Article de M. Renaud Donnedieu de Vabres, porte-parole de l'UMP, dans "Le Figaro" du 13 juin 2003, sur la nécessité de l'envoi d'une force d'interposition de l'ONU pour garantir le respect du cessez-le-feu entre Israéliens et Palestiniens, intitulé "Les Casques bleus ou le chaos !".

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Quelques jours seulement après le sommet d'Aqaba, la terreur, la désolation et le malheur s'abattent de nouveau sur les Palestiniens et les Israéliens.
La valse morbide des attentats et des représailles a donc repris malgré les déclarations encourageantes de Mahmoud Abbas et d'Ariel Sharon ces dernières semaines.
Cette violence est intolérable. Il est temps que les Nations unies interviennent dans ce conflit pour sauver une "feuille de route" dont chacun sait qu'elle est l'ultime espoir d'une paix juste entre les deux peuples.
L'envoi de Casques bleus est une nécessité absolue pour garantir le respect d'un cessez-le-feu entre Israéliens et Palestiniens, pour permettre aux négociations de se dérouler sereinement ; pour superviser le désarmement des groupes terroristes palestiniens, pour contrôler le démantèlement des colonies ; pour vérifier que l'aide internationale est uniquement affectée à l'amélioration des conditions de vie des Palestiniens ; pour résoudre le problème d'approvisionnement en eau des deux peuples ; pour faire en sorte que chaque partie retrouve le chemin de la fraternité.
Assistant en 1995 aux obsèques de Yitzhak Rabin sur le mont Herzl de Jérusalem, j'avais eu le sentiment, en partageant l'émotion générale particulièrement sincère et forte, que cette paix si proche allait de nouveau s'éloigner. De nombreux attentats en Israël plongèrent rapidement les deux peuples dans une spirale infernale à laquelle les accords d'Oslo ne résistèrent pas.
Les trois années qui suivirent furent celles des rendez-vous manqués, de Paris à Charm el-Cheikh. Le sommet d'Aqaba et la suite qui y sera donnée sont notre ultime chance que la haine et la terreur reculent et pour que la voix des partisans de la paix résonne plus fortement que celle des fanatiques.
La "feuille de route" prépare l'avenir. Seule une mobilisation internationale à l'initiative de l'Europe permettra de la graver dans le marbre. L'Europe de la rive septentrionale de la Méditerranée est culturellement proche de celle du Sud. Elle est éclairée par la lumière de la pierre blanche de Jérusalem et imprégnée du son des prières qui montent des synagogues, des mosquées et des églises.
Elle a conçu cette "feuille de route" à partir d'un premier travail mené par la France et l'Allemagne. Elle a réimpliqué les Américains malgré leurs réserves dans cette nouvelle quête de paix et dans cette recherche d'une alchimie politique entre Israéliens et Palestiniens.
Elle a lutté contre l'engourdissement et la lassitude de la communauté internationale en élaborant une sortie de crise acceptable par les Palestiniens, les Israéliens et les pays arabes.
Si les Américains ont les moyens de faire pression sur les Israéliens, les Européens ont une forte capacité d'influence sur l'Autorité palestinienne. La combinaison de leurs diplomaties respectives est une nécessité absolue pour optimiser les chances d'un accord. Les Israéliens et les Palestiniens ont prouvé au monde entier que, malgré les victimes et innombrables blessés, ils étaient capables de surmonter leur douleur et de redonner une chance à la paix. Ne décevons pas ceux qui, de Haïfa à Gaza, de Tel-Aviv au Caire en passant par Beyrouth et Amman, espèrent un jour vivre en paix et prospérer ensemble ! Nous devons agir pour garantir aux Israéliens de vivre dans un Etat dont le caractère juif est incontestable, de même que devra être incontestable le tracé des frontières du futur État palestinien, afin qu'il soit viable.
Cette solidarité existait avant le déclenchement de la seconde intifada. Des partenariats avaient vu le jour, les Palestiniens travaillaient dans les entreprises israéliennes, les policiers des deux nations collaboraient, les hôpitaux israéliens accueillaient des femmes palestiniennes pour qu'elles accouchent.
Cette fraternité retrouvée est à portée de main malgré les bombes. Lors de mon séjour récent pourtant marqué par de monstrueux attentats, je me suis revu sur le mont Herzl. Cette fois-ci j'ai écarté cette appréhension qui me taraude depuis les obsèques de Yitzhak Rabin. Refusons la lâcheté qui consiste à retomber dans la fatalité du désespoir et agissons collectivement pour donner des moyens humains, logistiques et financiers sans précédent à la résolution de ce conflit.
Tout est question de volonté politique. Il appartient dès lors à l'Europe et à la France de porter ce message et cette espérance au sein des Nations unies. C'est son devoir.
Dans Proche-Orient, il y a proche !
(Source http://www.u-m-p.org, le 1er juillet 2003)