Aujourd'hui, c'est à une étape de convergence supplémentaire que vous nous appelez. Comme vous le savez, une partie des contrôles que nous évoquons sont effectués par des organisations professionnelles ou en application de règles voulues par celles-ci. C'est donc, dans le prolongement des travaux en cours du comité de simplification, à un travail conjoint que nous devons nous atteler.
Ce travail devrait, si vous en êtes d'accord, être engagé dès le deuxième semestre, lorsque les groupes de travail seront parvenus à des résultats sur les signes de qualité du Conseil National de l'Alimentation (CNA) et sur les propositions du Comité de simplification.
Je suis confiant que si nous savons travailler en concertation dans ce domaine, nous parviendrons très vite à des résultats significatifs.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Je voudrais conclure mon propos en faisant preuve de la même franchise que celle que vous m'avez témoignée. Votre assemblée générale constitue un moment important pour votre profession, qui - vous l'avez dit - est frappée par une profonde morosité. Pour faire simple, je crois que vous avez voulu me demander si l'on doit " encore y croire ".
Sachez qu'une immense majorité des Français jugent les paysans travailleurs et courageux. C'est également mon cas. Mais, je sais que ceux-ci voient leur avenir de façon sombre.
Je suis néanmoins confiant qu'ensemble nous pourrons une nouvelle fois surmonter les épreuves que vous avez évoquées. Que ce soit au plan international ou au plan intérieur, le Gouvernement travaille dans le sens que vous souhaitez. Au-delà des premiers résultats déjà perceptibles, nous avons toutes les raisons de croire en l'avenir de la filière laitière.
Alors, ma réponse est sans hésitation : " oui, il faut continuer ! "
Je vous remercie.
(Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 21 mars 2003)