Déclaration de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, sur les réformes au sein du ministère et l'industrie d'armement en France et dans le cadre de l'Union européenne, à Paris, le 9 janvier 2004.

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Circonstance : Présentation des voeux aux industriels et aux syndicats de la défense, à Paris le 9 janvier 2004

Texte intégral

Monsieur le Délégué Général,
Madame la Secrétaire Générale,
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs les responsables syndicaux,
Mesdames et Messieurs,
Pour la deuxième fois depuis ma prise de fonction, j'ai le plaisir de vous présenter mes voeux de nouvel an.
Sur le plan personnel, je souhaite, à vous et vos familles, que l'année à venir vous apporte santé et bonheur.
Sur un plan plus professionnel, j'espère que 2004 sera pour vous synonyme de réussite, et je vous prie de transmettre ces voeux à l'ensemble de vos collaborateurs.
Outre l'instant de convivialité que cela représente, cette coutume est également l'occasion de tirer les leçons du passé et de se projeter vers l'année à venir.
Au delà des actes et des chiffres, 2003 a été marquée, pour nous et pour vous, par la disparition de Jean-Luc Lagardère.
Je veux rendre à nouveau hommage à ce grand capitaine d'industrie qui, de Matra à EADS, a marqué l'aéronautique, et qui a toujours manifesté son total engagement pour la France.
2003 a été pour notre pays et pour nos entreprises une année difficile.
2004 s'annonce sous de meilleurs auspices, avec le retour d'une croissance raisonnable.
Cette année sera donc pour nous l'occasion :
de réaffirmer la place de la Défense comme acteur économique majeur
de rechercher une plus grande efficacité dans la gestion de nos ressources financières et humaines
de concrétiser notre ambition économique nationale et européenne
1. La Défense est un acteur économique majeur et s'inscrit de ce fait dans la réflexion stratégique
1.1 L'impact économique et social du budget de la défense
Le budget de la défense constitue un apport important à la vie économique et à l'emploi.
La défense est en effet le premier investisseur national : ce sont près de 15 milliards d'euros qui sont injectés dans le tissu industriel.
Par le biais des exportations, elle engendre des apports financiers de l'ordre de 4 milliards d'euros en devises.
Dans le contexte de ralentissement économique marqué que nous connaissons actuellement, l'effort du gouvernement en faveur de la défense joue un rôle indéniable de relance de l'économie.
Le budget de la défense, c'est un acteur incontournable de toute politique d'emploi.
170 000 emplois directs dépendent de nos commandes, et la Défense recrute 37 000 jeunes par an.
L' implantation territoriale des unités militaires, tout comme des entreprises liées à la défense, constituent un apport considérable dans le dynamisme économique local.
Les dépenses de Défense ont un fort contenu technologique : ce sont autant de sources d'innovations qui contribuent à la croissance sur le court et le long terme.
La Défense joue de ce fait un rôle déterminant dans la recherche et le développement ; chacun sait que ce volet a des retombées qui vont bien au-delà de la sphère militaire.
1.2 Un Etat stratège qui pense le long terme
Garder ce rôle, voire le développer, suppose de soutenir une politique de recherche et de technologie ambitieuse.
Dans ce cadre, le recours aux démonstrateurs technologiques se poursuivra en 2004.
Nous avons présenté à tous nos partenaires européens notre projet d'avion de combat sans pilote (UCAV). La Suède est le premier pays à concrétiser son engagement à nos côtés : elle a signé le mois dernier une lettre d'intention relative à sa participation au programme.
L'espace reste un défi majeur, vous savez l'importance que j'y attache : il nous faut encourager une nouvelle ambition dans ce domaine.
C'est pourquoi j'ai mis sur pied une Commission de réflexion stratégique sur l'espace, confiée à une haute personnalité.
Elle doit préciser les enjeux stratégiques de l'espace pour la Défense, et identifier les priorités nationales et européennes.
J'attends de cette étude qu'elle nous permette de définir nos actions de long terme en la matière.
1.3 Ces enjeux stratégiques doivent conduire à une meilleure prise en compte des risques de dépendance
Une réflexion collective sur les problématiques de dépendance est nécessaire.
Il ne s'agit pas de faire preuve de protectionnisme ; il ne s'agit pas non plus de faire preuve de naïveté.
Nous devons en effet garantir nos approvisionnements, notre capacité à exporter, et plus généralement notre capacité de développer des programmes ambitieux.
Ces dépendances prennent des formes multiples : je pense par exemple aux contrats d'approvisionnement et de sous-traitance, sur lesquels vous devez être vigilants.
J'ai souhaité que le Conseil économique de Défense mène une mission d'analyse sur les enjeux de dépendance liés à la détention du capital des entreprises de défense.
Cela passera par une analyse fine et détaillée des entreprises stratégiques, y compris les plus petites, et par l'identification des menaces éventuelles et de leur prévention.
Le capital industriel et humain, qui fait la richesse du secteur de la Défense, doit bénéficier d'une gestion réfléchie et modernisée.
2. Vers une plus grande efficacité de la gestion des ressources financières et humaines de la défense
2.1 La gestion financière
J'entend que le ministère de la défense, qui est déjà à la pointe de la modernisation de l'Etat, joue un rôle d'exemple dans la réforme voulue par le Premier ministre.
Notre stratégie ministérielle de réforme va s'appliquer à mettre en oeuvre trois principes :
clarifier les responsabilités. La généralisation du contrôle de gestion nous aidera dans ce sens.
mutualiser les moyens
recentrer l'action du ministère sur ses missions propres
Dès 2003, des démarches de progrès ont été lancées, elles vont se développer.
Vous le savez, nous avons depuis hier un nouveau code des marchés publics, qui comprend un décret spécifique à la Défense.
Grâce au travail conduit en étroite relation avec les industriels et leurs organisations professionnelles, ce décret instaure, entre le ministère et les entreprises, une forme innovante de relation contractuelle et de modalités de paiement.
C'est une nouvelle preuve que notre ministère est à la pointe de la modernisation.
Valoriser les ressources humaines de la Défense est une exigence incontournable.
Elle doit témoigner de la reconnaissance que nous devons aux personnels.
Elle est une condition de notre efficacité.
2.2 Le personnel
Les échanges directs que j'ai eu avec chaque organisation syndicale, les réunions du conseil supérieur du personnel civil et celles des instances paritaires nous ont permis de mieux cerner, ensemble, les préoccupations du personnel.
Le budget 2004 traduit la prise en compte des priorités retenues, qu'il s'agisse de mesures catégorielles ou de recrutement.
L'année 2004 sera aussi marquée par la mise en uvre des propositions du rapport " Bachelet-Champey ".
Il ne faut pas s'arrêter en chemin !
Je souhaite que le secrétaire général pour l'administration prenne l'initiative, avant la fin de ce mois, d'établir avec les organisations syndicales un plan de travail pour l'année 2004.
En particulier, je tiens à ce que les organisations syndicales soient étroitement associées à la mise en oeuvre de la stratégie ministérielle de réforme.
Le personnel civil est au coeur de sa réussite.
3. Notre ambition pour la Défense dans le domaine économique est nationale, mais aussi européenne
3.1 La promotion d'une industrie nationale performante et compétitive
Notre approche de l'économie de défense se doit d'être moderne.
L'économie de Défense repose sur des mécanismes de marché et intègre donc les règles de la concurrence et les exigences de la compétitivité.
Dans cette perspective, nous avons lancé les restructurations des industries sous la responsabilité du ministère de la défense, à savoir DCN et GIAT Industries.
La transformation de DCN en société de plein exercice a été effectuée en juin 2003.
Elle est aujourd'hui en ordre de marche.
Les premiers résultats, financiers et opérationnels, sont encourageants.
La mobilisation doit se poursuivre : nous y veillerons.
GIAT est un sujet de préoccupation, mais c'est aussi une ambition.
La négociation progresse : la direction et les organisations syndicales négocient des aménagements, dans la perspective de la signature rapide d'un accord.
L'Etat, pour sa part, tient ses engagements, avec de premiers résultats particulièrement encourageants.
Il faut savoir terminer une négociation, il y va de l'intérêt même des personnels.
3.2 L'intégration du marché européen reste notre priorité
Notre ambition, c'est la construction d'une industrie européenne forte, performante et compétitive.
La France a un rôle essentiel à jouer dans cette construction.
Il faut encourager le développement d'un marché unique et concurrentiel.
Afin d'harmoniser les besoins entre partenaires européens, il faudra décloisonner les processus nationaux d'acquisition.
L'établissement de l'Agence européenne de développement des capacités de défense constitue une avancée majeure.
L'année 2003 a été riche en termes de grands programmes industriels européens.
L'Espagne a annoncé sa décision d'acquérir 24 hélicoptères de combat Tigre.
Nous avons assisté au lancement effectif du programme A400M.
Les négociations vont se poursuivre en 2004 en vue de consolider l'industrie européenne de défense dans le domaine naval.
L'année qui commence verra aussi le lancement du programme de frégates européennes multi-missions.
Conclusion
La Défense irrigue aujourd'hui un large secteur économique, riche d'industries performantes, riche de perspectives prometteuses, riche de personnels motivés et compétents.
De la PME au groupe d'envergure mondiale, toutes ces industries participent au rayonnement de la France sur la scène européenne et internationale.
La France doit y conserver sa place, voire la développer : il convient que nous mobilisions nos énergies dans ce sens.
Nos forces armées ont besoin de vos efforts dans les domaines de la production et de la maintenance de leurs équipements.
Il faut cependant garder à l'esprit que les dynamiques de transformation ne s'opèrent pas sans les hommes.
Tout comme le secteur industriel, le Ministère réfléchit aujourd'hui à une meilleure valorisation de ses ressources humaines et financières.
En 2004, cela devra être l'objet de nos efforts communs.
Permettez-moi, pour conclure, de renouveler mes voeux à chacune et à chacun d'entre vous.
Je vous remercie.
(Source http://www.défense.gouv.fr, le 16 janvier 2004)