Déclaration de M. Dominique Galouzeau de Villepin, ministre des affaires étrangères, de la coopération et de la francophonie, sur l'importance de la francophonie dans le dialogue des nations et la diversité culturelle, New York le 25 septembre 2003.

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Circonstance : Dîner offert à l'occasion de la 58è session de l'Assemblée générale des Nations unies, à New York le 25 septembre 2003

Texte intégral

Monsieur le Secrétaire général,
Madame,
Monsieur le Président,
Messieurs les Premiers ministres,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Chers Amis,
Nous voici une nouvelle fois réunis, entre amis, en famille. C'est une famille éprouvée par le lâche attentat de Bagdad contre les Nations unies.
Je pense à notre ami Sergio, qui incarnait nos idéaux et les exprimait avec force, avec élégance dans notre langue. Je pense à Nadia Younès, qui a si souvent participé à nos dîners, à Jean-Selim Kanaan, égyptien et français. Je pense à toutes les victimes de Bagdad qui incarnaient ce que notre organisation a de meilleur : l'engagement, le courage, le sens de la justice. Je veux ici rendre hommage à chacun.
C'est en de tels moments qu'il est si important d'être ensemble.
Ensemble, au sein de la grande famille des Nations unies, dont vous êtes un peu, mon cher Kofi, le père spirituel, le grand frère. Une famille au service de la paix, de la démocratie et du développement.
Nous vous avons tous entendu mardi, en anglais ou en français, et nous nous sommes tous reconnus dans vos propos.
Ensemble aussi, unis par la langue qui nous fait vivre d'un même souffle, d'une même chair. Cette langue que nous avons en partage est une chance. Le français est pétri d'histoire mais aussi d'avenir.
Ensemble, enfin, par la force de nos cultures francophones, avec des références communes, philosophiques, mais aussi historiques, artistiques, poétiques : d'Andrée Chédid à Simenon, de Cioran à Ahmadou Kourouma, de Gilles Vignault à Edouard Glissant, que je salue ce soir.
Notre choix est celui d'une Francophonie active. C'est tout le sens de notre initiative à l'UNESCO en faveur de la diversité culturelle qui fait toute la richesse de nos nations.
Jeter des ponts entre les peuples, établir entre les cultures un dialogue permanent pour construire cette "civilisation de l'universel" que Léopold Sédar Senghor appelait de ses voeux : voilà bien notre combat.
Seul ce dialogue peut nous permettre de répondre aux exigences de l'action.
Il y a urgence pour rendre sa chance à la paix, pour rétablir la primauté du droit sur la force, de l'échange sur la confrontation.
A Ouagadougou, nous nous retrouverons autour de ces objectifs, fidèles à l'esprit même de l'Organisation internationale de la Francophonie.
Comme toujours, le chemin est dans la persévérance. Ce n'est pas un hasard si notre dîner est placé ce soir sous le signe amical de Pierre Soulages, qui a signé notre menu. Pierre Soulages, avec ses "outrenoirs", avec ses "noir-lumière", qui nous convainc avec générosité et talent que du plus sombre de la nuit peut sortir la clarté.
Monsieur le Secrétaire général, Cher Kofi,
Il y a "dans l'homme quelque chose de supérieur à la langue, c'est la volonté", confiait Ernest Renan. Mettons notre langue et notre coeur au service de cette volonté commune. Soyons le meilleur exemple de ce que peut apporter l'unité dans le respect de la diversité.
Et puisqu'il faut une fin, je voudrais que cette fin soit heureuse et sans nulle arrogance, permettez-moi d'évoquer l'un des derniers films de Woody Allen, Hollywood Ending. Le personnage principal de ce film est un réalisateur fantasque, un réalisateur talentueux qui s'exclame en guise de conclusion : "Dieu merci, les Français existent !". Bien évidemment, je ne reprendrai pas à mon compte cette formule ce soir, mais avec vous tous : Dieu merci, les Francophones existent.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 septembre 2003)