Texte intégral
1/ Les ouvriers de la D.C.N. Toulon ont l'impression d'être pris " en otages " par le Ministre de la Défense qui aurait l'intention de régler des comptes avec la D.G.A. et les ingénieurs de l'armement. Le Var étant le révélateur de cette situation. Cette impression est-elle fondée ?
Alain RICHARD : C'est bien plus simple que cela. La DCN a des défis sérieux à relever, chacun les connaît. Les besoins de la Marine Nationale ne représentent que la moitié de ses capacités de production. Il faut donc trouver du travail auprès d'autres Marines, qui exercent un choix et qui comparent délais, coûts et qualité. Quant à l'Etat lui-même, il a remis en cohérence sa politique d'équipement militaire en tenant compte de la fin de la guerre froide ; le Premier Ministre Lionel JOSPIN, concluant à St-Mandrier la revue des programmes, a consolidé le niveau des crédits de défense (notamment pour la Marine), mais il a aussi décidé d'obtenir chaque matériel dans les meilleures conditions. Tous les industriels de l'armement s'y adaptent, la DCN doit aussi se mobiliser en ce sens. Ce qui est vrai pour les hélicoptères et les avions de combat, les missiles, les blindés, les radars ou les télécoms militaires est également vrai pour la marine de guerre. Le rapport prix-efficacité doit évoluer, et c'est possible.
Il me revient d'impulser cette transformation vers une DCN plus dynamique, plus efficace, plus économe et plus adaptable tout en respectant son statut d'entreprise d'Etat et celui de ses personnels. Cela n'a pas été fait avant, n'y revenons pas ; mais je suis certain d'agir pour préparer l'avenir d'une DCN modernisée. En regardant toutes les autres entreprises de défense, en France et en Europe, je sais que le refus de s'adapter représenterait le déclin assuré. Et comme je suis persuadé de la valeur professionnelle des personnels de la DCN, de l'excellence technique de l'outil, je sais que cela vaut la peine de travailler à cette modernisation, en valorisant les atouts et en examinant minutieusement les points faibles. Il faut le faire dans le dialogue social, c'est pourquoi j'ai indiqué aux syndicats dès le lendemain du discours de St-Mandrier que j'installais une mission de concertation dirigée par Jean Louis MOYNOT dont l'expérience variée est reconnue, tant dans le domaine social que dans celui de l'organisation industrielle.
Mais quand une grande entreprise doit faire des efforts pour assurer son avenir dans un contexte économique exigeant, c'est tout le personnel, de la base au sommet, qui doit se motiver pour réussir. Donc ce n'est vraiment pas le moment de prendre pour cible une catégorie ou une autre.
2/ M. CONORT a avancé aux syndicats un certain nombre de propositions pouvant permettre de faire avancer le conflit. En existe-t-il d'autres qui pourraient permettre de renouer le dialogue ?
Alain RICHARD : Nous devons regarder vers l'avenir. Le gouvernement a décidé de faire réparer les avaries dues à l'accident du " Var " - bâtiment technique ayant très peu de composantes militaires - dans un chantier civil ayant la capacité immédiate de le faire pour un coût limité. Cette décision a été interprétée par les salariés comme une menace sur le plan de charge de la DCN-Toulon, alors que le " Var " n'y était pas prévu. Je souhaite donc que la discussion, au niveau local, porte sur les améliorations possibles du plan de charge dans les mois qui viennent. La remontée, modeste mais réelle, de nos crédits de réparation prévue à partir de 1999 ouvre des perspectives positives, tant pour la disponibilité militaire des bâtiments de la Marine que pour l'activité de la DCN. Les étapes de la modernisation des méthodes de travail, en prenant appui sur l'expérience et les propositions des salariés et de l'encadrement, sont aussi à négocier. La mesure de départ anticipé à 52 ans, maintenant applicable, et l'aménagement du temps de travail sont également sur la table dans des termes qui méritent attention. Le dialogue est donc à approfondir, et non pas à reprendre comme vous le croyez, car il est maintenu en permanence - y compris par moi-même quand c'est utile. La concertation portera même, à l'avenir, sur les méthodes de comparaison entre le secteur concurrentiel et la DCN pour que chacun ait connaissance des données du problème.
3/ D.C.N. Ingénierie Sud s'associe aux actions actuelles du personnel de D.C.N. Toulon. Les syndicats C.G.T., C.F.D.T., C.G.C. avancent le départ de plus d'une centaine d'ingénieurs et redoutent une brutale déflation du plan de charge de l'établissement. Ces craintes sont-elles fondées ?
Alain RICHARD : Dans l'amélioration de l'efficacité industrielle de la DCN, la contribution de l'ingénierie est importante. Là aussi il faut discuter du changement car il y a des doublons et des incohérences qui viennent d'une répartition mal rationalisée au sein de la DCN, dont je rappelle qu'elle est une entreprise globale et non une mosaïque d'établissements isolés.
Mais dans ce cadre, le gouvernement a le souci de maintenir toute la place des établissements du Var au sein de l'entreprise, notamment DCN-Ingénierie Sud dont la compétence dans les systèmes de combat naval est un point fort de la DCN. Nous mesurons fort bien le rôle de l'activité navale militaire dans la vie économique régionale et nous en tenons compte.
D'ailleurs, les autres décisions que nous prenons en matière de réorganisation des armées aboutissent à une amélioration globale de l'emploi lié à la Défense dans le département du Var avec un apport net de plus de 900 militaires professionnels. En investissant près d'un milliard de francs dans l'Hôpital Sainte Anne durant les années à venir, nous démontrons aussi ce que représente pour nous la présence de la marine dans l'agglomération toulonnaise.
4/ Vous savez que le conflit a durement frappé la sous-traitance. Qu'avez-vous prévu pour aider les entreprises concernées ?
Alain RICHARD : Je suis particulièrement attentif aux petites et moyennes entreprises qui réalisent une partie significative de leur activité dans le domaine de la Défense. C'est pourquoi j'ai désigné le Contrôleur général des armées Yvon JOUAN comme chargé de mission pour les PME-PMI du secteur. Afin d'éviter que le conflit en cours ne pénalise trop fortement les entreprises toulonnaises, ce qui n'est d'ailleurs pas le cas actuellement, j'ai demandé au Contrôleur général JOUAN de se rendre dès la semaine prochaine à Toulon pour examiner avec chaque entreprise les problèmes spécifiques qu'elle peut éventuellement rencontrer.
5/ Des incidents répétés sont survenus dans l'arsenal : barricades, déprédations. Le Ministre envisage-t-il de fermer provisoirement l'arsenal comme le redoutent certains syndicats ?
Alain RICHARD : Il y a un conflit, et des incidents en résultent. J'ai le devoir de réduire la tension autant que possible et je note que les organisations syndicales agissent avec responsabilité. Chacun est conscient que la DCN est au service de la Défense et que tout acte rompant ce lien de confiance est en contradiction avec les bases mêmes du statut de l'établissement. Il faut sortir du conflit dans la dignité, et j'exercerai ma propre responsabilité dans ce sens.
6/ Le Ministre envisage-t-il de désigner un médiateur pour sortir de la crise actuelle ?
Alain RICHARD : Il n'y a pas de difficulté particulière pour le déroulement de la négociation. C'est aux dirigeants de la DCN de la mener sous l'égide du préfet maritime ; Dominique CONORT, le directeur chargé du personnel civil au Ministère, s'est joint à eux ; mes collaborateurs et moi-même suivons les discussions en permanence et prenons en outre les contacts nécessaires.
Les organisations syndicales savent que dans ce conflit j'ai particulièrement à cur de respecter leur rôle de représentation collective et de leur donner des éléments concrets pour déboucher. Je le leur ai indiqué clairement et elles ont pu juger de la sincérité de notre dialogue depuis 11 mois sur tous les sujets.
7/ Quelle sont les répercussions sur l'activité opérationnelle de la Marine après près d'un mois de conflit ?
Alain RICHARD : Depuis le début du conflit, les bâtiments qui devaient appareiller l'ont fait normalement, et le " Jean de Vienne " a quitté le bassin. Pour la prochaine échéance opérationnelle, c'est-à-dire l'exercice multinational EOLE, début juin, tous les bâtiments prévus pourront appareiller.
8/ Quel est le coût estimé du conflit actuel qui est l'un des plus long connu dans l'histoire de l'arsenal de Toulon depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale ?
Alain RICHARD : On a souvent dit à chaud de grosses erreurs sur le coût de tel ou tel conflit. Mon objectif est de régler celui-ci loyalement et de permettre à la DCN-Toulon de reprendre son activité programmée au service de la Marine Nationale et des clients étrangers qui lui font confiance.
Le rattrapage des tâches à accomplir sera négocié et je crois à la détermination des salariés de repartir de l'avant en montrant leurs capacités de réalisation.
(source http://www.defense.gouv.fr, le 8 janvier 2002)
Alain RICHARD : C'est bien plus simple que cela. La DCN a des défis sérieux à relever, chacun les connaît. Les besoins de la Marine Nationale ne représentent que la moitié de ses capacités de production. Il faut donc trouver du travail auprès d'autres Marines, qui exercent un choix et qui comparent délais, coûts et qualité. Quant à l'Etat lui-même, il a remis en cohérence sa politique d'équipement militaire en tenant compte de la fin de la guerre froide ; le Premier Ministre Lionel JOSPIN, concluant à St-Mandrier la revue des programmes, a consolidé le niveau des crédits de défense (notamment pour la Marine), mais il a aussi décidé d'obtenir chaque matériel dans les meilleures conditions. Tous les industriels de l'armement s'y adaptent, la DCN doit aussi se mobiliser en ce sens. Ce qui est vrai pour les hélicoptères et les avions de combat, les missiles, les blindés, les radars ou les télécoms militaires est également vrai pour la marine de guerre. Le rapport prix-efficacité doit évoluer, et c'est possible.
Il me revient d'impulser cette transformation vers une DCN plus dynamique, plus efficace, plus économe et plus adaptable tout en respectant son statut d'entreprise d'Etat et celui de ses personnels. Cela n'a pas été fait avant, n'y revenons pas ; mais je suis certain d'agir pour préparer l'avenir d'une DCN modernisée. En regardant toutes les autres entreprises de défense, en France et en Europe, je sais que le refus de s'adapter représenterait le déclin assuré. Et comme je suis persuadé de la valeur professionnelle des personnels de la DCN, de l'excellence technique de l'outil, je sais que cela vaut la peine de travailler à cette modernisation, en valorisant les atouts et en examinant minutieusement les points faibles. Il faut le faire dans le dialogue social, c'est pourquoi j'ai indiqué aux syndicats dès le lendemain du discours de St-Mandrier que j'installais une mission de concertation dirigée par Jean Louis MOYNOT dont l'expérience variée est reconnue, tant dans le domaine social que dans celui de l'organisation industrielle.
Mais quand une grande entreprise doit faire des efforts pour assurer son avenir dans un contexte économique exigeant, c'est tout le personnel, de la base au sommet, qui doit se motiver pour réussir. Donc ce n'est vraiment pas le moment de prendre pour cible une catégorie ou une autre.
2/ M. CONORT a avancé aux syndicats un certain nombre de propositions pouvant permettre de faire avancer le conflit. En existe-t-il d'autres qui pourraient permettre de renouer le dialogue ?
Alain RICHARD : Nous devons regarder vers l'avenir. Le gouvernement a décidé de faire réparer les avaries dues à l'accident du " Var " - bâtiment technique ayant très peu de composantes militaires - dans un chantier civil ayant la capacité immédiate de le faire pour un coût limité. Cette décision a été interprétée par les salariés comme une menace sur le plan de charge de la DCN-Toulon, alors que le " Var " n'y était pas prévu. Je souhaite donc que la discussion, au niveau local, porte sur les améliorations possibles du plan de charge dans les mois qui viennent. La remontée, modeste mais réelle, de nos crédits de réparation prévue à partir de 1999 ouvre des perspectives positives, tant pour la disponibilité militaire des bâtiments de la Marine que pour l'activité de la DCN. Les étapes de la modernisation des méthodes de travail, en prenant appui sur l'expérience et les propositions des salariés et de l'encadrement, sont aussi à négocier. La mesure de départ anticipé à 52 ans, maintenant applicable, et l'aménagement du temps de travail sont également sur la table dans des termes qui méritent attention. Le dialogue est donc à approfondir, et non pas à reprendre comme vous le croyez, car il est maintenu en permanence - y compris par moi-même quand c'est utile. La concertation portera même, à l'avenir, sur les méthodes de comparaison entre le secteur concurrentiel et la DCN pour que chacun ait connaissance des données du problème.
3/ D.C.N. Ingénierie Sud s'associe aux actions actuelles du personnel de D.C.N. Toulon. Les syndicats C.G.T., C.F.D.T., C.G.C. avancent le départ de plus d'une centaine d'ingénieurs et redoutent une brutale déflation du plan de charge de l'établissement. Ces craintes sont-elles fondées ?
Alain RICHARD : Dans l'amélioration de l'efficacité industrielle de la DCN, la contribution de l'ingénierie est importante. Là aussi il faut discuter du changement car il y a des doublons et des incohérences qui viennent d'une répartition mal rationalisée au sein de la DCN, dont je rappelle qu'elle est une entreprise globale et non une mosaïque d'établissements isolés.
Mais dans ce cadre, le gouvernement a le souci de maintenir toute la place des établissements du Var au sein de l'entreprise, notamment DCN-Ingénierie Sud dont la compétence dans les systèmes de combat naval est un point fort de la DCN. Nous mesurons fort bien le rôle de l'activité navale militaire dans la vie économique régionale et nous en tenons compte.
D'ailleurs, les autres décisions que nous prenons en matière de réorganisation des armées aboutissent à une amélioration globale de l'emploi lié à la Défense dans le département du Var avec un apport net de plus de 900 militaires professionnels. En investissant près d'un milliard de francs dans l'Hôpital Sainte Anne durant les années à venir, nous démontrons aussi ce que représente pour nous la présence de la marine dans l'agglomération toulonnaise.
4/ Vous savez que le conflit a durement frappé la sous-traitance. Qu'avez-vous prévu pour aider les entreprises concernées ?
Alain RICHARD : Je suis particulièrement attentif aux petites et moyennes entreprises qui réalisent une partie significative de leur activité dans le domaine de la Défense. C'est pourquoi j'ai désigné le Contrôleur général des armées Yvon JOUAN comme chargé de mission pour les PME-PMI du secteur. Afin d'éviter que le conflit en cours ne pénalise trop fortement les entreprises toulonnaises, ce qui n'est d'ailleurs pas le cas actuellement, j'ai demandé au Contrôleur général JOUAN de se rendre dès la semaine prochaine à Toulon pour examiner avec chaque entreprise les problèmes spécifiques qu'elle peut éventuellement rencontrer.
5/ Des incidents répétés sont survenus dans l'arsenal : barricades, déprédations. Le Ministre envisage-t-il de fermer provisoirement l'arsenal comme le redoutent certains syndicats ?
Alain RICHARD : Il y a un conflit, et des incidents en résultent. J'ai le devoir de réduire la tension autant que possible et je note que les organisations syndicales agissent avec responsabilité. Chacun est conscient que la DCN est au service de la Défense et que tout acte rompant ce lien de confiance est en contradiction avec les bases mêmes du statut de l'établissement. Il faut sortir du conflit dans la dignité, et j'exercerai ma propre responsabilité dans ce sens.
6/ Le Ministre envisage-t-il de désigner un médiateur pour sortir de la crise actuelle ?
Alain RICHARD : Il n'y a pas de difficulté particulière pour le déroulement de la négociation. C'est aux dirigeants de la DCN de la mener sous l'égide du préfet maritime ; Dominique CONORT, le directeur chargé du personnel civil au Ministère, s'est joint à eux ; mes collaborateurs et moi-même suivons les discussions en permanence et prenons en outre les contacts nécessaires.
Les organisations syndicales savent que dans ce conflit j'ai particulièrement à cur de respecter leur rôle de représentation collective et de leur donner des éléments concrets pour déboucher. Je le leur ai indiqué clairement et elles ont pu juger de la sincérité de notre dialogue depuis 11 mois sur tous les sujets.
7/ Quelle sont les répercussions sur l'activité opérationnelle de la Marine après près d'un mois de conflit ?
Alain RICHARD : Depuis le début du conflit, les bâtiments qui devaient appareiller l'ont fait normalement, et le " Jean de Vienne " a quitté le bassin. Pour la prochaine échéance opérationnelle, c'est-à-dire l'exercice multinational EOLE, début juin, tous les bâtiments prévus pourront appareiller.
8/ Quel est le coût estimé du conflit actuel qui est l'un des plus long connu dans l'histoire de l'arsenal de Toulon depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale ?
Alain RICHARD : On a souvent dit à chaud de grosses erreurs sur le coût de tel ou tel conflit. Mon objectif est de régler celui-ci loyalement et de permettre à la DCN-Toulon de reprendre son activité programmée au service de la Marine Nationale et des clients étrangers qui lui font confiance.
Le rattrapage des tâches à accomplir sera négocié et je crois à la détermination des salariés de repartir de l'avant en montrant leurs capacités de réalisation.
(source http://www.defense.gouv.fr, le 8 janvier 2002)