Texte intégral
Permettez-moi d'abord de dire l'immense plaisir que j'ai cet après-midi de voir le ministre des Relations extérieures du Brésil, mon collègue et ami Celso Amorim. Nous nous étions déjà rencontrés en janvier lors de la visite du président Lula à Paris. Nous sommes restés en contact étroit, notamment sur l'évolution du dossier irakien, avec nos deux collègues mexicain et chilien qui siègent actuellement au Conseil de sécurité. Celso Amorim et moi-même avons donc maintenu un dialogue très fructueux.
La contribution apportée par le Brésil, par le président Lula et par Celso Amorim, a été très utile et la France tient à leur exprimer sa reconnaissance dans le travail, la réflexion et les efforts qui ont été entrepris. Nos entretiens d'aujourd'hui nous ont permis de constater que nous partageons sur la crise irakienne les mêmes objectifs pour l'avenir : le rôle central des Nations unies, le respect des principes d'unité, d'intégrité, de souveraineté de l'Irak, la nécessité, nous l'avons évoquée, de la mobilisation d'action humanitaire d'urgence. Et au-delà de l'Irak évidemment, notre réflexion s'est prolongée sur la gestion des crises dans le monde d'aujourd'hui, sur la nécessité d'un monde multipolaire où chacun peut assumer ses responsabilités avec évidemment cet organe, cet outil de légitimité que représentent les Nations unies. Vous le savez, la coopération bilatérale avec le Brésil est diversifiée, équilibrée, les relations avec la France sont excellentes. Cette coopération repose sur de nombreux accords sectoriels et institutionnels. Elle s'est beaucoup approfondie au cours des quatre dernières années avec la mise en oeuvre de programmes technologiques, de recherche, de coopération institutionnelle, éducative et culturelle de grande qualité. Et avec l'arrivée du président Lula, nous sommes confiants qu'une nouvelle impulsion pourra être donnée.
Nous sommes prêts à développer rapidement de nouvelles coopérations, notamment dans le domaine institutionnel - je pense à la modernisation de l'Etat, je pense à l'intégration régionale -, coopération aussi dans le domaine de la formation de hauts fonctionnaires, de la politique de la ville, de l'agriculture familiale, des technologies de pointe, destinées à aider le Brésil à accroître la présence de ses entreprises à l'étranger. Je présiderai avec Celso Amorim en juillet prochain, la commission générale franco-brésilienne qui nous permettra de faire le bilan de notre coopération bilatérale et de tracer de nouvelles orientations pour les prochaines années.
Enfin un petit mot personnel pour terminer, parce que, quand on reçoit le ministre des Relations extérieures du Brésil, on reçoit d'abord un ami. Je sais que Celso Amorim a participé dans sa jeunesse à l'aventure du cinéma nouveau et je pense à tous ces talents, à tous ces créateurs qui ont tissé entre nos deux pays une relation si particulière. Il n'est que de citer le football qui est une passion commune, la musique - et je salue la présence dans le gouvernement du président Lula de Gilberto Gil comme ministre de la Culture -, tous ces formidables romanciers, ces poètes, ces photographes qui font du Brésil une puissance rayonnante dans le monde que nous apprécions et que nous avons toujours du plaisir à retrouver. Il y a là cet appétit, ce goût pour la culture, pour les cultures du monde. Et nous partageons, je crois, la même curiosité, le même appétit et c'est un atout dans la relation entre le Brésil et la France.
Q - En parlant de l'Irak, le journal anglais The Guardian vient de publier un article sur le projet de Washington pour l'après-guerre, qui prévoit 23 ministères en Irak, chacun avec un commandement militaire américain. Est-ce que la France pense que cela va dans le bon sens et le Brésil aussi, est-ce que cela serait acceptable ?
R - Il n'est pas question ici de commenter des indications de presse. Vous connaissez les principes sur lesquels la France fonde sa position et ce sont évidemment les mêmes que ceux que vient d'exprimer mon collègue brésilien et au premier chef, l'importance, le rôle central que nous pensons devoir accorder aux Nations unies. C'est une affaire qui est difficile. Nous sommes dans une phase qui est celle de la guerre et d'autres phases, nous l'espérons rapidement, succéderont. Il y aura alors la question de la sécurisation de l'Irak, de la reconstruction politique et économique. Il s'agit bien sûr de discuter dans le cadre du Conseil de sécurité avec l'ensemble des partenaires de la communauté internationale sur la meilleure façon d'obtenir un Irak souverain et stabilisé.
Vous le savez, demain, à Bruxelles, il y aura un certain nombre de réunions entre la Troïka et l'Otan, au sein du Conseil atlantique entre l'Union européenne et l'Otan avec la visite de Colin Powell. Ce sera donc l'occasion d'avancer dans la voie de cette concertation.
Ce que je peux vous dire aujourd'hui, c'est que la France aborde dans un esprit le plus constructif possible cette perspective, cet avenir de l'Irak, convaincus que nous sommes qu'il convient bien évidemment de tout faire pour que l'avenir de l'Irak s'éclaire enfin.
Q - Monsieur le Ministre, qu'allez-vous dire justement demain à Colin Powell ? Et quelle est l'assurance que l'on peut avoir de la distribution de l'aide humanitaire ? Est-ce qu'on va assister à l'établissement de corridors humanitaires, parce que la résolution "pétrole contre nourriture" c'est une chose, mais le problème c'est : comment distribue-t-on ?
R - Le message à Colin Powell, vous me permettrez de le réserver pour demain et nous aurons l'occasion de préciser davantage les choses. La situation humanitaire est évidemment au cur de nos préoccupations et, avec Celso Amorim, nous avons parlé en détail de cette situation. Comme vous le savez, il y a la résolution 1472 qui a été adoptée vendredi dernier à l'unanimité par le Conseil de sécurité et qui donne donc les pouvoirs pendant 45 jours au Secrétaire général des Nations unies pour essayer de régler cette situation et de prolonger le dispositif "Pétrole contre nourriture". Se pose le problème concret de l'acheminement de cette aide. Il faut donc tout faire pour que cette aide puisse arriver. Vous savez que les parties en conflit ont une responsabilité particulière et que les forces présentes là-bas doivent, aux termes du droit humanitaire, assumer cette responsabilité. Notre souhait est d'apporter au maximum cette aide humanitaire. Vous savez que la France a annoncé cette aide.
Dans le cadre européen, un effort important est fait par ailleurs puisque 100 millions d'euros dans le cadre du Fonds monétaire ECHO sont apportés pour les besoins d'urgence de l'Irak. Il convient donc de poursuivre les efforts des uns et des autres.
Q - Quelle est votre impression en voyant les Etats-Unis mettre le feu dans une capitale vieille de trois mille ans ? Y a-t-il des initiatives pour aboutir à un cessez-le-feu ?
R - C'est une question bien évidemment difficile, puisque la guerre, vous le savez, a lieu. Et, dans ce contexte, il est important de tout faire pour prendre en compte la situation des populations civiles. La guerre avec ses désastres, ses tragédies, c'est toujours la guerre et nous savons tous qu'elle est à la fois tragique et en même temps imprévisible. C'est pour cela que nous travaillons à la fois sur les perspectives, qui pourraient être celles de l'Irak, de reconstruction et en même temps sur les besoins humanitaires qui se posent immédiatement et qui sont une nécessité absolue. Le Conseil de sécurité est mobilisé, le Secrétaire général des Nations unies est mobilisé, nous sommes en liaison étroite avec l'ensemble des organisations qui peuvent agir sur le terrain - je pense au Comité international de la Croix Rouge, je pense aux agences spécialisées des Nations unies, je pense aux organisations non gouvernementales. Nous sommes en étroit contact avec l'ensemble de nos partenaires, y compris du monde arabe, pour faire en sorte que cette crise puisse avoir l'issue la plus rapide.
Q - Lors du passage du président Lula à Paris, le président Chirac et le président Lula s'étaient accordés pour avoir une coopération plus grande dans la réforme du Conseil de sécurité des Nations unies et pour que des délégations brésiliennes comme d'autres pays y participent. Ils s'étaient accordés pour que le ministre français et le ministre brésilien fassent évoluer cette idée de la participation brésilienne dans la réforme du Conseil de sécurité. Est-ce que ce sujet a été traité avec le ministre et quel est l'appui de la France à cette participation brésilienne ?
R - Nous avons évidemment évoqué cette question et je confirme que la France envisage très favorablement la candidature brésilienne à un siège de membre permanent au Conseil de sécurité, dans le cadre d'une réforme qui permettrait l'accroissement du nombre des membres permanents et qui rejoint l'idée que nous nous faisons d'un monde multipolaire. Il y a évidemment la reconnaissance des responsabilités spécifiques, il y a le souci que chacun puisse assumer pleinement ses responsabilités. Et, sur la scène internationale, nous le voyons bien, les problèmes, les menaces, les défis sont très nombreux : terrorisme, prolifération, crises régionales, ceci demande la mobilisation de tous et, par définition, les Nations unies, le Conseil de sécurité ont une responsabilité particulière. Plus la communauté internationale est unie, plus elle est efficace. Nous avons besoin de cette instance de légitimité et le fait d'accroître le nombre des membres permanents, de mieux saisir et apprécier cette légitimité internationale est une nécessité dans le cadre d'une réforme du Conseil de sécurité.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 4 avril 2003)
La contribution apportée par le Brésil, par le président Lula et par Celso Amorim, a été très utile et la France tient à leur exprimer sa reconnaissance dans le travail, la réflexion et les efforts qui ont été entrepris. Nos entretiens d'aujourd'hui nous ont permis de constater que nous partageons sur la crise irakienne les mêmes objectifs pour l'avenir : le rôle central des Nations unies, le respect des principes d'unité, d'intégrité, de souveraineté de l'Irak, la nécessité, nous l'avons évoquée, de la mobilisation d'action humanitaire d'urgence. Et au-delà de l'Irak évidemment, notre réflexion s'est prolongée sur la gestion des crises dans le monde d'aujourd'hui, sur la nécessité d'un monde multipolaire où chacun peut assumer ses responsabilités avec évidemment cet organe, cet outil de légitimité que représentent les Nations unies. Vous le savez, la coopération bilatérale avec le Brésil est diversifiée, équilibrée, les relations avec la France sont excellentes. Cette coopération repose sur de nombreux accords sectoriels et institutionnels. Elle s'est beaucoup approfondie au cours des quatre dernières années avec la mise en oeuvre de programmes technologiques, de recherche, de coopération institutionnelle, éducative et culturelle de grande qualité. Et avec l'arrivée du président Lula, nous sommes confiants qu'une nouvelle impulsion pourra être donnée.
Nous sommes prêts à développer rapidement de nouvelles coopérations, notamment dans le domaine institutionnel - je pense à la modernisation de l'Etat, je pense à l'intégration régionale -, coopération aussi dans le domaine de la formation de hauts fonctionnaires, de la politique de la ville, de l'agriculture familiale, des technologies de pointe, destinées à aider le Brésil à accroître la présence de ses entreprises à l'étranger. Je présiderai avec Celso Amorim en juillet prochain, la commission générale franco-brésilienne qui nous permettra de faire le bilan de notre coopération bilatérale et de tracer de nouvelles orientations pour les prochaines années.
Enfin un petit mot personnel pour terminer, parce que, quand on reçoit le ministre des Relations extérieures du Brésil, on reçoit d'abord un ami. Je sais que Celso Amorim a participé dans sa jeunesse à l'aventure du cinéma nouveau et je pense à tous ces talents, à tous ces créateurs qui ont tissé entre nos deux pays une relation si particulière. Il n'est que de citer le football qui est une passion commune, la musique - et je salue la présence dans le gouvernement du président Lula de Gilberto Gil comme ministre de la Culture -, tous ces formidables romanciers, ces poètes, ces photographes qui font du Brésil une puissance rayonnante dans le monde que nous apprécions et que nous avons toujours du plaisir à retrouver. Il y a là cet appétit, ce goût pour la culture, pour les cultures du monde. Et nous partageons, je crois, la même curiosité, le même appétit et c'est un atout dans la relation entre le Brésil et la France.
Q - En parlant de l'Irak, le journal anglais The Guardian vient de publier un article sur le projet de Washington pour l'après-guerre, qui prévoit 23 ministères en Irak, chacun avec un commandement militaire américain. Est-ce que la France pense que cela va dans le bon sens et le Brésil aussi, est-ce que cela serait acceptable ?
R - Il n'est pas question ici de commenter des indications de presse. Vous connaissez les principes sur lesquels la France fonde sa position et ce sont évidemment les mêmes que ceux que vient d'exprimer mon collègue brésilien et au premier chef, l'importance, le rôle central que nous pensons devoir accorder aux Nations unies. C'est une affaire qui est difficile. Nous sommes dans une phase qui est celle de la guerre et d'autres phases, nous l'espérons rapidement, succéderont. Il y aura alors la question de la sécurisation de l'Irak, de la reconstruction politique et économique. Il s'agit bien sûr de discuter dans le cadre du Conseil de sécurité avec l'ensemble des partenaires de la communauté internationale sur la meilleure façon d'obtenir un Irak souverain et stabilisé.
Vous le savez, demain, à Bruxelles, il y aura un certain nombre de réunions entre la Troïka et l'Otan, au sein du Conseil atlantique entre l'Union européenne et l'Otan avec la visite de Colin Powell. Ce sera donc l'occasion d'avancer dans la voie de cette concertation.
Ce que je peux vous dire aujourd'hui, c'est que la France aborde dans un esprit le plus constructif possible cette perspective, cet avenir de l'Irak, convaincus que nous sommes qu'il convient bien évidemment de tout faire pour que l'avenir de l'Irak s'éclaire enfin.
Q - Monsieur le Ministre, qu'allez-vous dire justement demain à Colin Powell ? Et quelle est l'assurance que l'on peut avoir de la distribution de l'aide humanitaire ? Est-ce qu'on va assister à l'établissement de corridors humanitaires, parce que la résolution "pétrole contre nourriture" c'est une chose, mais le problème c'est : comment distribue-t-on ?
R - Le message à Colin Powell, vous me permettrez de le réserver pour demain et nous aurons l'occasion de préciser davantage les choses. La situation humanitaire est évidemment au cur de nos préoccupations et, avec Celso Amorim, nous avons parlé en détail de cette situation. Comme vous le savez, il y a la résolution 1472 qui a été adoptée vendredi dernier à l'unanimité par le Conseil de sécurité et qui donne donc les pouvoirs pendant 45 jours au Secrétaire général des Nations unies pour essayer de régler cette situation et de prolonger le dispositif "Pétrole contre nourriture". Se pose le problème concret de l'acheminement de cette aide. Il faut donc tout faire pour que cette aide puisse arriver. Vous savez que les parties en conflit ont une responsabilité particulière et que les forces présentes là-bas doivent, aux termes du droit humanitaire, assumer cette responsabilité. Notre souhait est d'apporter au maximum cette aide humanitaire. Vous savez que la France a annoncé cette aide.
Dans le cadre européen, un effort important est fait par ailleurs puisque 100 millions d'euros dans le cadre du Fonds monétaire ECHO sont apportés pour les besoins d'urgence de l'Irak. Il convient donc de poursuivre les efforts des uns et des autres.
Q - Quelle est votre impression en voyant les Etats-Unis mettre le feu dans une capitale vieille de trois mille ans ? Y a-t-il des initiatives pour aboutir à un cessez-le-feu ?
R - C'est une question bien évidemment difficile, puisque la guerre, vous le savez, a lieu. Et, dans ce contexte, il est important de tout faire pour prendre en compte la situation des populations civiles. La guerre avec ses désastres, ses tragédies, c'est toujours la guerre et nous savons tous qu'elle est à la fois tragique et en même temps imprévisible. C'est pour cela que nous travaillons à la fois sur les perspectives, qui pourraient être celles de l'Irak, de reconstruction et en même temps sur les besoins humanitaires qui se posent immédiatement et qui sont une nécessité absolue. Le Conseil de sécurité est mobilisé, le Secrétaire général des Nations unies est mobilisé, nous sommes en liaison étroite avec l'ensemble des organisations qui peuvent agir sur le terrain - je pense au Comité international de la Croix Rouge, je pense aux agences spécialisées des Nations unies, je pense aux organisations non gouvernementales. Nous sommes en étroit contact avec l'ensemble de nos partenaires, y compris du monde arabe, pour faire en sorte que cette crise puisse avoir l'issue la plus rapide.
Q - Lors du passage du président Lula à Paris, le président Chirac et le président Lula s'étaient accordés pour avoir une coopération plus grande dans la réforme du Conseil de sécurité des Nations unies et pour que des délégations brésiliennes comme d'autres pays y participent. Ils s'étaient accordés pour que le ministre français et le ministre brésilien fassent évoluer cette idée de la participation brésilienne dans la réforme du Conseil de sécurité. Est-ce que ce sujet a été traité avec le ministre et quel est l'appui de la France à cette participation brésilienne ?
R - Nous avons évidemment évoqué cette question et je confirme que la France envisage très favorablement la candidature brésilienne à un siège de membre permanent au Conseil de sécurité, dans le cadre d'une réforme qui permettrait l'accroissement du nombre des membres permanents et qui rejoint l'idée que nous nous faisons d'un monde multipolaire. Il y a évidemment la reconnaissance des responsabilités spécifiques, il y a le souci que chacun puisse assumer pleinement ses responsabilités. Et, sur la scène internationale, nous le voyons bien, les problèmes, les menaces, les défis sont très nombreux : terrorisme, prolifération, crises régionales, ceci demande la mobilisation de tous et, par définition, les Nations unies, le Conseil de sécurité ont une responsabilité particulière. Plus la communauté internationale est unie, plus elle est efficace. Nous avons besoin de cette instance de légitimité et le fait d'accroître le nombre des membres permanents, de mieux saisir et apprécier cette légitimité internationale est une nécessité dans le cadre d'une réforme du Conseil de sécurité.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 4 avril 2003)