Déclaration de M. François d'Aubert, ministre délégué à la recherche, sur la composition de l'équipe dirigeante du futur Institut national du cancer et la recherche contre le cancer, Paris le 22 avril 2004.

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Circonstance : Présentation de l'équipe dirigeante du futur Institut national du cancer à Paris le 22 avril 2004

Texte intégral

Monsieur le Ministre,
Messieurs les Professeurs,
Mesdames et Messieurs,
Je me réjouis d'être parmi vous cet après-midi avec Philippe Douste-Blazy pour présenter l'équipe de haut niveau qui aura l'honneur et la lourde charge de porter sur les fond baptismaux l'Institut national du cancer, ce vaisseau amiral du Plan cancer.
Le cancer est une maladie de nos gènes, dont les altérations s'accentuent avec le vieillissement de notre organisme. Dans nos pays développés, où la vie s'allonge grâce aux progrès médicaux, l'incidence du cancer augmente donc inéluctablement. Face à cette aggravation continue et pour faire régresser durablement la mortalité liée au cancer, la recherche est porteuse d'espoir parce qu'elle représente la plus grande marge de possibilité de réduction de cette mortalité.
En effet un consensus, établi parmi les médecins et les scientifiques, estime que cette mortalité pourrait être réduite environ :
- d'un quart en diminuant l'exposition de la population à des facteurs de risque connus, tels le tabac, le soleil, certaines infections, ou certaines habitudes alimentaires ;
- et d'un second quart en améliorant le dépistage avec les moyens actuels, par exemple pour le cancer du sein, et en optimisant l'accès aux soins.
Il reste donc une moitié de la marge d'amélioration de la mortalité qui est strictement dépendante de la recherche et de l'innovation, que ce soit par l'identification d'autres facteurs de risque, par la mise au point de nouveaux outils de dépistage et de diagnostic, ou par le développement de traitements innovants.
Il est donc essentiel que la recherche occupe une place centrale dans le Plan cancer et dans l'Institut national du cancer, qui assurera progressivement la maîtrise d'ouvrage de ce plan. Ce rôle central de la recherche, je l'ai à l'instant justifié par cette équation simple de réduction de la mortalité. Mais ce rôle central se justifie aussi par l'expertise qui émane de la pratique de la recherche :
- expertise pour la définition de référentiels de pratique et d'organisation des soins ;
- et aussi expertise pour l'évaluation du dispositif de soins.
Comme l'illustrent déjà les sites de référence et de recours que sont les CHU, où recherche de laboratoire, recherche clinique et innovation des soins se côtoient, l'amélioration des soins se nourrit de la proximité de la recherche. Une recherche biomédicale innovante, orientée vers les patients, doit rester au contact des malades et de leurs médecins.
Cette synergie entre soins et recherche, qui doit bien sûr exister pour tout progrès médical, est particulièrement pertinente dans la cas du cancer et cette synergie doit être au coeur de l'Institut national du cancer.
La recherche en cancérologie connaît en effet actuellement une véritable révolution, issue de la connaissance du génome humain. Cette recherche est passée en quelques années, d'une approche " artisanale ", gène par gène, à une approche " massivement parallèle ", où des centaines de gènes peuvent être analysés simultanément. Grâce à de nouveaux outils, comme les puces à ADN ou les molécules ciblées sur un mécanisme tumoral précis, la complexité de la biologie du cancer peut être appréhendée directement sur des échantillons issus de patients.
Ces nouveaux outils, par leur transfert rapide dans le contexte clinique, vont rapidement devenir applicables dans tous les aspects de la lutte contre le cancer : la prévention, le dépistage, le diagnostic, la thérapie. Parallèlement ces nouveaux outils permettront de prendre en compte les spécificités génétiques de chaque patient et de développer les moyens diagnostiques et thérapeutiques pour une véritable médecine individualisée.
Ces ambitions scientifiques et médicales seront portées par l'Institut national du cancer et déjà, dès le lancement du Plan cancer, une nouvelle impulsion à la recherche a été donnée par les cancéropôles. Les cancéropôles sont des structures opérationnelles, associant laboratoires et services cliniques de cancérologies, organisées autour de projets couvrant les trois grandes priorités d'action : la recherche en épidémiologie et en sciences sociales, la recherche en biologie et en génomique fonctionnelle des tumeurs et la recherche clinique. Sept cancéropôles, à l'échelle d'une région ou d'une association de régions, ont été identifiées et financés dès 2003, à hauteur de 16 millions d'euros, pour favoriser leur structuration et leur équipement. Une première vague de projets, qui sont en cours d'évaluation, va être financée dès 2004.
C'est dans les cancéropôles, qui seront à terme labellisés, coordonnés et financés par l'Institut national du cancer, que sera conduite la majeure partie de l'activité de recherche, en s'appuyant notamment sur les équipes de l'INSERM, du CNRS et des universités et sur les services cliniques les plus investis dans l'innovation. En outre, des appels à projet de recherche, ouverts au-delà des cancéropôles, pourront être lancés par l'Institut, par exemple sur des problématiques nécessitant un fort interface entre la physique, la chimie et la biologie.
Pour assurer ses missions de pilotage stratégique de la recherche et d'évaluation scientifique, l'Institut national du cancer devra aussi fortement s'appuyer sur la communauté scientifique française et internationale. Déjà des scientifiques de haut niveau, tels les Professeur Daniel Louvard, François Amalric, Gilbert Lenoir, François Sigaux ou Jacques Pouyssegur, ont contribué à ces missions, dans de la Commission d'orientation sur le cancer, puis dans les premières étapes du Plan cancer. Je souhaite les en remercier et le assurer de ma confiance et de ma reconnaissance.
Je souhaite fortement que l'équipe que nous présentons aujourd'hui s'entoure, au sein de l'Institut national du cancer, des instances adéquates, regroupant les meilleurs scientifiques, afin de conduire une politique ambitieuse et clairvoyante.
Dans cette période relativement sereine, qui succède à de grands remous dans le monde de la recherche, nous nous plaçons résolument François Fillon et moi au coeur d'une réflexion active sur l'avenir de la recherche dans notre pays. Cette réflexion doit aboutir, d'ici la fin de l'année, à l'élaboration d'un projet de loi d'orientation et de programmation pour la recherche.
Je pense donc que la mise en place rapide de l'Institut national du cancer, qui répond à un besoin d'efficacité pour le succès d'un plan ambitieux, doit être regardée comme une expérimentation dont le déroulement doit enrichir cette réflexion.
Nos structures de recherches et nos modes de gestion sont figés depuis de trop nombreuses années. La dynamique de modernisation qui sera inscrite dans la future loi devra tenir compte du retour d'expérience de l'Institut national du cancer et l'Institut devra également savoir s'inscrire dans la dynamique qui sera dessinée par la loi.
Professeur Khayat, Professeur Maraninchi, Monsieur Werner, je vous adresse tous mes voeux de succès et tous mes encouragements pour les mois à venir. Sachez que mon ministère et la communauté scientifique seront à vos côtés pour faire de cet Institut une expérience réussie.
(Source http://www.recherche.gouv.fr, le 29 avril 2004)