Déclaration de Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies, sur la candidature officielle de Cadarache pour accueillir le centre de recherche mondial sur la fusion thermonucléaire contrôlée, Marseille et Cadarache le 31 mars 2003.

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Circonstance : Visite du département de recherche sur la fusion contrôlée du CEA à Cadarache le 31 mars 2003 et rencontre avec des personnalités de la région PACA dans le cadre du projet ITER (International Nuclear Experimental Reactor) à Marseille le 31 mars 2003

Texte intégral

Monsieur le Ministre, Cher Renaud,
Monsieur le Préfet de Région,
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur l'Administrateur Général,
Madame le Directeur,
Mesdames, Messieurs, Chers Amis,
En venant vous rencontrer aujourd'hui, ici à Cadarache, je veux, avant tout, vous faire part de l'engagement du gouvernement à préparer la candidature de ce site pour que l'Europe gagne la compétition internationale sur ITER. Je veux aussi vous communiquer mon enthousiasme et ma conviction face à ce projet qui tient en une phrase : réaliser en France, au sein de l'Europe, un projet mondial. Un projet mondial qui nous permettra de penser l'avenir de la planète autrement...
Nous nous retrouvons dans un endroit emblématique de ce que la recherche française peut représenter de talents, de réussite, d'ambitions scientifiques et technologiques, d'espérances. En venant aujourd'hui en Provence et en débutant ma visite par le département de recherche sur la fusion contrôlée, j'ai vraiment l'impression de connaître un instant privilégié.
Celui d'avoir visité TORE SUPRA, qui est, en quelque sorte, votre compagnon quotidien et que vous connaissez mieux que personne.
Le privilège aussi de passer quelques instants avec vous, toute l'équipe du DRFC, mais aussi avec les représentants des autres départements, des autres équipes, des autres sites du CEA de Cadarache que je salue et auxquels je dis toute ma confiance pour les difficiles missions qui sont les leurs et toute ma gratitude pour leur engagement professionnel.
Aujourd'hui, je concentre ma visite en Provence sur le seul thème d'ITER, et je sais que chacun le comprend.
Nous sommes dans la dernière ligne droite d'une grande compétition internationale. Le Premier ministre, Jean-Pierre RAFFARIN, m'a demandé de me mobiliser complètement pour que la France accueille ce grand centre de recherche mondial au titre de l'Union européenne.
Je le fais avec enthousiasme. Un enthousiasme accru après avoir vu TORE SUPRA.
Un enthousiasme profond car les perspectives de la recherche sont prometteuses quant à ses applications technologiques et industrielles dans quelques décennies.
Mais un enthousiasme lucide, car les autres sites candidats présentent des conditions d'accueil et de fonctionnement acceptables par la communauté internationale.
Alors bien sûr, comme vous, je pense que Cadarache a beaucoup d'atouts pour gagner. Et vous êtes, chacun et chacune d'entre vous, un atout pour remporter la victoire. D'abord, parce que les équipes françaises ont une compétence reconnue dans le monde entier. Et à ce titre, vous êtes dans ce département mais également dans beaucoup d'autres départements du CEA, des précurseurs.
Vous êtes très largement des équipes internationales, et je voudrais saluer la cinquantaine de chercheurs étrangers qui sont présents aujourd'hui et qui travaillent au sein du DRFC. Ce sera un atout de poids dans la réalisation, au sein de l'Europe, d'un projet mondial.
Un autre atout majeur est fondé sur l'expérience que nous avons en France de "manager" des projets de très grande taille comme le sera ITER.
TORE SUPRA est aussi un très bon exemple et je le dis avec plaisir devant M. Robert AYMAR qui a été le chef du projet du tokamak TORE SUPRA, comme il a été un acteur essentiel du projet ITER. Lui mieux que quiconque sait ce que signifient la maîtrise des aléas et la coordination des nombreux intervenants pendant toutes les phases de la construction.
Notre capacité à participer à la construction d'ITER, à respecter les procédures, à évaluer au mieux les charges financières, est, j'en suis certaine, un atout très net non seulement vis-à-vis de nos partenaires européens mais encore vis-à-vis des Etats-Unis et de la Russie par exemple.
Aujourd'hui, il y a un consensus mondial parmi les scientifiques pour approuver le choix de réaliser ITER. Je ne reviens pas sur l'historique de ce grand projet depuis 1988. Les départs des uns, l'arrivée de nouveaux membres, le retour récent des Etats-Unis dont je me félicite. Ce consensus, c'est une chance dans un contexte où l'on explore les voies les plus originales pour produire autrement de l'énergie.
Si la fission est actuellement à l'origine de 75% de la production électrique française, la fusion elle, en est encore à un stade de recherche fondamentale et ne produira ses premiers effets qu'à partir de la deuxième moitié de ce siècle.
Mais, c'est dès aujourd'hui que les conditions nécessaires pour progresser dans ce domaine doivent être rassemblées.
Les progrès scientifiques ont été considérables au cours des dix dernières années tant dans le domaine expérimental que dans la compréhension des phénomènes qui régissent ces milieux si complexes que sont les plasmas chauds magnétisés.
Des puissances de fusion de 16 Mégawatts ont été produites sur le JET à Culham, en plein accord avec les prédictions.
Des durées de décharge de plus de quatre minutes ont été obtenues, ici même à Cadarache, sur TORE SUPRA, qualifiant ainsi des technologies analogues à celles qui seront utilisées pour la construction d'ITER.
Ces résultats remarquables placent l'Union européenne au premier plan des recherches dans ce domaine. Je considère que TORE SUPRA et JET sont complémentaires et que les deux records mondiaux, de puissance et de durée, ne pourront être dépassés que par ces deux machines, ou je l'espère par ITER. Je me réjouis de savoir que les questions relatives au maintien de décharges longues constituent un domaine important de la recherche sur la fusion que TORE SUPRA commence à mieux appréhender.
La prochaine étape dans les recherches, ITER, consiste à produire un plasma en auto-entretenu, c'est à dire un plasma produisant beaucoup plus d'énergie qu'il n'en consomme pour son propre fonctionnement.
Cette démonstration constitue l'ultime étape scientifique à l'issue de laquelle il restera à compléter le développement des matériaux nécessaires au réacteur et au procédé de régénération du combustible tritium pour parvenir à un réacteur économiquement viable.
Dans le concert des recherches mondiales, l'Union européenne, par la richesse de son programme expérimental, occupe une position dominante.
Au sein de l'Europe, la France a joué un rôle moteur incontestable. Moteur pour la construction du tokamak TFR à Fontenay-aux-Roses dans les années 70 puis du JET dans les années 80 à Culham, moteur pour la construction de TORE SUPRA, et maintenant moteur pour une proposition de site pour la machine de prochaine génération ITER.
TORE SUPRA explore la problématique des plasmas de longue durée (record de 4 minutes). Nombre des études et développements qui ont été effectués sur la machine sont directement utilisables pour la conception et le dessin du projet ITER.
C'est le cas par exemple des aimants supraconducteurs, des composants face au plasma qui résistent à des flux de chaleur très élevés (plusieurs MW/ m2 ), ou encore des technologies de chauffage du plasma, et des nombreux systèmes spécifiques de mesure associés.
C'est pourquoi les équipes du département de recherche sur la fusion contrôlée pourront mettre toutes leurs compétences au service d'ITER.
De plus, le département de recherche sur la fusion contrôlée, et plus généralement tout le Centre de Cadarache, permettront d'offrir à l'organisation ITER un support scientifique et technologique sans égal en comparaison des autres sites candidats.
Ce support immédiatement opérationnel une fois la décision prise pourra être beaucoup plus large lors de la construction et de l'exploitation de ITER. La palette de supports proposée est en effet très vaste : mise à disposition de bureaux d'études, locaux pour effectuer des tests de réception ou de qualification, suivi de fabrication, sans compter les éléments de logistique qui pourraient être mutualisés tels les équipes de gardiennage ou de radioprotection, le traitement des effluents, le suivi médical
Tous ces éléments constituent une source d'économie substantielle, mais ils garantissent surtout une intégration optimale d'ITER et de ses équipes au sein d'un environnement de grande qualité, et enfin l'expérience d'exploitation d'installations nucléaires diversifiées.
Nous sommes ensemble près du but.
Quelle satisfaction nous aurions tous à accueillir dans quelques mois à deux pas d'ici, ITER ! Nous aurions alors le sentiment que des hommes comme Paul-Henri REBUT, Robert AYMAR, André SAMAIN, et Jean JACQUINOT auraient ouvert la voie pour que ce grand projet mondial soit enfin une réalité. Je salue leur réussite et les remercie chaleureusement de leur engagement professionnel indéfectible.
Mesdames, Messieurs,
Le futur est à notre porte.
Je sais pouvoir compter sur votre mobilisation.
Soyez assurés de mon engagement.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.recherche.gouv.fr, le 2 avril 2003)
Rencontre avec des personnalités de la Région PACA dans le cadre du projet ITER
(International Thermonuclear Experimental Reactor)
Monsieur le Ministre, Cher Renaud,
Monsieur le Préfet de Région,
Messieurs les Présidents des Conseils Généraux et du Conseil Régional,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,
En venant vous rencontrer aujourd'hui à Marseille, je veux d'abord vous confirmer l'engagement total du gouvernement à préparer au mieux la candidature de Cadarache pour que l'Europe gagne la compétition internationale sur ITER, vous convaincre de ma détermination personnelle, vous remercier de votre implication aussi. Cette rencontre me permettra de faire le point des discussions et négociations en cours et d'envisager avec vous leur évolution dans les semaines et les mois qui viennent. Et puis j'aimerais surtout vous écouter et répondre à vos interrogations, étant entendu que nous pourrons poursuivre nos discussions au cours du déjeuner.
Il y a deux mois le Premier ministre confirmait la candidature officielle de la France, de Cadarache auprès de l'Union européenne, pour accueillir en Europe le centre de recherche mondial sur la fusion thermonucléaire contrôlée. M. Jean-Pierre RAFFARIN nous a dit alors, à mes collègues du Gouvernement et à moi-même, que nous nous engagions pour faire gagner la France et l'Europe.
M. le Préfet de région était présent à cette réunion de ministres, je suis convaincue qu'il a ressenti comme moi-même cette volonté, cette détermination. Cette détermination sera nécessaire dans une compétition dont nous ne devons pas sous estimer la concurrence.
Moi aussi je veux gagner, pour la France, pour l'Europe, pour la recherche, pour le développement technologique et industriel de votre région, Provence Alpes Côte d'Azur.
Je veux gagner aussi parce qu'ITER est un symbole fort qui transcende les contraintes ou les limites que nous connaissons habituellement. Le symbole de la réalisation en France, au sein de l'Europe, d'un projet mondial. Un projet mondial qui nous permettra de penser l'avenir de la planète autrement.
J'ai ce matin même pu découvrir le site de la possible implantation d'ITER à Cadarache. Ce fût pour moi un moment d'émotion, en cette terre de Provence, à la lumière si pure, aux paysages si attachants, de songer que mes yeux découvraient le lieu même d'un grand projet utile aux hommes des nombreuses générations à venir, aux enfants de nos propres enfants qui attendent que nous sachions faire en temps utile les choix courageux et lucides qui s'imposent.
Ce fut aussi une grande satisfaction de constater la superbe réussite que constitue le site du CEA et de son projet de pré-figuration de la fusion en pénétrant moi-même dans l'environnement immédiat de Tore Supra.
A quoi peut-on comparer le projet ITER ? Au rêve de la conquête de l'espace ? Au déchiffrement des énigmes du vivant ? Peut-être beaucoup plus encore, car nous savons bien que la satisfaction de nos besoins futurs en énergie pourra dépendre largement de notre capacité à faire ou à ne pas faire ensemble ces recherches sur la fusion contrôlée.
Et vous, vous avez décidé, ici en région Provence Alpes Côte d'Azur, de vous mobiliser collectivement, de faire équipe pour accueillir ITER en Provence.
Bien sûr, chaque décideur politique, économique et industriel, ou administratif envisage les retombées pour l'aménagement du territoire, dont il a la charge, en fonction de l'arrivée de plusieurs centaines de chercheurs à Cadarache avec leurs familles, avec la création d'entreprises technologiques ou de services, avec une ouverture internationale de notre système scolaire et universitaire. Tout cela vous y songez, et c'est bien légitime.
Mais c'est aussi parce que vous avez conscience qu'un centre de recherche mondial, sur un sujet hautement symbolique, changera la place, la dimension même de votre région et de l'ensemble du sud de notre pays vis à vis du reste de l'Union européenne.
Je partage votre analyse. L'implantation d'ITER en Provence représentera pour notre pays un succès national, un succès européen, dont les conséquences, les avantages, les impacts dépasseront largement nos frontières.
Les engagements financiers que les conseils généraux des Bouches du Rhône, du Vaucluse, du Var, des Alpes de Haute Provence, du conseil régional, de la communauté d'agglomérations du pays d'Aix représentent près de 10% du coût de la construction du centre de recherche ITER.
C'est presque autant que l'engagement financier annoncé par les États-Unis qui viennent de rejoindre le projet ITER. Je veux saluer cet effort remarquable de votre part. Je vous en remercie donc très sincèrement.
Votre participation financière est non seulement le signe le plus tangible de votre détermination, du soutien de votre population à ce projet, mais aussi un excellent moyen de renforcer et sécuriser le dossier français lorsqu'on le compare aux autres candidatures.
Je vous remercie aussi pour les travaux prospectifs que les uns ou les autres avez commencés, que ce soit avec les services de l'État sous l'impulsion et la coordination personnelle de M. le Préfet de région, des organismes de coopération institutionnels, ou encore avec les représentants des entreprises, pour anticiper les besoins en termes d'aménagements routiers, de logements, d'équipements publics.
Là aussi votre démarche est un signe fort qui crédibilise dans la durée la capacité de la France à accueillir le centre de recherche ITER.
Je vous le disais, ne nous berçons pas d'illusion, la concurrence sera forte. Chaque site candidat a ses avantages et ses inconvénients.
Bien sûr, nous pensons vous et moi que Cadarache a des atouts majeurs qui sont de vrais avantages ! Mais comme vous le savez, le rapport des scientifiques et ingénieurs sur les 4 sites candidats qui a été présenté à Saint-Petersbourg il y a un mois et demi, ne tranche pas en faveur d'un site ou d'un autre.
A nous de mettre en valeur nos atouts, de convaincre, d'être actif dans toutes les phases de la négociation internationale qui se poursuit.
Quel est aujourd'hui l'état de ces discussions ? Depuis deux mois, les Etats-Unis et la Chine ont rejoint les pays qui étaient déjà dans le projet : l'Union européenne, le Canada, la Russie, le Japon. Nous pensons que cela sera sans conséquence notable sur le calendrier la négociation qui porte non seulement sur le choix du site, mais aussi sur le partage financier du projet dans toute sa durée d'existence, soit près de 35 ans, et enfin sur la création d'une organisation internationale support et garant de la pérennité du projet. Il est clair que c'est sur le premier point que l'attention se focalise essentiellement. Mais je suis également comme vous, très attentive à l'aspect financier. L'arrivée de nouveaux partenaires ne peut, je l'espère, que modifier le partage des contributions de façon positive pour le pays hôte, je veux dire la France et l'Europe.
Pour le choix du site, ma priorité est d'arriver à ce que l'Union européenne ne présente plus qu'une seule candidature.
La nôtre bien sûr. En effet, la double candidature franco-espagnole au sein de l'Union ne me paraît pas souhaitable. L'Europe doit se montrer unie alors même que les pays du monde entier se retrouvent autour d'un même objectif.
Aussi, ai-je demandé au commissaire européen à la recherche, au moment du dernier conseil des ministres à Bruxelles au début du mois, de faire en sorte qu'un choix européen, un seul choix, soit effectué dès que possible.
Le commissaire BUSQUIN, a répondu favorablement à cette proposition. Je salue sa lucidité et son courage. La procédure pour y parvenir reste à déterminer. Pour ma part, j'ai commencé à prendre les contacts avec mes collègues au sein de l'Union européenne pour leur exposer notre volonté et notre capacité, mieux en France qu'ailleurs, à accueillir un grand projet mondial soutenu par l'Union européenne.
Je crois, je suis sûre que la France, et elle l'a déjà démontré notamment à Cadarache, sait créer ou accueillir des équipes internationales de recherche efficaces, intelligentes, soudées.
Elle sait aussi " manager " la construction de très grandes et complexes réalisations comme le sera ITER.
Construire un centre de recherche pendant près de dix ans, maîtriser les procédures, coordonner l'ensemble des intervenants, entreprises nationales, locales ou internationales, suivre attentivement l'évolution des coûts pour réduire au mieux les aléas financiers, notre pays, nos équipes, quelles que soient leurs origines, CEA, administrations publiques, Etat ou collectivités territoriales, entreprises, scientifiques ou techniques, en ont l'expérience, la volonté et le talent.
Je dis également à mes interlocuteurs qu'en accueillant ITER en Provence, la France veut construire avec tous les pays parties prenantes au projet, des partenariats forts.
Soit au sein du centre de recherche de Cadarache bien sûr, soit dans leur propre pays pour utiliser au mieux les compétences et les expériences des uns et des autres.
Nos partenaires allemands et anglais par exemple, conduisent déjà avec succès des recherches très importantes et très utiles pour ITER.
La coopération avec l'Italie est également primordiale.
Certains pays de l'Europe du Nord sont aussi actifs dans la recherche sur la fusion, et même si elle n'est pas dans l'Union européenne, la Suisse où j'étais vendredi et dont mon homologue suit de très près et favorablement notre candidature, a elle-même des chercheurs de très haut niveau.
ITER est l'aboutissement du travail de centaines de chercheurs à travers le monde, et je saluais tout à l'heure à Cadarache l'équipe que dirige M. Jean JACQUINOT à la tête du département de recherche sur la fusion contrôlée, et au vu du formidable travail accompli, comment ne pas espérer convaincre toute la communauté scientifique au sein de l'Union européenne de se mobiliser pour que l'Europe, en présentant une seule candidature, ait les meilleures chances de l'emporter face au Canada et au Japon ?
C'est cette première étape qu'il faut franchir victorieusement, c'est la stratégie que je défends, c'est l'action que je mène.
Si cette étape est franchie avant l'été, j'ai bon espoir que les négociations avec les autres pays seront conclues avant la fin de l'année ou au tout début de l'année prochaine.
Dans le même temps je reste évidemment mobilisée à l'égard des autres partenaires hors Union européenne. Jeudi dernier, une délégation chinoise est venue évaluer notre site avant de se rendre en Espagne, et je leur ai adressé un chaleureux message de bienvenue.
Je verrai moi-même dans quelques semaines le Ministre chinois que j'avais rencontré à Pékin en décembre.
Je serai demain à Berlin, et après-demain aux Etats-Unis pour aborder avec nos amis américains notamment le dossier ITER.
Je me plais à souligner que la coopération scientifique se poursuit, quelles que soient les circonstances.
J'ai vu à plusieurs reprises le Président russe lors de sa récente visite en France.
Croyez-moi, le Premier ministre suit également le dossier avec attention et mes collègues, Renaud MUSELIER le confirmera, sont bien informés de son évolution. Vous savez que M. le Président de la République a, il y a trois semaines, évoqué ITER en inaugurant un centre de très haute technologie à Crolles à côté de Grenoble. Il est fortement mobilisé, je le sais.
Désormais, nous sommes entrés dans la dernière ligne droite et l'équipe France doit être la plus soudée possible pour atteindre cet objectif commun.
Vous avez tracé la voie.
Nous continuerons dans cet esprit d'ouverture et de saine compétition avec détermination, mais sans agressivité vis-à-vis des autres sites. Elle ne serait pas de mise dans la recherche d'un consensus, seul moyen de construire à l'échelle européenne puis mondiale, ce grand projet en faveur de la recherche sur la fusion contrôlée.
Un tel comportement serait contre-productif vis-à-vis des équipes de recherche des autres pays candidats avec lesquels nous travaillerons lorsque le site, Cadarache bien sûr, sera retenu.
Pour autant nous devons argumenter et répondre scientifiquement, technologiquement, techniquement aux interrogations que peut poser notre candidature.
Ainsi, s'agissant de la prise en compte du risque sismique à Cadarache, nous disposons d'abord des conclusions très claires du Comité d'experts de Saint-Pétersbourg.
Ils considèrent que les caractéristiques sismiques du site sont bien connues. Des évaluations internationales menées dans les domaines de la géologie, de la sismologie, de l'hydrogéologie ont par ailleurs permis à l'Autorité de Sûreté Nucléaire à préconiser des conditions précises à respecter pour la construction des installations nucléaires sur cette zone. Des réponses techniques et classiques dans la conception et la construction mêmes des bâtiments permettront de prendre en compte ces données pour garantir le plus haut niveau de sécurité.
A la différence des trois autres sites candidats, Cadarache n'a pas d'accès direct maritime ou fluvial.
Certains ont pointé du doigt les éventuelles difficultés de transport d'un certain nombre d'éléments et de pièces lourds et encombrants nécessaires à la construction.
C'est un fait que la distance entre Cadarache et l'étang de Berre est d'environ soixante-dix kilomètres à vol d'oiseau et de plus de quatre-vingt-dix kilomètres par la route.
Les études d'ores et déjà engagées ont sans ambiguïté permis de déterminer les quelques endroits du trajet qui nécessiteront des modifications des voies existantes : renforcement d'ouvrages d'art, élargissement de tronçons de route par exemple.
Là encore, je pense que nous avons déjà tous les éléments de réponse à cette interrogation, je sais que les financements nécessaires à ces travaux sont non seulement évalués mais également d'ores et déjà prévus.
Il convient donc de poursuivre l'étroite coopération entre les services de collectivités territoriales concernées et ceux de l'Etat pour être prêts le plus en amont possible du début du chantier.
Je voudrais pour conclure, aborder un autre point, la question de l'impact sur l'environnement du fonctionnement du centre de recherche.
L'Autorité de Sûreté Nucléaire retient que les enjeux essentiels en matière de sûreté ont été correctement identifiés. Les options de sûreté et de conception présentées sont reconnues par elles comme convenables et adaptées aux caractéristiques du site. Elle note également comme un aspect positif qu'en cas d'implantation sur ledit site, l'exploitant pourra bénéficier de l'expérience acquise par les équipes de l'installation TORE-SUPRA.
En première analyse, l'ASN retient que le risque présenté par l'installation pour le public et l'environnement lors de son fonctionnement est faible. Pour les travailleurs, au risque radiologique se superposera un risque chimique lié à l'existence de poussières de béryllium. Il conviendra de maîtriser la somme de ces risques avec rigueur.
Les rejets de l'installation seront en très faibles quantités essentiellement constitués de tritium. L'impact sanitaire de ces rejets sur l'environnement de l'installation devrait pouvoir être maintenu à un niveau très faible.
Le fonctionnement de l'installation produira des matériaux de moyenne radio-activité au sein de l'enveloppe de confinement, par collisions des neutrons avec les parois. La France devra les gérer lors de l'exploitation, puis du démantèlement de l'installation, sans conséquence pour les populations. La France a le savoir faire pour cela.
Je souhaite, dans la transparence, que l'ensemble des questions liées à l'impact sur l'environnement par l'installation du centre de recherche ITER puisse faire l'objet d'un débat avec le public.
La Commission nationale du débat public devra permettre que s'expriment localement tous les points de vue sur cette implantation.
Mon objectif est donc que le public puisse se prononcer en amont sur ce projet alors même que toutes ses caractéristiques n'auront pas encore été définies.
Je vais saisir formellement la Commission nationale du débat public pour lui demander, compte tenu de l'importance de ce projet, de ses caractéristiques concernant la procédure du choix, de me faire part de son avis sur la nature de l'information, sur la participation du public et sur le moment qui serait le plus approprié, pour conduire ce débat. Je suis, pour ma part, favorable à ce que le débat ait lieu le plus tôt possible.
Voilà, Mesdames et Messieurs, les éléments d'information que je tenais à vous donner aujourd'hui à Marseille.
Avec le Préfet de région, avec mon équipe, avec vous, nous travaillons pour l'avenir. Ce sont des perspectives lointaines qui nous mobilisent ensemble. Mais elles sont riches d'espoir pour la communauté scientifique, pour votre région et pour la France, pour l'ensemble de la planète.
Merci de votre engagement et des efforts que vous avez menés, nous continuons sur le même chemin.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.recherche.gouv.fr, le 2 avril 2003)