Déclaration de Mme Michèlle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme, sur le bilan de la fréquentation touristique générée par la Coupe du Monde de football, Paris le 29 juillet 1998.

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A quelques jours des départs en vacances du mois d'août, j'ai tenu à faire un point avec vous sur le démarrage de cette saison 1998 et plus particulièrement sur les premières analyses des retombées touristiques de la Coupe du Monde.
Je voudrai juste signaler en préambule que mon propos ne vise pas à dresser le bilan touristique de la saison estivale avant même que ne se termine le mois de juillet. Les quelques premiers éléments de comparaison que je vais vous présenter concernent les 6 premiers mois de l'année, incluant bien évidemment la période de la Coupe du Monde.

Il est bien évident, que par souci de crédibilité, je ne souhaite pas me livrer aujourd'hui à une communication prématurée de chiffres dont la valeur scientifique ne serait pas assurée. J'aurai l'occasion, début septembre, de vous présenter une évaluation plus significative de la fréquentation touristique des mois de juin, juillet et août 1998.

Concernant les retombées de la Coupe du Monde de Football dans l'économie touristique de notre pays, j'ai pu observer à quel point les commentaires publiés ici et là ces dernières semaines pouvaient être contradictoires, voire pour certains d'entre eux extrêmement négatifs.

Je souhaiterai vous faire part des premières observations que mon ministère a recueillies en France comme à l'étranger.

Certes, il faut le reconnaître, nous avons constaté une légère baisse du nombre de touristes qui ont l'habitude de séjourner chez nous à cette époque. Celle-ci a cependant été compensée en partie par la venue des supporters qui ont assisté à la compétition et surtout, par un effet report des séjours sur la période d'après Coupe du Monde. Notre campagne " Bonjour la France accueille le Monde " n'y a pas été étrangère et je tiens tout de suite à souligner à quel point les acteurs du tourisme ont joué le jeu de la qualité et du professionnalisme. La Coupe du Monde de Football a été abordée par la grande famille du tourisme comme une chance et un défi. Je crois que nous pouvons affirmer aujourd'hui que nous avons su saisir cette chance et que le défi a été relevé avec succès.

On ne peut cependant limiter, l'appréciation des retombées positives d'une telle manifestation à la seule évaluation de la fréquentation touristique immédiate. Il faut prendre en compte l'importance des effets de cet événement sur l'image et la notoriété de notre pays. La France, j'en suis convaincue, sort grandie de la Coupe du Monde qui a fait l'unanimité quant à la qualité de son organisation et de l'accueil réservé aux sportifs, aux spectateurs et aux journalistes.

Les articles de presse élogieux à notre égard, les multiples reportages sur notre pays et notre population, vus par des milliards de téléspectateurs dans le monde entier ont largement contribué à mieux faire connaître la France et les Français.

La Coupe du Monde a été aussi pour nous l'occasion de mobiliser nos professionnels du tourisme en France et de les fédérer autour d'un programme d'actions de promotion menées dans plusieurs pays. Nous nous sommes livrés à une première estimation en contre-valeur publicitaire à titre d'exemple uniquement en presse écrite et à partir des marchés que nous suivons de nos représentations à l'étranger. On peut chiffrer celle-ci à près de 1 milliard de francs.

Il faudra ajouter à cette estimation celle des retombées médiatiques et promotionnelles des images sur nos régions qui accompagnaient la diffusion de chaque match. Il nous faudra probablement attendre entre un an et un an et demi avant de retirer les premiers fruits significatifs de cet effort de communication. Cependant nous ne devrons pas nous endormir sur ces lauriers. Il nous faudra bien au contraire conforter cette image positive à l'étranger, notamment au travers de Maison de la France, dont chacun connaît le rôle essentiel dans la promotion de notre pays en Europe et dans le monde.

Pour ce qui concerne la fréquentation touristique et les premières tendances de la saison, les données récentes de l'enquête hôtelière pour le mois de juin mettent en évidence un bilan plutôt positif de la Coupe du Monde dans l'hôtellerie homologuée.

Les résultats préliminaires sur les 13 régions qui ont terminé à ce jour leur observation économique, dont 8 ont accueilli l'événement, indiquent pour le mois de juin un taux d'occupation moyen sur l'ensemble de la France de 64,3 %, soit une progression de 2,6 points par rapport à juin 1997.

Je tiens à souligner le travail remarquable accompli par les Comités Régionaux de Tourisme des régions qui ont accueilli l'événement sportif. Ceux-ci ont en effet travaillé jusqu'au dernier jour de cette compétition pour offrir aux journalistes, aux spectateurs, comme aux touristes, la meilleure information et les meilleurs produits. Je n'oublierai pas le rôle déterminant qu'ils ont joué auprès des tours opérateurs étrangers qu'ils ont démarchés, invités et reçus, dès l'an dernier pour leur présenter sous son meilleur jour la France des régions. Je sais les efforts qu'ils ont accomplis, en particulier dans la professionnalisation de l'information et de la réservation de leur offre touristique.

Ainsi, Midi-Pyrénées, Provence Alpes Côte d'Azur et Rhône-Alpes ont vu leur fréquentation s'accroître de façon sensible, en particulier dans les départements des villes d'accueil. Les villes de Saint-Etienne, Toulouse, Lyon et Marseille ont vu leur taux d'occupation progresser de 6 à 10 points.

En région Ile-de-France, la situation est plus nuancée. Globalement le bilan est positif mais si la fréquentation a peu varié à Paris, le département de Seine Saint Denis a vu sa fréquentation étrangère doubler en termes de nuitées (165.000 au lieu de 86.000 en 1997). Par contre, la clientèle française d'affaires s'est moins déplacée.

Cette progression du taux d'occupation des hôtels classés est due essentiellement à la clientèle étrangère venue nombreuse qui a favorisé les sites de la Coupe du Monde. On note, selon la Fédération Nationale de l'Industrie Hôtelière, entre juin 1997 et juin 1998, une hausse des taux d'occupation dans l'hôtellerie, de + de 3 % pour les chaînes intégrées et de 6,2 % pour les hôtels indépendants.

En matière d'hébergement, la campagne sur les " Prix Bleus " et le travail mené par Mondirésa, la centrale de réservation hôtelière du CFO, ont atteint leur objectif. En effet, dans l'hôtellerie, les prix n'ont pas souffert de la forte augmentation que l'on pouvait craindre. Au contraire, on enregistre une bonne progression de son chiffre d'affaire, dans la majorité des agglomérations où se déroulaient les matches. L'augmentation du prix de vente des chambres a été en moyenne de 20 % pour l'ensemble des régions concernées. Cette augmentation inclut bien évidemment, je le rappelle, pour ce qui concerne Mondirésa, les coûts de commercialisation et de réservation.

Concernant les départs en vacances des français, on constate, comme d'ailleurs auprès de marchés proches tels que l'Angleterre, l'Espagne ou l'Italie, que nos concitoyens ont privilégié la Coupe du Monde en famille, sur leur lieu d'habitation, plutôt que sur leur lieu de vacances.

Des régions moins directement concernées par l'événement, comme par exemple l'Alsace, Poitou-Charentes ou l'Auvergne, ont profité pour capter une nouvelle clientèle moins attirée par la compétition. Parmi les autres, seules la région Languedoc-Roussillon et de façon moins nette, Midi-Pyrénées, affichent durant cette période une progression plus nette de la clientèle française.

Si les taux d'occupation dans l'hôtellerie sont équivalents ou même en progression par rapport au mois de juin 1997 dans les régions qui ont accueilli la Coupe du Monde, il est à noter sur l'ensemble du territoire, une légère baisse des touristes étrangers en provenance de certains pays tels que l'Angleterre, l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie ou encore le Japon.

Dans ces pays, la Coupe du Monde a, comme je l'ai dit précédemment, retenu partiellement les familles devant leur poste de télévision. Au Royaume-Uni, la baisse des départs en juin a été réelle et a affecté toutes les destinations quand, dans le même temps, l'Espagne notait chez ses loueurs d'appartements une réduction d'activité de 20 %. De la même manière, les italiens, fervents supporters de leur équipe et passionnés de football, ont choisi de rester chez eux, entraînant le report de leur départ à l'étranger, y compris sur les longs courriers.

Cette baisse, enregistrée dans certains pays limitrophes, qui a atteint pour quelques-uns près de 15 %, a été néanmoins compensée en partie par la venue d'une nouvelle catégorie de touristes à revenus plus élevés, qui ont a priori consommé plus fortement dans notre pays. Par exemple, en Allemagne, ce sont les voyageurs privilégiant l'avion et l'hôtellerie qui se sont déplacés. Globalement, la Coupe du monde a eu moins de conséquences négatives sur la clientèle des grands tours opérateurs que sur celle individuelle, qui a moins fréquenté la France, en particulier ces villes. En effet, la Coupe du Monde a généré pour la première fois en France une forte émission de touristes latino-américains.

Les effets positifs sur l'image de notre pays, engendrés par la Coupe du Monde ont entraîné une augmentation des réservations et des départs de dernière minute à destination de la France.

On note ainsi pour le mois d'août une augmentation de réservation de 10 % en provenance de l'Espagne; de 21 % pour les Pays-Bas ou de 15 % à 25 % sur août et septembre pour l'Angleterre.

Je l'ai déjà dit ces dernières semaines, l'année 1998 devrait être un très grand crû. Les ventes des professionnels étrangers à destination de la France ont connu un grand succès depuis le début de cette année. A titre d'exemple, nos bureaux de Maison de la France ont noté 25 % d'augmentation en Italie, 20 % en Irlande, 54 % en Autriche. A ce sujet, je peux déjà vous dire que les estimations établies par la Direction du Tourisme pour le premier semestre 1998 font état d'une progression de 9 % des recettes. Le solde du poste voyage de la balance des paiements devrait dépasser les 32 milliards de francs pour les 6 premiers mois de l'année, soit une augmentation de 5 % de ce solde par rapport à la même période de 1997.

Concernant le début de la saison estivale, si les indicateurs sont excellents, les régions situées au nord de la Loire, souffrent d'une météo particulièrement mauvaise.

La fréquentation française ne devrait pas s'en trouver trop modifiée. Il risque d'en être différent pour les touristes étrangers. Pour autant, des régions telles que la Bretagne et le Nord-Pas-de-Calais, ont développé des activités culturelles qui narguent le mauvais temps. Il est, je le pense, possible d'offrir en France un tourisme de quatre saisons et d'élargir ainsi la période d'activité touristique.

Comme je le disais en préambule, la Coupe du Monde était un enjeu pour notre pays. Nous avons su relever le défi et en faire un succès. Il nous faut maintenant tous ensemble transformer l'essai. C'est la mission essentielle que j'ai confiée à la Direction du Tourisme et en particulier à Maison de la France. C'est ce à quoi j'invite aujourd'hui l'ensemble des professionnels du tourisme français.
(source http://www.tourisme.gouv.fr, le 27 septembre 2001)