Interview de M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement, à La Chaîne info le 24 septembre 2004, sur le débat sur le traité constitutionnel et l'éventualité de l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne, les élections sénatoriales et sur l'ouverture de la session parlementaire et le vote du budget pour 2005.

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Texte intégral

Q- La rentrée parlementaire est dans une dizaine de jour. Auparavant, il y a les élections sénatoriales. Mais d'abord, une question sur la Turquie : hier, le commissaire à l'élargissement a reçu le Premier ministre turc et il a quasiment donné son feu vert à l'ouverture de négociations avec la Turquie, sous réserve d'adoption de la loi sur la non-criminalisation de l'adultère. Est-ce que cette question turque va polluer le débat sur la Constitution ? D'autre part, est-ce que le Gouvernement va accéder à la demande de F. Bayrou, d'organiser un débat avec vote sur l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne ?
R- Sur cette question deux choses : premièrement, il ne faut pas confondre le débat sur le traité constitutionnel avec l'adhésion éventuelle de la Turquie. Pour ce qui concerne la Turquie, vous dites que le commissaire européen a quasiment donné son feu vert ; il n'a pas donné son feu vert, il a émis un avis. La Commission présentera un rapport le 6 octobre et c'est en décembre que les chefs d'Etat et de Gouvernement, à l'unanimité, décideront de leur position à adopter quant à l'ouverture éventuelle de négociations pour l'entrée de la Turquie. Si, pour une raison ou pour une autre, cette décision relative à l'ouverture de négociations, à l'entrée éventuelle de la Turquie, est favorable, à ce moment-là, ces négociations, chacun le sait, dureront de dix à quinze ans. Donc, aujourd'hui, le problème de l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne est une perspective à long terme. Ce n'est pas un sujet qui doit interférer, en tout état de cause, dans le débat beaucoup plus important aujourd'hui sur l'adoption du traité constitutionnel qui parait, naturellement, dans ce cadre-là, infiniment plus important que le sujet que vous évoquez.
Q- Mais quand les parlementaires français demandent un débat sur cette question, avec un vote, qu'est-ce que vous allez leur répondre ?
R- La question se posera une fois que la réunion des chefs d'Etat et de Gouvernement se sera prononcée sur l'ouverture ou non de négociations. A mon avis, et je ne m'exprime qu'en mon nom, la question ne se pose pas aujourd'hui. Elle pourra se poser...
Q- Elle va se poser dans huit jours...
R- Non ! Elle se posera une fois que les chefs d'Etat et de Gouvernement, en décembre, se seront réunis et auront adopté une position. Ce n'est pas aujourd'hui que la question se pose. Il faut essayer de sérier les questions et les problèmes.
Q- On les série, mais en général, les chefs d'Etat et de Gouvernement suivent l'avis de la Commission.
R- On verra.
Q- Dimanche, vous avez des élections sénatoriales au menu. Ce ne sera pas le troisième tour des régionales et des européennes, mais l'UMP va cependant perdre la majorité absolue au Sénat ; ce n'est pas une catastrophe ?
R- L'UMP a deux voix de majorité absolue au Sénat. Donc, le plus grand risque qu'elle perde, c'est si elle perd deux sièges, de perdre la majorité absolue. Il est probable, effectivement, qu'il y aura des modifications pour ce qui concerne le groupe UMP. Je pense, en ce qui me concerne, que ces modifications seront à la marge et l'on verra, lorsque ces résultats seront connus, que la composition du Sénat restera assez semblable à ce qu'elle est aujourd'hui et que pour ce qui concerne la majorité, tout cela se résumera grosso modo - je ne veux pas être trop optimiste - à l'épaisseur d'un trait de plume.
Q- Et un trait de plume à quelle épaisseur ?
R- D'un bon stylo.
Q- Et un stylo pèse combien de voix ?
R- Je ne veux pas faire de fourchette, mais je crois que les prévisions donnaient un nombre important de siège...
Q- Douze à quinze sièges ?
R- Oui, je pense qu'elles sont un peu optimistes pour l'opposition.
Q- Vous avez un candidat favori pour la présidence du Sénat ? Pour vous, C. Poncelet doit-il être reconduit ?
R- Ce n'est pas mon problème. J'ai beaucoup de respect et de considération pour l'action qu'a conduite le président Poncelet depuis qu'il est président du Sénat. Mais l'élection du président du Sénat appartient aux sénateurs. Ce n'est pas un membre du Gouvernement d'indiquer quel est le candidat de son choix.
Q- Vous ne vous en mêlerez pas ?
R- Et je ne m'en mêlerai naturellement pas.
Q- Après les sénatoriales, c'est l'ouverture de la session parlementaire, avec le grand menu : le budget. Un budget que le ministre qualifie "d'équilibré", mais qui est critiqué à gauche et à droite aussi, il faut le dire : pas assez dynamique pour les uns et trop favorable aux riches pour les autres. Vous aurez fort à faire dans cette affaire, parce que la majorité est très divisée sur ce budget. Les uns trouvent qu'il n'y a pas assez d'incitations fiscales pour faire rentrer ceux qui sont partis à l'étranger, pour ceux qui gagnent beaucoup d'argent. Et la gauche dit qu'on met du beurre sur les tartines des riches en quelque sorte. Va-t-on modifier, par exemple, la première tranche du barème d'impôt sur la fortune ?
R- J'aurais été très inquiet si le PS n'avait pas critiqué ce budget ! S'il ne l'avait pas critiqué, c'est que cela aurait été un mauvais budget. Il le critique, donc cela me rassure. Ce budget, c'est quoi ? Quelle est philosophie qui a sous-tendu à son élaboration, quelle a été l'orientation qui a été fixée par le président de la République et le Premier ministre ? La croissance est revenue, on est aujourd'hui à 2,5 %, chacun le sait. On est l'un des pays moteur de la croissance dans l'Union européenne. La philosophie qui sous-tend l'élaboration du budget, c'est tout faire pour accélérer la croissance. Accélérer la croissance, pourquoi ? Pour créer des emplois naturellement, et pour conforter la cohésion sociale. A partir de là, tous les dispositifs qui figurent dans ce budget sont orientés dans cet objectif, cet objectif qui est l'objectif essentiel fixé par le chef d'Etat et fixé par le Premier ministre. A partir de là, il y aura naturellement discussion à la marge, avec la commission des finances et les députés, c'est la règle du jeu. Mais l'économie globale de ce budget, qui est tournée naturellement sur la réduction des déficits, c'est la création d'emplois. Aujourd'hui, fin de l'année 2004, année 2005, on est sûr que l'on va créer des emplois, on est sûr que l'on va créer plus de 150 voire 200.000 emplois sur l'année 2005. C'est ça, l'objectif. Et il n'y a que cela qui compte.
Q- Toujours à l'ordre du jour du Parlement, se pose la question d'une loi sur l'instauration d'un service minimum. Et deuxième question, aura-t-on, le temps d'examiner la proposition de loi sur la fin de vie ?
R- Il faut bien savoir que la session commence le 1er octobre et qu'elle se termine le 30 juin. En ce qui concerne le service minimum, G. de Robien poursuit une concertation largement engagée. Elle avance, mais elle n'est pas clause. Il faut savoir donner le temps à la concertation. C'est la méthode souhaitée et voulue par le Premier ministre. Je crois qu'il a raison, j'en suis même convaincu. Donc les choses avancent de ce côté-là. En ce qui concerne la fin de vie, naturellement, il y aura un débat à l'Assemblée, non pas un débat abstrait. Vous avez qu'il y a une proposition de loi qui a été déposée par déposée par J. Leonetti, qui est consensuelle et qui sera examinée, naturellement, au cours de la session...
Q- C'est-à-dire l'année prochaine ?
R- Probablement.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 27 septembre 2004)