Texte intégral
(Entretien de Claudie Haigneré avec TV5, le 7 octobre 2004)
Q - Claudie Haigneré, merci d'être avec nous. La classe politique française est très divisée sur la question de la Turquie. Tout comme Jacques Chirac, vous êtes favorable à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne. Est-ce que malgré tout, vous comprenez ces dissensions qui secouent aujourd'hui la classe politique ?
R - Oui, c'est une question importante. Je voudrais simplement rappeler les faits : la Commission a rendu hier un rapport disant que la Turquie avait fait suffisamment de progrès, et satisfaisait aux critères qui étaient exigés pour envisager l'ouverture de négociations. Et vous savez que la décision politique d'ouverture éventuelle des négociations sera prise par les chefs d'État et de gouvernement le 17 décembre au cours d'un Conseil européen.
Je voudrais souligner que dans le rapport de la Commission, il y a des éléments intéressants, qui n'ont jamais été mentionnés dans un rapport d'évaluation de ce type. D'une part, le processus engagé est un processus ouvert, dont l'issue n'est pas garantie a priori. C'est un long chemin qui reste à parcourir pour l'Union européenne et la Turquie, pour aller vers l'adhésion. Les mécanismes de négociation sont très précis, les contrôles le sont aussi : pour la première fois, il sera possible de suspendre le processus si on voit que, par rapport aux critères, aux valeurs, aux objectifs qui sont ceux de l'Union européenne, la Turquie n'est pas prête, ou dérive, par rapport aux engagements qu'elle a pris.
Q - Mais ce qu'il faut rappeler, c'est que, si demain la Turquie rejoint l'Union européenne, elle est le plus grand pays de par son nombre d'habitants, donc aura un poids prépondérant au sein de cette Union européenne. Plus important même que l'Allemagne ou d'autres ?
R - La Turquie est un pays très particulier, et effectivement, il faut réfléchir sur sa taille, son poids démographique, son économie, son agriculture, et prendre tout cela en compte. Le chemin de l'adhésion sera très long ; l'adhésion de la Turquie n'aura pas lieu demain, ni après-demain. C'est un processus qui prendra dix à quinze années. Mais la Turquie, manifestement, de par sa taille, de par sa position géostratégique est un pays au poids important ; aujourd'hui, elle est en train de se tourner avec volontarisme vers des valeurs européennes, la démocratie, l'État de droit, le respect des libertés, le respect des minorités Ce sont des éléments essentiels, qu'il faut prendre en compte.
Q - En France, on évoque aujourd'hui un référendum sur l'adhésion de la Turquie. Le Premier ministre turc, M. Erdogan, estime que ce référendum est injuste. Vous lui répondez quoi ? Parce qu'il faut bien dire qu'il n'y a aucun autre candidat de l'Union européenne dont l'adhésion a été soumise à référendum.
R - Je rappelle qu'il y a eu un référendum en 1972 pour l'entrée de la Grande-Bretagne dans l'Union européenne ; par conséquent, cela s'est déjà produit.
Par ailleurs, l'Union européenne est une construction qui se fait avec volontarisme. C'est une Union de citoyens, on ne peut pas construire l'Union européenne contre les citoyens. Il faut leur expliquer davantage les enjeux, il faut les consulter. C'est pour cela que le président de la République va proposer de réviser notre Constitution pour que les citoyens français puissent se prononcer par voie de référendum sur l'adhésion de la Turquie au moment où elle aura lieu. C'est tout le propre de l'Union européenne que de se construire pour et avec ses citoyens.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 octobre 2004)
(Entretien de Claudie Haigneré avec BFM, le 7 octobre 2004)
Q - Est-ce que cela a un sens qu'à l'Assemblée nationale - où 80 députés veulent une vraie discussion, où 50 députés de l'opposition (45 UMP et 5 UDF) veulent dire non à la Turquie - il y ait un débat sans vote, comme nous le propose le président de l'Assemblée nationale Jean-Louis Debré ?
R - Il y a effectivement une demande de débat sur les enjeux européens à l'Assemblée nationale, et comme je l'ai dit hier lors de la séance de questions au gouvernement, nous allons parler de ces enjeux. Nous avons l'habitude, Michel Barnier et moi-même, d'être présents devant les commissions et les délégations pour l'Union européenne du Parlement pour expliquer, avant et après chaque Conseil européen, les tenants et les aboutissants des décisions et des positions politiques françaises. Qu'il y ait un débat, cela est essentiel. Cette demande est l'expression d'une préoccupation, d'un questionnement sur des enjeux qui sont importants.
Q - A quoi sert un débat si l'on ne peut pas voter ? Jean-Louis Debré a exclu hier l'idée qu'il y ait un vote. Il faut que les députés puissent s'expliquer, non ?
R - Je reprends la proposition du président de la République, qui consiste à inscrire, dans la révision de la Constitution, la possibilité de recourir au référendum pour se prononcer, à terme, sur le processus d'adhésion de la Turquie à l'Union. Nous n'avons pas actuellement à demander à ce que les citoyens s'expriment sur ce qui n'est que l'ouverture éventuelle de négociations. Nous allons avoir un référendum sur le traité constitutionnel, sur un texte qui existe. Il ne nous serait pas venu à l'idée d'organiser un référendum au tout début du processus.
Q - On a toujours cette impression que quand le mouvement européen est lancé, enclenché, on arrive trop tard, que c'est trop tard. C'est ce qu'on dit les partisans du "non" au référendum sur la Constitution. Ils nous disent "on arrive toujours trop tard en bout de processus". Pourquoi ne pas faire voter en début de processus ?
R - La question du rapprochement entre la Turquie et l'Union européenne est quelque chose dont on discute depuis plus de 40 ans. Il y a eu toute une série d'associations, de rapprochements, d'engagements. Maintenant, il faut prendre la décision d'ouverture ou non des négociations d'adhésion avec la Turquie. Le rapport de la Commission a été rendu public hier, et nous allons l'analyser. Il fait notamment le point sur les progrès effectués pour que nous puissions envisager d'ouvrir les négociations. Il est assorti de nombreuses conditionnalités : il propose de renforcer la méthodologie des négociations, il mentionne la possibilité de suspendre éventuellement les discussions si la Turquie ne remplit pas ses obligations, et rappelle qu'on ne peut préjuger de l'issue des négociations, qui seront nécessairement longues. Tout le monde reconnaît que la Turquie est un pays qui a fait d'immenses progrès, que c'est un partenaire important, sur le plan géostratégique, pour la stabilité de notre continent, et qu'il se rapproche chaque jour davantage de nos valeurs européennes que sont la démocratie, le respect du droit, le respect des libertés.
Q - Est-ce que vous n'avez pas peur qu'avec ce débat qui est lancé maintenant, cela ait des conséquences ? On sait que majoritairement, en principe, l'opinion n'est, pour l'instant, pas très favorable à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne. N'avez-vous pas peur que cela pollue le débat sur la Constitution ?
R - C'est quelque chose que l'on peut craindre. Si on analyse les derniers sondages, on voit que 56 % des Français se prononcent contre l'adhésion aujourd'hui. Mais lorsqu'on les interroge sur le fait que la Turquie puisse, à terme, une fois des efforts politiques et économiques importants accomplis, rejoindre l'Union, 60 % des personnes interrogées répondent positivement. Comme vous l'avez dit, l'opinion publique n'est pas, pour l'instant, favorable à l'entrée de la Turquie ; mais elle n'est pas figée sur cette question.
Q - C'est normal, les gens ne peuvent pas se projeter dans dix ans.
R - Actuellement, personne n'est capable de se projeter dans dix ans, de savoir ce que sera la Turquie dans dix, quinze ans, ce que sera l'Union européenne dans quinze ans. C'est pour cela que ce n'est pas la question aujourd'hui, et qu'il faut la distinguer de la question du référendum sur la Constitution.
Q - Pourquoi est-ce le seul pays pour lequel on parle de cela quinze ans à l'avance ? La Roumanie et la Bulgarie ce sera en 2007.
R - La Turquie n'est pas tout à fait un pays comme les autres, comme ceux qui viennent de nous rejoindre. La Bulgarie et la Roumanie font partie de ce cinquième élargissement qui s'est fait au 1er mai. Il y a eu un petit retard dans la mise en place, mais c'est le même type d'élargissement. La Turquie est un autre pays, avec un poids économique et démocratique très différent.
Q - Ce débat, réclamé par de nombreux responsables au Parlement, François Bayrou, Hervé Morin, 80 députés, va prendre quelle forme ? Comment va se passer cette discussion demandée par les parlementaires ?
R - Cette organisation va se faire au sein du Parlement, et ce n'est pas à moi d'intervenir. Ce que nous allons faire, avec Michel Barnier, c'est aller expliquer devant les commissions et les délégations parlementaires les éléments du débat.
Q - Vous êtes prête à répondre à tous ceux qui vous poseront des questions. Les opposants veulent aussi parler.
R - Dans les commissions et les délégations à l'Union européenne, il y a des représentants de tous les partis. Chacun doit s'exprimer, nous avons l'habitude de le faire, il n'y a pas de raisons que cela ne soit pas fait à l'occasion de ce Conseil européen, au cours duquel une décision très importante sera prise. Je reviens sur l'opinion des Français pour vous rappeler, comme je l'ai déjà dit, qu'ils sont prêts, à terme, à envisager l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne, pour peu qu'on explique, qu'on prenne du temps, qu'on soit exigeants, vigilants. Ce qui nous paraît possible avec les recommandations que la Commission a faites. Maintenant, c'est une décision politique qui sera prise par les chefs d'État et de gouvernement en décembre.
Q - Les parlementaires, à l'Assemblée nationale, veulent absolument qu'un débat soit organisé avant le mois de décembre. Est-ce que vous vous y engagez aujourd'hui ?
R - Oui. Je m'engage, et je l'ai dit hier au cours du débat à l'Assemblée, à être présente, avec Michel Barnier, devant les commissions responsables et les délégations à l'Union européenne.
Q - Et globalement, la décision qui a été prise hier par la Commission vous convient ? C'est-à-dire un oui assorti de nombreuses conditionnalités, vous considérez que c'est juste comme décision ?
R - C'est une recommandation d'ouverture des négociations. Après une analyse lucide, transparente, la Commission a souligné que la Turquie a fait suffisamment de progrès pour que l'on considère que les critères qui permettent l'ouverture sont réunis. La décision d'ouverture sera à prendre en décembre, je ne me prononce pas aujourd'hui, c'est une décision qui sera prise à l'unanimité par les chefs d'État et de gouvernement. Ensuite, que l'on reste exigeant, que le chemin soit long, et que l'issue des négociations reste ouverte, ce sont des éléments importants dans la décision.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 octobre 2004)
Q - Claudie Haigneré, merci d'être avec nous. La classe politique française est très divisée sur la question de la Turquie. Tout comme Jacques Chirac, vous êtes favorable à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne. Est-ce que malgré tout, vous comprenez ces dissensions qui secouent aujourd'hui la classe politique ?
R - Oui, c'est une question importante. Je voudrais simplement rappeler les faits : la Commission a rendu hier un rapport disant que la Turquie avait fait suffisamment de progrès, et satisfaisait aux critères qui étaient exigés pour envisager l'ouverture de négociations. Et vous savez que la décision politique d'ouverture éventuelle des négociations sera prise par les chefs d'État et de gouvernement le 17 décembre au cours d'un Conseil européen.
Je voudrais souligner que dans le rapport de la Commission, il y a des éléments intéressants, qui n'ont jamais été mentionnés dans un rapport d'évaluation de ce type. D'une part, le processus engagé est un processus ouvert, dont l'issue n'est pas garantie a priori. C'est un long chemin qui reste à parcourir pour l'Union européenne et la Turquie, pour aller vers l'adhésion. Les mécanismes de négociation sont très précis, les contrôles le sont aussi : pour la première fois, il sera possible de suspendre le processus si on voit que, par rapport aux critères, aux valeurs, aux objectifs qui sont ceux de l'Union européenne, la Turquie n'est pas prête, ou dérive, par rapport aux engagements qu'elle a pris.
Q - Mais ce qu'il faut rappeler, c'est que, si demain la Turquie rejoint l'Union européenne, elle est le plus grand pays de par son nombre d'habitants, donc aura un poids prépondérant au sein de cette Union européenne. Plus important même que l'Allemagne ou d'autres ?
R - La Turquie est un pays très particulier, et effectivement, il faut réfléchir sur sa taille, son poids démographique, son économie, son agriculture, et prendre tout cela en compte. Le chemin de l'adhésion sera très long ; l'adhésion de la Turquie n'aura pas lieu demain, ni après-demain. C'est un processus qui prendra dix à quinze années. Mais la Turquie, manifestement, de par sa taille, de par sa position géostratégique est un pays au poids important ; aujourd'hui, elle est en train de se tourner avec volontarisme vers des valeurs européennes, la démocratie, l'État de droit, le respect des libertés, le respect des minorités Ce sont des éléments essentiels, qu'il faut prendre en compte.
Q - En France, on évoque aujourd'hui un référendum sur l'adhésion de la Turquie. Le Premier ministre turc, M. Erdogan, estime que ce référendum est injuste. Vous lui répondez quoi ? Parce qu'il faut bien dire qu'il n'y a aucun autre candidat de l'Union européenne dont l'adhésion a été soumise à référendum.
R - Je rappelle qu'il y a eu un référendum en 1972 pour l'entrée de la Grande-Bretagne dans l'Union européenne ; par conséquent, cela s'est déjà produit.
Par ailleurs, l'Union européenne est une construction qui se fait avec volontarisme. C'est une Union de citoyens, on ne peut pas construire l'Union européenne contre les citoyens. Il faut leur expliquer davantage les enjeux, il faut les consulter. C'est pour cela que le président de la République va proposer de réviser notre Constitution pour que les citoyens français puissent se prononcer par voie de référendum sur l'adhésion de la Turquie au moment où elle aura lieu. C'est tout le propre de l'Union européenne que de se construire pour et avec ses citoyens.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 octobre 2004)
(Entretien de Claudie Haigneré avec BFM, le 7 octobre 2004)
Q - Est-ce que cela a un sens qu'à l'Assemblée nationale - où 80 députés veulent une vraie discussion, où 50 députés de l'opposition (45 UMP et 5 UDF) veulent dire non à la Turquie - il y ait un débat sans vote, comme nous le propose le président de l'Assemblée nationale Jean-Louis Debré ?
R - Il y a effectivement une demande de débat sur les enjeux européens à l'Assemblée nationale, et comme je l'ai dit hier lors de la séance de questions au gouvernement, nous allons parler de ces enjeux. Nous avons l'habitude, Michel Barnier et moi-même, d'être présents devant les commissions et les délégations pour l'Union européenne du Parlement pour expliquer, avant et après chaque Conseil européen, les tenants et les aboutissants des décisions et des positions politiques françaises. Qu'il y ait un débat, cela est essentiel. Cette demande est l'expression d'une préoccupation, d'un questionnement sur des enjeux qui sont importants.
Q - A quoi sert un débat si l'on ne peut pas voter ? Jean-Louis Debré a exclu hier l'idée qu'il y ait un vote. Il faut que les députés puissent s'expliquer, non ?
R - Je reprends la proposition du président de la République, qui consiste à inscrire, dans la révision de la Constitution, la possibilité de recourir au référendum pour se prononcer, à terme, sur le processus d'adhésion de la Turquie à l'Union. Nous n'avons pas actuellement à demander à ce que les citoyens s'expriment sur ce qui n'est que l'ouverture éventuelle de négociations. Nous allons avoir un référendum sur le traité constitutionnel, sur un texte qui existe. Il ne nous serait pas venu à l'idée d'organiser un référendum au tout début du processus.
Q - On a toujours cette impression que quand le mouvement européen est lancé, enclenché, on arrive trop tard, que c'est trop tard. C'est ce qu'on dit les partisans du "non" au référendum sur la Constitution. Ils nous disent "on arrive toujours trop tard en bout de processus". Pourquoi ne pas faire voter en début de processus ?
R - La question du rapprochement entre la Turquie et l'Union européenne est quelque chose dont on discute depuis plus de 40 ans. Il y a eu toute une série d'associations, de rapprochements, d'engagements. Maintenant, il faut prendre la décision d'ouverture ou non des négociations d'adhésion avec la Turquie. Le rapport de la Commission a été rendu public hier, et nous allons l'analyser. Il fait notamment le point sur les progrès effectués pour que nous puissions envisager d'ouvrir les négociations. Il est assorti de nombreuses conditionnalités : il propose de renforcer la méthodologie des négociations, il mentionne la possibilité de suspendre éventuellement les discussions si la Turquie ne remplit pas ses obligations, et rappelle qu'on ne peut préjuger de l'issue des négociations, qui seront nécessairement longues. Tout le monde reconnaît que la Turquie est un pays qui a fait d'immenses progrès, que c'est un partenaire important, sur le plan géostratégique, pour la stabilité de notre continent, et qu'il se rapproche chaque jour davantage de nos valeurs européennes que sont la démocratie, le respect du droit, le respect des libertés.
Q - Est-ce que vous n'avez pas peur qu'avec ce débat qui est lancé maintenant, cela ait des conséquences ? On sait que majoritairement, en principe, l'opinion n'est, pour l'instant, pas très favorable à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne. N'avez-vous pas peur que cela pollue le débat sur la Constitution ?
R - C'est quelque chose que l'on peut craindre. Si on analyse les derniers sondages, on voit que 56 % des Français se prononcent contre l'adhésion aujourd'hui. Mais lorsqu'on les interroge sur le fait que la Turquie puisse, à terme, une fois des efforts politiques et économiques importants accomplis, rejoindre l'Union, 60 % des personnes interrogées répondent positivement. Comme vous l'avez dit, l'opinion publique n'est pas, pour l'instant, favorable à l'entrée de la Turquie ; mais elle n'est pas figée sur cette question.
Q - C'est normal, les gens ne peuvent pas se projeter dans dix ans.
R - Actuellement, personne n'est capable de se projeter dans dix ans, de savoir ce que sera la Turquie dans dix, quinze ans, ce que sera l'Union européenne dans quinze ans. C'est pour cela que ce n'est pas la question aujourd'hui, et qu'il faut la distinguer de la question du référendum sur la Constitution.
Q - Pourquoi est-ce le seul pays pour lequel on parle de cela quinze ans à l'avance ? La Roumanie et la Bulgarie ce sera en 2007.
R - La Turquie n'est pas tout à fait un pays comme les autres, comme ceux qui viennent de nous rejoindre. La Bulgarie et la Roumanie font partie de ce cinquième élargissement qui s'est fait au 1er mai. Il y a eu un petit retard dans la mise en place, mais c'est le même type d'élargissement. La Turquie est un autre pays, avec un poids économique et démocratique très différent.
Q - Ce débat, réclamé par de nombreux responsables au Parlement, François Bayrou, Hervé Morin, 80 députés, va prendre quelle forme ? Comment va se passer cette discussion demandée par les parlementaires ?
R - Cette organisation va se faire au sein du Parlement, et ce n'est pas à moi d'intervenir. Ce que nous allons faire, avec Michel Barnier, c'est aller expliquer devant les commissions et les délégations parlementaires les éléments du débat.
Q - Vous êtes prête à répondre à tous ceux qui vous poseront des questions. Les opposants veulent aussi parler.
R - Dans les commissions et les délégations à l'Union européenne, il y a des représentants de tous les partis. Chacun doit s'exprimer, nous avons l'habitude de le faire, il n'y a pas de raisons que cela ne soit pas fait à l'occasion de ce Conseil européen, au cours duquel une décision très importante sera prise. Je reviens sur l'opinion des Français pour vous rappeler, comme je l'ai déjà dit, qu'ils sont prêts, à terme, à envisager l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne, pour peu qu'on explique, qu'on prenne du temps, qu'on soit exigeants, vigilants. Ce qui nous paraît possible avec les recommandations que la Commission a faites. Maintenant, c'est une décision politique qui sera prise par les chefs d'État et de gouvernement en décembre.
Q - Les parlementaires, à l'Assemblée nationale, veulent absolument qu'un débat soit organisé avant le mois de décembre. Est-ce que vous vous y engagez aujourd'hui ?
R - Oui. Je m'engage, et je l'ai dit hier au cours du débat à l'Assemblée, à être présente, avec Michel Barnier, devant les commissions responsables et les délégations à l'Union européenne.
Q - Et globalement, la décision qui a été prise hier par la Commission vous convient ? C'est-à-dire un oui assorti de nombreuses conditionnalités, vous considérez que c'est juste comme décision ?
R - C'est une recommandation d'ouverture des négociations. Après une analyse lucide, transparente, la Commission a souligné que la Turquie a fait suffisamment de progrès pour que l'on considère que les critères qui permettent l'ouverture sont réunis. La décision d'ouverture sera à prendre en décembre, je ne me prononce pas aujourd'hui, c'est une décision qui sera prise à l'unanimité par les chefs d'État et de gouvernement. Ensuite, que l'on reste exigeant, que le chemin soit long, et que l'issue des négociations reste ouverte, ce sont des éléments importants dans la décision.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 octobre 2004)