Déclaration de M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre, sur le rôle de l'Alliance française et sur la défense d'une gouvernance mondiale, Paris le 29 janvier 2004.

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Circonstance : Commémoration du 120ème anniversaire de l'Alliance Française, à Paris le 29 janvier 2004

Texte intégral

Monsieur le ministre,
Monsieur l'ambassadeur,
Président de l'Alliance Française de France,
Mesdames et Messieurs les présidents des Alliances Françaises,
Je voudrais dire combien, avec P.-A. Wiltzer, nous sommes, ici, heureux, d'être avec vous pour célébrer votre anniversaire. Ce n'est pas tous les jours que l'on célèbre son anniversaire de 120 ans. Et je voudrais vous dire combien nous avons de la gratitude pour tous ceux qui, au sein de l'Alliance Française, donnent leur coeur à la France. Je dirais, donnent leur coeur à l'esprit de la France, partout au monde. Je suis d'abord venu vous dire merci pour la construction de ce grand ensemble, cette grande multinationale de l'esprit de la France, que sont, rassemblées, l'ensemble des Alliances Françaises.
Peu d'institutions culturelles au monde peuvent afficher d'ailleurs une telle longitudité. Et associer, au fond, autant de vertus qui s'attachent à cet âge. A la fois, la vertu de l'expérience, mais aussi celle de la connaissance et de ce goût de l'avenir et de ce goût des jeunes.
Le projet, porté dès 1883 par ses fondateurs et ses premiers responsables au sein desquels ont compté, il est vrai, des parrains célèbres, et naturellement porteurs d'avenir : L. Pasteur, J. Verne. Tout ceci, montre, dès le départ, la puissance qu'il y avait dans cette démarche et qui explique cette vivacité au travers des époques.
Je crois qu'il s'agissait, à cette époque-là, après la défaite, de promouvoir, partout au monde, le renouveau culturel et intellectuel. Aujourd'hui encore, je crois qu'il est nécessaire dans ce contexte international qui bouge, qui, à la fois, ouvre de formidables opportunités, mais en même temps développe des risques et multiplie les craintes, il est important de faire entendre les messages de la France, les messages de la diversité, du respect des identités et du dialogue des cultures. Hier comme aujourd'hui, au travers de la langue française, c'est la cause de l'esprit, l'esprit d'humanité, que vous entendez défendre et ce pourquoi, je crois, il y a, aujourd'hui partout cette dynamique. Vous mobilisez pour cela, une énergie puissante et efficace. D'abord, la vaste famille de vos implantations partout présente au monde ; ensuite, cette méthode qui est la vôtre, autour de ce si beau mot d'"alliance", qui fait de chaque unité locale une unité autonome et responsable mais en même temps, membre chez nous d'un vaste ensemble fraternel lié dans la confiance avec l'Alliance française de Paris. Moi qui suis un peu plus girondin que jacobin, j'apprécie que vous soyez à la fois libres et responsables dans les structures mais cohérents dans la démarche. Et l'Alliance française, à Paris, jouant ce rôle de lien de confiance mais ne déresponsabilise pas l'ensemble des acteurs de terrain dans les différents pays du monde.
La relation que vous avez aussi avec notre langue cette belle langue française, est naturellement très importante pour les uns et les autres et pour notre pays, et pour le combat que mène notamment Pierre-André WILTZER pour la francophonie. Mais vous y voyez plus, comme nous tous, qu'un système de communication mais le véhicule de valeurs. Et ce sont ces valeurs humanistes qui rassemblent et qui vivifient qu'il faut répandre toujours davantage dans le monde. C'est pour cela que je suis fier d'apporter mon soutien et ma reconnaissance à votre entreprise. Car au fond, les Alliances françaises sont les lieux où le français prend sens, où le français donne du sens. Je crois important d'avoir cette vision, il ne s'agit pas simplement d'une grammaire ajoutée à un vocabulaire ; il s'agit de transmettre des idées et de transmettre des valeurs : celles de la France. Ces valeurs que prononce la France de temps en temps dans son Histoire, ce sont comme par hasard les moments où la France est entendue dans le monde. Et aujourd'hui encore, sur un certain nombre de grands sujets, notamment quand on entend la voix de la France sur les problèmes du développement, sur les problèmes de la paix, on sent que la langue française est cette langue qui, au XXIe siècle, est encore la langue de l'humanisme.
Votre conseil d'administration a agréé les statuts de quelque 1 400 comités d'Alliance dans le monde. Je suis impressionné par les chiffres : 370 000 étudiants suivent des cours de français dans l'ensemble du réseau des Alliances qui sont implantées dans 130 pays. Ces chiffres montrent à la fois la dimension universelle qu'est la vôtre et cet engagement qui demande forcément beaucoup de mobilisation professionnelle et bénévole ; je voudrais saluer les uns et les autres. J'ai pu me rendre compte de cette dynamique, aussi bien à Delhi, à Saint-Pétersbourg, dans l'application pour les manifestations du tricentenaire de l'Alliance française, comme dans cette nouvelle Alliance de Delhi, qui je l'espère, reverra bientôt le jour, nous n'avons posé que la première pierre, mais il y a là une perspective importante, et je crois, qui est attendue par beaucoup. Je sais que votre réseau vit et s'accroît en adaptant sa géographie aux besoins du monde et je suis heureux de voir que, par exemple - c'est d'actualité - le réseau se développe en Chine ou après Hong Kong, ou Macao. Six Alliances s'implantent sur le continent.
Ce qui est je crois aussi très important, c'est que dans les pays émergents, votre présence reste forte, dans les pays du Nord. Elle témoigne de l'activité permanente de notre langue et de notre réponse à la diversité, mais aussi que partout où il y a besoin de transmettre des idées généreuses, également dans les pays du Sud, vous développez l'image d'une société ouverte, tolérante, respectueuse de l'autre. Cette République des Lettres que porte votre message et dont je suis heureux de saluer tous ceux qui, au nord comme au sud, je pense en Afrique notamment, où de nombreuses Alliances proposent à leurs publics, une véritable formation professionnelle, et allant au-delà, une véritable insertion économique et sociale. Et certaines Alliances françaises jouent localement un rôle précieux d'accès aux données du savoir, c'est-à-dire au fond, participent aussi au partage de la connaissance qui est souvent une façon d'accéder aussi à plus de démocratie, à mieux de compréhension.
Si la création française peut trouver au travers de votre réseau un vecteur de diffusion internationale inégalé - beaucoup d'artistes ont pu en bénéficier - nombreux aussi sont les artistes étrangers, je veux le souligner, qui trouvent grâce au concours des Alliances, les moyens qui leur permettent de s'exprimer et de se faire connaître. C'est un problème très important : espace de communication mais aussi lieu de création, et de création métissée. La flamme claire de la pensée française, comment a-t-elle pris et gardé son éclat, si inversement, tant d'éléments ne lui avaient été apportés par l'esprit des autres peuples ? C'est le Général de Gaulle qui disait cela pour le soixantième anniversaire de l'Alliance française. C'est dans l'organisation même de ses rapports entre toutes les cultures du monde que l'on peut nourrir votre mobilisation mais aussi le sens de cette mobilisation, et au fond, c'est peut-être là que l'Alliance française trouve sa véritable raison d'être. Sa pérennité profonde. Il est dès lors nécessaire, évidemment, que l'Etat, à travers le ministère des Affaires étrangères, accompagne votre action. Il le fait en participant dans les 280 Alliances conventionnées, avec des personnels et des moyens d'action - je sais que ce n'est pas suffisant, ou alors si vous trouviez que c'est suffisant, vous seriez les premiers Français que je rencontre depuis deux ans, qui trouvent que l'action de l'Etat est suffisante. Mais je sais néanmoins qu'il est important de veiller aux moyens ; je sais que nous veillerons, notamment en ce qui concerne l'Alliance française de Paris, et en assurant que cette année du maintien de ses moyens, malgré un contexte budgétaire difficile et peu favorable, qui exige l'effort de tous les Français, mais je sais qu'il est nécessaire aujourd'hui de maintenir cet effort pour qu'on puisse assurer cette cohérence générale qui est indispensable à la vitalité du réseau. Je pense qu'il faut aussi valoriser cette logique de partenariat qui est au coeur de votre méthode, de pouvoir ouvrir à la société civile, à tous les partenaires, aux entreprises, à tous ceux qui peuvent participer aux initiatives que vous engagez, de faire en sorte que l'Alliance française - les Alliances françaises - n'apparaisse pas comme ce qu'elles ne sont pas, c'est-à-dire des services de l'Etat, des bureaux qui s'ajouteraient à des bureaux, mais au contraire, des espaces ouverts, des lieux d'échange où chacun peut venir avec son projet et trouver la place pour son projet. Cette dynamique, qui peut être celle du partenariat, doit pouvoir se développer.
Je voudrais remercier toutes celles et tous ceux qui, sous votre autorité, monsieur l'ambassadeur Viau, et sous celles des membres du Conseil d'administration de Paris et l'ensemble de vos partenaires, je voudrais remercier votre grand engagement vis-à-vis de la jeunesse, vis-à-vis de l'ensemble de ceux qui veulent rencontrer notre langue et ses valeurs, tous ceux qui veulent créer au travers du réseau, porter ces projets de création. Malraux disait qu'il faut laisser sa cicatrice sur la terre. Eh bien, les Alliances, partout dans le monde, sont des lieux où il y a plein de cicatrices qui sont laissées. Je crois que c'est une des libertés que vous offrez aux créateurs et c'est pourquoi, je voudrais vous remercier et saluer la démarche qui est la vôtre en cette période anniversaire.
Naturellement, on ne peut pas penser à la langue française sans penser aux Alliances, comme on ne peut pas penser aux Alliances sans penser à la langue française, la francophonie, notre attachement à notre langue, ce combat permanent, combat non-agressif, combat d'ouverture... Ce qui est important dans la connaissance d'une langue, c'est cette capacité à faire prendre conscience de la langue de l'autre, et au fond, ce voyage en nous-mêmes, ce voyage à l'intérieur même de notre véhicule culturel, est un appel pour aller chercher l'autre et ses propres véhicules de communication. Nous avons pris des engagements au Sommet francophone de Beyrouth, la France est mobilisée pour la Francophonie. Nous disions avec P.-A. Wiltzer, dans une réunion, récemment, combien nous notions partout dans le monde, cette difficulté que nous avons à promouvoir le français, mais en même temps, ce formidable appel de Français que l'on entend partout dans le monde. Si nous avions les moyens de doubler tous nos lycées français, si nous avions les moyens de doubler les initiatives de formation, nous aurions les personnes capables de venir répondre à ces différents appels. C'est-à-dire qu'il y a un appel de français, et nous sentons que nous avons besoin de mobiliser toutes nos énergies pour valoriser cette dynamique pour le français, qui mobilise quelque 880 millions d'euros au ministère des Affaires étrangères, mais qui, naturellement, reste toujours insuffisant, même si nous y ajouterons un certain nombre d'initiatives. Je pense notamment à la chaîne d'information internationale en français, parce qu'il faut aussi que le regard de la France puisse être perçu, et l'information doit pouvoir aussi être pluraliste, pouvoir s'exprimer notamment dans les grands sujets du monde, avec un regard français, il ne s'agit pas d'un regard partisan, mais qui est un regard qui se veut libre, exprimant sa vision libre du monde.
Je voudrais donc vous dire combien nous sommes engagés, depuis ce sommet de Beyrouth, sur les engagements qui ont été pris, sous l'autorité du Président de la République pour mobiliser tous les ministères dans cette action pour la Francophonie, pour le français et pour le développement de notre langue et à travers elle, de la pensée de la France. Aujourd'hui, la France propose au monde une pensée du XXIe siècle, une pensée sur l'organisation du monde. Nous avons une pensée sur la paix. Nous pensons que la paix peut être protégée par davantage de droits, et notre pensée, c'est qu'il faut trouver la capacité de donner au droit international, toute la force nécessaire pour imposer la paix, c'est pour cela que nous sommes pour une réforme de l'ONU, source du droit et lieu donc de paix. C'est pour cela que nous sommes engagés dans l'OMC pour un développement plus juste. C'est pour cela que nous voulons développer la conscience de la planète et que nous demandons une organisation mondiale de l'environnement, parce que nous voulons que l'humanité ait conscience qu'aujourd'hui, elle a entre ses mains, la capacité de détruire la planète, c'est-à-dire détruire l'humanité.
Voilà des idées que le français porte, que la France porte. Ce sont des idées de gouvernance mondiale autour des valeurs - la paix, le développement, l'environnement, le développement durable -, qui sont des valeurs que nous voulons défendre, et pour lesquelles nous pensons qu'il nous faut une organisation pluraliste mondiale, pour défendre ces idées. Cela veut dire une organisation qui soit multilatérale, multipolaire, de manière à ce qu'il n'y ait pas une pensée univoque, qu'il n'y ait pas une pensée mondiale unique. On sent bien qu'il y aurait là des risques d'appauvrissement, et de la pensée et peut-être aussi des équilibres du monde. Mais nous voulons qu'au delà de la seule vision politique, on puisse valoriser toute la diversité culturelle. Nous sommes très attachés à ce que partout dans le monde, on puisse être des militants de la diversité culturelle. C'est pour notre reconnaissance, mais pas seulement. Nous savons bien que pour défendre le français, il faut défendre d'autres langues. C'est pour cela que nous sommes engagés, par exemple, pour défendre l'allemand. Nous sommes si proches, aujourd'hui, sur le plan politique, de l'Allemagne, et pouvons-nous accepter aussi de voir l'allemand disparaître au niveau international, quant à sa puissance de rayonnement. C'est un combat qui nous intéresse, puisqu'il est parallèle au notre, qui est frère de notre propre combat. Donc, il faut associer les projets qui sont voisins des nôtres, et les rassembler dans cet attachement qui est le nôtre à la diversité culturelle. Et c'est pour cela que nous avons souhaité que l'Unesco soit saisie pour la rédaction d'un projet de convention internationale sur la diversité culturelle, et nous sommes très heureux de voir la mobilisation internationale qui est aujourd'hui rassemblée autour de ce projet. C'est un élément, je crois, très important, de la capacité que nous pouvons avoir aujourd'hui, de défendre des idées d'organisation du monde, qui sont des idées universelles, portées par la France. C'est au fond, la façon de vivre votre propre héritage, vos cent vingt ans. C'est aussi la façon que la France assume aussi son héritage et sa force, quand elle parle au monde de valeurs universelles.
Je voudrais également saluer l'ensemble de tous les personnels des différentes Alliances, qui se consacrent à l'enseignement de la langue. Je sais que les situations ne sont pas faciles, je sais qu'il y a des difficultés dans un certain nombre d'Alliances ; je mesure ces difficultés, nous les regardons. Je pense qu'il faut saluer cette initiative, parce que ce sont des personnes engagées avec compétence, et qui font de leur métier, non seulement l'exercice d'une profession, mais aussi la capacité d'assumer une mission d'intérêt général. Et, au nom de cet intérêt général - car enseigner le français dans tous les pays du monde, c'est une mission d'intérêt général que je veux saluer -, je voudrais dire combien nous avons conscience du mérite des personnes qui s'y consacrent.
Je voudrais également dire combien il me paraît important que nous puissions vivre avec notre organisation diplomatique d'une part, et les Alliances d'autre part, des relations de liberté mais de proximité, que les Alliances restent ces lieux de liberté, ces lieux de parole libre, parce que ce sont des lieux de création, des lieux d'échange, des lieux où on peut constituer des réseaux, où on peut assumer une convivialité, où une part de France se rassemble. Il faut donc garder cette dimension de grande liberté du pôle des Alliances. Mais je crois qu'il faut aussi qu'il y ait cette cohérence avec notre diplomatie, avec ce que nous avons comme stratégies internationales, qu'il y ait cette bonne connaissance, parce qu'au fond, nous sommes dans un monde dans lequel non seulement les événements vont très vite mais, en plus, le poids de la France, relativement, est plus fort sur le terrain des idées que sur d'autres terrains, évidemment sur le terrain de la démographie, ou même quelquefois sur le terrain de l'économie. Je visite de très nombreux pays où je constate toujours que notre proximité politique est plus forte que notre proximité économique ou que nos propres échanges. Je vois très souvent des pays, avec lesquels nous avons de véritables relations historiques et stratégiques amicales, et pour lesquels je vois d'entreprises implantées et je vois encore peu d'activités se développer ou, en tout cas, quand je m'analyse, il m'arrive de me satisfaire, mais quand je me compare, il m'arrive de m'inquiéter ! Et quand je vois nos amis italiens - Dieu sait s'ils sont de bons amis, de vrais Latins comme nous ! -, mais être si souvent devant nous dans l'implantation économique à l'étranger, je me dis quand même qu'il nous faut essayer d'assumer quelques challenges. Je ne parle pas de "compétition" avec les Italiens... Mais je pense quand même que c'est un point de repère ! Et donc, nous avons, avec nos amis allemands, nos amis italiens, des points de repère d'implantation. Et il n'y a plus de raison pour que nous ne soyons pas mieux placés dans bien des critères de l'implantation, parce qu'au fond, la culture est fédératrice, la culture est au fond la capacité à montrer l'investissement humain que fait la France dans un territoire. Que ce soit l'investissement économique, un investissement social, à un moment ou à un autre, le vecteur culturel apparaît comme un indicateur de vitalité. C'est pour cela que les Alliances françaises sont si importantes dans tout ce que nous avons à faire ensemble, pour que la France fasse entendre ses messages.
Mon dernier mot sera pour dire que nous sentons combien il est important aujourd'hui que les messages de la France puissent se faire entendre sur l'exigence d'une gouvernance mondiale. Mais cela veut dire qu'il faut accélérer la gouvernance européenne, parce qu'on voit bien aujourd'hui cette urgence européenne. Car comme l'organisation du monde devient urgente, si nous voulons éviter une multiplication de tragédie, si nous voulons structurer les démarches de paix, si nous voulons construire le développement durable, il faut aller vite dans la gouvernance mondiale. Et dans cette gouvernance mondiale, il faut faire en sorte que la France puisse faire entendre sa voix avec le levier de l'Europe, avec ce multiplicateur d'influences qu'est l'Europe. L'Europe ne peut donc pas être en retard, les idées de l'Europe ne peuvent pas être absentes de ces grands systèmes d'organisations qui, dans les années à venir, se mettront en place. C'est pour cela que nous allons vivre des années très importantes pour l'Europe. L'élargissement est une étape historique. Nous attendions cette époque depuis longtemps. L'Europe à vingt-cinq, l'Europe qui retrouve son lit, l'Europe qui rassemble sa géographie, qui constitue cette communauté de destins, de liberté, avec ces pays qui retrouvent l'espoir d'appartenir à une communauté humaine fondée sur des valeurs universelles. Nous devons accueillir ces pays, nous devons réussir l'Europe à vingt-cinq, nous avons pris cet engagement. Et ce sera le 1er mai, l'application du traité d'Athènes - c'est demain matin. Mais à vingt-cinq, elle devra fonctionner, cette Europe. Il lui faudra des institutions, il lui faudra une organisation pour surmonter toute dérive bureaucratique ou toute dérive qui, à un moment ou à un autre, pourrait conduire l'Europe à l'impuissance. Donc il faut aller très vite aussi sur la capacité d'organiser l'Europe, avec ce traité institutionnel qu'a préparé la Convention, et pour laquelle la France milite, avec notre accord, pour obtenir des amendements, des éclaircissements, mais garder la substance même de cette capacité de donner à l'Europe une organisation politique stable - pas un changement de présidence tous les six mois -, une vraie subsidiarité, avec un rôle pour le Parlement européen, une vraie démocratie aussi avec les parlements nationaux, une capacité autour du ministre des Affaires étrangères à mieux coordonner la politique étrangère, à structurer mieux la politique de défense, être capable d'avoir une Europe rassemblée, qui donne aux idées de la France, aux idées de la France, de l'Allemagne, aux idées de la France, de l'Allemagne, du Royaume-Uni et de tous les autres, cette capacité aujourd'hui à se faire entendre au niveau mondial. C'est un point du défi qui est aujourd'hui internationalement le nôtre. Nous défendons des valeurs, vous les portez, vous les faites vivre, vous les faites s'exprimer dans chacune des Alliances françaises.
Ces valeurs appartiennent néanmoins, aujourd'hui, sous des formes diverses, libres, parfois critiques, ouvertes, à un projet français. Ce projet français, est un monde d'humanité. Ce monde d'humanité, ce projet français, passe par des efforts d'organisation au niveau mondial et au niveau européen. Et la France pense que c'est avec l'Europe qu'elle peut faire entendre sa voix au niveau mondial, avec la force nécessaire pour être capable de modifier les grandes organisations internationales.
C'est pour cela que nous sommes engagés, aujourd'hui, dans cette course de vitesse pour la diversité culturelle, pour un monde multipolaire, un monde capable d'être organisé par, autour, de pôles d'équilibre qui peuvent ensemble assumer le destin de la planète, assumer ce principe d'humanité auquel nous sommes très attachés et que vous faites vivre.
Voilà pourquoi, je crois vraiment qu'il était heureux que nous puissions nous retrouver, pour que je vous dise, au nom du Gouvernement, donc, de l'ensemble des institutions de la République, notre reconnaissance. Le Président vous a transmis un message, ce matin. Je voudrais vous confirmer combien nous avons conscience de l'importance du rôle qui est le vôtre.
A propos d'A. Dumas, V. Hugo disait : "C'est un semeur de civilisations". Eh bien, merci à chacune et chacun d'entre vous, d'être "des semeurs et semeuses de civilisations".
Merci à tous.
(source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 8 avril 2004)