Déclaration de M. Dominique Galouzeau de Villepin, ministre des affaires étrangères, sur les efforts de la communauté internationale pour aider Israël et l'Autorité palestinienne à mettre en oeuvre la feuille de route pour un plan de maix au Proche-Orient, Ramallah le 26 mai 2003.

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Circonstance : Voyage en Israël et dans les Territoires palestiniens les 25 et 26 mai 2003-entretien avec M. Yasser Arafat, président de l'Autorité palestinienne, point de presse avec le ministre des affaires étrangères, M. Nabil Chaath à Ramallah le 26

Texte intégral

ENTRETIEN AVEC M. ARAFAT :
Comme M. Arafat l'a d'indiqué, je lui ai remis un message du président Chirac, un message d'espoir de paix, un message pour encourager les réformes. Nous avons confiance dans la capacité de l'Autorité palestinienne à pousser davantage cet indispensable processus de réformes.
Ma visite dans la région intervient à un moment capital. L'acceptation par les Israéliens de la feuille de route, après l'acceptation par les Palestiniens, ouvre une nouvelle page dans l'Histoire de la région. Il est essentiel que chacun puisse aujourd'hui prendre pleinement ses responsabilités, tant c'est l'avenir même qui se dessine, la perspective tant attendue de la création d'un Etat palestinien, capable de vivre en paix à côté d'Israël, Israël trouvant là sa sécurité garantie.
Chacun doit prendre ses responsabilités, chacun doit faire sa part du chemin. Je l'ai dit au président Arafat, comme je l'ai dit hier aux Israéliens : il est essentiel que nous saisissions cette chance qui se présente pour la région. Les Palestiniens se sont engagés dans ce processus. Il reste à arrêter complètement les violences, il reste à lutter avec fermeté et sans appel contre le terrorisme.
La feuille de route est acceptée par les deux parties, elle doit être appliquée. Il appartient aux Israéliens de faire les gestes nécessaires, l'arrêt des opérations militaires, le gel de la colonisation, le retrait des Territoires, la libération des prisonniers, autant de gestes indispensables pour marquer la volonté de tourner la page et de regarder vers l'avenir. Bien sûr, nous avons évoqué la situation de la région il y a quelques jours à Paris, lors de la réunion du G8 ministériel et elle sera évoquée à nouveau dans quelques jours, lors du Sommet d'Evian. C'est au cur des préoccupations aujourd'hui des dirigeants du monde, c'est au cur des préoccupations des peuples du monde. La France, l'Union européenne, vous le savez, sont fortement engagées dans ce processus. Vous savez le rôle qui a été le leur pour la définition de la feuille de route, les efforts qui ont été les leurs pour que cette feuille de route puisse enfin être acceptée. Nous devons unir nos efforts avec l'ensemble de nos partenaires, avec nos amis américains, russes, avec les Nations unies et tous les membres du Quartet car il s'agit véritablement d'une responsabilité collective de la communauté internationale.
La France, avec l'ensemble de ses partenaires de l'Union européenne, ne ménagera pas ses efforts pour que ce que nous entrevoyons aujourd'hui puisse devenir une réalité.
Nous appuyons les efforts engagés par les Palestiniens, nous soutenons le processus de réformes et nous voulons continuer à uvrer dans ce sens, à la fois pour la réforme institutionnelle et pour les réformes dans tous les domaines. Et c'est bien là la vocation de la France, des pays d'Europe et de la communauté internationale d'accompagner ce processus de réformes et c'est aussi le sens du message que j'ai voulu transmettre au président Arafat.
Pour cela, nous avons donc besoin de continuer à travailler avec l'ensemble des autorités palestiniennes, du peuple palestinien, les Palestiniens unis pour avancer tous dans la même direction, la paix.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 mai 2003)
POINT DE PRESSE AVEC M. CHAATH :
Je suis très heureux d'être à Ramallah aujourd'hui, près d'un an après ma dernière visite. J'ai rencontré ce matin le président Arafat, le Premier ministre Abou Mazen, mon collègue et ami Nabil Chaath et plusieurs membres du gouvernement palestinien.
Chacun le sait, cette visite intervient à un moment capital pour l'Histoire de cette région, où il y a une chance à saisir pour la paix, une chance très importante. J'ai pu mesurer les effets dramatiques de la réoccupation des territoires palestiniens et du blocus sur la population. La situation humanitaire des Palestiniens est grave, c'est une source de préoccupation pour la France, pour l'Europe. L'assistance internationale, notamment européenne, est particulièrement nécessaire mais la seule réponse, nous le savons, est politique. Elle passe par la relance du processus de négociation permettant d'entrevoir la création rapide d'un Etat palestinien, viable, démocratique et indépendant.
Pour atteindre cet objectif, les parties doivent appliquer la feuille de route, feuille de route acceptée par les Palestiniens, et depuis hier, acceptée par les Israéliens également.
Nous devons saisir cette chance unique pour construire la paix ensemble. C'est le seul moyen de rétablir une perspective politique, c'est le seul moyen d'apporter la justice au peuple palestinien : c'est donc la clef du succès des réformes qui ont été engagées du côté palestinien. J'ai dit hier aux Israéliens les gestes qui étaient attendus, les gestes qui devaient être faits pour marquer leur engagement, qu'il s'agisse de l'arrêt des opérations militaires, qu'il s'agisse du gel des colonisations, qu'il s'agisse de rétablir la vie quotidienne dans les Territoires, un avenir possible pour chaque Palestinien, qu'il s'agisse de la liberté des prisonniers.
La France a proposé des étapes pour soutenir ce plan de paix et pour sa part, vous le savez, l'Europe est pleinement mobilisée.
Chacun doit maintenant faire sa part du chemin. Les Palestiniens doivent poursuivre leurs efforts. D'abord, il faut bien sûr lutter pour mettre fin aux violences, pour éliminer toute forme de terrorisme, les attaques terroristes qui sont injustifiables. Je salue la position très claire prise par l'ensemble des dirigeants palestiniens. Il faut une mobilisation sans faille et j'étais heureux de constater ce matin, à la fois la détermination et l'unité des dirigeants palestiniens.
Ensuite, il faut approfondir les réformes pour avancer vers l'édification d'un Etat palestinien. Il faut rétablir les fonctions essentielles, la justice, l'ordre public, la sécurité, l'adoption d'une constitution, afin de pouvoir préparer les élections.
Le gouvernement palestinien a une tâche lourde, une tâche considérable devant lui, et je tiens à dire solennellement qu'il pourra compter sur le soutien de la France, le soutien de l'Union européenne. Je viens d'évoquer en détail avec mes interlocuteurs les modalités de cette aide de la France, qu'il s'agisse du renforcement des structures administratives, de l'appui à la réforme institutionnelle en Palestine, qu'il s'agisse des réformes qui sont engagées, réformes économiques, appui dans le domaine de la sécurité et de l'éducation. C'est sur l'ensemble de ces aspects que nous voulons apporter notre concours, convaincus que nous sommes que le règlement de ce conflit justifie aujourd'hui un effort particulier, une mobilisation particulière. C'est une véritable chance pour la paix, il nous appartient une fois de plus, tous ensemble, de la saisir. Et vous savez le rôle qui a été celui de la France, celui de l'Union européenne dans la définition de la feuille de route du Quartet. Nous pensons qu'il faut continuer d'avancer ensemble, tous ensemble, de façon à ce que les difficultés qui ne manqueront pas de surgir pourront être écartées avec résolution, détermination, parce que nous sommes tous convaincus de la nécessité de faire justice au peuple palestinien et d'apporter les garanties indispensables au peuple israélien dans le domaine de sa sécurité.
Q - (A propos de la feuille de route du Quartet)
R - La feuille de route est le fruit des efforts de toute la communauté internationale, efforts engagés par les Nations unies, par les Etats-Unis, par la Russie et par l'Union européenne et chacun sait le rôle très déterminé qui a été celui de l'Union européenne tout au long de la conception, de l'élaboration, de la discussion de cette feuille de route. Nous en avons demandé la mise en uvre et la signature dès la fin de l'année dernière. Nous sommes donc particulièrement heureux, comme Européens, comme Français, de voir qu'elle est acceptée par les deux parties. Il s'agit maintenant de lui donner toutes les chances de réussir. Ceci demandera du courage, de la patience, de la vision, de l'unité et c'est bien je crois ce qui est essentiel aujourd'hui.
Il nous faut tous ensemble travailler dans la même direction. Alors, ne nous divisons pas pour savoir qui sera sur la photo, le but, le seul but, c'est la paix : la paix au service du peuple palestinien pour qu'il lui soit rendu justice, la paix pour que le peuple israélien puisse avoir les garanties indispensables de sa sécurité, la paix pour que le Moyen-Orient puisse retrouver un avenir, se consacrer de toutes ses forces au développement, la paix pour que le monde tout entier puisse retrouver davantage de stabilité. C'est dire que le défi est immense et le défi ne peut être relevé sans l'énergie et les efforts de tous.
Q - Monsieur le Ministre, vous avez rendu visite aujourd'hui au président Arafat et Israël avait dit qu'il boycotterait toute déclaration du président Arafat. Concernant la feuille de route, nous savons que les Etats-Unis jouent un rôle prépondérant dans le pouvoir des décisions. Comment cela va-t-il tenir pour la mise en uvre de la feuille de route ? Il y a des demandes pour que l'Europe joue un rôle plus important. Comment pensez-vous que cela peut se faire ?
R - Il suffit de regarder concrètement comment les choses se sont faites au cours des derniers mois pour obtenir d'abord l'écriture de cette feuille de route, sa définition et puis, son acceptation. Je constate que c'est un effort collectif, chacun d'entre nous a pesé. J'ai en mémoire l'insistance avec laquelle les Européens ont travaillé tout au long de ces derniers mois. Je me rappelle les grands rendez-vous de Séville, de Bruxelles, d'Athènes, où nous avons constamment marqué notre volonté et je suis heureux que l'engagement américain ait accompagné cet effort des Européens. Aujourd'hui, on le voit bien, il joue effectivement un rôle central pour parvenir à convaincre chacun d'avancer. Mais, sur ce chemin, la détermination de tous est indispensable, l'unité de la communauté internationale est indispensable et je suis convaincu qu'à toutes les étapes de la feuille de route, la responsabilité de chacun est engagée. Vous connaissez l'engagement politique des Européens, vous connaissez l'engagement financier des Européens dans cette région, vous connaissez le capital de confiance que ces pays européens ont dans cette région. Nous avons besoin de tout cela, en liaison avec les Américains, les Russes, avec les Nations unies, pour dépasser toutes les difficultés qui sont sur le bord du chemin.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 2 juin 2003)
ENTRETIEN AVEC LA PRESSE :
Je ne voulais pas venir ce matin, rencontrer le président Arafat, le Premier ministre Abou Mazen, le ministre Nabil Chaath, sans venir à ce camp.
Bien sûr, il y a le ministre de la France, il y a l'Européen mais il y a aussi l'homme. Et comment ne pas se souvenir quand on voit, aujourd'hui encore, les blessures de l'Histoire, comment ne pas penser à l'injustice toujours faite à votre peuple ?
Mais, aujourd'hui, c'est une nouvelle page qu'il nous revient d'écrire ensemble, avec l'acceptation par les Palestiniens de la feuille de route, avec l'acceptation par les Israéliens de la feuille de route. C'est une page nouvelle et je veux dire aujourd'hui mon espoir, ma conviction que l'ensemble de la communauté internationale réunie veut regarder vers l'avenir. Aujourd'hui, nous savons l'importance de ce qui se joue ici chez vous, et les regards se tournent vers vous. Nous savons que c'est la paix qu'il faut écrire, renonçant à la violence, à toutes les violences, soucieux de rétablir votre peuple dans ses droits, soucieux d'échanger les territoires contre la paix, soucieux d'effacer tant d'années d'angoisse, de souffrance, de douleur. Face à cela, en mesurant aujourd'hui votre hospitalité, votre accueil, votre générosité, je veux vous dire mon émotion.
Cela s'écrit bien sûr avec les mains mais cela s'écrit peut-être d'abord avec le cur et face à cette réalité, que représentent aujourd'hui quatre millions de réfugiés, face au fait qu'un Palestinien sur deux est réfugié, face au fait que deux Palestiniens sur trois ont moins de 25 ans et représentent cette jeunesse qui veut vivre, qui veut regarder vers l'avenir, j'ai la conviction qu'ensemble, avec le soutien de nos peuples, tous nos peuples, et je veux le dire aussi fortement au nom de la France, de la part de tous les Français, nous voulons vous aider sur ce chemin, sur ce chemin de paix, sur ce chemin qui suppose l'effort et la réforme, sur ce chemin où vous nous trouverez toujours présents avec vous.
Je tiens à saluer le travail remarquable accompli par l'UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient) depuis tant d'années, le travail et la dévotion de Peter Hansen. Je l'ai rencontré il y a quelques semaines encore à Paris, je lui avais promis de venir vous voir ici, vous rencontrer, parce que l'on ressent tellement plus fortement, en vous voyant ici, à quel point l'espoir existe. Et l'on mesure le devoir qui est le nôtre de répondre présent sur ce chemin avec tous ceux qui sont mobilisés et une fois de plus, je le redis, les efforts, le dévouement de tous ceux qui, à travers l'UNWRA se mobilisent pour défendre l'honneur de la communauté internationale. Nous saluons cet effort, nous l'appuyons et nous l'appuyons non seulement par le cur, mais nous l'appuyons financièrement avec la conviction qu'aujourd'hui, cet effort prend un nouveau sens, avec cette perspective, avec cet espoir de paix qui s'ouvre et nous devons redoubler les efforts qui sont les nôtres. A chacun merci.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 2 juin 2003)