Déclaration de M. Georges Sarre, porte-parole du Mouvement républicain et citoyen, sur la spirale de violence engendrée par la conquête de l'Irak par les Etats-Unis, sur la situation politique en France, sur la nécessaire reconstruction de la gauche républicaine

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Circonstance : Allocution lors de l'Université d'été du Mouvement républicain et citoyen à Belfort le 6 septembre 2003

Texte intégral


Chers Camarades,
En préambule, je voudrais vous lire un texte de Pierre Mendès-France, qui rappelle avec force un devoir primordial de l'homme politique:
"L'élément fondamental du système démocratique, c'est la vérité. Sans la vérité, il ne peut y avoir de démocratie."
Analysons donc ensemble objectivement la situation nationale et internationale, et traçons ensemble les perspectives d'action du Mouvement Républicain et Citoyen dans la continuité de notre combat commun.
I
Pour cette première université d'été depuis la création du Mouvement Républicain et Citoyen, on aurait pu rêver d'un contexte moins sombre.
Où que nous jetions nos regards, il n'est guère de motifs d'optimisme.
I- 1
Dans un monde fracturé par les inégalités de développement et par toutes sortes de régressions idéologiques intégristes, le terrorisme étend ses menaces. La trop facile conquête de l'Irak par les Etats-Unis a ouvert une période durable d'anarchie et de chaos économique au Moyen Orient. Les assassinats, à quelques jours d'intervalle, de Sergio Vaira de Melo et d'un haut dignitaire chiite, illustrent avec éclat le cinglant échec de la conquête américaine.
Cet échec est celui de ce qu'il est convenu d'appeler l'"Administration Bush" : les aventuriers du "Big Business" et les intégristes de la "Christian coalition". Il est celui des politiciens misérables, les Blair, Aznar, Berlusconi, Vaclav Havel, qui se sont évertués avec des fortunes diverses, à entraîner dans cette folle aventure les Etats européens. Mais cet échec est aussi un recul du droit et de la paix, un recul de l'humanité tout entière. La forme brutale des Etats-Unis, leurs mensonges cyniques sur les armes de destruction massive ont eu facilement le dessus sur le droit international. C'est l'impérialisme américain à l'oeuvre.
Les Nations Unies ont été doublement bafouées, par l'agression américaine elle-même, en violation de la charte et par la nécessité où elles se trouvent actuellement de composer avec l'agresseur, faute de pouvoir le sanctionner.
Tout le monde arabe ressent vivement l'humiliation de cette occupation étrangère imposée à l'Irak, de ce retour du colonialisme. Le conflit israélo-palestinien, loin de trouver les solutions que certains croyaient étourdiment faciliter par le renversement de Saddam Hussein, est plus que jamais prisonnier d'une spirale de violence.
I-2
L'Etat de la France n'a rien non plus qui puisse nous réjouir. On n'en finit pas d'enterrer les morts de la canicule et, avec eux, quelques illusions dont cette épreuve a tragiquement fait justice : le terrible isolement d'un grand nombre de personnes âgées où à faibles ressources, qu'elles soient mortes seules ou dans l'indifférence ou qu'elles aient heureusement survécu, révèle l'éclatement de la famille, la faillite des dispositifs d'alerte, de protection sanitaire et sociaux et finalement la crise de la société. Le respect même de la mort, l'un des fondements les plus profonds de toute société humaine, a paru ébranlé.
On compte les morts. On compte les chômeurs aussi. Malgré les astuces statistiques, des manipulations, la réalité du chômage est à son plus haut niveau et la chronique s'enrichit quasi quotidiennement d'une nouvelle annonce de licenciements ou défaillances d'entreprises.
La France s'achemine de nouveau vers les trois millions de chômeurs.
Le profond malaise des enseignants, mis en lumière par les luttes sociales du printemps, reste bien présent et la rentrée s'est effectuée dans une atmosphère lourde. Des actions sont annoncées. Nous les comprenons et nous les soutenons. Les services publics en leur ensemble voient s'amonceler les menaces. Vouloir poursuivre dans la voie des privatisations d'EDF, de GDF, de La Poste, ne relève pas seulement de l'idéologie, du dogme, du besoin d'argent, mais d'un aveuglement sans pareil. Il est urgent d'obtenir un audit des entreprises privatisées pour mesurer l'étendue des dégâts. Je soutiens la demande d'ATTAC. Les déficits publics se creusent, sans pour autant soutenir la croissance et l'emploi et rechercher résolument la remise en cause du pacte de stabilité au niveau européen.
I-3
Une lueur d'espoir apparaîtrait-elle dans ce sombre tableau?
Un nombre croissant de nos concitoyens et de nos concitoyennes sont apparus ces derniers mois résolus à ne pas se laisser faire. Les manifestations massives, généralisées, contre l'agression américaine en Irak ont été suivies de peu par les luttes multiformes pour la défense des retraites, par celles des intermittents du spectacle et aussi contre le transfert aux régions et aux départements de certains personnels de l'Education nationale. Par parenthèse, je voudrais vous rappeler ou vous dire que du 29 juin au 31 août, les intermittents du spectacle ont été accueillis dans une salle municipale du XIème arrondissement, la salle Olympe de Gouges, avec à leur disposition deux vastes espaces et la logistique nécessaire à un travail militant. Je l'ai voulu et je me réjouis de voir la qualité des relations qui se sont établies entre eux et la Mairie.
Il n'en faut pas douter - quelles que soient les formes, l'intensité, le caractère spectaculaire ou non que pourront revêtir les luttes sociales dans les semaines à venir - la volonté de lutter est là et elle est forte.
Il existe désormais une résistance à la mondialisation qui atteint nos sites industriels, mis en concurrence avec d'autres sites lointains, où ne sont respectées ni normes sociales, ni normes environnementales.
Il existe une résistance à cette mondialisation, relayée par les institutions européennes, qui pousse au démantèlement de nos services publics, à la remise en cause de nos acquis sociaux.
Si le mouvement dit "alter mondialiste" demeure parfois ambigu, nous ne pouvons qu'observer avec intérêt et espérance le succès persistant des rencontres de Porto Alègre et, tout récemment, le rassemblement, au plateau du Larzac, de plusieurs dizaines de milliers de personnes.
Il n'est pas exagéré de dire que cette prise de conscience est en train de créer les conditions nécessaires pour un renouveau politique. Mais il n'est non moins clair qu'elle ne saurait y suffire.
Il faudra pourtant bien développer une alternative politique à l'action libérale du gouvernement et nous n'avons pas à craindre l'extrême gauche. L'extrême gauche est plus forte parce qu'il n'y a pas de perspective.
II
Quelle politique nous fait donc cet exécutif, dont le chef a été élu avec 82 % des voix, dans les circonstances exceptionnelles dont chacun de nous garde l'amer souvenir ?
II-1
Reconnaissons-lui tout d'abord le mérite qui est le sien, celui d'une posture internationale souvent honorable, rompant en tous cas avec l'alignement sans gloire sur les intérêts américains, qui a trop souvent tenu lieu de politique étrangère ces dernières années.
Ce n'est pas une chose négligeable que la France ait été, dans la crise irakienne, le centre d'impulsion, le point de ralliement, de toutes les résistances à l'aventure lamentable dans laquelle "l'Administration Bush" s'employait à lancer son pays, le Moyen Orient et la planète entière.
Et c'est l'honneur de la France que Jacques Chirac ait refusé cette agression et ses justifications mensongères dont on voit bien aujourd'hui qu'elles entachent encore George W. Bush et Tony Blair.
Le peuple américain comprendra un jour que la France n'a pas manqué, bien au contraire, au devoir de l'amitié franco-américaine en s'efforçant de contrecarrer les projets de ses dirigeants irresponsables. Les peuples d'Europe ont d'ores et déjà, dans leur grande majorité, donné raison à la politique française contre ceux de leurs dirigeants anglais, espagnols, italiens, polonais qui ont réduit leur pays au statut d'Etat caniche des Etats-Unis en les engageant plus ou moins fortement dans le guêpier irakien. Les peuples du monde, et plus particulièrement les peuples arabes, savent gré à la France du rôle qu'elle a joué dans cette crise, en empêchant notamment que l'agression néo-impériale des Etats-Unis soit bénie et blanchie par une résolution du Conseil de Sécurité.
Encore devons-nous demeurer vigilants, de peur que la pression des milieux atlantistes et des intérêts économiques et financiers, si influents au sein de l'UMP, ne conduise la France à des complaisances qui auraient pour effet de conduire l'ONU à jouer en Irak le rôle de roue de secours humanitaire ou même celui de caution morale au profit des agneaux anglo-américains.
Pour l'instant, Jacques Chirac tient bon, tant mieux. Et la France doit continuer à faire pression pour que soit restaurée au plus tôt la souveraineté irakienne après des élections libres.
Au crédit de ce gouvernement on peut encore porter, mais non sans certaines réserves, les quelques circonstances dans lesquelles il a été conduit à se démarquer de l'orthodoxie financière monétariste, dont les institutions européennes se sont faites les gardiennes. Quand Messieurs Mer et Raffarin interviennent pour sauver Alsthom en dépit des froncements de sourcils de Bruxelles, nous ne pouvons que les approuver.
Je dis cela car notre parti, et chacune, chacun d'entre nous, a un devoir de vérité.
II-2
Hélas, les motifs de satisfecits à la Droite s'arrêtent là.
En effet, si la politique extérieure actuellement suivie mérite quelque respect, la politique intérieure se caractérise par un haut degré d'amateurisme et une complaisance permanente aux sommations du MEDEF et des grands intérêts financiers, tempérée seulement par les protestations et les luttes populaires. La France du XVIIIe siècle vivait, a-t-on dit sous une "monarchie absolue tempérée par des chansons"; c'est à dire par l'opinion publique naissante. On pourrait dire aujourd'hui que nous vivons sous la dictature des grands milieux d'affaires, limitée par des grèves et des manifestations.
II-3
Nous avions salué en leur temps quelques initiatives prises par Monsieur Sarkozy en matière de sécurité au cours de sa première année passée place Beauvau. Seulement voilà, ce ministre a lourdement échoué sur le dossier corse. Il est bon qu'on ait enfin arrêté Yvan Colonna. Mais pour autant, il n'était ni raisonnable ni conforme aux principes fondamentaux de la République d'inscrire pour l'essentiel la politique du nouveau gouvernement en Corse dans le droit fil des accords de Matignon, illusoire compromis recherché avec les poseurs de bombes.
Disons le franchement, la victoire du "non" le 6 juillet 2003, fut un vrai moment de bonheur. Aujourd'hui comme hier, soyons lucides, quel qu'ait été le résultat du référendum corse, il était évident que le terrorisme qui n'a jamais cessé, serait réapparu tôt ou tard. En rejetant le mauvais compromis, passé entre le gouvernement et les indépendantistes, les corses ont réaffirmé leur attachement à la République, d'une manière insupportable aux terroristes. Et je tiens à saluer l'action courageuse et déterminante d'Emile Zuccarelli et de Nicolas Alfonsi.
La reprise du terrorisme, avec une ampleur sans précédent, constitue, autant que le désaveu apporté par les électeurs corses, un grave échec pour la politique de sécurité de Monsieur Sarkozy. Il aborde la rentrée bien fragilisé.
Certes, le ministre de l'intérieur se déplace beaucoup, mais devant les multiples provocations séparatistes, la recrudescence des attentats, que fait-il? Il se déplace, il cause, il repart. Le gouvernement semble tétanisé. Mais, malgré une agitation autour de ceux qui ont aidé Yvan Colonna à se soustraire à l'Etat de droit, on le sent prêt à reprendre les tractations avec les séparatistes, d'autant que le Premier ministre l'y pousse. Et pourtant, au nom de quoi y aurait-il matière à tractation ?
Que l'on ne revienne pas nous parler d'un droit d'exception au nom d'une tradition corse d'hospitalité! L'hospitalité n'est pas une spécificité corse. Certes, les corses pratiquent l'hospitalité, tant mieux, mais comme bien d'autres en France et dans le monde. Et nous savons bien que pour ces beaux parleurs, celle-ci ne s'étend pas aux fonctionnaires plastiqués, aux maghrébins abattus et bien sûr au préfet assassiné.
II - 4
En panne sur la Corse, le gouvernement l'est aussi sur la décentralisation. Monsieur Raffarin avait fait de celle-ci, et particulièrement de la régionalisation, son cheval de bataille. Aucun effort de communication n'avait été épargné pour "vendre" aux Françaises et aux Français l'idée magnifique d'une démocratie "de proximité".
Hélas pour Monsieur Raffarin, l'échec est complet ! Le référendum corse a plombé l'idée anti-républicaine d'une dévolution de certains pouvoirs législatifs aux régions. Plus généralement, les Français ont bien compris qu'il se préparait un nouveau renforcement des pouvoirs des potentats locaux, auxquels ils ont cessé de faire aveuglément confiance et que les inégalités de ressources entre collectivités locales ne pourraient manquer de se répercuter sur la qualité des services publics transférés.
Devant la multiplicité et la vigueur des oppositions, notamment syndicale, la date d'effet a été différée.
Aussi, se réduisent comme peau de chagrin les orientations décentralisatrices de "Raffarina Grobis".
II - 5
La politique européenne de notre gouvernement n'est guère plus heureuse. Exception faite des entorses au pacte de stabilité, elle persiste pour l'essentiel à se résigner à ce que Bruxelles soit le relais de la mondialisation ultra-libérale. Disons-le clairement, c'est Bruxelles qui décide et il est assez hypocrite de fixer des dates d'ouverture de la chasse contraires à des directives européennes ayant force de loi. Mieux vaudrait, mais le gouvernement s'en garde, critiquer les directives elles-mêmes, rechercher les conditions dans lesquelles la France y a consenti et prendre les mesures nécessaires pour qu'à l'avenir, l'accord de la France ne puisse plus être donné à Bruxelles sur des mesures que la représentation nationale n'approuverait pas.
C'est une question de démocratie et de responsabilité.
La convention présidée par Monsieur Giscard d'Estaing a produit des propositions qui conduisent à aggraver des transferts de souveraineté au niveau européen en donnant à l'Union davantage de compétences exclusives. Ces propositions aboutissent à donner, aux citoyens des petits Etats, un poids dans les institutions européennes, deux à trois fois supérieur à celui des citoyens des plus grands Etats.
Avec l'élargissement, la situation économique ne manquera pas de se détériorer encore plus. Les délocalisations vont se multiplier, les plans de chômage aussi naturellement et le pouvoir d'achat des Français déclinera. L'impréparation est totale et le péril immense.
Chers Camarades, il faudra exiger le moment venu que les dispositions appelées à régir cette tour de Babel que sont devenues les institutions européennes - avec la perspective de vingt et une langues officielles, toutes faisant également foi - que toutes ces nouvelles dispositions soient soumises à référendum.
Oui, que nul ne l'oublie, dans la République, le pouvoir constituant appartient au peuple et seulement au peuple. Et nous exigeons que ce scrutin soit précédé d'un véritable débat équitable entre les partisans et les adversaires de ce texte, et non d'un débat tronqué parce que monopolisé par un seul camp grâce à des subterfuges juridiques.
L'Europe que nous voulons n'est pas celle-là. C'est tout d'abord des Etats, rassemblés par une puissante volonté commune de peser sur le destin du monde, indépendamment des Etats-Unis.
Nous voulons une Europe démocratique c'est à dire une Europe de libre coopération entre des Etats - souverains, seuls lieux possibles de formation et d'expression authentique de la volonté du peuple.
De tout cela, le gouvernement n'a cure. Il pratique la politique de l'Europe crevée au fil de l'eau. Mais soyons justes : les socialistes n'étaient pas meilleurs sur cette question, et à moins d'une conversion subite, ne le sont toujours pas.
II - 6
Quand on est incapable, faute de diagnostics suffisants des besoins et qu'on veut pourtant faire face à de nouvelles priorités, augmenter les crédits de l'armée, des prisons, de la justice et des forces de sécurité, et tout à la fois réduire les impôts, que se passe-t-il ?
Il n'y a pas de miracle : les déficits augmentent.
En matière de finances publiques, ce gouvernement est dans la situation du personnage tombant du trentième étage et qui constate, en passant devant le onzième, que tout va bien encore.
Raffarin prétend gérer en bon père de famille : non, il joue une partie de poker menteur !
En attendant, on vit d'expédients qui seraient parfois risibles si cette situation en son ensemble n'était tragique. On reconnaît tardivement la nécessité d'ajouter aux grandes priorités du quinquennat celle plus coûteuse des personnes âgées. Comment les financer ? Par des économies sur d'autres postes ? Ils ne savent pas faire ! Arrive donc la suppression d'un jour férié, le lundi de Pentecôte. Mais en réalité, cette initiative perverse est une offensive contre les trente cinq heures. Voilà pourquoi le Président du MEDEF la déclare "formidable".
II - 7
Le brillant Ernest Seillière de Laborde a perdu là une nouvelle et remarquable occasion de se taire. Cette version française de l'oncle Picsou badigeonnée d'une forte couche de morgue comme il sied à un héritier des maîtres de forges de Wendel, notre oncle Picsou national donc, aurait en se taisant évité de souligner une nouvelle fois la profonde harmonie qui règne entre les orientations gouvernementales et les intérêts du patronat et des milieux d'affaires.
III
Dans cette situation politique difficile qui est aujourd'hui celle de notre pays, quel est notre rôle? Quelle est la voie que nous devons suivre ?
III - 1
Tout d'abord, soyons fidèles à nous-mêmes. Ceux d'entre nous qui ont accompagné Jean-Pierre CHEVENEMENT depuis plusieurs décennies n'ont pas à rougir de leur passé. Ils peuvent en être fiers. Ensemble, nous avons contribué à la rénovation du Parti Socialiste, à la réalisation de l'Union de la Gauche puis, en 1981, à la victoire de François Mitterrand. Faudrait-il le regretter ?
Il est vrai que le grand mouvement d'espérance populaire de 1981 a tourné court avec le tournant libéral pris en 1983. Beaucoup de nos concitoyens en ont gardé quelque méfiance à l'égard des socialistes et lorsqu'ils les ont appelés à nouveau au pouvoir, ils l'ont fait davantage par rejet de la droite que par l'effet d'une adhésion véritable. Reste que nous avons permis de briser la domination inconditionnelle de la droite, et imposé des mesures économiques et sociales non négligeables, les nationalisations, la 5e semaine de congés payés, la retraite à 60 ans, le R.M.I, etc.
Nous avons le droit d'être fiers aussi d'avoir dénoncé le tournant libéral de 1983. Fiers de ce qu'à nouveau Jean-Pierre Chevènement ait quitté le gouvernement en 1991 lorsque François Mitterrand a cru devoir emboîter le pas aux Etats-Unis et s'engager, déjà, dans la guerre du Golfe. Fiers d'avoir dit non à Maastricht. Fiers d'avoir alors quitté le PS pour fonder le MDC.
Soyons fiers encore de n'avoir pas attendu les alter- mondialistes pour voter, en 1993 à l'Assemblée nationale, contre le traité instituant l'OMC, presque seuls avec les communistes et une poignée de députés de droite.
Soyons fiers de la candidature de Jean-Pierre CHEVENEMENT aux élections présidentielles de 2002 et de l'avancée réalisée à cette occasion par les idéaux républicains, même si souvent cette avancée a été récupérée par plusieurs de nos adversaires.
III - 2
Continuons à défendre l'idéal républicain, sans sectarisme mais sans compromission. La République, dit-on parfois avec raison, n'est la propriété de personne. Mais cela n'empêche pas de veiller à ce qu'elle ne soit pas galvaudée.
Lorsqu'il y a un siècle, les "droites" se sont ralliées à la République, elles n'ont fait que renoncer à la monarchie et accepté la forme républicaine du gouvernement. En ce sens, les "droites" dites républicaines sont aujourd'hui toutes celles qui ne sont ni monarchistes, ni fascistes "stricto sensu". Cela veut dire que presque tout le monde aujourd'hui peut se dire formellement républicain.
Mais nous avons une conception plus exigeante de la République, pour laquelle l'égalité et la fraternité ne sont pas de vains mots. La République n'est plus elle-même si elle n'est pas sociale, si elle ne s'applique pas à une grande entreprise de solidarité nationale et de redistribution des richesses. Née à gauche, la République reste donc à gauche. Certes, une large part de ceux qui se disent de gauche lui ont été infidèles en tournant le dos au peuple. Certes, des hommes venus de la droite ont eu à toute époque et ont aujourd'hui toute leur place dans la République, pourvu qu'ils acceptent avec toutes leurs implications les principes d'égalité et de fraternité.
III - 3
Oui, il y a urgence à reconstruire la gauche républicaine, aujourd'hui en miettes, mais ce ne peut être que sur la base d'un projet.
Dès lors, si surprenante que puisse paraître à certains cette affirmation, c'est notre M.R.C., si modeste soit-il aujourd'hui, qui a vocation à être le centre de gravité de cette gauche refondée, car il détient pour l'essentiel les grandes lignes de ce projet, capable de fédérer demain l'ensemble des forces vives de la gauche et de la République.
Avec feu, la gauche plurielle, c'est toute une démarche politique qui a connu, en 2002, un échec sans appel : c'est la démarche consistant à former un conglomérat d'organisations politiques juxtaposées cherchant chacune pour elle-même le maximum d'avantages, sans avoir défini un objectif commun dont la réalisation prime sur tout le reste.
Disons le clairement, la gauche plurielle s'est suicidée. Au départ, les chances de réussir étaient faibles, mais elles n'étaient pas nulles et la déclaration d'investiture de Lionel Jospin donnait espoir. Mais la politique conduite, la création de l'axe central PS-Verts allait vite conduire à un échec inexorable. Dés l'an 2000, les dés étaient jetés.
Alors aujourd'hui il ne faut pas se tromper sur la méthode et nous devons tout faire pour ne pas laisser prévaloir une formule de travail en commun avant le débat sur le fond. Le débat oui, et public pour avancer vraiment et faire naître la confiance.
La gauche refondée de demain ne peut être, comme la gauche plurielle d'hier, une auberge espagnole.
Les contradictions inhérentes à cette démarche deviennent vite ingérables. Auprès de véritables républicains, de militants animés de vraies ambitions sociales, l'auberge espagnole accueille des personnes et des courants qui n'ont pas d'autre titre à se réclamer de la gauche que celui d'adhérer à un parti, qui fut jadis authentiquement de gauche, à un moment de son histoire. N'est-ce pas le cas de nombreux socialistes, pour qui la revendication sociétale a fini par effacer l'ambition sociale ? N'est-ce pas le cas de beaucoup de verts?
Les orientations autour desquelles peut et doit se faire le rassemblement ont été tracées par le discours de Vincennes et la campagne présidentielle de Jean-Pierre CHEVENEMENT ainsi que par la déclaration de principes et la motion d'orientation de notre mouvement.
Mais loin de nous en tenir aux paroles, nous développerons un programme de mesures et d'actions précises pour garantir les droits fondamentaux de la personne humaine, le droit au travail et à des conditions de vie décentes, le droit de chacun sans distinction de sexe, d'âge ou d'origine, à des chances égales et à une dignité égale.
Telle est notre feuille de route. Se mettre à l'écoute du pays, être disponible, et rebâtir en restant fermes sur nos orientations.
Un seul objectif : faire entendre à l'adresse du pays la voix de l'espérance.
C'est notre mission.
Au travail...
(Source http://www.mrc-France.org, le 11 septembre 2003)