Extraits de l'interview de M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement et porte-parole du Gouvernement, à "Radio J" le 2 novembre 2003, sur la lutte contre l'antisémitisme et la politique de la France au Proche-Orient.

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Média : Radio J

Texte intégral

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Q - Il y a ce qu'on appelle aujourd'hui la judéophobie, une recrudescence de l'antisémitisme. Qu'est-ce que vous dites à ces jeunes musulmans qui s'en prennent aux juifs aujourd'hui ?
R - Tout simplement que les lois de la République sont applicables à tous et que nous agirons avec la plus grande intransigeance contre toutes les formes d'extrémisme et en particulier contre toutes les formes d'antisémitisme.
Q - Ou ce que Jean-Pierre Raffarin a appelé l'islamophobie.
R - Bien sûr. De toutes parts, ces comportements sont inacceptables et nous devons les combattre avec la plus grande énergie. Les lois de la République le permettent ; encore faut-il que nous soyons, nous, en situation de montrer aux uns et aux autres notre détermination et croyez-moi, sur ce point, on ne sera pas en arrière.
Q - Alors il y a un débat justement qui a un rapport avec ce dont on vient de parler, un débat en ce moment autour des déclarations, autour de la personnalité de Tarik Ramadan, cet islamologue suisse, Frère musulman, qui a mis en cause récemment des intellectuels juifs français, les accusant notamment de défendre Israël par réflexe communautaire. Votre réflexion sur ces propos ?
R - Comme beaucoup, j'ai été extrêmement choqué par ces propos qui ne correspondent à rien et qui surtout sont justement de nature à encourager les comportements extrémistes. Donc oui, naturellement c'est choquant. De manière plus générale, je le répète à nouveau, nous ne pouvons pas tolérer la banalisation de ces discours qui encouragent toutes les formes d'extrémisme, d'intégrisme et qui n'ont rien à voir avec la vision républicaine qui est la nôtre. Dans ces périodes où il y a des tentations de banaliser, eh bien nous devons, nous, montrer une très grande fermeté.
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Q - Alors une autre question qui concerne nos auditeurs ; est-ce que vous comprenez le malaise des Juifs de France, Monsieur Copé ?
R - De quel point de vue ?
Q - Du point de vue d'une recrudescence de l'antisémitisme et d'un certain nombre de sujets qui les concernent ?
R - Je vais vous dire : je suis très sensible à l'expression de ce malaise et il m'arrive bien souvent d'en parler avec un certain nombre de représentants de la communauté juive, d'ailleurs de toutes obédiences et je veux vous dire, sur ce sujet, qu'il nous faut sans cesse marteler que nous sommes déterminés à lutter contre toutes les formes d'antisémitisme, qu'il est absolument indispensable de rappeler ce qu'a été l'histoire et, sur ce point, à la fois les déclarations de Jacques Chirac en 1995 comme celles récentes du Premier ministre notamment sur la journée nationale de la Shoah, sont des moments très importants, des "marqueurs" comme on dit, qui doivent rappeler à chacun que la conscience collective exige le devoir de mémoire, le respect et donc naturellement la lutte déterminée contre toutes les formes d'extrémisme et en particulier contre l'antisémitisme. Nous ne serons jamais trop nombreux pour lutter contre ces dérives qui sont contraires aux lois de la République.
Q - Et qu'est-ce que vous répondez à ceux qui disent que la diplomatie française concernant ses choix au Proche-Orient est délibérément pro-arabe ?
R - Je pense que ce sont deux sujets qui sont distincts, il y a une détermination absolument sans faille du gouvernement à lutter contre toutes les formes d'antisémitisme, je l'ai dit
Q - Bien sûr, ce sont deux sujets différents mais c'est une question qui se pose. Jacques Chirac est devenu l'ami des pays arabes quand il va au Maroc où il est accueilli comme tel donc à l'inverse cela peut peut-être monter les
R - Je connais ce discours, je l'ai entendu, je veux vous dire que sur ce point, il est des choses qu'on ne peut pas laisser dire. Le président de la République est très proche de la communauté juive en France. Vous savez qu'il a, avec les uns et les autres, des relations très soutenues et très anciennes. En ce qui concerne la politique de la France au Proche-Orient, elle ne se place pas en terme de choix d'un camp ou de l'autre ; ou si elle doit choisir un camp, c'est celui de la paix, c'est celui d'un processus politique.
Q - Non, mais c'est sa position contre la guerre en Irak qui en a fait un ami des pays arabes.
R - Je n'ai pas le sentiment que toutes les choses et tous les problèmes aient été réglés - ou alors c'est que je ne comprends pas ce qui se passe - depuis l'intervention en Irak. Aujourd'hui, notre principale préoccupation est de faire en sorte que la communauté internationale retrouve toute sa place et que le processus de démocratisation, de sécurisation et de paix l'emporte et Dieu sait si dans ce domaine, nous avons fort à faire les uns et les autres.
Q - Mais qui ou quoi quel est l'obstacle à la paix aujourd'hui au Proche Orient ?
R - La capacité des uns et des autres à se mettre autour d'une table pour parler.
Q - Mais il y a un plan de paix qui a été opéré à Genève
R - Il y a d'abord une Feuille de route
Q - Oui, bien sûr, la Feuille de route
R - Pardon d'y revenir, il y a d'abord une Feuille de route dont le Quartet est l'élément porteur et je crois que sur ce point, il faut inlassablement continuer - le rôle de la communauté internationale sera essentiel et notamment de l'Union européenne et de la France - de tout faire pour que les uns et les autres se retrouvent autour de la table et se parlent.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 4 novembre 2003)