Entretien de Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée aux affaires européennes, avec BFM le 16 novembre 2004 sur les efforts de l'Union européenne en faveur de l'implantation du réacteur nucléaire ITER sur le site de Cadarache et la coopération internationale autour de ce projet.

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Média : BFM

Texte intégral

Q - Peut-on dire que ITER sera conçu à Cadarache, que ce soit avec ou sans les Japonais ?
R - Ce qui a été présenté ce soir par la Commission européenne, c'est une décision de proposer un mandat pour que l'Union européenne négocie la mise en place d'ITER à Cadarache. Il fallait un mandat à l'Union européenne pour discuter sur ce point sur le plan international, avec l'ensemble des partenaires. Elle se donne également aujourd'hui la possibilité d'envisager un autre scénario, si, dans un délai déterminé après le prolongement des négociations, on ne peut pas prendre de décision dans le cadre envisagé jusqu'ici.
Q - L'autre scénario privilégié que vous évoquez, c'est la construction d'ITER sans les Etats-Unis, sans le Japon ni la Corée du Sud, donc essentiellement financé par l'Union européenne. Si tel était le cas, l'Union européenne financerait-elle seule ITER, ou la Chine et la Russie seraient-elles également "dans le coup" ?
R - Je me permets simplement de vous préciser que le scénario privilégié, est celui du partenariat à six, tel qu'on l'a toujours envisagé et sur lequel on travaille aujourd'hui. Ce qu'on propose avec ce mandat, c'est un partenariat avec le Japon, qui possède des compétences importantes dans ce domaine et joue un rôle tout à fait privilégié aux côtés de l'Europe.
Q - On propose au Japon de participer à ce dossier sans construire le réacteur au Japon ?
R - L'option essentielle est de maintenir ce partenariat privilégié avec le Japon, qui est partenaire central dans ce programme. Mais on ne veut pas attendre trop longtemps, car c'est une chance pour l'Europe et pour le monde que d'avoir la possibilité d'avancer dans l'étude de l'énergie par fusion. Par conséquent, le mandat de la Commission, qui devrait être adopté au prochain Conseil des ministres des 25 et 26 novembre, propose la possibilité de démarrer le projet ITER sur le territoire européen à Cadarache, dans le cadre d'un partenariat ouvert. Vous savez que la Chine et la Russie soutiennent l'Union européenne sur la qualité du site européen. C'est le début d'un partenariat, qui restera toujours très ouvert, puisqu'il y a d'autres partenaires qui s'associent actuellement au projet. L'Union européenne dans son mandat, précise aussi son engagement financier. Au total, l'Union européenne et les Etats membres qui y participent , et j'évoque bien sûr la France, prendraient en charge 50 % du coût total de la mise en place de ce projet. C'est un projet très ambitieux, qui coûte cher, puisqu'il est estimé à 5 milliards d'euros dans les dix premières années qui correspondent à la construction du site.
Q - La France a annoncé que si le site se faisait sans un soutien du Japon et des Etats-Unis, la contribution de la France serait susceptible d'être doublée.
R - En France, l'Etat et les collectivités territoriales de la Région PACA, qui sont très actives et motivées par ce projet, ont dit qu'ils pourraient assumer une part plus importante du coût, toujours en restant dans les 50 % de l'Union européenne que j'évoquais tout à l'heure. Ceci en sachant que les partenaires chinois et russes sont prêts à s'engager et que nous avons toutes les chances de pouvoir travailler dans un partenariat beaucoup plus large, ce que nous souhaitons d'ailleurs, et ce à quoi nous travaillons.
Q - On imagine que le Conseil européen du 26 novembre soutiendra cette proposition de la Commission. A partir de là, quel peut-être le délai raisonnable pour débuter le projet ?
R - Le 26 novembre, je pense effectivement que l'Union européenne va donner mandat à la Commission pour explorer, dans des conditions nouvelles, l'implantation d'ITER à Cadarache dans le cadre d'un partenariat privilégié à six. Ceci va prendre du temps. Les choses sont en train de bouger, mais on ne peut pas dire aujourd'hui à quel moment elles pourraient aboutir. Je crois qu'il faut se laisser du temps pour établir le bon partenariat. C'est ce qu'on a toujours tenté de faire jusqu'ici. Nous verrons d'ici quelques semaines, au cas où les négociations ne débouchent pas, si nous devons passer au scénario alternatif envisagé aujourd'hui par l'ensemble des membres de l'Union européenne.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 novembre 2004)