Texte intégral
Madame la ministre,
Messieurs les Présidents,
Mesdames et messieurs,
Chers collègues,
Lorsque Michel Marty, président d'Eurocancer m'a proposé d'intervenir lors de votre congrès, j'ai accepté sans hésiter, car je sais l'importance et l'utilité de votre réunion dans le domaine de la cancérologie. Je veux d'ailleurs en remercier les organisateurs et les participants.
Votre congrès contribue de façon importante à la diffusion de l'état de l'art en cancérologie, au partage des connaissances les plus à jour et des résultats issus de la recherche ; il constitue également un lieu de rencontre et de dialogue entre professionnels chercheurs, médecins, soignants, et je sais que ces échanges sont nécessaires pour définir les meilleures pratiques de traitement et d'accompagnement dont les malades du cancer ont besoin.
Par ailleurs, je suis très heureux que nous ayons pu être présents tous les deux, Madame la ministre déléguée à la recherche, Claudie Haigneré et moi-même, pour vous dire combien le gouvernement tout entier est attaché à la mise en place des mesures du plan cancer voulu par le Président de la République, et pour vous rappeler nos orientations particulières dans le domaine de l'innovation diagnostique ou thérapeutique.
J'ai déjà eu l'occasion de le dire : le plan cancer n'est pas seulement un ensemble organisé de mesures de lutte contre le cancer, c'est aussi, et peut être d'abord, une contribution à l'évolution nécessaire de notre système de santé dans l'intérêt collectif de la santé publique, et au bénéfice de chacun des patients. Dans le cas d'une pathologie comme le cancer, autour de laquelle s'est construit depuis déjà longtemps une tradition d'innovation, ce plan prévoit de mettre en place de nouvelles organisations, de nouveaux comportements et de nouvelles technologies qui à terme devraient profiter à l'ensemble des disciplines médicales et soignantes. Je voudrais insister ici sur les quatre domaines pour lesquels, dans le plan cancer, je souhaite favoriser les attitudes innovantes et les solutions audacieuses : tout d'abord la recherche, bien sûr, mais aussi l'organisation des soins, la prévention et la prise en charge sociale.
Dans le domaine de la recherche, pour lequel les attentes des patients sont immenses, je souhaite que nos deux ministères, santé et recherche, travaillent en partenariat étroit, pour rapprocher au mieux les forces et le potentiel hospitalier de celui des laboratoires universitaires et des grands instituts de recherche. Nous unirons nos forces Claudie Haigneré et moi, pour simplifier et amplifier les actions gouvernementales en faveur de la recherche médicale. Vous avez pu d'ailleurs constater que nous avions réussi à organiser dans des délais brefs un appel d'offre commun à nos deux ministères, appel d'offre cofinancé, qui permettra, dès cette année, à la recherche en cancérologie de mieux se structurer et de s'orienter vers les thèmes les plus prioritaires. J'ai pu constater que vous, médecins et chercheurs, vous vous étiez remarquablement mobilisés puisque vous avez su, pour la plupart, émettre des propositions pour faire émerger six, voire sept, cancéropôles à un échelon essentiellement interrégional. Je me félicite du succès de cet appel. Dès que l'institut national du cancer sera en place, c'est à dire au cours de l'année prochaine, puisque la loi de santé publique portant sa création doit être examinée au parlement cet automne, ces cancéropôles pourront être labellisés sous l'égide de cet Institut. Je souhaite en outre que les pôles régionaux de cancérologie, qui associent les établissements publics et privés spécialisés dans le cancer, puissent mettre en commun leur potentiel de recherche hospitalière en association avec les unités de recherche labellisées et faciliter ainsi la mise en place des cancéropôles. La mise en place dans chaque région de ces pôles régionaux de cancérologie est prévue d'ici fin 2004.
Je souhaite le redire ici, le plan cancer doit conduire à augmenter la capacité de recherche et d'innovation de nos institutions, en facilitant la complémentarité entre la recherche hospitalière - notamment la recherche clinique - et la recherche en laboratoire et en assurant une continuité accrue entre la recherche médicale et les malades. Je crois que les institutions hospitalières y sont prêtes. Le potentiel et les moyens consacrés à toutes les formes de recherche à l'hôpital sont d'ailleurs considérables, puisque pour les seuls Centres Hospitaliers Universitaires et Centres de Lutte Contre le Cancer, ces moyens peuvent être estimés entre 1 et 2 milliards d'euros, financés par la dotation globale. Je suis certain qu'une organisation optimisée de ces moyens, mieux coordonnée, orientée sur des programmes concertés avec les équipes de recherche fondamentales, et ouverte davantage aux partenariats avec l'industrie de la santé est possible. Cela permettra aux patients de bénéficier plus vite de meilleurs traitements et d'une qualité de vie plus grande.
Je veux également insister sur la cohérence qui existe entre ce soutien à l'innovation médicale et la politique du médicament que je mène actuellement. Dans le cadre contraint des ressources financières de l'assurance maladie, j'ai opté pour une priorité claire aux traitements les plus efficaces pour les maladies les plus graves : il n'est plus possible aujourd'hui de financer au même niveau un traitement modérément utile et un traitement qui sauve des vies. C'est pourquoi il est nécessaire que chaque malade puisse avoir un accès égal, quel que soit son lieu de prise en charge, à ces traitements à forte valeur ajoutée, souvent innovants, et dont beaucoup concernent le cancer. Dès l'année prochaine, je souhaite que les traitements les plus coûteux soient mieux financés. Dans le cadre de la réforme de la tarification, nous voulons introduire un financement à l'hôpital et dans les cliniques qui prenne mieux en compte les dépenses réellement mises en uvre pour soigner les patients, alors qu'aujourd'hui ces dépenses sont mal financées pour les établissements à budget global ou pour les cliniques en hospitalisation conventionnelle.
Bien sûr, cela suppose que les prescriptions de ces traitements coûteux fassent l'objet d'un suivi plus rigoureux, et respectent les référentiels issus de l'AMM et des bonnes pratiques cliniques.
De même, nous poursuivrons le programme de soutien aux technologies innovantes et coûteuses, qui permet d'évaluer l'intérêt médico-économique des nouveaux traitements, et qui en facilite la diffusion.
Le second domaine pour lequel le plan cancer propose des innovations importantes est celui de l'organisation des soins. Vous savez mieux que moi combien les chances pour un patient peuvent être diminuées si la prise en charge est mal coordonnée dans le temps, ou ne bénéficie pas d'une approche multidisciplinaire conforme aux bonnes pratiques cliniques. C'est pour répondre à cela que le plan cancer comporte plusieurs mesures d'organisation bien identifiées : c'est le cas de la mise en place d'un programme personnalisé de soins qui sera remis à chaque patient, signé par au moins trois médecins et qui est le gage d'une approche multidisciplinaire et coordonnée des soins. C'est également le cas de la mise en place des centres de coordination en cancérologie et d'un référent médical unique, qui permettront à chaque patient de disposer d'un contact permanent avec la structure qui le soigne. C'est encore le cas des réseaux de soins en cancérologie, qui devront assurer le respect des référentiels cliniques, et la continuité des soins entre les phases aigües du traitement, réalisées à l'hôpital, et les phases intermédiaires qui doivent privilégier le domicile. C'est enfin le cas de la mise en place d'un agrément des structures de soins en cancérologie qui devront d'ici quatre ans respecter un référentiel qualité prédéfini. Je pense que si vous exercez à l'hôpital ou en clinique, vous aurez remarqué que ces mesures sont assez profondément innovantes, et qu'elles dessinent une organisation des soins beaucoup plus structurée, dans l'intérêt et autour des personnes malades.
Dans le domaine de la prévention, je crois aussi que le plan cancer encourage à innover et à renouveler nos perceptions et nos habitudes. Dès cette année, nous allons renforcer les actions de prévention des conduites à risque et d'éducation à la santé, en mobilisant les associations : un appel d'offre conjoint entre l'INPES et la Direction générale de la santé va être diffusé prochainement auprès des acteurs associatifs, afin d'encourager les actions visant à modifier nos habitudes. Cet appel d'offre sera centré sur le tabac, qui est notre priorité première, et permettra, je l'espère, de faire émerger des propositions originales et innovantes. Dans le domaine de compétence de l'Etat, je suis en train de préparer deux contrats cadres, l'un avec Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire et l'autre avec François Fillon, ministre des affaires sociales du travail de la solidarité. Ces contrats permettront à nos ministères de mieux coordonner les actions sur le terrain, en faveur de la prévention et de la diffusion des attitudes favorables à la santé. Nous avons choisi la voie du contrat, plus souple et je l'espère plus efficace, à la voie réglementaire, qui est pourtant traditionnelle à l'administration. Ici encore, le plan cancer nous a conduit à innover dans nos pratiques.
Je voudrais également dire un mot des mesures sociales du plan cancer, qui sont très attendues par les patients, et pour lesquelles nous avons aussi cherché à sortir des sentiers balisés, pour trouver de nouvelles réponses. Je pense tout d'abord à une meilleure prise en charge financière par l'assurance maladie et les complémentaires de certaines prothèses ou dispositifs esthétiques, actuellement mal remboursés : nous allons essayer, par la concertation entre les différents acteurs concernés, d'ouvrir un espace de remboursement amélioré sur ces dispositifs, sans pour autant remettre en chantier l'ensemble du système de prise en charge, ce qui serait une démarche trop lourde. Je pense également à l'évolution de certaines prestations d'aide au maintien ou au retour à l'emploi pour les personnes en traitement ou pour les parents d'enfants malades. Sur ces sujets, nous allons chercher à identifier au mieux le besoin réel des malades, pour répondre sur la base d'aides plus souples, et plus ciblées.
Comme je viens d'essayer de vous le démontrer, la démarche qui a été initiée au travers du plan cancer est, je le crois réellement, une démarche volontariste et animée du souci de trouver les meilleures solutions aux très nombreux problèmes posés par cette terrible maladie. Ces solutions, pour beaucoup d'entre elles, sont des solutions neuves, innovantes, et réformatrices. J'en suis d'autant plus heureux que c'est vous, les professionnels, qui en êtes généralement à l'origine. J'y vois une grande capacité de notre système de santé à se mobiliser et à inventer de nouvelles approches pour mieux prévenir et prendre en charge le cancer. Le premier ministre a mis en place une mission interministérielle pour piloter la mise en uvre de ce plan cancer. Cette mission, dirigée par Pascale Briand, doit également préfigurer le futur institut national du cancer, qui interviendra dans le domaine de la recherche, comme je l'ai déjà mentionné, mais aussi comme observateur et pilote de l'ensemble de l'organisation de prise en charge du cancer dans notre pays.
La mission de pilotage du plan cancer devra également mettre en place un dispositif d'évaluation du plan cancer, qui permette d'en apprécier les impacts et les insuffisances. Cela aussi est une démarche innovante au sein de l'action publique. J'ai trop vu dans mon passé, qu'il soit professionnel ou parlementaire, des plans annoncés mais jamais suivis d'effets. C'est pourquoi une équipe dévolue est là chargée de suivre le travail jour après jour. C'est le cas par exemple pour le dépistage du cancer du sein : nous remplirons notre contrat. Les 100 départements seront en marche d'ici la fin de l'année. Car là où il y a une volonté, il y a de l'action.
Mesdames, messieurs, je vous remercie encore pour votre mobilisation au service de la lutte contre le cancer.
(Source http://www.sante.gouv.fr, le 10 juillet 2003)