Déclaration de M. Christian Poncelet, président du Sénat, sur le soixantième anniversaire de la libération de Paris et notamment du jardin et du Palais du Luxembourg, au Sénat le 25 août 2004.

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Circonstance : Manifestations commémoratives du 60ème anniversaire de la libération du jardin et du Palais du Luxembourg, au Sénat le 25 août 2004

Texte intégral

Monsieur le Ministre,
Monsieur le Maire de Paris,
Mesdames, Messieurs les Présidents,
Chers Amis,
Depuis cinquante-huit ans, les autorités du Sénat, les représentants de Paris et de son 6ème arrondissement, le préfet de police, les représentants des anciens Combattants, viennent se recueillir sur cette dalle des fusillés inaugurée le 16 septembre 1946 à la demande de l'Assemblée nationale constituante.
Cette dalle a été dédiée à la mémoire de sept combattants morts pour la France : quatre civils détenus au Palais du Luxembourg et trois gardiens de la paix faits prisonniers le 19 août, jour de l'insurrection déclenchée par le colonel Henri Rol Tanguy, chef des Forces françaises de l'intérieur d'Île-de-France.
Ces sept hommes ne furent pas les seules victimes des combats autour du jardin et du Palais, mais ils symbolisent le sacrifice de tous.
Ils témoignent aussi de la présence de la Résistance intérieure, dans sa diversité, aux côtés des troupes de la France libre et de nos alliés.
Les troupes de la France libre sont incarnées aujourd'hui, non seulement par les délégations d'anciens combattants que je salue, mais aussi par le drapeau et le détachement du 501e régiment de chars de combat, l'une des premières composantes de la 2ème DB.
C'est à cette unité qu'appartenait Pierre de La Fouchardière, que j'ai tenu ici à honorer au nom de tous ses camarades. C'est lui le premier, alors chargé de la protection du général Leclerc sous les ordres d'Alain de Boissieu, qui s'est présenté près des grilles du Luxembourg, il y a maintenant soixante ans.
Le Palais abritait, on le sait, l'un des commandements " régionaux " de la Luftwaffe. Il fut ainsi l'un des objectifs donnés aux troupes qui investirent Paris. Il s'agissait de neutraliser l'important contingent allemand et les nombreux chars qu'il possédait, afin de faciliter la pénétration des unités de la 2e DB.
La bataille pour le jardin et le Palais s'est déroulée une grande partie de la journée du 25 août.
La garnison allemande fut prise en tenailles : après une première reconnaissance par le Sud par les chars légers du peloton La Fouchardière, un autre détachement de la 2e DB, placé sous les ordres du commandant Putz et dirigé par le futur général de Wittasse, remonte le boulevard Saint-Michel en venant de la Seine et engage les combats place de la Sorbonne et rue de Vaugirard. Le char La Moscowa immobilise le char Panther sorti à sa rencontre.
Ce même détachement du 501e réduit les dernières résistances de l'École des Mines.
Sur le flan ouest, par la rue de Vaugirard, arrivent les fusiliers marins. Les FFI du colonel Fabien participent à l'investissement du jardin. La garnison se rend à 18 heures 35, après que la reddition du général Von Choltitz lui a été notifiée.
Soixante ans après, jour pour jour, le Sénat a souhaité donner une tonalité solennelle à ces manifestations qui s'inscrivent dans le programme de commémoration du soixantième anniversaire de la Libération décidé par son Bureau.
La libération du Sénat ne fut qu'un des aspects de la libération de Paris. C'est la raison pour laquelle j'ai tenu, Monsieur le Maire de Paris, à ce qu'elle s'inscrive dans le cadre plus général aux destinées duquel vous présidez avec Monsieur le Ministre délégué aux anciens Combattants.
Cette cérémonie n'aurait cependant pas de sens si nous nous en tenions à la seule célébration des combats. Nous sommes, je crois, les uns et les autres convaincus du fait que ces morts nous obligent à rester dignes des valeurs pour lesquelles ils se sont battus et ont fait le sacrifice de leur vie.
Cette fidélité est particulièrement nécessaire pour une assemblée de la République qui représente l'ensemble de ses territoires.
Quelques mois plus tard, le premier embryon de représentation du peuple français - l'Assemblée consultative provisoire - s'installa dans l'hémicycle de ce Palais tout proche et commença à jeter les bases de la reconstruction de nos institutions et de la renaissance de notre société.
Bientôt, avant même l'armistice, des élections libres seraient organisées. Je me dois de souligner que ce furent des élections locales et qu'elles virent, pour la première fois, la participation des Françaises.
Aujourd'hui, nous devons penser au défi commun qui nous attend : faire vivre la liberté et la démocratie, non seulement en France, mais en Europe, seules conditions de l'instauration d'une paix durable.
Puisse le souvenir des combats rappeler aussi que la paix ne peut être maintenue sans vigilance, sans engagement et sans courage.
C'est le message que nous souhaitons transmettre aux nouvelles générations. Nous donnons d'ailleurs rendez-vous aux jeunes des lycées de France et des pays limitrophes de la France, le 21 mai prochain, dans l'hémicycle du Sénat, pour une réflexion commune sur la paix et la nécessaire démocratie européenne.
Symbole de cette continuité républicaine qui s'attache à notre assemblée, l'hémicycle du Sénat aura ainsi connu et les prémisses de la reconstruction de notre patrie et l'esquisse de son avenir, de notre avenir, au sein d'une Europe forte, prospère et solidaire.
(Source http://www.senat.fr, le 3 septembre 2004)