Interview de M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement et candidat UMP à la présidence de la région Ile-de-France, à RTL le 6 novembre 2003, sur le plan gouvernemental "vieillissemnt et solidarité" en faveur des personnes âgées, la laïcité et la préparation des elections régionales.

Prononcé le

Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

J.-M. Aphatie : Bonjour J.-F. Copé.
- " Bonjour. "
Le Premier ministre présentera tout à l'heure, lui-même à Matignon à 11 heures, le "plan vieillissement et solidarité" - on ne va pas en dévoiler le contenu ici bien sûr- mais c'est fini, on travaillera désormais le lundi de Pentecôte ?
- " Ecoutez on va évoquer tout ça tout au long de la journée. Vous savez c'est une matinée importante qu'on va vivre parce que le Premier ministre va effectivement présenter une réforme très ambitieuse, qui va concerner ce très grand sujet de la dépendance, avec deux programmes importants : d'une part, en faveur des personnes âgées dépendantes, et d'autre part en faveur des personnes handicapées. C'est vraiment un rendez-vous très très important, parce que ça va être l'occasion de dire à la suite du drame de la canicule qui a été un révélateur d'un problème beaucoup plus grave, qu'il y a de grandes étapes dans l'histoire d'un pays : en 1945, on avait comme priorité le vieillissement. Eh bien, la priorité aujourd'hui, ça va être la dépendance. Et je crois que ça, c'est une énorme préoccupation des Français. "
Sur le lundi de la Pentecôte, vous ne répondrez pas.
- " Non, parce que ça n'est qu'un des éléments, c'est la dimension du financement, qui, finalement, est un aspect très connexe du premier et essentiel qui est les grandes réformes qu'on va mettre en oeuvre, qui va concerner d'ailleurs aussi l'emploi, qui va concerner beaucoup de choses. "
Quel cafouillage pour en arriver là ! Qu'est-ce qui s'est passé ? Est-ce que la machine gouvernementale a mal fonctionné ! Quelle leçon vous tirez de tout ça ?
- " Oh écoutez vous savez, on a beaucoup glosé sur tout ça. Moi, je tire une leçon qui d'ailleurs nous concerne tous. C'est que gouverner, c'est difficile, préparer des réformes sur lesquelles personne ne s'est vraiment penché, c'est très très difficile. Il faut à la fois discuter avec les gens, écouter, dialoguer, concerter, et puis bon, du coup il y a des petits bouts de phrases qui sortent ici ou là, des petits bouts de propositions. Ca perd parfois en efficacité de message mais je crois qu'aujourd'hui, c'est l'ensemble du plan que le Premier ministre va présenter aux Français. "
J'aimerais vous soumettre la Une de l'Express, qui sera en vente à partir de ce matin : le visage inquiet de J.-P. Raffarin, pleine page, avec ce mot : "la fin. Point d'interrogation". Comment vous réagissez ?
- " Je dis simplement que le métier de gouverner est un métier difficile, que ce gouvernement travaille sur des engagements précis, qui sont tous des réformes que les Français attendent et c'est normal quand on est au milieu de l'effort, d'avoir forcément, ici et là, des interrogations posées par les uns et les autres. Nous on est là pour faire le boulot, et comme j'ai l'occasion de le dire, le grand rendez-vous avec les Français c'est les élections de 2007. D'ici là, on pourra juger de l'efficacité des réformes que nous avons mises en oeuvre, à la demande des Français. "
On s'approche de "la fin" pour J.-P. Raffarin ?
- " Mais bien sûr que non. "
Mais quand vous voyez la Une d'un hebdo, comme ça. C'est dur quand même.
- " Disons qu'en tout cas, fort heureusement dans une grande démocratie, il est tout à fait normal que les journaux s'expriment, et qu'en même temps, ça ne soit pas l'essentiel de la manière dont on gouverne. Ce qui compte, c'est de faire le boulot pour lequel nous sommes là. C'est le principe du gouvernement de mission. On ne gouverne pas simplement dans l'obsession d'avoir sans cesse des couvertures de journaux magnifiques ; et d'ailleurs, si je peux me permettre, ça ne réussit pas à tout le monde. Je me souviens du gouvernement précédent : ils ont eu pendant des années des couvertures de magazines magnifiques. La fin a été plus douloureuse. Il est vrai qu'entre temps, aucune grande réforme n'avait été faite ! "
Allez, tout va bien pour J.-P. Raffarin. Avant d'en arriver aux élections régionales, on parle beaucoup du voile, et, finalement, lit-on partout, le Premier ministre et le président de la République seraient d'accord pour faire une loi ?
- " Non, je crois que ce n'est pas tout à fait comme ça, j'ai eu l'occasion de le dire hier. Le président de la République a rappelé que la laïcité c'était pas négociable. C'est vrai qu'il y a besoin aujourd'hui de regarder concrètement la réalité, dans les écoles, dans les hôpitaux. Vous savez je vois bien dans ma propre ville, à Meaux... "
Une loi sur l'école, on y va ou pas à votre avis ?
- " Pardon mais on ne peut pas répondre en deux secondes. Simplement il y a des jeunes filles qui refusent aujourd'hui de se faire soigner par des médecins hommes, par exemple, c'est un problème dont il faut qu'on parle concrètement. Il y a une commission qui travaille là-dessus, c'est celle de Monsieur Stasi... "
Donc on attend...
- " D'ici la fin de cette année, la décision qui devra être prise le sera. "
Vous êtes candidat aux élections régionales en Ile-de-France. Et vous aurez face à vous, il y aura beaucoup d'adversaires, mais vous aurez A. Santini, de l'UDF. Alors vous êtes sans doute ravi de cette division de la majorité ? C'est le pluralisme qui s'exprime ?
- " Ecoutez vous savez bien que c'est mieux quand on est uni, quand on pense les mêmes idées, naturellement. Bon, cela dit, moi je n'ai rien vu de vraiment nouveau hier. Il y a longtemps que l'on sait que F. Bayrou souhaite nommer des chefs de file régionaux. Donc très bien, maintenant la campagne électorale elle est partie vous savez. "
Oui, parce qu'A. Santini dans Le Parisien ce matin dit, à propos du tramway : "s'affronter sur ce sujet avec la Ville de Paris - alors c'est vous qui vous affrontez avec la Ville de Paris sur ce sujet hein - s'affronter sur ce sujet, ça ne me semble pas la meilleure idée". Ca y est : A. Santini commence à vous arrêter.
- " Non écoutez tout ça n'a pas une très grande importance. Je crois que sur l'essentiel, on a les mêmes idées. D'ailleurs c'est assez normal puisqu'on a tous les deux des expériences de maire en Ile-de-France. Moi je suis parti en campagne depuis maintenant près de six semaines. J'ai présenté il y a trois/quatre jours vingt et une orientations sur la région. Vous savez je crois que tout ça doit être vu de manière très concrète. Par exemple, le plan qu'on va évoquer sur la dépendance. Moi je vis extrêmement mal que la canicule, les premiers drames, le plus grand nombre de victimes, ce soit en Ile-de-France. Ca veut dire quoi ? Ca veut dire qu'en réalité, eh bien depuis des années, dans notre belle région, et peut-être aussi dans notre pays, moi je ne peux plus supporter qu'il y ait des gens qu'on ne respecte plus, qu'on n'écoute plus. Et je crois que le premier rôle de Président de la région, c'est d'être une sorte de maire, de super maire en fait, qui doit passer beaucoup de son temps à écouter les gens, à essayer de partager avec eux cette fraternité qu'il nous faut réinventer dans une région où on vit finalement beaucoup moins bien qu'avant. "
C'est ostensible, vous refusez le combat avec l'UDF, le combat frontal, mais hier F. Bayrou a tout de même justifié la présentation de ses chefs de file de la manière suivant : "Aujourd'hui - dit-il - les Français ressentent un malaise profond. Ils ont l'impression, justifiée, - c'est F. Bayrou qui parle - qu'il manque une ligne claire, et que les décisions sont prises par le Gouvernement, en contradiction entre elles, il faut une offre politique nouvelle". C'est un opposant au Gouvernement qui parle comme ça.
- " Mais vous me dites : vous refusez le combat. Il ne faut pas se tromper de combat justement. "
Mais F. Bayrou vous attaque et vous ne lui répondez jamais. C'est extraordinaire! Vous êtes d'une gentillesse...
- " Laissez-moi en placer une J.-M. Apathie! "
Allez-y...
- " Je crois que le problème ne se pose pas tout à fait en ces termes. Pardon de vous le dire, mais aujourd'hui ce que les Français regardent ce n'est pas du tout les querelles entre les gens ! C'est : où sont les projets nouveaux ? Où sont les ambitions ? Où sont surtout les souffles pour l'avenir ? Moi, je m'excuse, j'ai 39 ans, je vous le dis très franchement, je me suis engagé en politique, non pas pour savoir si j'étais contre untel ou pour un autre. Je me suis engagé parce qu'ici et là, je pense que le service de ce pays, du nôtre, exige des réponses concrètes. Cela veut dire que, quand aujourd'hui, sur la dépendance, sur le handicap, il y a tellement de drames, si nous, Gouvernement, ou nous élus locaux, ne sommes pas en première ligne pour tendre une main fraternelle - sans demander l'étiquette politique des gens - simplement demander comment on peut les aider à faire avancer, à retrouver un peu de concret. C'est à ça que je vais travailler durant cette campagne régionale. Et à rien d'autre. Chacun fera comme il le voudra. "
D'accord. Pour en finir, l'UMP a investi déjà 21 têtes de listes pour les élections régionales - la Corse est mise à part. Sur ces 21 têtes de listes, il y a 20 hommes, une femme. La politique ça reste une affaire d'hommes.
- " Oui enfin si ce n'est qu'il y a une grande nouveauté, parce que maintenant il y a une parité. Donc il y aura autant de conseillers régionaux, hommes que femmes, et pour ce qui me concerne... "
Les hommes devant, et les femmes derrière...
- " Oh ce n'est pas comme ça que ça marche, vous le savez bien. La vie est beaucoup plus complexe. Et croyez-moi, j'ai présenté huit tandems dans chacun de mes départements, et à chaque fois, c'est le renouveau et la compétence. Et ça concerne les hommes, comme les femmes. "
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernent, le 6 novembre 2003)