Texte intégral
RTL
Le 17 septembre 2004
Bonjour R. Donnedieu de Vabres.
Bonjour.
Q- RTL ainsi que d'autres radios diffusent depuis ce matin des messages conçus par Reporters sans Frontières, et dits par des personnalités, Catherine Deneuve ce matin. Ces messages témoignent bien sûr de notre solidarité avec C. Chesnot et G. Malbrunot, détenus en otages depuis quatre semaines maintenant en Irak. Ces messages seront diffusés jusqu'à leur libération. Cette libération, elle peut tarder R. Donnedieu de Vabres ?
R- Vous savez, le gouvernement reste totalement mobilisé, nous sommes prudents, nous faisons preuve de la plus grande discrétion pour que surtout, rien ne perturbe ce que nous espérons, c'est-à-dire la libération prochaine de nos otages. Et tous les témoignages d'unité nationale qui se sont exprimés, et ces paroles fortes d'artistes, de solidarité vis-à-vis des familles des otages et vis-à-vis des otages eux-mêmes, eh bien je crois que c'est nécessaire, c'est magnifique. Ca donne si vous voulez le sentiment de cette unité nécessaire, et de cette réponse au terrorisme.
Q- "Des informations vous permettent de dire qu'ils sont vivants et en bonne santé" : c'est encore ce que dit M. Alliot-Marie ce matin.
R- Écoutez nous n'avons aucune information contraire. Mais vous comprenez que là-dessus il faut être d'une prudence extrême, compte tenu du chaos qui règne en Irak. Donc, prudence, mais également espérance.
Q- Votre ministère organise ce week-end "les Journées du patrimoine", et vous avez choisi, vous, R. Donnedieu de Vabres, d'exposer dans votre ministère rue de Valois - les visiteurs pourront le voir - le document originel de l'Edit de Nantes, signé par Henri IV, en 1598.
R- Voilà. C'est un très beau symbole. C'est-à-dire que c'est pour moi le symbole de la liberté religieuse, de la liberté de conscience, de la liberté d'expression. Et donc ce document sera sorti pour la première fois des coffres des Archives Nationales. Et je souhaite que nombreux soient les Français qui, venant visiter le ministère de la Culture, ou venant exprès contempler ce document, puissent s'exprimer. Donc, à côté, il y aura des registres où chacun pourra s'exprimer sur la liberté de conscience, la tolérance, et je publierai ensuite l'ensemble de ces textes parce que nous sommes dans un monde de haine, de violence, d'affrontements, et de forme renouvelée de racisme et d'antisémitisme, de xénophobie. Et donc le lieu et l'action du ministère de la Culture, c'est d'être un ciment, c'est d'être un lien de la même manière que j'ai souhaité que toutes les formes et toutes les époques du patrimoine soient présentées et réunies. Je suis pour la réconciliation entre les époques, entre les générations, parce que là aussi je crois que ça fait partie des nécessités du monde actuel.
Q- Vous êtes Ministre de la Culture et aussi Ministre de la Communication. Alors j'aimerais vous soumettre une phrase de S. Dassault, nouveau patron de presse de la Socpresse. Il a eu cette phrase devant la société des rédacteurs du Figaro, qui est maintenant sa propriété. "J'estime, a dit S. Dassault, qu'il y a quelques informations qui nécessitent beaucoup de précautions. Il en est ainsi des articles qui parlent des contrats en cours de négociation. Il y a des informations qui font plus de mal que de bien. Le risque étant de mettre en péril des intérêts commerciaux ou industriels de notre pays". Que pensez-vous de cette conception de l'information, R. Donnedieu de Vabres ?
R- Vous savez, je pense qu'à l'intérieur d'une rédaction, il y a toujours des discussions, et il y a des textes législatifs d'ailleurs qui garantissent la liberté des journalistes. Et donc lorsqu'il y a, comme vous le savez, un changement de propriété dans un organe de presse, la loi française permet aux journalistes de dire si, au fond, ils sont ou ils ne sont pas en concordance de vue avec le propriétaire d'un titre. Et je crois que c'est une bonne chose, parce que ça respecte la liberté de l'information. Deuxièmement, il ne m'appartient pas évidemment d'interférer dans les rapports entre un propriétaire de journal et une rédaction, mais je crois que partout la liberté d'expression doit exister, la liberté de conscience comme je le disais tout à l'heure, et c'est évident que vous êtes parfois confrontés à des décisions redoutables, c'est-à-dire munis d'une information. Est-ce qu'on la donne, est-ce qu'on ne la donne pas ? Où est-ce qu'on en est sur le plan de la vérification ? Donc les choses ne sont pas simples et pas caricaturales. En tout cas, je pense une seule chose nécessaire : c'est la liberté pour les journalistes. C'est essentiel tout simplement au fonctionnement de la démocratie.
Q- Et quand un industriel important devient un important patron de la presse dans une société, c'est un problème ? C'est inéluctable ? C'est souhaitable ?
R- Vous savez, il faut voir les choses aussi de la manière suivante : il est important qu'il y ait des moyens financiers pour le fonctionnement de la presse, de l'audiovisuel public ou de la presse écrite, et j'en sais quelque chose. C'est-à-dire que dans la partie qui m'incombe, comme ministre de la Communication, je fais en sorte que la presse quotidienne, enfin la presse d'information, bénéficie de soutiens puissants, pour sa modernisation, pour sa distribution, pour sa diffusion. Donc, pour que cette liberté existe, il faut qu'il y ait des moyens, ça c'est aussi la vérité de le dire.
Q- Une autre phrase fait aussi couler beaucoup d'encre et suscite pas mal de réactions. Elle est signée P. Lelay, PDG de TF1. "A la base - je cite P. Lelay - le métier de TF1 c'est d'aider Coca Cola par exemple à vendre son produit. Pour qu'un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible". Qu'en pensez-vous R. Donnedieu de Vabres ?
R- Ecoutez ! je serais journaliste à TF1, ou concepteur des programmes de TF1, j'aurais évidemment conçu cette phrase comme remettant en cause le contenu même de mon travail. Parce que, lorsque je regarde l'information, lorsque je regarde un certain nombre de programmes, je considère qu'ils ont une valeur en eux-mêmes, et qu'ils ne sont pas des éléments interstitiels avant la pub.
Q- Ah c'est bien dit ! "Eléments interstitiels avant la pub". D'accord. Donc vous n'auriez pas signé la phrase de P. Lelay. Je souligne pour ceux qui n'auraient pas compris... L. Fabius a dit non à la Constitution Européenne. Qu'en pensez-vous ?
R- Je suis vraiment partagé. D'un certain point de vue...
Q- Vous avez envie de dire non vous aussi ?
R- Ah ! non pas du tout !
Q- Ah bon.
R- Non non, c'est pas ça. Il y a un débat, vive la liberté d'expression comme je l'ai dit tout à l'heure, il a le droit de s'exprimer. Et je ressens un malaise. Parce que j'espère qu'il n'y a pas trop d'arrière-pensées politiciennes ! J'espère que c'est vraiment les considérations sur l'Europe qui motivent sa décision. En tout cas, point par point, moi je souhaite qu'aucune question ne soit éludée. Les Français ont la parole, le président de la République veut la leur donner, le débat européen est essentiel. Et je pense que dans le monde actuel, où nous avons peur de perdre notre identité, nos racines, nos repères - la mondialisation, les délocalisations et parfois l'Europe fait peur - eh bien, vive ce débat. Moi je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour convaincre les Français que l'élargissement est une chance, c'est une réunification, c'est la victoire de la paix contre les périodes de barbarie.
Q- Et la Constitution est bonne, ou elle n'est pas bonne ?
R- Mais bien sûr qu'elle est bonne ! Parce qu'elle redéfinit clairement les pouvoirs. Elle est un progrès. Simplement, le débat européen, c'est aussi un débat sur la force française. Et donc, nous ne disparaissons pas au sein de l'Europe. C'est pour nous une chance. Il faut l'expliquer aux Français. Et moi je souhaite que nous soyons nombreux à l'expliquer et je souhaite, évidemment, que Monsieur Fabius soit minoritaire !
R. Donnedieu de Vabres, dont le cerveau est disponible pour la politique, était l'invité d'RTL ce matin. Bonne journée.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 20 septembre 2004)
RMC
Le 17 septembre 2004
Q- Vous savez que nous avons une nouvelle tradition - vous ne le savez peut-être pas - : je vous demande de poser une question aux Français, parce que cela va toujours dans le même sens. Moi, je voudrais renverser un peu. Est-ce que vous avez une question à poser aux Français, une façon de les interpeller ?
R- J'ai plein de questions à leur poser. J'ai envie, bien sûr, de leur poser une question sur l'Europe et j'ai envie de leur demander si pour eux, affirmer l'objectif européen, est-ce que cela légitime que l'on soit d'abord fier d'être français ?
Q- Nous avons la question de R. Donnedieu de Vabres, vous aurez la réponse avant 9 heures. Les otages français : M. Alliot-Marie déclare dans Le Parisien - je cite - : "Nous avons des renseignements qui permettent de penser que nos otages sont vivants, en bonne santé et en sécurité".
R- Sur ces questions, je suis d'une extrême prudence, parce que je ne veux, bien sûr, d'aucune manière, par mes propos qui sont toujours écoutés, comme ceux des autres membres du Gouvernement, comme ceux de beaucoup de gens, écoutés là-bas en Irak, faire peser le moindre risque. Le Gouvernement est mobilisé. Pour le moment, nous sommes évidemment très prudents, parce que la situation en Irak est un vrai chaos en lui-même, ce qui présente évidemment des risques supplémentaires. Mais effectivement, nous espérons et nous continuons d'espérer que la libération sera prochaine.
Q- Vous espérez ? Vous n'avez pas de nouveaux renseignements ?
R- Non. En tout cas, moi, je n'en ai pas. Nous sommes très prudents et vous pensez bien que de toute façon...
Q- Vous ne les donneriez pas.
R- On ne les donnerait pas, parce qu'il ne faudrait pas donner de la moindre manière, le sentiment que l'on puisse avoir des informations qui menace la sécurité de nos otages.
Q- Il y a eu un nouveau communiqué sur les otages, annonçant un verdict, ils seraient passés en jugement par les ravisseurs. Comment vérifier ? C'est difficile... ?
R- Tous les services de renseignement français sont totalement mobilisés, comme le Gouvernement.
Q- Parce qu'on a besoin de savoir... Est-ce que l'on n'est pas allé trop vite en besogne, est-ce que l'on n'a pas un peu trop vite annoncé une libération imminente ?
R- Tant que les choses ne sont pas faites, là, vous avez raison, il faut toujours être très prudent. Donc, c'est vrai qu'il y a eu un moment où on a espéré que c'était vraiment très proche, et ils ne sont toujours pas libérés. Il faut donc être très prudent. Mais on est vraiment mobilisé, c'est-à-dire que nous faisons tous les efforts possibles pour parvenir à cette libération.
Q- La redevance télé : voilà un sujet grand public ! Vous avez tout changé ; d'abord, elle va s'appeler "taxe audiovisuelle", elle va être adossée à la taxe d'habitation, donc, nous la paierons avec la taxe d'habitation. Le Gouvernement espère récolter 50 à 60 millions d'euros supplémentaires. J'ai envie de vous dire que c'est une taxe injuste, elle n'est pas proportionnelle aux revenus, pourquoi ?
R- Parce que l'impôt sur le revenu, lui, est proportionnel aux revenus, ça, c'est normal. Ensuite, pour le reste, vous savez très bien qu'il y a un certain nombre d'impôts et de taxes qui ne sont pas proportionnels aux revenus. On ne peut pas le faire indéfiniment, ce serait difficilement gérable. Ce qu'il faut que les Français sachent, c'est qu'elle n'augmente pas, c'est important. Deuxièmement, elle est à un poste, une taxe, il n'y aura pas pluralité de taxes. Je crois que c'est juste. Et deuxièmement, il faut reconnaître que l'audiovisuel public a des besoins de financement et que c'est une manière de le faire et que l'on est beaucoup moins cher que dans la plupart des pays européens.
Q- Parlons justement de l'audiovisuel public : pourquoi y a-t-il encore de la pub sur France 2 et sur France 3 ? Avant que vous ne répondiez à cette question, j'ai une autre question sur la redevance : de nombreux auditeurs nous disent qu'ils paient la redevance mais que ce n'est pas pour enrichir les sociétés de production, par exemple, de monsieur Delarue.
R- Vous posez la question du contenu des programmes, par qui et comment ils sont réalisés.
Q- Eh oui, pourquoi est-ce je paye une redevance pour enrechir la société de production Delarue ?
R- Une grande société de télévision peut organiser ses programmes et la fabrication des programmes comme elle l'entend. Et donc, avoir recours à des sociétés et des gens qui ont beaucoup de talent. Ce qui n'importe, en tout cas, c'est que les tournages aient le plus possible lieu en France...
Q- Ce n'est pas le cas en ce moment...
R- C'est un objectif, c'est très important et j'essaie d'en persuader tout le monde. C'est la raison pour laquelle je suis très heureux que l'ancien patron du CNC, D. Kessler, ait pris une responsabilité au sein de France Télévisions pour veiller au grain sur toutes ces questions, parce qu'elles sont évidemment très importantes et je pense qu'il faut que l'on fasse en sorte que beaucoup de réalisations et de productions soient tournées en France.
Q- Au lieu d'être tournées dans les pays de l'Est, par exemple en Roumanie... Pourquoi de la pub sur France 2 et France 3 ?
R- Vous allez me dire que l'Etat est inconséquent, c'est-à-dire qu'il devrait financer l'intégralité de l'audiovisuel public. Eh bien ce n'est pas le cas, parce que je crois légitime qu'il y ait cette partition, entre d'un côté la publicité et de l'autre côté...
Q- Cela n'existe pas en radio par exemple ?
R- Dans la plupart des pays européens, c'est un système mixte. Cela veut dire que si j'exige, au fond, de France Télévisions la programmation à 20h30 d'une pièce de théâtre ou d'un concert qui n'attire pas un public immense, qui serait peut-être très bien sur le plan de la diffusion culturelle et du pluralisme des uvres culturelles, évidemment, France Télévisons me dira immédiatement "là, vous me posez un problème de financement parce que la publicité est une recette importante pour moi". Il faut donc qu'il y ait un équilibre à cause des sources sur le contenu des programmes. Donc, je pense que l'équilibre est satisfaisant.
Q- Pas de privatisation de France 2, c'est fini cela ?
R- Non, pas de privatisation de France 2.
Q- Cela a couru un peu dans Paris...
R- Vous savez, les choses courent... Il y a des moments pour tout. Au moment d'une campagne présidentielle, d'une campagne législative, on définit un projet et ensuite, pendant cinq ans, on le mène à bien le projet. Dans le projet que nous avons défini autour du président de la République, de J. Chirac et ensuite autour de l'élection législative, il n'y avait la privatisation de France 2. Donc, elle ne survient pas en cours de mandat, par surprise.
Q- Un débat agite régulièrement nos auditeurs qui nous interrogent régulièrement sur les docu-fictions. Les auditeurs sont parfois sensibles aux arguments de ceux qui disent qu'il ne faut pas aller trop loin. Un exemple : les familles de victimes qui s'inquiètent, qui ont fait interpellé E. Mougeotte à TF1 sur la tuerie de Nanterre. Il y a eu la diffusion de la cellule d'Hamburg, par exemple, sur France 2. Quelle est votre position là-dessus ?
R- Je ne veux pas interférer dans les contenus de programmes, celui qui a la charge de cela, c'est le CSA. Il faut le rappeler à nos concitoyens pour qu'ils comprennent. Je ne suis pas en train d'ouvrir un parapluie, ce n'est pas ma manière de fonctionner en règle générale dans l'exercice de mes fonctions. Mais le contenu de l'aspect déontologique des programmes, c'est le CSA qui doit le faire. Chacun d'entre vous, tous les journalistes, les responsables des programmes dans les chaînes de radio ou de télévision, comme dans la presse écrite d'ailleurs, mesurent la responsabilité et l'appréciation de l'opportunité qu'il y a parfois à dire ou à ne pas dire, à lancer un sujet, ou à ne pas lancer un sujet. Et cela peut évidemment poser des problèmes de déontologie. Il y a parfois contradiction d'intérêt. C'est-à-dire que parfois, une famille peut avoir intérêt à ce que les projecteurs soient donnés sur une affaire judiciaire pour que les délais soient accélérés, pour qu'un dossier soit revu, parce qu'il peut y avoir le sentiment d'un dysfonctionnement. Et parfois, c'est l'inverse, c'est-à-dire qu'une famille veut vivre à l'abri avec son deuil, avec son chagrin et qu'on ne vienne pas en plus... Donc, c'est très compliqué, et là, c'est l'appréciation des patrons, et cela c'est bien.
Q- Le danger, c'est de confondre la fiction et la réalité...
R- C'est vrai que cela suppose beaucoup de précision. Encore une fois, c'est un genre qui est très important, parce que cela fait comprendre le monde dans lequel nous vivons. Mais cela doit être fait avec beaucoup de finesse et de déontologie
Q- J'ai encore plein de questions à vous poser, notamment sur le projet de chaîne internationale française : est-ce qu'il est abandonné ou pas ce projet ?
R- Pas du tout, ce projet n'est pas abandonné, c'est une nécessité absolue.
Q- Donc, il n'est pas abandonné ?
R- Non.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 20 septembre 2004)
Le 17 septembre 2004
Bonjour R. Donnedieu de Vabres.
Bonjour.
Q- RTL ainsi que d'autres radios diffusent depuis ce matin des messages conçus par Reporters sans Frontières, et dits par des personnalités, Catherine Deneuve ce matin. Ces messages témoignent bien sûr de notre solidarité avec C. Chesnot et G. Malbrunot, détenus en otages depuis quatre semaines maintenant en Irak. Ces messages seront diffusés jusqu'à leur libération. Cette libération, elle peut tarder R. Donnedieu de Vabres ?
R- Vous savez, le gouvernement reste totalement mobilisé, nous sommes prudents, nous faisons preuve de la plus grande discrétion pour que surtout, rien ne perturbe ce que nous espérons, c'est-à-dire la libération prochaine de nos otages. Et tous les témoignages d'unité nationale qui se sont exprimés, et ces paroles fortes d'artistes, de solidarité vis-à-vis des familles des otages et vis-à-vis des otages eux-mêmes, eh bien je crois que c'est nécessaire, c'est magnifique. Ca donne si vous voulez le sentiment de cette unité nécessaire, et de cette réponse au terrorisme.
Q- "Des informations vous permettent de dire qu'ils sont vivants et en bonne santé" : c'est encore ce que dit M. Alliot-Marie ce matin.
R- Écoutez nous n'avons aucune information contraire. Mais vous comprenez que là-dessus il faut être d'une prudence extrême, compte tenu du chaos qui règne en Irak. Donc, prudence, mais également espérance.
Q- Votre ministère organise ce week-end "les Journées du patrimoine", et vous avez choisi, vous, R. Donnedieu de Vabres, d'exposer dans votre ministère rue de Valois - les visiteurs pourront le voir - le document originel de l'Edit de Nantes, signé par Henri IV, en 1598.
R- Voilà. C'est un très beau symbole. C'est-à-dire que c'est pour moi le symbole de la liberté religieuse, de la liberté de conscience, de la liberté d'expression. Et donc ce document sera sorti pour la première fois des coffres des Archives Nationales. Et je souhaite que nombreux soient les Français qui, venant visiter le ministère de la Culture, ou venant exprès contempler ce document, puissent s'exprimer. Donc, à côté, il y aura des registres où chacun pourra s'exprimer sur la liberté de conscience, la tolérance, et je publierai ensuite l'ensemble de ces textes parce que nous sommes dans un monde de haine, de violence, d'affrontements, et de forme renouvelée de racisme et d'antisémitisme, de xénophobie. Et donc le lieu et l'action du ministère de la Culture, c'est d'être un ciment, c'est d'être un lien de la même manière que j'ai souhaité que toutes les formes et toutes les époques du patrimoine soient présentées et réunies. Je suis pour la réconciliation entre les époques, entre les générations, parce que là aussi je crois que ça fait partie des nécessités du monde actuel.
Q- Vous êtes Ministre de la Culture et aussi Ministre de la Communication. Alors j'aimerais vous soumettre une phrase de S. Dassault, nouveau patron de presse de la Socpresse. Il a eu cette phrase devant la société des rédacteurs du Figaro, qui est maintenant sa propriété. "J'estime, a dit S. Dassault, qu'il y a quelques informations qui nécessitent beaucoup de précautions. Il en est ainsi des articles qui parlent des contrats en cours de négociation. Il y a des informations qui font plus de mal que de bien. Le risque étant de mettre en péril des intérêts commerciaux ou industriels de notre pays". Que pensez-vous de cette conception de l'information, R. Donnedieu de Vabres ?
R- Vous savez, je pense qu'à l'intérieur d'une rédaction, il y a toujours des discussions, et il y a des textes législatifs d'ailleurs qui garantissent la liberté des journalistes. Et donc lorsqu'il y a, comme vous le savez, un changement de propriété dans un organe de presse, la loi française permet aux journalistes de dire si, au fond, ils sont ou ils ne sont pas en concordance de vue avec le propriétaire d'un titre. Et je crois que c'est une bonne chose, parce que ça respecte la liberté de l'information. Deuxièmement, il ne m'appartient pas évidemment d'interférer dans les rapports entre un propriétaire de journal et une rédaction, mais je crois que partout la liberté d'expression doit exister, la liberté de conscience comme je le disais tout à l'heure, et c'est évident que vous êtes parfois confrontés à des décisions redoutables, c'est-à-dire munis d'une information. Est-ce qu'on la donne, est-ce qu'on ne la donne pas ? Où est-ce qu'on en est sur le plan de la vérification ? Donc les choses ne sont pas simples et pas caricaturales. En tout cas, je pense une seule chose nécessaire : c'est la liberté pour les journalistes. C'est essentiel tout simplement au fonctionnement de la démocratie.
Q- Et quand un industriel important devient un important patron de la presse dans une société, c'est un problème ? C'est inéluctable ? C'est souhaitable ?
R- Vous savez, il faut voir les choses aussi de la manière suivante : il est important qu'il y ait des moyens financiers pour le fonctionnement de la presse, de l'audiovisuel public ou de la presse écrite, et j'en sais quelque chose. C'est-à-dire que dans la partie qui m'incombe, comme ministre de la Communication, je fais en sorte que la presse quotidienne, enfin la presse d'information, bénéficie de soutiens puissants, pour sa modernisation, pour sa distribution, pour sa diffusion. Donc, pour que cette liberté existe, il faut qu'il y ait des moyens, ça c'est aussi la vérité de le dire.
Q- Une autre phrase fait aussi couler beaucoup d'encre et suscite pas mal de réactions. Elle est signée P. Lelay, PDG de TF1. "A la base - je cite P. Lelay - le métier de TF1 c'est d'aider Coca Cola par exemple à vendre son produit. Pour qu'un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible". Qu'en pensez-vous R. Donnedieu de Vabres ?
R- Ecoutez ! je serais journaliste à TF1, ou concepteur des programmes de TF1, j'aurais évidemment conçu cette phrase comme remettant en cause le contenu même de mon travail. Parce que, lorsque je regarde l'information, lorsque je regarde un certain nombre de programmes, je considère qu'ils ont une valeur en eux-mêmes, et qu'ils ne sont pas des éléments interstitiels avant la pub.
Q- Ah c'est bien dit ! "Eléments interstitiels avant la pub". D'accord. Donc vous n'auriez pas signé la phrase de P. Lelay. Je souligne pour ceux qui n'auraient pas compris... L. Fabius a dit non à la Constitution Européenne. Qu'en pensez-vous ?
R- Je suis vraiment partagé. D'un certain point de vue...
Q- Vous avez envie de dire non vous aussi ?
R- Ah ! non pas du tout !
Q- Ah bon.
R- Non non, c'est pas ça. Il y a un débat, vive la liberté d'expression comme je l'ai dit tout à l'heure, il a le droit de s'exprimer. Et je ressens un malaise. Parce que j'espère qu'il n'y a pas trop d'arrière-pensées politiciennes ! J'espère que c'est vraiment les considérations sur l'Europe qui motivent sa décision. En tout cas, point par point, moi je souhaite qu'aucune question ne soit éludée. Les Français ont la parole, le président de la République veut la leur donner, le débat européen est essentiel. Et je pense que dans le monde actuel, où nous avons peur de perdre notre identité, nos racines, nos repères - la mondialisation, les délocalisations et parfois l'Europe fait peur - eh bien, vive ce débat. Moi je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour convaincre les Français que l'élargissement est une chance, c'est une réunification, c'est la victoire de la paix contre les périodes de barbarie.
Q- Et la Constitution est bonne, ou elle n'est pas bonne ?
R- Mais bien sûr qu'elle est bonne ! Parce qu'elle redéfinit clairement les pouvoirs. Elle est un progrès. Simplement, le débat européen, c'est aussi un débat sur la force française. Et donc, nous ne disparaissons pas au sein de l'Europe. C'est pour nous une chance. Il faut l'expliquer aux Français. Et moi je souhaite que nous soyons nombreux à l'expliquer et je souhaite, évidemment, que Monsieur Fabius soit minoritaire !
R. Donnedieu de Vabres, dont le cerveau est disponible pour la politique, était l'invité d'RTL ce matin. Bonne journée.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 20 septembre 2004)
RMC
Le 17 septembre 2004
Q- Vous savez que nous avons une nouvelle tradition - vous ne le savez peut-être pas - : je vous demande de poser une question aux Français, parce que cela va toujours dans le même sens. Moi, je voudrais renverser un peu. Est-ce que vous avez une question à poser aux Français, une façon de les interpeller ?
R- J'ai plein de questions à leur poser. J'ai envie, bien sûr, de leur poser une question sur l'Europe et j'ai envie de leur demander si pour eux, affirmer l'objectif européen, est-ce que cela légitime que l'on soit d'abord fier d'être français ?
Q- Nous avons la question de R. Donnedieu de Vabres, vous aurez la réponse avant 9 heures. Les otages français : M. Alliot-Marie déclare dans Le Parisien - je cite - : "Nous avons des renseignements qui permettent de penser que nos otages sont vivants, en bonne santé et en sécurité".
R- Sur ces questions, je suis d'une extrême prudence, parce que je ne veux, bien sûr, d'aucune manière, par mes propos qui sont toujours écoutés, comme ceux des autres membres du Gouvernement, comme ceux de beaucoup de gens, écoutés là-bas en Irak, faire peser le moindre risque. Le Gouvernement est mobilisé. Pour le moment, nous sommes évidemment très prudents, parce que la situation en Irak est un vrai chaos en lui-même, ce qui présente évidemment des risques supplémentaires. Mais effectivement, nous espérons et nous continuons d'espérer que la libération sera prochaine.
Q- Vous espérez ? Vous n'avez pas de nouveaux renseignements ?
R- Non. En tout cas, moi, je n'en ai pas. Nous sommes très prudents et vous pensez bien que de toute façon...
Q- Vous ne les donneriez pas.
R- On ne les donnerait pas, parce qu'il ne faudrait pas donner de la moindre manière, le sentiment que l'on puisse avoir des informations qui menace la sécurité de nos otages.
Q- Il y a eu un nouveau communiqué sur les otages, annonçant un verdict, ils seraient passés en jugement par les ravisseurs. Comment vérifier ? C'est difficile... ?
R- Tous les services de renseignement français sont totalement mobilisés, comme le Gouvernement.
Q- Parce qu'on a besoin de savoir... Est-ce que l'on n'est pas allé trop vite en besogne, est-ce que l'on n'a pas un peu trop vite annoncé une libération imminente ?
R- Tant que les choses ne sont pas faites, là, vous avez raison, il faut toujours être très prudent. Donc, c'est vrai qu'il y a eu un moment où on a espéré que c'était vraiment très proche, et ils ne sont toujours pas libérés. Il faut donc être très prudent. Mais on est vraiment mobilisé, c'est-à-dire que nous faisons tous les efforts possibles pour parvenir à cette libération.
Q- La redevance télé : voilà un sujet grand public ! Vous avez tout changé ; d'abord, elle va s'appeler "taxe audiovisuelle", elle va être adossée à la taxe d'habitation, donc, nous la paierons avec la taxe d'habitation. Le Gouvernement espère récolter 50 à 60 millions d'euros supplémentaires. J'ai envie de vous dire que c'est une taxe injuste, elle n'est pas proportionnelle aux revenus, pourquoi ?
R- Parce que l'impôt sur le revenu, lui, est proportionnel aux revenus, ça, c'est normal. Ensuite, pour le reste, vous savez très bien qu'il y a un certain nombre d'impôts et de taxes qui ne sont pas proportionnels aux revenus. On ne peut pas le faire indéfiniment, ce serait difficilement gérable. Ce qu'il faut que les Français sachent, c'est qu'elle n'augmente pas, c'est important. Deuxièmement, elle est à un poste, une taxe, il n'y aura pas pluralité de taxes. Je crois que c'est juste. Et deuxièmement, il faut reconnaître que l'audiovisuel public a des besoins de financement et que c'est une manière de le faire et que l'on est beaucoup moins cher que dans la plupart des pays européens.
Q- Parlons justement de l'audiovisuel public : pourquoi y a-t-il encore de la pub sur France 2 et sur France 3 ? Avant que vous ne répondiez à cette question, j'ai une autre question sur la redevance : de nombreux auditeurs nous disent qu'ils paient la redevance mais que ce n'est pas pour enrichir les sociétés de production, par exemple, de monsieur Delarue.
R- Vous posez la question du contenu des programmes, par qui et comment ils sont réalisés.
Q- Eh oui, pourquoi est-ce je paye une redevance pour enrechir la société de production Delarue ?
R- Une grande société de télévision peut organiser ses programmes et la fabrication des programmes comme elle l'entend. Et donc, avoir recours à des sociétés et des gens qui ont beaucoup de talent. Ce qui n'importe, en tout cas, c'est que les tournages aient le plus possible lieu en France...
Q- Ce n'est pas le cas en ce moment...
R- C'est un objectif, c'est très important et j'essaie d'en persuader tout le monde. C'est la raison pour laquelle je suis très heureux que l'ancien patron du CNC, D. Kessler, ait pris une responsabilité au sein de France Télévisions pour veiller au grain sur toutes ces questions, parce qu'elles sont évidemment très importantes et je pense qu'il faut que l'on fasse en sorte que beaucoup de réalisations et de productions soient tournées en France.
Q- Au lieu d'être tournées dans les pays de l'Est, par exemple en Roumanie... Pourquoi de la pub sur France 2 et France 3 ?
R- Vous allez me dire que l'Etat est inconséquent, c'est-à-dire qu'il devrait financer l'intégralité de l'audiovisuel public. Eh bien ce n'est pas le cas, parce que je crois légitime qu'il y ait cette partition, entre d'un côté la publicité et de l'autre côté...
Q- Cela n'existe pas en radio par exemple ?
R- Dans la plupart des pays européens, c'est un système mixte. Cela veut dire que si j'exige, au fond, de France Télévisions la programmation à 20h30 d'une pièce de théâtre ou d'un concert qui n'attire pas un public immense, qui serait peut-être très bien sur le plan de la diffusion culturelle et du pluralisme des uvres culturelles, évidemment, France Télévisons me dira immédiatement "là, vous me posez un problème de financement parce que la publicité est une recette importante pour moi". Il faut donc qu'il y ait un équilibre à cause des sources sur le contenu des programmes. Donc, je pense que l'équilibre est satisfaisant.
Q- Pas de privatisation de France 2, c'est fini cela ?
R- Non, pas de privatisation de France 2.
Q- Cela a couru un peu dans Paris...
R- Vous savez, les choses courent... Il y a des moments pour tout. Au moment d'une campagne présidentielle, d'une campagne législative, on définit un projet et ensuite, pendant cinq ans, on le mène à bien le projet. Dans le projet que nous avons défini autour du président de la République, de J. Chirac et ensuite autour de l'élection législative, il n'y avait la privatisation de France 2. Donc, elle ne survient pas en cours de mandat, par surprise.
Q- Un débat agite régulièrement nos auditeurs qui nous interrogent régulièrement sur les docu-fictions. Les auditeurs sont parfois sensibles aux arguments de ceux qui disent qu'il ne faut pas aller trop loin. Un exemple : les familles de victimes qui s'inquiètent, qui ont fait interpellé E. Mougeotte à TF1 sur la tuerie de Nanterre. Il y a eu la diffusion de la cellule d'Hamburg, par exemple, sur France 2. Quelle est votre position là-dessus ?
R- Je ne veux pas interférer dans les contenus de programmes, celui qui a la charge de cela, c'est le CSA. Il faut le rappeler à nos concitoyens pour qu'ils comprennent. Je ne suis pas en train d'ouvrir un parapluie, ce n'est pas ma manière de fonctionner en règle générale dans l'exercice de mes fonctions. Mais le contenu de l'aspect déontologique des programmes, c'est le CSA qui doit le faire. Chacun d'entre vous, tous les journalistes, les responsables des programmes dans les chaînes de radio ou de télévision, comme dans la presse écrite d'ailleurs, mesurent la responsabilité et l'appréciation de l'opportunité qu'il y a parfois à dire ou à ne pas dire, à lancer un sujet, ou à ne pas lancer un sujet. Et cela peut évidemment poser des problèmes de déontologie. Il y a parfois contradiction d'intérêt. C'est-à-dire que parfois, une famille peut avoir intérêt à ce que les projecteurs soient donnés sur une affaire judiciaire pour que les délais soient accélérés, pour qu'un dossier soit revu, parce qu'il peut y avoir le sentiment d'un dysfonctionnement. Et parfois, c'est l'inverse, c'est-à-dire qu'une famille veut vivre à l'abri avec son deuil, avec son chagrin et qu'on ne vienne pas en plus... Donc, c'est très compliqué, et là, c'est l'appréciation des patrons, et cela c'est bien.
Q- Le danger, c'est de confondre la fiction et la réalité...
R- C'est vrai que cela suppose beaucoup de précision. Encore une fois, c'est un genre qui est très important, parce que cela fait comprendre le monde dans lequel nous vivons. Mais cela doit être fait avec beaucoup de finesse et de déontologie
Q- J'ai encore plein de questions à vous poser, notamment sur le projet de chaîne internationale française : est-ce qu'il est abandonné ou pas ce projet ?
R- Pas du tout, ce projet n'est pas abandonné, c'est une nécessité absolue.
Q- Donc, il n'est pas abandonné ?
R- Non.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 20 septembre 2004)