Déclaration de M. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, à "RTL" le 20 août 2004, sur la relance de la consommation, les créations d'entreprises, les menaces de délocalisation liées aux 35 heures, la consommation des fruits et légumes.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

Q- La hausse du SMIC de 8 % sera réalisée en 2005, comme prévu à l'origine. Il n'y aura pas d'étalement de cette hausse, comme annoncé en juillet. C'est une économie à laquelle l'Etat a renoncé en fait.
R - "C'est surtout un moyen de relance de la consommation. C'est un engagement qui avait été pris par le Gouvernement. C'est vrai que le contexte budgétaire ne facilitait pas les choses, puisqu'en compensation de cette augmentation du Smic, il y a également une augmentation de la prise en charge des charges, c'est-à-dire une baisse des charges pour les chefs d'entreprise.
Q-Des charges fiscales et sociales ?
R - "Voilà. Et donc, cela coûte au budget. Ceci étant, je pense que c'est un bon moyen de contribuer à la relance de la consommation et à la relance tout court."
Q-Les PME ne sont pas concernées, en général ?
R - "Elles sont concernées pour certaines d'entre elles, mais c'est vrai que ce n'est pas dans le PME qu'il y a les plus bas salaires."
Q-Tout cela est permis par une relance de la croissance, enfin, une croissance meilleure que prévu.
R - "Une croissance meilleure que prévu, et puis surtout : on est dans un contexte - on va peut être en parler - de création, de développement de la création d'entreprise. Il faut à ce moment-là que toutes les mesures prises par le Gouvernement permettent de doper cette création d'entreprise, création d'activité, création d'emplois, relance de la consommation, de façon à ce que la machine économique tourne plus vite."
Q-On peut parler d'une cagnotte fiscale en ce moment ?
R - "Je ne crois pas que ce soit le terme approprié."
Q-A propos de PME, et avant de parler de leur création, il y a eu des exemples cet été, d'entreprises qui demandaient à leurs salariés de renoncer aux 35 heures, sans quoi par exemple, elles délocalisaient. Hier, c'est dans une PME de moins de 40 salariés, à Châlons-en-Champagne qu'on a appris que, pour la quarantaine de salariés, c'était le retour à 39 heures ou le licenciement. Vous allez intervenir dans un cas comme ça ?
R - "Cela mériterait d'avoir davantage d'éléments. Ce que je pense, c'est qu'il faut laisser trouver les moyens de souplesse qui ont été faits dans le cadre de la loi Fillon, et voir si, éventuellement, on ne peut pas aller plus loin. Mais cela ne doit se faire que dans un cadre contractuel, entre le chef d'entreprise et ses salariés. Et de toute façon, les heures supplémentaires, si on passe de 35 à 39 heures, ces heures doivent être payées. On ne va pas faire travailler les gens en plus gratuitement.
Donc, il faut voir comment les choses peuvent s'établir, mais toujours de la manière contractuelle. Je ne crois pas à ces systèmes d'économie administrée ou d'encadrement strict, comme cela a pu être fait par les 35 heures. Il y a un cadre légal du travail, bien entendu, mais à l'intérieur de ce cadre légal, voyons comment on peut mettre davantage de souplesse, de façon à permettre aux entreprises d'avoir plus de compétitivité, et de permettre aux salariés qui veulent gagner davantage de pouvoir le faire aussi."
Q-Les créations d'entreprises : pendant deux ans, il y a eu une forte croissance des créations. Et puis, les statistiques d'avril à juillet, ont indiqué un coup d'arrêt de cette progression. Cela vous inquiète un peu ?
R On est sur une augmentation globale tout à fait significative. Le programme économique du président de la République avait fixé un cadre, si l'on peut dire, de 200.000 créations d'entreprises par an. Nous sommes bien au-delà, puisque je pense qu'on devrait finir cette année, à 230 voire, 240.000."
Q-Donc, on arrivera à un million sur le quinquennat ?
R - "On arrivera au-delà du million, fixé par le président de la République. Et la baisse est en fait beaucoup plus sensible sur la période d'été. Mais malgré tout on est à 20 ou 30 % au-delà des prévisions, au-delà de la situation d'il y a deux ans."
Q-Votre loi sur la vie des entreprises, sur l'entreprise, sur les PME, elle se prépare pour cet automne ; vous en êtes où ?
R - "On travaille beaucoup avec les chambres consulaires - chambres de métier, chambres de commerce - avec la CGPME, avec les artisans, et nous allons, je pense, d'ici le 15 octobre, pouvoir sortir des propositions tout à fait précises, dans trois axes importants : celui de la transmission de l'entreprise. Vous savez que, chaque année, il y a des entreprises qui ont des difficultés à pouvoir se transmettre pour des raisons fiscales. L'accès au financement : beaucoup de petites entreprises ne trouvent pas le financement qui correspond à leur projet. Et le statut des entreprises, et je pense là aussi au statut des conjoints en particulier."
Q-Cela concerne aussi les entreprises, les entreprises agricoles ; qu'est-ce qui se passe à votre avis, en matière de fruits et légumes ? Il y a eu cet accord du 17 juin, dans lequel les distributeurs s'engageaient à acheter à un prix minimum aux agriculteurs, et cela ne marche pas.
R - "L'accord du 17 juin, ce n'était pas l'engagement d'acheter à un prix minimum. L'accord du 17 juin, c'était de baisser les prix à la consommation, et un resserrement des marges, en fait, entre les industries agro-alimentaires et la grande distribution.
Q-Apparemment, ce n'est pas une satisfaction...
R - "J'avais veillé à ce moment-là à ce que les producteurs agricoles puissent être épargnés et que la pression ne retombe pas sur les producteurs agricoles, ou sur les PME qui étaient également directement concernées. Le dossier des fruits et légumes mérite d'être vu avec beaucoup de sérénité. Il y a deux axes de travail : il y a celui de la relance de la consommation et des outils de promotion. Il faut faire savoir le bien de nos fruits et l'intérêt de les consommer.
Q-C'est une campagne de promotion ?
R - "Voilà. Il y a des campagnes de promotion à imaginer, et par ailleurs, regarder comment en période de crise on peut assurer et maintenir le revenu de producteurs, puisque ces périodes de crises, malheureusement presque chaque année, elles reviennent. Je pense qu'au lieu, peut-être, des systèmes de prix minimum - qui souvent se transforment en prix maximum, c'est-à-dire que cela créé un appel d'air à des produits d'importation -, peut-être faudrait-il réfléchir à des systèmes de coefficients multiplicateurs. C'est-à-dire que quand vous achetez un produit 100, eh bien le distributeur applique un coefficient pour créer sa marge. Ce qui veut dire que ça l'incite, pour faire une marge importante, et toujours à acheter plus cher et donc, à éviter l'effondrement des cours. Mais ce sont des sujets qu'il faut travailler en étroite collaboration avec le ministère de l'Agriculture. J'ai eu l'occasion de l'évoquer hier après-midi et hier soir avec H. Gaymard."
Q-Et dans quel sens ?
R - "Nous allons regarder ensemble, à la fois au ministère de la Consommation, au ministère de l'Agriculture, comment nous pouvons apporter une réponse aux producteurs."
Q-Au ministère de l'Economie, c'est largement N. Sarkozy qui s'occupe de cette question. Vous êtes un ministre délégué dans son ministère d'Etat. Comment se passe la cohabitation, sachant que vous êtes depuis toujours un proche
de J. Chirac ?
R - "D'abord, ce n'est pas une cohabitation, c'est un travail en commun, puisque la cohabitation peut avoir une autre connotation. Au quotidien, les choses se passent dans l'état d'esprit, dans la ligne fixée par le président de la République et le Premier ministre. Et sur ces dossiers, notamment sur la préparation de la table ronde du mois de juin, nous avons fait un long travail en commun."
Q-Oui, mais politiquement, est-ce que ce serait une bonne chose que N. Sarkozy dirige l'UMP ?
R - "C'est un choix personnel qui revient à N. Sarkozy. Le fait d'être candidat ou pas, c'est un choix personnel. Ensuite, si la question est de savoir si c'est cumulable avec une responsabilité ministérielle, je crois que la position du président de la République est claire et sans appel, et tout à fait légitime."
Q-La position du Président peut-être, mais vous qui travaillez avec lui, vous pensez que les deux sont compatibles ?
R- "On n'est pas sur un problème de temps, on est sur un problème de fonctionnement de nos institutions. C'est-à-dire qu'on ne peut pas avoir, évidemment, dans un gouvernement, un ministre qui soit en même temps le chef de la majorité. C'est le rôle naturel du Premier ministre."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 20 août 2004)