Conférence de presse de M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication, sur la politique en faveur des parcs et jardins et la deuxième édition de "Rendez-vous aux jardins", Paris le 25 mai 2004.

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Circonstance : Conférence de presse à l'occasion de la deuxième édition de "rendez-vous aux jardins" à Paris le 25 mai 2004

Texte intégral

Mesdames, Messieurs, chers amis des jardins,
Je suis très heureux de vous présenter la deuxième édition de " Rendez-vous aux jardins ".
" Mieux connaître les jardins pour mieux les aimer " : tel est, en 2004, le thème fédérateur de cette myriade de rendez-vous, répartis sur l'ensemble de notre territoire.
Ce sont cette année plus de 1300 lieux qui accueilleront tous les amoureux des jardins, dont 560 proposeront des animations, 420 un accueil par le jardinier ou le propriétaire ; 145 jardins ouvriront jusqu'au crépuscule.
C'est un rendez-vous exceptionnel cette année puisque 89 jardins n'ouvriront que pendant ces trois jours.
Parmi ces rendez-vous d'exception, je me réjouis de l'ouverture des jardins de l'Elysée (Ouverture réservée aux scolaires et sur inscription préalable) l'après-midi du 4 juin et de ceux de Matignon les 4, 5 et 6 juin. Nos amis canadiens ouvriront les jardins de leur ambassade. Au total, 40 jardins ouvriront au public pour la première fois.
Je tiens à remercier tous les propriétaires et les jardiniers qui ouvrent le précieux patrimoine dont ils ont la charge à la curiosité, à la soif de découverte, à l'amour du public, à l'amour des Françaises et des Français pour ces lieux qui, selon le beau vers de Malherbe, " donnent au coeur tant d'aimables désirs ". Ces lieux où, propriétaires et jardiniers, toujours selon le grand poète classique " au miracle de l'art font céder la nature. "
Car les parcs et jardins font partie intégrante de notre patrimoine. Qu'ils appartiennent à l'Etat, aux collectivités territoriales ou à de très nombreux propriétaires privés, que je tiens à remercier pour leur engagement à faire partager leur passion, ils forment notre paysage familier, l'environnement que nous aimons contempler, ils marquent notre territoire et notre regard, ils sont notre bien commun.
Un bien précieux, un bien vivant et donc fragile. Lorsque surviennent des catastrophes comme la tempête de 1987 en Bretagne, ou la grande tempête de 1999 dont toutes les cicatrices sont loin d'être effacées, ou des incendies particulièrement dévastateurs dans le Sud de la France, nous ressentons combien ce patrimoine, soumis par nature aux mouvements cycliques des saisons, est périssable.
Les jardins sont nos racines, nous y cultivons des souvenirs familiers, sans nostalgie, car nous aimons aussi être surpris, par les talents, parfois le génie de ceux qui les font.
Cette deuxième édition des " Rendez-vous aux jardins " est pour moi l'occasion de saluer la première année de travail du Conseil national des parcs et jardins, présidé par Jean-Pierre Bady, et assisté par les services de la direction de l'architecture et du patrimoine.
Installé l'an dernier, ce Conseil réunit les représentants des administrations, du ministère de la culture et de la communication et des autres ministères concernés, des collectivités territoriales, des gestionnaires de jardins publics, des membres des associations de propriétaires privés, des personnalités qualifiées du monde des jardins, jardiniers, architectes du patrimoine, paysagistes, historiens des jardins, botanistes, bref, tous ceux qui, par leurs savoirs et leurs savoir-faire, entretiennent, transmettent, et créent ce patrimoine vivant des parcs et jardins.
Et je constate, Monsieur le Président, que votre Conseil, qui a pour but à la fois de favoriser le dialogue entre les pouvoirs publics et les propriétaires privés, et de me proposer des idées et des projets, a beaucoup travaillé depuis un an !
Il a constitué en son sein des groupes de travail et s'est adjoint le concours d'experts dans ses vastes domaines de compétence : la protection, l'entretien, la recherche, la restauration, la création, la formation, l'animation, la valorisation, et la définition d'un nouveau label. Tous ces groupes de travail sont à l'origine des 54 propositions - pas moins ! - que vous avez adoptées en séance plénière et qui figurent dans votre premier rapport annuel.
Ces propositions sont extrêmement stimulantes pour la réflexion et l'action de l'administration et du Ministre.
J'y attache d'autant plus de prix qu'elles sont le fruit d'un travail en commun entre tous les acteurs concernés, en particulier les représentants des propriétaires privés.
Je tiens, parmi toutes les personnes présentes, à rendre hommage à l'engagement de Monsieur Wirth, président du Comité des parcs et jardins de France, comme à celui de toutes les grandes associations représentées au sein du Conseil.
Sur l'ensemble de vos propositions, j'en ai retenu quelques-unes auxquelles je souhaite donner le caractère d'une priorité :
Tout d'abord, la création du label " Jardins remarquables ".
Il y a en France près de 1700 parcs et jardins protégés dont plus de 500 sont classés parmi les monuments historiques. Bien d'autres encore sont inscrits au titre des sites (et relèvent donc du ministère de l'écologie). Leur état d'entretien est fort variable.
En revanche, il existe des jardins qui, s'ils n'ont pas tous été distingués au titre des monuments historiques et des sites, n'en possèdent pas moins un caractère spécialement intéressant, parce qu'ils sont particulièrement bien entretenus, parce qu'ils possèdent une collection botanique exceptionnelle, ou parce qu'ils sont ouverts largement au public et sont dotés d'un ensemble d'informations destinées aux visiteurs.
Ils seront désormais signalés au public comme " jardins remarquables ".
Il ne s'agit pas de créer un troisième échelon de protection, mais bien de dégager une catégorie à part, rassemblant jardins protégés ou non, qui possèdent un intérêt digne de susciter la curiosité particulière du public.
Déjà, près d'une centaine de propositions ont été présélectionnées par les DRAC.
L'obtention de ce label sera naturellement subordonné à l'accord du propriétaire, lequel devra s'engager à entretenir son jardin durant cinq années, notamment grâce à un plan de gestion. Ces jardins présentant un grand intérêt historique, esthétique ou botanique se distinguent en effet par un entretien exemplaire et un accueil attentif des visiteurs.
J'ai souhaité que le label permette à ceux auxquels il est attribué d'obtenir un agrément fiscal, à charge pour eux d'ouvrir leurs jardins quarante à cinquante jours par an (suivant les mêmes modalités que pour les monuments non protégés) en échange de quoi ils pourraient déduire de leurs impôts les frais de travaux et d'entretien. Je viens de recevoir l'accord de mon collègue, secrétaire d'Etat au budget, pour cet aménagement fiscal dont l'intérêt général n'échappe à personne.
Ce label aura aussi un effet d'entraînement sur l'entretien des parcs et jardins que je souhaite voir s'inscrire dans le cadre de plans de gestion. Ces plans permettront aux propriétaires de projeter l'évolution de leurs jardins à cinq ans ou dix ans, avec le concours de l'expertise de professionnels et de programmer les travaux d'entretien et d'aménagement de leurs jardins.
Parce qu'un jardin n'est pas figé, parce qu'il est vivant, il évolue dans le temps et cette évolution doit être programmée.
Les jardins doivent être accessibles au public dans le monde réel mais aussi dans le monde virtuel d'internet et je souhaite que l'ensemble des informations relatives aux jardins soit regroupé sur le site du ministère avec des liens vers d'autres sites spécialisés ou vers d'autres portails.
Parmi ces liens, je pense en particulier au site préparé par le Comité national des parcs et jardins.
Je me félicite que le Conseil national des parcs et jardins ait montré l'exemple en commençant à rassembler, en annexe de son rapport, des informations relatives aux bibliothèques et aux centres de documentation possédant des collections sur les jardins, ainsi que la liste des centres de ressources botaniques et une bibliographie. Car il y a un foisonnement des savoirs sur les jardins, qui doivent rencontrer les immenses besoins d'information et de formation du public, des amateurs et de tous les professionnels concernés par l'art des jardins.
Les parcs et jardins, je l'ai dit, ne sont pas un patrimoine figé, qui devrait rester en l'état - et d'ailleurs en quel état ? S'ils façonnent notre paysage, ce paysage lui-même créé par les hommes et fruit d'un équilibre toujours en mouvement entre la nature et la culture, les jardins ont toujours été des lieux de création.
Pour contribuer à cette création, caractéristique de l'art vivant des jardins, je souhaite donner un caractère prioritaire à la mise en oeuvre d'opérations représentatives. C'est pourquoi je me propose d'organiser un concours de conception de jardins contemporains sur trois sites de représentativité différente et de caractéristiques particulières : un jardin privé - représentatif de l'effort de ces " conservateurs bénévoles " que sont les propriétaires privés dont les jardins sont ouverts au public - , un monument de l'Etat témoin de la continuité de notre histoire nationale, un jardin urbain largement ouvert aux sollicitations du loisir de nos contemporains, où le travail de l'artiste pourra être porté sur l'accueil des enfants dans le jardin. Je demande à la direction de l'architecture et du patrimoine de porter une attention particulière à cette opération.
Enfin, je retiens la proposition du Conseil national des parcs et jardins d'organiser les prochains entretiens du patrimoine sur le thème de l'entretien des jardins. Ce sera l'occasion de débattre avec tous les professionnels et les amateurs concernés en présence des meilleurs spécialistes de l'ensemble des thèmes qui nous rassemblent aujourd'hui.
Pour ma part, je vous donne rendez-vous vendredi 4 juin à Montreuil, où j'irai visiter les "murs à pêches" datant du XVIIe siècle le matin, puis à Versailles l'après-midi où j'aurai le plaisir de décorer, au sein même de l'un des plus beaux jardins de France, quelques-uns de ceux qui, par leur travail et leur talent, rendent nos jardins si agréables, qu'il s'agisse de jardiniers de l'Etat ou du secteur privé. Samedi 5 juin, j'irai en région.
Que ce millier de rendez-vous soit une fête, une grande fête des jardins, une fête du patrimoine et de la création et une ouverture, sans contrainte, pleine d'enthousiasme, aux aspects vivants de notre culture !
Je vous remercie.
(source http://www.culture.gouv.fr, le 27 mai 2004)