Texte intégral
Madame la ministre déléguée à la recherche,
Messieurs les directeurs généraux,
mes chers collègues doyens et présidents de CME,
J'ai aujourd'hui grand plaisir à m' exprimer devant les responsables des CHU réunis à l'occasion de ces assises niçoises. À un moment crucial pour l'évolution de la médecine de notre pays, vous avez, ensemble, en effet, un rôle éminent à jouer.
Je situerai mon intervention dans le contexte de la situation de notre système de santé,(I ) avant de vous dire l'intérêt que je porte aux réflexions que vous conduisez soit pour préparer des évolutions qui vous paraissent nécessaires,(II) soit pour souligner l'importance de la mission et du rôle des CHU au sein de la politique de santé du pays (III). Je terminerai mon propos en évoquant quelques-unes des perspectives qui caractérisent le plan hôpital 2007. (IV)
I - Le contexte général.
Notre système de santé souffre d'un paradoxe.
Peu de pays au monde investissent autant que la France pour soigner leurs citoyens.
L'organisation mondiale de la santé nous situe parmi les plus performants en raison notamment de la grande accessibilité de nos services de soins par rapport à ceux des autres pays. Les patients disent leur satisfaction à l'égard des professionnels de santé en général et leur confiance dans l'hôpital en particulier.
Et pourtant l'ampleur des tensions jamais apaisées et des conflits mal réglés est considérable. La confiance ne se rétablit que très progressivement entre les partenaires du système de santé. La situation reste tendue en particulier en ce qui concerne les comptes sociaux et de l'assurance-maladie qui connaissent des déficits importants.
S'il en est ainsi, c'est que notre système de santé n'est clairement plus adapté à son nouvel environnement.
Celui-ci est caractérisé par : le vieillissement de la population, le développement rapide des pathologies chroniques, comme le cancer, le diabète où les maladies cardio-vasculaires, mais aussi la croissance remarquablement rapide du progrès médical (pensez aux médicaments issus des biotechnologies ou à l'imagerie médicale) et enfin l'aspiration au mieux-être et au mieux vivre des citoyens y compris des professionnels de santé.
Tout cela caractérise un environnement en forte évolution, qui appelle une réforme. Et, si l'on veut réformer, il faut trouver graduellement des solutions qui répondent aux attentes de tous, car il serait illusoire de vouloir faire table rase de l'existant.
II - Dans ce contexte général je veux vous dire combien je porte intérêt aux réflexions que vous menez pour préparer certaines évolutions qui vous paraissent nécessaires.
Ces réflexions ont trait à différents aspects de la politique de santé dans son ensemble (1°), j'en évoquerai quelques uns ; elles portent aussi, bien évidemment, sur l'institution hospitalo-universitaire à laquelle vous appartenez (2°) : deux raisons pour moi d'y être attentif.
1°) Vous traitez de la politique de santé lorsque vous vous penchez sur
la première année de formation futurs professionnels de santé et sur leur sélection
ou sur la démographie médicale.
S'agissant de la première année de formation commune aux diverses professions de santé, j'attache une grande importance à la réflexion conduite actuellement, vous le savez. J'en attends les très prochaines conclusions avec beaucoup d'intérêt. À mes yeux cette démarche est une première étape en direction de la constitution, au sein de l'université pluridisciplinaire, d'un véritable pôle santé. Il aura vocation à devenir le lieu de formation de ces professionnels et à leur offrir des perspectives d'évolution de carrière dans le cadre d'un cursus LMD. Dès à présent j'adresse mes vifs remerciements à tous ceux qui, parmi vous, ont consacré du temps à cette réflexion.
L'évolution de la démographie médicale est un sujet préoccupant. C'est aussi à l'occasion de vos assises qu'était abordée, il y a quelques années déjà, cette question si importante. Nul doute que ces travaux aient apporté une contribution utile à l'élaboration du rapport que j'ai demandé sur ce sujet à Yvon Berland dès mon arrivée.
Je saisis cette occasion pour le remercier encore du travail qu'il a accompli et dont je compte tirer toutes les conséquences.
2°) Votre réflexion a également une portée de caractère général lorsqu'elle s'attache à l'amélioration de la performance de l'institution hospitalo-universitaire à laquelle vous appartenez : je veux parler ici de la gouvernance du CHU.
C'est ainsi qu'abandonnant les limites étriquées des corporatismes vous vous êtes résolument attachés à rechercher les conditions qui permettent aux responsables du CHU de mieux le diriger, c'est-à-dire de mieux assumer ensemble leurs responsabilités. C'est un véritable choix stratégique. Le protocole que signent aujourd'hui les Présidents de vos trois conférences à l'occasion de ces assises en apporte une preuve éclatante. J e vous en félicite. Je m'attacherai à lui donner l'assise réglementaire dont il a besoin pour avoir sa pleine efficacité.
III - Au cours de vos assises vous vous êtes concentrés sur le rôle du CHU
dans sa triple mission intégrée de soin (1°), d'enseignement (2°) et de recherche (3°).
Démarche bien naturelle pour vous.
Démarche particulièrement utile et constructive au moment où se définissent les contours du plan hôpital 2007. A un moment, aussi, où cette mission s'inscrit dans une dimension compétitive internationale, en premier lieu européenne.
1°) Vous vous préoccupez de mieux organiser la mission de soins avec le souci du respect de la personne humaine et de l'effort que consent notre collectivité nationale pour préserver la santé de tous. Votre appréhension des nécessaires évolutions de la démarche soignante du CHU est pertinente. Si sa vocation de centre d'excellence reste première, le CHU a néanmoins à remplir une fonction de proximité.
Vous vous êtes attachés à définir les conditions les plus propices à l'accomplissement de cette double mission. Dans ce cadre il est, en effet, plus que jamais nécessaire de travailler dans la complémentarité. Complémentarité entre les corps de médecins au sein de l'hôpital universitaire, complémentarité entre les différents secteurs hospitaliers, complémentarité entre hospitaliers et libéraux, complémentarité entre les différents partenaires du monde de la santé. C'est tout un état d'esprit nouveau d'ouverture qu'il nous faut développer. Votre contribution pour conduire cette évolution est déterminante.
2°) Ce recours à la complémentarité, vous le valorisez aussi dans la seconde mission qui est la vôtre, qui est la nôtre, celle de l'enseignement.
Notre mission d'enseignement doit avant tout contribuer à accroître la qualité de la formation initiale, de nos médecins d'abord, de tous nos médecins, et également des médecins étrangers: c'est l'esprit des réformes que nous entreprenons, notamment de la réforme de l'internat. Cette complémentarité appliquée à l'enseignement est aussi la trame d'un réseau, qui s'étend du CHU au monde libéral en passant par le centre hospitalier et le corps des PH.
La formation des généralistes auprès des maîtres de stages donne un remarquable exemple de ce que peut être un " réseau universitaire ". Il faut effectivement réfléchir à son extension. Il contribue utilement à resserrer des liens distendus et à rétablir une confiance entre les membres d'une même profession que des évolutions de carrière ont parfois éloignés les uns des autres. Le CHU n'y perd pas son âme. Tout au contraire.
À ce propos, je voudrais ici faire une digression et vous dire un mot des dispositions que nous avons été amenés à prendre vis-à-vis des étudiants en médecine. Je ne reviendrai pas sur le contexte. Vous le connaissez. Je voudrais vous dire un mot, en effet, de l'épreuve de lecture critique de l'examen national classant. Je n'en méconnais pas la valeur pédagogique, bien au contraire. Je m'attacherai à ce qu'elle soit un élément important de la validation du second cycle avant qu'elle ne fasse partie des épreuves de l'examen national classant, en 2008.
Je terminerai mon propos sur l'enseignement en revenant sur votre réflexion relative au recrutement des hospitalo-universitaires et aux critères de sélection du CNU. J'attacherai pour ma part la plus grande importance à ce que la compétence et l'engagement pédagogiques soient mieux valorisés qu'ils ne le sont, notamment au moment du recrutement.
3°) Quant à la mission de recherche, apanage si particulier du CHU et de ses partenaires, elle reste, à mes yeux, l'indispensable complément des deux précédentes missions dans un concept hospitalo-universitaire dont nous avons voulu réaffirmer l'importance. La mise en place d'un groupe CHU dans le cadre du plan hôpital 2007 en porte le témoignage. Il s'attachera, en particulier, à identifier les dispositifs et moyens de préserver la mission d'innovation et de recherche clinique du CHU.
Ce faisant il s'agit, là encore, de penser en termes de complémentarité et de réseau, aussi bien au sein des équipes, qu'entre établissements et institutions, sans exclusive.
Disant cela et au moment de lancer le plan cancer, je pense particulièrement aux centres de lutte contre le cancer et aux cancéro-pôles qui se constitueront. Des liens plus étroits doivent se nouer entre ces centres et le CHU lorsqu'ils sont ensemble capables de répondre à la mission hospitalo-universitaire. Il y va, dans cette perspective également, de la notoriété internationale de notre médecine.
IV - Pour l'accomplissement de ces missions, il m'apparaît aujourd'hui nécessaire
d'alléger les contraintes qui pèsent sur l'hôpital (1°) et de stimuler la responsabilité (2°) : c'est toute la philosophie du plan hôpital 2007.
1°) L'allégement des contraintes.
Sous cette rubrique j'évoquerai trois orientations.
L'assouplissement des règles d'achat public applicables à l'hôpital. Il me paraît aujourd'hui indispensable pour que les établissements de santé puissent bénéficier de toute la réactivité dont ils ont besoin, notamment en matière d'innovation.
La suppression des indices qui encadrent la planification sanitaire n'est pas une mesure moins importante. Doivent s'y substituer la notion de besoin et d'activités évalués régionalement, dans le cadre du SROSS.
L'investissement enfin doit être facilité, pour assurer la remise à niveau d'un parc hospitalier vétuste et de son équipement souvent insuffisant voire obsolète. L'effort de financement supplémentaire annoncé par le président de la république s'élèvera à 6 milliards d'euros sur cinq ans. Un premier milliard est mobilisé dès cette année 2003, comme vous le savez.
En outre une mission d'appui à l'investissement a été mise en place à l'occasion de la loi de financement pour la sécurité sociale 2003. Elle a vocation à apporter une aide technique à la réalisation des projets d'investissement là où elle apparaît nécessaire.
2°) Stimuler la prise de responsabilité : telle est l'autre ambition du plan hôpital 2007.
Doivent y contribuer :
l'assouplissement de la gestion interne de l'hôpital (A)
la recomposition hospitalière (B)
et la tarification à l'activité (C)
A) l'assouplissement de la gestion interne de l'hôpital et la responsabilisation des acteurs sont, je le sais, au coeur de vos préoccupations et de vos réflexions.
Je m'y arrêterai un instant, car ils sont pour moi prioritaires. Vous connaissez mes orientations. Je les ai exprimées à plusieurs reprises. En un mot elles visent à doter les hôpitaux, et les CHU en particulier, de la réactivité que vous appelez de vos voeux en matière de gestion interne.
Les centres de responsabilité doivent en constituer l'armature. La nature et l'étendue de la délégation contractuelle, qui doit être donnée à leurs animateurs, seront définies de façon plus précise, plus incitative et certainement plus volontariste qu'elles ne l'ont été par le passé. Il est également légitime qu'une fonction de cette nature soit rémunérée.
Des liens doivent bien évidemment unir les départements universitaires et les centres de responsabilité au sein du CHU. Les partenaires hospitaliers et universitaires ont tout à fait vocation à être associés dans la démarche de contractualisation. C'est ce à quoi nous devons travailler. Je sais qu'il s'établit à cet égard des convergences de vues entre votre conférence, celle des directeurs généraux et celle des doyens. Je m'en félicite.
B) Hôpital 2007 c'est aussi un plan de recomposition hospitalière.
Je vous rassure. Disant cela je n'imagine pas un seul instant la suppression de tel ou tel CHU. Il s'agit plutôt, dans une nouvelle approche de l'organisation du tissu sanitaire du territoire, de réviser l'implantation et l'organisation des plateaux techniques et d'adapter les structures hospitalières à l'évolution de leur environnement.
À cet effet il sera nécessaire de favoriser les coopérations pour qu'elles se développent au sein de l'hôpital public, universitaire ou non, et entre le secteur public et le monde libéral. C'est bien dans ce cadre que je projette de donner un nouveau visage au Groupement de coopération sanitaire. Les évolutions législatives que cela suppose figureront dans les ordonnances de simplification. Celles-ci seront promulguées au plus tard à l'automne 2003. J'ajoute que la modernisation des modalités de conduite des opérations immobilières figurera également dans ces ordonnances.
Au-delà de ces considérations je serai aussi particulièrement attentif, compte-tenu des missions qui sont les vôtres, au domaine de l'innovation et aux moyens qu'elle réclame et mobilise. Je serai attentif à la mise en oeuvre de coopérations dépassant les limites territoriales habituelles. Je sais que plusieurs CHU sont déjà engagés dans cette voie et je porte un intérêt tout particulier à leur démarche exemplaire. S'agissant des CHU, des modalités de contractualisation inter régionales doivent être définies.
C'est d'ailleurs bien le sens de la mission que j'ai confiée à madame la directrice générale de l'Assistance Publique hôpitaux de Paris. Les particularités de cet établissement ne le font pas échapper aux opportunités qu'ouvre le plan " Hôpital 2007 ".
C) Enfin, la tarification à l'activité est l'un des leviers importants de ce plan et de la responsabilisation des acteurs.
Peut-être est-ce d'ailleurs le plus important. Elle apportera un profond changement dans les modalités d'affectation des ressources.
De ce seul fait il est normal qu'elle suscite appréhensions et interrogations.
Appréhensions au regard, notamment, de toutes ces activités qui, à l'heure actuelle, ne sont pas systématiquement répertoriées et qui, par conséquent, ne sont pas valorisées. Appréhensions, aussi, parce que les échelles mêmes de la tarification ne sont pas aujourd'hui définies.
Et des interrogations, bien compréhensibles, en particulier, s'agissant du CHU. Chacun connaît bien, en effet, la réalité du surcoût engendré par les missions spécifiques qui sont les siennes, sans ni le connaître réellement, ni appréhender sa variabilité d'un établissement à l'autre.
C'est pour progresser résolument qu'une mission a été mise en place afin d'analyser les composantes de cette tarification. Une expérimentation qui portera sur une soixantaine d'établissements - dont des CHU - est entreprise dès cette année.
Les déterminants de ce nouvel outil d'allocation des ressources seront sélectionnés à la faveur de cette expérimentation et d'opérations de simulation qui l'accompagneront.
J'ai en particulier demandé à la mission d'engager un travail pour élaborer des critères permettant de mesurer précisément l'effort d'enseignement et de recherche. L'aboutissement de ce travail ne sera pas immédiat. Une concertation devra, à l'évidence, s'engager entre les conférences universitaires.
J'attends beaucoup, sur tous ces sujets, des deux groupes de projets auxquels j'ai confié le soin de recueillir le sentiment des acteurs de terrain et notamment du groupe CHU dont la mission a été définie avec Luc Ferry. Les suggestions qu'ils pourront faire en matière de régionalisation, les expérimentations qu'ils proposeront seront écoutées : elles répondent aux orientations tout récemment définies par le premier ministre.
J'attends aussi beaucoup des résultats de la mission parlementaire de M. René Couanau.
En terminant je voudrais vous dire que ma confiance vous est acquise, à vous tous, directeurs généraux, présidents de CME, doyens.
Oh bien sûr, je sais qu'à certains moments tel ou tel d'entre nous finit par douter et par se lasser, tant les contraintes de toute nature se sont accumulées au fil des années. Je connais ces contraintes. Soyez assurés que je m'attache et m'attacherai à les alléger et à leur apporter une juste compensation.
Disant cela, je pense notamment à certaines améliorations statutaires que vous appelez les uns et les autres de vos voeux. À ce propos, mes chers collègues, sachez que j'ai rencontré Luc Ferry pour lever les difficultés qui peuvent résulter de la double appartenance.
J'aurai l'occasion dans le courant de ce mois d'informer moi-même vos représentants des dispositions qui seront prises et qui feront l'objet d'un protocole.
J'indique aux directeurs généraux que la mise en place du plan hôpital 2007 devra, elle aussi, s'accompagner d'un volet statutaire.
Je connais la somme d'efforts quotidiens et renouvelés que vous accomplissez tous.
Je sais pouvoir compter sur votre rôle d'animateurs. L'action que mènent les CHU a une valeur exemplaire, vos assises en portent le témoignage. Convaincu de votre engagement, je suis donc confiant.
J'ai la certitude que cette démarche forte et constructive que vous avez pris l'initiative de conduire ensemble aura un impact décisif sur l'évolution des projets que je viens de brosser devant vous.
(Source http://www.sante.gouv.fr, le 25 mars 2003)
Messieurs les directeurs généraux,
mes chers collègues doyens et présidents de CME,
J'ai aujourd'hui grand plaisir à m' exprimer devant les responsables des CHU réunis à l'occasion de ces assises niçoises. À un moment crucial pour l'évolution de la médecine de notre pays, vous avez, ensemble, en effet, un rôle éminent à jouer.
Je situerai mon intervention dans le contexte de la situation de notre système de santé,(I ) avant de vous dire l'intérêt que je porte aux réflexions que vous conduisez soit pour préparer des évolutions qui vous paraissent nécessaires,(II) soit pour souligner l'importance de la mission et du rôle des CHU au sein de la politique de santé du pays (III). Je terminerai mon propos en évoquant quelques-unes des perspectives qui caractérisent le plan hôpital 2007. (IV)
I - Le contexte général.
Notre système de santé souffre d'un paradoxe.
Peu de pays au monde investissent autant que la France pour soigner leurs citoyens.
L'organisation mondiale de la santé nous situe parmi les plus performants en raison notamment de la grande accessibilité de nos services de soins par rapport à ceux des autres pays. Les patients disent leur satisfaction à l'égard des professionnels de santé en général et leur confiance dans l'hôpital en particulier.
Et pourtant l'ampleur des tensions jamais apaisées et des conflits mal réglés est considérable. La confiance ne se rétablit que très progressivement entre les partenaires du système de santé. La situation reste tendue en particulier en ce qui concerne les comptes sociaux et de l'assurance-maladie qui connaissent des déficits importants.
S'il en est ainsi, c'est que notre système de santé n'est clairement plus adapté à son nouvel environnement.
Celui-ci est caractérisé par : le vieillissement de la population, le développement rapide des pathologies chroniques, comme le cancer, le diabète où les maladies cardio-vasculaires, mais aussi la croissance remarquablement rapide du progrès médical (pensez aux médicaments issus des biotechnologies ou à l'imagerie médicale) et enfin l'aspiration au mieux-être et au mieux vivre des citoyens y compris des professionnels de santé.
Tout cela caractérise un environnement en forte évolution, qui appelle une réforme. Et, si l'on veut réformer, il faut trouver graduellement des solutions qui répondent aux attentes de tous, car il serait illusoire de vouloir faire table rase de l'existant.
II - Dans ce contexte général je veux vous dire combien je porte intérêt aux réflexions que vous menez pour préparer certaines évolutions qui vous paraissent nécessaires.
Ces réflexions ont trait à différents aspects de la politique de santé dans son ensemble (1°), j'en évoquerai quelques uns ; elles portent aussi, bien évidemment, sur l'institution hospitalo-universitaire à laquelle vous appartenez (2°) : deux raisons pour moi d'y être attentif.
1°) Vous traitez de la politique de santé lorsque vous vous penchez sur
la première année de formation futurs professionnels de santé et sur leur sélection
ou sur la démographie médicale.
S'agissant de la première année de formation commune aux diverses professions de santé, j'attache une grande importance à la réflexion conduite actuellement, vous le savez. J'en attends les très prochaines conclusions avec beaucoup d'intérêt. À mes yeux cette démarche est une première étape en direction de la constitution, au sein de l'université pluridisciplinaire, d'un véritable pôle santé. Il aura vocation à devenir le lieu de formation de ces professionnels et à leur offrir des perspectives d'évolution de carrière dans le cadre d'un cursus LMD. Dès à présent j'adresse mes vifs remerciements à tous ceux qui, parmi vous, ont consacré du temps à cette réflexion.
L'évolution de la démographie médicale est un sujet préoccupant. C'est aussi à l'occasion de vos assises qu'était abordée, il y a quelques années déjà, cette question si importante. Nul doute que ces travaux aient apporté une contribution utile à l'élaboration du rapport que j'ai demandé sur ce sujet à Yvon Berland dès mon arrivée.
Je saisis cette occasion pour le remercier encore du travail qu'il a accompli et dont je compte tirer toutes les conséquences.
2°) Votre réflexion a également une portée de caractère général lorsqu'elle s'attache à l'amélioration de la performance de l'institution hospitalo-universitaire à laquelle vous appartenez : je veux parler ici de la gouvernance du CHU.
C'est ainsi qu'abandonnant les limites étriquées des corporatismes vous vous êtes résolument attachés à rechercher les conditions qui permettent aux responsables du CHU de mieux le diriger, c'est-à-dire de mieux assumer ensemble leurs responsabilités. C'est un véritable choix stratégique. Le protocole que signent aujourd'hui les Présidents de vos trois conférences à l'occasion de ces assises en apporte une preuve éclatante. J e vous en félicite. Je m'attacherai à lui donner l'assise réglementaire dont il a besoin pour avoir sa pleine efficacité.
III - Au cours de vos assises vous vous êtes concentrés sur le rôle du CHU
dans sa triple mission intégrée de soin (1°), d'enseignement (2°) et de recherche (3°).
Démarche bien naturelle pour vous.
Démarche particulièrement utile et constructive au moment où se définissent les contours du plan hôpital 2007. A un moment, aussi, où cette mission s'inscrit dans une dimension compétitive internationale, en premier lieu européenne.
1°) Vous vous préoccupez de mieux organiser la mission de soins avec le souci du respect de la personne humaine et de l'effort que consent notre collectivité nationale pour préserver la santé de tous. Votre appréhension des nécessaires évolutions de la démarche soignante du CHU est pertinente. Si sa vocation de centre d'excellence reste première, le CHU a néanmoins à remplir une fonction de proximité.
Vous vous êtes attachés à définir les conditions les plus propices à l'accomplissement de cette double mission. Dans ce cadre il est, en effet, plus que jamais nécessaire de travailler dans la complémentarité. Complémentarité entre les corps de médecins au sein de l'hôpital universitaire, complémentarité entre les différents secteurs hospitaliers, complémentarité entre hospitaliers et libéraux, complémentarité entre les différents partenaires du monde de la santé. C'est tout un état d'esprit nouveau d'ouverture qu'il nous faut développer. Votre contribution pour conduire cette évolution est déterminante.
2°) Ce recours à la complémentarité, vous le valorisez aussi dans la seconde mission qui est la vôtre, qui est la nôtre, celle de l'enseignement.
Notre mission d'enseignement doit avant tout contribuer à accroître la qualité de la formation initiale, de nos médecins d'abord, de tous nos médecins, et également des médecins étrangers: c'est l'esprit des réformes que nous entreprenons, notamment de la réforme de l'internat. Cette complémentarité appliquée à l'enseignement est aussi la trame d'un réseau, qui s'étend du CHU au monde libéral en passant par le centre hospitalier et le corps des PH.
La formation des généralistes auprès des maîtres de stages donne un remarquable exemple de ce que peut être un " réseau universitaire ". Il faut effectivement réfléchir à son extension. Il contribue utilement à resserrer des liens distendus et à rétablir une confiance entre les membres d'une même profession que des évolutions de carrière ont parfois éloignés les uns des autres. Le CHU n'y perd pas son âme. Tout au contraire.
À ce propos, je voudrais ici faire une digression et vous dire un mot des dispositions que nous avons été amenés à prendre vis-à-vis des étudiants en médecine. Je ne reviendrai pas sur le contexte. Vous le connaissez. Je voudrais vous dire un mot, en effet, de l'épreuve de lecture critique de l'examen national classant. Je n'en méconnais pas la valeur pédagogique, bien au contraire. Je m'attacherai à ce qu'elle soit un élément important de la validation du second cycle avant qu'elle ne fasse partie des épreuves de l'examen national classant, en 2008.
Je terminerai mon propos sur l'enseignement en revenant sur votre réflexion relative au recrutement des hospitalo-universitaires et aux critères de sélection du CNU. J'attacherai pour ma part la plus grande importance à ce que la compétence et l'engagement pédagogiques soient mieux valorisés qu'ils ne le sont, notamment au moment du recrutement.
3°) Quant à la mission de recherche, apanage si particulier du CHU et de ses partenaires, elle reste, à mes yeux, l'indispensable complément des deux précédentes missions dans un concept hospitalo-universitaire dont nous avons voulu réaffirmer l'importance. La mise en place d'un groupe CHU dans le cadre du plan hôpital 2007 en porte le témoignage. Il s'attachera, en particulier, à identifier les dispositifs et moyens de préserver la mission d'innovation et de recherche clinique du CHU.
Ce faisant il s'agit, là encore, de penser en termes de complémentarité et de réseau, aussi bien au sein des équipes, qu'entre établissements et institutions, sans exclusive.
Disant cela et au moment de lancer le plan cancer, je pense particulièrement aux centres de lutte contre le cancer et aux cancéro-pôles qui se constitueront. Des liens plus étroits doivent se nouer entre ces centres et le CHU lorsqu'ils sont ensemble capables de répondre à la mission hospitalo-universitaire. Il y va, dans cette perspective également, de la notoriété internationale de notre médecine.
IV - Pour l'accomplissement de ces missions, il m'apparaît aujourd'hui nécessaire
d'alléger les contraintes qui pèsent sur l'hôpital (1°) et de stimuler la responsabilité (2°) : c'est toute la philosophie du plan hôpital 2007.
1°) L'allégement des contraintes.
Sous cette rubrique j'évoquerai trois orientations.
L'assouplissement des règles d'achat public applicables à l'hôpital. Il me paraît aujourd'hui indispensable pour que les établissements de santé puissent bénéficier de toute la réactivité dont ils ont besoin, notamment en matière d'innovation.
La suppression des indices qui encadrent la planification sanitaire n'est pas une mesure moins importante. Doivent s'y substituer la notion de besoin et d'activités évalués régionalement, dans le cadre du SROSS.
L'investissement enfin doit être facilité, pour assurer la remise à niveau d'un parc hospitalier vétuste et de son équipement souvent insuffisant voire obsolète. L'effort de financement supplémentaire annoncé par le président de la république s'élèvera à 6 milliards d'euros sur cinq ans. Un premier milliard est mobilisé dès cette année 2003, comme vous le savez.
En outre une mission d'appui à l'investissement a été mise en place à l'occasion de la loi de financement pour la sécurité sociale 2003. Elle a vocation à apporter une aide technique à la réalisation des projets d'investissement là où elle apparaît nécessaire.
2°) Stimuler la prise de responsabilité : telle est l'autre ambition du plan hôpital 2007.
Doivent y contribuer :
l'assouplissement de la gestion interne de l'hôpital (A)
la recomposition hospitalière (B)
et la tarification à l'activité (C)
A) l'assouplissement de la gestion interne de l'hôpital et la responsabilisation des acteurs sont, je le sais, au coeur de vos préoccupations et de vos réflexions.
Je m'y arrêterai un instant, car ils sont pour moi prioritaires. Vous connaissez mes orientations. Je les ai exprimées à plusieurs reprises. En un mot elles visent à doter les hôpitaux, et les CHU en particulier, de la réactivité que vous appelez de vos voeux en matière de gestion interne.
Les centres de responsabilité doivent en constituer l'armature. La nature et l'étendue de la délégation contractuelle, qui doit être donnée à leurs animateurs, seront définies de façon plus précise, plus incitative et certainement plus volontariste qu'elles ne l'ont été par le passé. Il est également légitime qu'une fonction de cette nature soit rémunérée.
Des liens doivent bien évidemment unir les départements universitaires et les centres de responsabilité au sein du CHU. Les partenaires hospitaliers et universitaires ont tout à fait vocation à être associés dans la démarche de contractualisation. C'est ce à quoi nous devons travailler. Je sais qu'il s'établit à cet égard des convergences de vues entre votre conférence, celle des directeurs généraux et celle des doyens. Je m'en félicite.
B) Hôpital 2007 c'est aussi un plan de recomposition hospitalière.
Je vous rassure. Disant cela je n'imagine pas un seul instant la suppression de tel ou tel CHU. Il s'agit plutôt, dans une nouvelle approche de l'organisation du tissu sanitaire du territoire, de réviser l'implantation et l'organisation des plateaux techniques et d'adapter les structures hospitalières à l'évolution de leur environnement.
À cet effet il sera nécessaire de favoriser les coopérations pour qu'elles se développent au sein de l'hôpital public, universitaire ou non, et entre le secteur public et le monde libéral. C'est bien dans ce cadre que je projette de donner un nouveau visage au Groupement de coopération sanitaire. Les évolutions législatives que cela suppose figureront dans les ordonnances de simplification. Celles-ci seront promulguées au plus tard à l'automne 2003. J'ajoute que la modernisation des modalités de conduite des opérations immobilières figurera également dans ces ordonnances.
Au-delà de ces considérations je serai aussi particulièrement attentif, compte-tenu des missions qui sont les vôtres, au domaine de l'innovation et aux moyens qu'elle réclame et mobilise. Je serai attentif à la mise en oeuvre de coopérations dépassant les limites territoriales habituelles. Je sais que plusieurs CHU sont déjà engagés dans cette voie et je porte un intérêt tout particulier à leur démarche exemplaire. S'agissant des CHU, des modalités de contractualisation inter régionales doivent être définies.
C'est d'ailleurs bien le sens de la mission que j'ai confiée à madame la directrice générale de l'Assistance Publique hôpitaux de Paris. Les particularités de cet établissement ne le font pas échapper aux opportunités qu'ouvre le plan " Hôpital 2007 ".
C) Enfin, la tarification à l'activité est l'un des leviers importants de ce plan et de la responsabilisation des acteurs.
Peut-être est-ce d'ailleurs le plus important. Elle apportera un profond changement dans les modalités d'affectation des ressources.
De ce seul fait il est normal qu'elle suscite appréhensions et interrogations.
Appréhensions au regard, notamment, de toutes ces activités qui, à l'heure actuelle, ne sont pas systématiquement répertoriées et qui, par conséquent, ne sont pas valorisées. Appréhensions, aussi, parce que les échelles mêmes de la tarification ne sont pas aujourd'hui définies.
Et des interrogations, bien compréhensibles, en particulier, s'agissant du CHU. Chacun connaît bien, en effet, la réalité du surcoût engendré par les missions spécifiques qui sont les siennes, sans ni le connaître réellement, ni appréhender sa variabilité d'un établissement à l'autre.
C'est pour progresser résolument qu'une mission a été mise en place afin d'analyser les composantes de cette tarification. Une expérimentation qui portera sur une soixantaine d'établissements - dont des CHU - est entreprise dès cette année.
Les déterminants de ce nouvel outil d'allocation des ressources seront sélectionnés à la faveur de cette expérimentation et d'opérations de simulation qui l'accompagneront.
J'ai en particulier demandé à la mission d'engager un travail pour élaborer des critères permettant de mesurer précisément l'effort d'enseignement et de recherche. L'aboutissement de ce travail ne sera pas immédiat. Une concertation devra, à l'évidence, s'engager entre les conférences universitaires.
J'attends beaucoup, sur tous ces sujets, des deux groupes de projets auxquels j'ai confié le soin de recueillir le sentiment des acteurs de terrain et notamment du groupe CHU dont la mission a été définie avec Luc Ferry. Les suggestions qu'ils pourront faire en matière de régionalisation, les expérimentations qu'ils proposeront seront écoutées : elles répondent aux orientations tout récemment définies par le premier ministre.
J'attends aussi beaucoup des résultats de la mission parlementaire de M. René Couanau.
En terminant je voudrais vous dire que ma confiance vous est acquise, à vous tous, directeurs généraux, présidents de CME, doyens.
Oh bien sûr, je sais qu'à certains moments tel ou tel d'entre nous finit par douter et par se lasser, tant les contraintes de toute nature se sont accumulées au fil des années. Je connais ces contraintes. Soyez assurés que je m'attache et m'attacherai à les alléger et à leur apporter une juste compensation.
Disant cela, je pense notamment à certaines améliorations statutaires que vous appelez les uns et les autres de vos voeux. À ce propos, mes chers collègues, sachez que j'ai rencontré Luc Ferry pour lever les difficultés qui peuvent résulter de la double appartenance.
J'aurai l'occasion dans le courant de ce mois d'informer moi-même vos représentants des dispositions qui seront prises et qui feront l'objet d'un protocole.
J'indique aux directeurs généraux que la mise en place du plan hôpital 2007 devra, elle aussi, s'accompagner d'un volet statutaire.
Je connais la somme d'efforts quotidiens et renouvelés que vous accomplissez tous.
Je sais pouvoir compter sur votre rôle d'animateurs. L'action que mènent les CHU a une valeur exemplaire, vos assises en portent le témoignage. Convaincu de votre engagement, je suis donc confiant.
J'ai la certitude que cette démarche forte et constructive que vous avez pris l'initiative de conduire ensemble aura un impact décisif sur l'évolution des projets que je viens de brosser devant vous.
(Source http://www.sante.gouv.fr, le 25 mars 2003)