Texte intégral
Le souvenir des grandes persécutions ne se perd jamais. Quelle que soit l'horreur des faits, les anniversaires de massacre ne sauraient être que des appels à la compassion ou à la déploration. Oublier ou se taire c'est se choisir complice. C'est consentir au meurtre.
Les enfants des victimes ne sont pas comme les autres. Ils ont une marque rouge dissimulée quelque part dans leur tête et dans leur cur. Ils se reconnaissent entre eux, partout dans le monde.
Les lois d'amnistie obéissent parfois à l'intérêt national, mais, pour les grands crimes, elles n'effacent pas la souffrance des victimes et de leurs proches.
Le principe de réconciliation n'a de sens qu'entre ceux qui se sont portés mutuellement des coups. Il n'a pas de sens entre victime et bourreau.
Bien entendu, il n'y a de grandeur que dans le pardon, mais le pardon n'est pas à la disposition des vivants, de ceux qui n'ont rien subi. Ce serait trop facile. Seules les victimes peuvent donner le pardon, quand il est demandé avec remord, c'est à dire avec la conscience du crime commis.
Quand la justice ne passe pas ou qu'elle passe mal, quand la raison d'Etat triomphe, quand l'amnistie est presque une forme du négationnisme, la paix n'est pas assise sur des bases solides. Il faut que des gestes forts aient lieu. Ici à Oradour, ces gestes ont commencé de la part de l'Allemagne et aussi de l'Alsace : il faut continuer. Le négationnisme est une manière d'empêcher l'inhumation des victimes, car, elles ne peuvent être ensevelies que dans le linceul de la vérité, reconnue de tous. Le négationnisme crée la révolte et la dernière victoire du criminel est d'inciter à se comporter comme lui. Le bourreau inflige une double souffrance : d'abord directement par les actes mais aussi dans la mémoire par une révolte qui pousse à lui ressembler et au bout du compte à se détruire soi-même.
Pourtant la vengeance doit être retenue, la souffrance contenue, et l'espoir en l'homme maintenu.
En un lieu où fut versé tant de sang innocent les mots doivent être prononcés avec beaucoup de prudence. Je crois qu'on transforme déjà un peu le monde et qu'on contribue à réduire la souffrance des hommes par la manière dont on regarde le passé et que cette manière conditionne le présent et l'avenir.
Ce village de martyrs, cette église incendiée et ce sang répandu : c'est là que peut naître la conscience élevée d'une humanité davantage maîtresse d'elle-même, plus respectueuse de la dignité de chacun, et invitant à voir dans l'autre le reflet de soi-même.
Souvenons-nous donc des crimes que les nôtres ont subis. Mais souvenons-nous aussi des crimes que d'autres parmi nous ont commis. On doit pouvoir le dire ici aussi, nous sommes naturellement plus marqués des crimes subis que des crimes commis.
Malgré les progrès du droit international et de ses juridictions, malgré les progrès de la démocratie, malgré les progrès de la communication, nous voyions tous les jours des innocents assassinés au nom d'un prétendu idéal, politique ou religieux. Cessons de dire à chacune de nos commémorations " plus jamais cela ", comme si ça n'avait plus lieu.
Enfants du Génocide, enfants d'Auschwitz, enfants d'Oradour, c'est à vous qu'il incombe de changer le monde !
(source http://www.interieur.gouv.fr, le 11 septembre 2003)
Les enfants des victimes ne sont pas comme les autres. Ils ont une marque rouge dissimulée quelque part dans leur tête et dans leur cur. Ils se reconnaissent entre eux, partout dans le monde.
Les lois d'amnistie obéissent parfois à l'intérêt national, mais, pour les grands crimes, elles n'effacent pas la souffrance des victimes et de leurs proches.
Le principe de réconciliation n'a de sens qu'entre ceux qui se sont portés mutuellement des coups. Il n'a pas de sens entre victime et bourreau.
Bien entendu, il n'y a de grandeur que dans le pardon, mais le pardon n'est pas à la disposition des vivants, de ceux qui n'ont rien subi. Ce serait trop facile. Seules les victimes peuvent donner le pardon, quand il est demandé avec remord, c'est à dire avec la conscience du crime commis.
Quand la justice ne passe pas ou qu'elle passe mal, quand la raison d'Etat triomphe, quand l'amnistie est presque une forme du négationnisme, la paix n'est pas assise sur des bases solides. Il faut que des gestes forts aient lieu. Ici à Oradour, ces gestes ont commencé de la part de l'Allemagne et aussi de l'Alsace : il faut continuer. Le négationnisme est une manière d'empêcher l'inhumation des victimes, car, elles ne peuvent être ensevelies que dans le linceul de la vérité, reconnue de tous. Le négationnisme crée la révolte et la dernière victoire du criminel est d'inciter à se comporter comme lui. Le bourreau inflige une double souffrance : d'abord directement par les actes mais aussi dans la mémoire par une révolte qui pousse à lui ressembler et au bout du compte à se détruire soi-même.
Pourtant la vengeance doit être retenue, la souffrance contenue, et l'espoir en l'homme maintenu.
En un lieu où fut versé tant de sang innocent les mots doivent être prononcés avec beaucoup de prudence. Je crois qu'on transforme déjà un peu le monde et qu'on contribue à réduire la souffrance des hommes par la manière dont on regarde le passé et que cette manière conditionne le présent et l'avenir.
Ce village de martyrs, cette église incendiée et ce sang répandu : c'est là que peut naître la conscience élevée d'une humanité davantage maîtresse d'elle-même, plus respectueuse de la dignité de chacun, et invitant à voir dans l'autre le reflet de soi-même.
Souvenons-nous donc des crimes que les nôtres ont subis. Mais souvenons-nous aussi des crimes que d'autres parmi nous ont commis. On doit pouvoir le dire ici aussi, nous sommes naturellement plus marqués des crimes subis que des crimes commis.
Malgré les progrès du droit international et de ses juridictions, malgré les progrès de la démocratie, malgré les progrès de la communication, nous voyions tous les jours des innocents assassinés au nom d'un prétendu idéal, politique ou religieux. Cessons de dire à chacune de nos commémorations " plus jamais cela ", comme si ça n'avait plus lieu.
Enfants du Génocide, enfants d'Auschwitz, enfants d'Oradour, c'est à vous qu'il incombe de changer le monde !
(source http://www.interieur.gouv.fr, le 11 septembre 2003)