Texte intégral
- "Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les députés,
Monsieur le député,
L'émotion, grave et forte, qu'a suscité en Europe et aussi dans notre pays le projet d'alliance entre le parti conservateur autrichien et le parti de l'extrême droite en Autriche, est tout à fait légitime. Je sais, monsieur le député, que la réprobation que vous exprimez est partagée par l'ensemble de la représentation nationale.
Nous n'avons pas oublié les brûlures de l'histoire européenne. Certes, il ne faut pas amalgamer les situations historiques. Les années 2000 en Europe ne sont pas les années Trente. L'Allemagne de Hindenburg et d'Hitler ne peut être comparée à l'Autriche de messieurs Schüssel et Haider. Le FPO lui-même, le parti de M. Haider, n'est pas un parti national-socialiste. Mais c'est un parti d'extrême droite, xénophobe. Mais c'est un parti dont le leader a rendu hommage, en son temps et nous ne l'avons pas oublié, à Hitler, sa politique de l'emploi et les waffen SS. Mais c'est un parti dont le leader a révélé tout récemment encore, par ses dérapages verbaux, inconvenants à l'égard du Président de la République française, répugnants à l'égard du gouvernement belge, ce qu'il était.
Il est donc logique que ce projet d'alliance provoque à la fois l'indignation et le refus.
Une question est posée, notamment parfois à Vienne, chez certains des responsables autrichiens : est-ce que cette alliance projetée n'est pas seulement l'affaire des Autrichiens ?
Il faut, à cet égard, insister sur un élément qui n'a pas été mis jusqu'ici, suffisamment en valeur. Dire cela, ce n'est pas prendre en compte le fait que l'Autriche désormais appartient à une communauté et à une communauté fondée sur des principes et des valeurs humanistes. Lorsque, au début des années 1990, a été posée la question du passé de monsieur K. Waldheim, l'Autriche n'était pas membre de l'Union européenne. Chacun des pays européens était libre de déterminer la nature de ses relations avec l'Autriche ; chacun des pays européens et des autres pays du monde était libre de décider s'il avait ou n'avait pas de relation politique avec l'Autriche. D'ailleurs, la communauté internationale des nations démocratiques a marqué son refus, a engagé une politique de boycott qui a conduit à la démission de monsieur K. Waldheim.
Aujourd'hui, les choses sont différentes parce que l'Autriche est dans l'Union européenne. Nous nous réunissons régulièrement entre chefs d'Etat et de gouvernements ou au niveau des ministres compétents, à Quinze, dans l'Union européenne et nous ne pouvons pas refuser, selon les règles du Traité, la participation des Etats membres. C'est pourquoi, en réalité, lorsque l'on parle d'ingérence, il faut bien considérer que par le seul fait que nous devrions accepter dans ces instances, des représentants de ces partis d'extrême droite, ces dirigeants nous demandent en réalité d'apporter notre caution politique à une alliance qu'ils ont déterminée en Autriche. Or nous refusons cette alliance parce que la jugeant dangereuse. Or nous refusons cette alliance dans notre propre pays. Et c'est pour moi l'occasion ici, de rendre hommage à la droite parlementaire qui, à quelques exceptions près dans trois de nos régions, a refusé constamment, le Président de la République en particulier, cette alliance avec l'extrême droite. Nous n'avons pas à nous la voir imposer politiquement.
Puisqu'une communauté implique que nous vivions ensemble, alors c'est aux quinze Etats-membres à s'entendre sur les règles minimum de ce vivre ensemble.
Les idées du FPO sont contradictoires avec les principes sur lesquels est fondée la communauté européenne. C'est pourquoi nous sommes effectivement passés aux actes, la France et les quatorze pays autres que l'Autriche. Le Président de la République, avec mon plein accord, dès vendredi, après les contacts avec le chancelier allemand, a proposé au président de l'Union, monsieur A. Guterres, un certain nombre de mesures pratiques. Moi-même, j'ai eu pendant ce week-end des contacts téléphoniques avec le président de l'Union. Et la présidence portugaise a proposé hier d'adresser, et a effectivement adressé, au président de la République autrichienne et à l'actuel chancelier d'Autriche, le chancelier social-démocrate Klima, une déclaration selon laquelle si une telle alliance était constituée, il n'y aurait plus de contacts politiques et diplomatiques officiels entre les quatorze et l'Autriche, les contacts au niveau des ambassadeurs seraient maintenus à un seul niveau technique, nous n'appuierions aucune des propositions de l'Autriche en matière de postes au plan européen comme au plan international.
Si nous nous sommes situés au plan bilatéral, l'addition des quatorze bilatéralismes, et au plan politique, c'est que le Traité ne nous permettait pas d'agir de façon préventive. Il faudrait, selon l'article 7 du Traité d'Amsterdam, que des violations graves et persistantes aux principes qui fondent l'Union, soient opérés par cet hypothétique nouveau gouvernement, avant que nous ne puissions agir. Nous n'entendons pas attendre que cette situation se créé.
C'est pourquoi, la pression politique exercée par les chefs d'Etats et de gouvernements, celle exercée par nos formations politiques, par les mouvements spirituels, par l'opinion elle-même, par les médias, est absolument nécessaire. L'objectif est de faire en sorte que monte une prise de conscience en Autriche et que ce projet soit interrompu. S'il n'en était pas ainsi, croyez bien qu'en contact avec nos partenaires européens, le gouvernement français serait amené sur la base de ce qui a été décidé, sur la base de nouvelles propositions qu'il pourrait faire, notamment s'il était confronté à cette situation pendant la présidence française, à prendre toute mesure pour que l'Autriche de messieurs Haider et Schüssel soit alors politiquement isolée en Europe.
(Source : http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 3 février 2000)
Mesdames et Messieurs les députés,
Monsieur le député,
L'émotion, grave et forte, qu'a suscité en Europe et aussi dans notre pays le projet d'alliance entre le parti conservateur autrichien et le parti de l'extrême droite en Autriche, est tout à fait légitime. Je sais, monsieur le député, que la réprobation que vous exprimez est partagée par l'ensemble de la représentation nationale.
Nous n'avons pas oublié les brûlures de l'histoire européenne. Certes, il ne faut pas amalgamer les situations historiques. Les années 2000 en Europe ne sont pas les années Trente. L'Allemagne de Hindenburg et d'Hitler ne peut être comparée à l'Autriche de messieurs Schüssel et Haider. Le FPO lui-même, le parti de M. Haider, n'est pas un parti national-socialiste. Mais c'est un parti d'extrême droite, xénophobe. Mais c'est un parti dont le leader a rendu hommage, en son temps et nous ne l'avons pas oublié, à Hitler, sa politique de l'emploi et les waffen SS. Mais c'est un parti dont le leader a révélé tout récemment encore, par ses dérapages verbaux, inconvenants à l'égard du Président de la République française, répugnants à l'égard du gouvernement belge, ce qu'il était.
Il est donc logique que ce projet d'alliance provoque à la fois l'indignation et le refus.
Une question est posée, notamment parfois à Vienne, chez certains des responsables autrichiens : est-ce que cette alliance projetée n'est pas seulement l'affaire des Autrichiens ?
Il faut, à cet égard, insister sur un élément qui n'a pas été mis jusqu'ici, suffisamment en valeur. Dire cela, ce n'est pas prendre en compte le fait que l'Autriche désormais appartient à une communauté et à une communauté fondée sur des principes et des valeurs humanistes. Lorsque, au début des années 1990, a été posée la question du passé de monsieur K. Waldheim, l'Autriche n'était pas membre de l'Union européenne. Chacun des pays européens était libre de déterminer la nature de ses relations avec l'Autriche ; chacun des pays européens et des autres pays du monde était libre de décider s'il avait ou n'avait pas de relation politique avec l'Autriche. D'ailleurs, la communauté internationale des nations démocratiques a marqué son refus, a engagé une politique de boycott qui a conduit à la démission de monsieur K. Waldheim.
Aujourd'hui, les choses sont différentes parce que l'Autriche est dans l'Union européenne. Nous nous réunissons régulièrement entre chefs d'Etat et de gouvernements ou au niveau des ministres compétents, à Quinze, dans l'Union européenne et nous ne pouvons pas refuser, selon les règles du Traité, la participation des Etats membres. C'est pourquoi, en réalité, lorsque l'on parle d'ingérence, il faut bien considérer que par le seul fait que nous devrions accepter dans ces instances, des représentants de ces partis d'extrême droite, ces dirigeants nous demandent en réalité d'apporter notre caution politique à une alliance qu'ils ont déterminée en Autriche. Or nous refusons cette alliance parce que la jugeant dangereuse. Or nous refusons cette alliance dans notre propre pays. Et c'est pour moi l'occasion ici, de rendre hommage à la droite parlementaire qui, à quelques exceptions près dans trois de nos régions, a refusé constamment, le Président de la République en particulier, cette alliance avec l'extrême droite. Nous n'avons pas à nous la voir imposer politiquement.
Puisqu'une communauté implique que nous vivions ensemble, alors c'est aux quinze Etats-membres à s'entendre sur les règles minimum de ce vivre ensemble.
Les idées du FPO sont contradictoires avec les principes sur lesquels est fondée la communauté européenne. C'est pourquoi nous sommes effectivement passés aux actes, la France et les quatorze pays autres que l'Autriche. Le Président de la République, avec mon plein accord, dès vendredi, après les contacts avec le chancelier allemand, a proposé au président de l'Union, monsieur A. Guterres, un certain nombre de mesures pratiques. Moi-même, j'ai eu pendant ce week-end des contacts téléphoniques avec le président de l'Union. Et la présidence portugaise a proposé hier d'adresser, et a effectivement adressé, au président de la République autrichienne et à l'actuel chancelier d'Autriche, le chancelier social-démocrate Klima, une déclaration selon laquelle si une telle alliance était constituée, il n'y aurait plus de contacts politiques et diplomatiques officiels entre les quatorze et l'Autriche, les contacts au niveau des ambassadeurs seraient maintenus à un seul niveau technique, nous n'appuierions aucune des propositions de l'Autriche en matière de postes au plan européen comme au plan international.
Si nous nous sommes situés au plan bilatéral, l'addition des quatorze bilatéralismes, et au plan politique, c'est que le Traité ne nous permettait pas d'agir de façon préventive. Il faudrait, selon l'article 7 du Traité d'Amsterdam, que des violations graves et persistantes aux principes qui fondent l'Union, soient opérés par cet hypothétique nouveau gouvernement, avant que nous ne puissions agir. Nous n'entendons pas attendre que cette situation se créé.
C'est pourquoi, la pression politique exercée par les chefs d'Etats et de gouvernements, celle exercée par nos formations politiques, par les mouvements spirituels, par l'opinion elle-même, par les médias, est absolument nécessaire. L'objectif est de faire en sorte que monte une prise de conscience en Autriche et que ce projet soit interrompu. S'il n'en était pas ainsi, croyez bien qu'en contact avec nos partenaires européens, le gouvernement français serait amené sur la base de ce qui a été décidé, sur la base de nouvelles propositions qu'il pourrait faire, notamment s'il était confronté à cette situation pendant la présidence française, à prendre toute mesure pour que l'Autriche de messieurs Haider et Schüssel soit alors politiquement isolée en Europe.
(Source : http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 3 février 2000)