Texte intégral
Monsieur le Maire, Seul le prononcé fait foi
Mesdames et messieurs,
Me rendre parmi vous, à Blois, aux " rendez-vous de l'histoire ", ce n'est pas seulement célébrer, par un geste officiel, une manifestation remarquable Il ne s'agit pas non plus, uniquement, de saluer l'engagement des enseignants et chercheurs de notre pays, qui transmettent avec ferveur les savoirs de l'Histoire.
Non ; venir ici, c'est d'abord pour moi un acte de foi.
Je crois en la vitalité, la sagesse et la modernité de l'histoire ; je crois dans ses vertus éducatives. J'ai l'intime conviction que nos enfants ne peuvent s'épanouir, grandir et vivre ensemble sans racines communes.
J'entends parfois dire de l'histoire qu'elle est une discipline lointaine, et, disons-le, accessoire, car tournée vers les " vestiges " du passé.
La passion que j'ai pour elle me parle un autre langage ; un langage que le succès de cette manifestation souligne : l'histoire est présente, elle est vivante ! Elle est notre matrice. A ces " rendez-vous de l'histoire ", c'est bien en citoyens du XXI e siècle que nous avons rendez-vous avec nous-mêmes.
Dans notre univers contemporain, complexe et mouvant, se développe une " soif des origines " à laquelle l'historien répond, en retissant les fils rompus. L'histoire nous resitue dans un pays, un milieu, une filiation. Elle éclaire notre culture, nos origines. En nous réconciliant avec nos racines, elle nous offre une identité, et bien souvent, une dignité.
Qu'on ne voit là aucun passéisme !
De plus en plus d'entreprises, par exemple, commandent aux chercheurs une étude de leur propre histoire. Elles ne le font pas seulement par attachement patrimonial. Elles cherchent à y discerner la logique de leur développement. Elles y lisent leurs erreurs et leurs succès. A la lumière de ces travaux, elles font le tri entre l'essentiel et le conjoncturel, entre continuités utiles et héritages obsolètes.
La recherche historique se présente, de ce point de vue, comme essentiellement dynamique. Elle nous tend le miroir d'hier pour mieux nous connaître aujourd'hui.
Je ne verserai pas dans l'excès qui consiste à y voir la clé de tout savoir. L'histoire ne se répète pas mécaniquement. Sa connaissance peut nous inspirer ; elle ne nous permet pas de prophétiser. L'homme innove, improvise et parfois se fait surprendre. Du moins l'histoire lui permet-elle de ne pas avancer en aveugle, dans un monde certes inconnu, mais pas si dissemblable de celui d'hier.
C'est pourquoi je mise sur l'histoire, autant que sur l'imagination, pour préparer la France aux défis du XXIe siècle.
On nous dit, par exemple, qu'un choc des civilisations se prépare. Certains découvrent avec une angoisse soudaine ce scénario qui, à mon sens, n'est fort heureusement pas écrit d'avance. L'historien, lui, se rappelle croisades, grandes invasions, colonisations et décolonisations - pour ne parler que des phases les plus saillantes
Un choc des civilisations ? Mais n'est-ce pas là, sous d'autres formes, la matière même de notre passé, y compris de notre passé pacifique, démographique, commercial ou culturel ? L'histoire ne nous fournit pas de politique clé en main face aux scénarios les plus sombres. Du moins nous arme-t-elle pour y réfléchir et pour les dissuader.
A mon sens, l'Histoire est moins une science de l'action, qu'une philosophie pour l'action.
Nous vivons dans un monde plus rapide. Le flux de l'information grossit continuellement et impose son rythme haché. La tentation est grande de se contenter d'analyses superficielles, de raccourcis, de réflexes commodes. C'est l'histoire qui nous en délivre.
Le recul historique, c'est l'atout de notre modernité.
Il y a quelques mois, le secrétaire d'Etat américain Donald Rumsfeld évoquait dans une formule fameuse la " vieille Europe ". Il ne se cachait pas d'une intention sarcastique. Prenons-le au mot : oui, nous sommes la vieille Europe, tissée de culture et pétrie d'histoire. C'est notre force et notre fierté. C'est notre expérience et notre conscience.
Dans l'univers chahuté qui est le nôtre, un danger, mesdames et messieurs, persiste. Il n'est pas né d'aujourd'hui même si son visage est changeant : c'est celui de la barbarie.
A travers le monde se produisent encore des conflits frontaliers, des guerres civiles, parfois des génocides. L'histoire nous a, pour un temps, immunisés contre de tels soubresauts, et nous qualifions les massacres qui se produisent " d'anachroniques ". Prenons le mot au sérieux : ces massacres sont le fait de peuples souvent coupés de leur histoire.
Ici où là, des pouvoirs brutaux n'ont pas seulement martyrisé les populations. Ils ont tracé droit au travers des bibliothèques, des temples, des palais. Ils ont rompu des filiations culturelles millénaires. Ils ont jeté les peuples ainsi déracinés dans de nouveaux égarements ethniques ou religieux - perpétuant l'horreur première. Ces blessures sont lentes à cicatriser. Cette barbarie ressurgira partout où nous ferons fi de l'histoire.
Mais une autre forme de " barbarie " existe. Elle n'est - fort heureusement - pas sanguinaire, mais elle est insidieuse et, je le crois, porteuse de périls : c'est celle de notre propre matérialisme.
Une chose est de brutaliser l'histoire, une autre est de la croire dépassée.
Parce que nous sommes en paix, nous nous plaçons au-dessus de ses leçons - en gestionnaires froids, pressés et parfois cyniques, de notre sort. Il y a dans nos sociétés occidentales une sorte d'indifférence spirituelle, une forme d'assèchement culturel, auxquels nous devons prendre garde. Par delà les mouvements saccadés de notre époque sachons conserver le sentiment du temps long. Respectons la mémoire des siècles.
On dit parfois que les peuples heureux n'ont pas d'histoire. Je crois plutôt que les peuples sans histoire sont des peuples malheureux.
Mesdames et messieurs,
Grandes oubliées de notre histoire, les femmes, qui sont l'objet de ces 7è rendez-vous, doivent y reprendre leur place.
A l'évidence, elles ont bien longtemps fait l'objet d'un traitement injuste. Nous savons pourtant l'intensité de leur rôle. Il ne se limite pas à quelques figures imposantes, que sais-je ? la Grande Catherine, ou la reine Victoria - cas isolés qui servent en fait de paravent. Il s'étend à des personnalités remarquables, dont beaucoup restent à découvrir. Il relève parfois de populations entières, que leur féminité distingue : de larges études ont déjà brossé le portrait de l'ouvrière. D'autres restent à faire, celui de la femme résistante, de la femme journaliste, de la femme enseignante...
Longtemps, l'Education nationale a donné de ces femmes une image biaisée. Par conformisme, par facilité, elle leur réservait une sorte de niche, au sein d'une histoire faite par d'autres, c'est à dire par les hommes. La " grande femme " était l'exception : Madame de Sévigné, seule femme de lettres, Vigée-Lebrun, seule femme peintre.
Parfois celle-ci gagnait leur reconnaissance en se faisant plus masculine que les hommes. Quelle féminité l'imagerie populaire accordait-elle à une Jeanne d'Arc en armure ? A une Marie Curie sous sa blouse noire ? Demeurée féminine, elle n'était, dans la mouvance du grand homme, qu'une ombre délicate et un peu secondaire : c'est Madame du Deffand dans la suite de Diderot, Madame du Châtelet dans celle de Voltaire. Parfois elle était épouse, comme Madame Berthelot, inséparable de son mari jusqu'aux caveaux du Panthéon. Parfois, elle était égérie, maîtresse ou favorite. Mais qu'elle sorte de ces rôles stéréotypés pour s'approcher du pouvoir, et on la qualifiait alors d'intrigante.
Bref, en se conformant à l'emprise de l'homme sur la société, l'instruction plaçait de fait les femmes hors histoire.
Depuis quelques années, l'Education nationale a, sur ces sujets, engagé sa métamorphose, même si elle n'a pas encore totalement achevé sa mutation.
L'enjeu est considérable car l'école fixe les représentations de toute la société.
Chaque jour dans nos établissements scolaires, les enfants, les adolescents font à l'école l'apprentissage délicat de la mixité. L'école de la République est une. Ne posant aucune différence entre garçons et filles, elle invite à une cohabitation harmonieuse et enrichissante.
Cet objectif suppose de rompre avec les clichés qui nourrissent encore trop souvent les comportements à l'endroit des femmes. Il ne fait aucun doute que le respect plein et entier de la femme passe notamment par une reconnaissance de sa place dans notre passé national.
Il ne s'agit pas, bien entendu, de féminiser l'histoire. Il s'agit de lui rendre, en y rétablissant la part des femmes, son intégrité.
Sans doute ces Rendez-vous de Blois contribueront-ils à cette nécessaire évolution. La qualité de leur programme autorise cet espoir. Leur cadre même y invite. En 1617, Louis XIII fit, en effet, enfermer ici Marie de Médicis. L'activité incessante de sa mère portait ombrage au roi. La mise à l'écart des femmes dans l'histoire n'a pas de meilleure illustration. Pour autant, l'affaire ne fut pas close, puisque Marie de Médicis se libéra d'elle-même. Pour bien d'autres reléguées de l'histoire, illustres ou modestes, il est temps, je le crois, de sortir aussi de l'ombre !
Mesdames et messieurs,
Sans doute l'aurez-vous compris : pour moi, les sciences humaines, et tout particulièrement l'histoire, constituent un enjeu de société. A l'aube d'un nouveau siècle, ces disciplines éclairent le chemin des questions fondamentales qui font l'honneur de la condition humaine
Notre devoir est d'instruire et de souder la communauté nationale. L'instruire, c'est lui rappeler comment elle s'est constituée. La souder, c'est expliquer aux jeunes qu'ils en seront demain, collectivement, les acteurs. L'appartenance nationale, c'est la conscience d'une destinée partagée. On a un peu moqué l'école de la Troisième République, qui parlait sans distinction de " nos ancêtres les Gaulois "... La formule prête, en effet, à sourire, mais elle pointait du doigt une vérité essentielle : l'histoire est notre ciment.
Elle nous éclaire, nous interpelle, nous oblige, nous rassemble. A cet égard, l'histoire est bien au cur de l'enjeu humaniste et républicain de la France.
(Source http://www.education.gouv.fr, le 18 octobre 2004)
Mesdames et messieurs,
Me rendre parmi vous, à Blois, aux " rendez-vous de l'histoire ", ce n'est pas seulement célébrer, par un geste officiel, une manifestation remarquable Il ne s'agit pas non plus, uniquement, de saluer l'engagement des enseignants et chercheurs de notre pays, qui transmettent avec ferveur les savoirs de l'Histoire.
Non ; venir ici, c'est d'abord pour moi un acte de foi.
Je crois en la vitalité, la sagesse et la modernité de l'histoire ; je crois dans ses vertus éducatives. J'ai l'intime conviction que nos enfants ne peuvent s'épanouir, grandir et vivre ensemble sans racines communes.
J'entends parfois dire de l'histoire qu'elle est une discipline lointaine, et, disons-le, accessoire, car tournée vers les " vestiges " du passé.
La passion que j'ai pour elle me parle un autre langage ; un langage que le succès de cette manifestation souligne : l'histoire est présente, elle est vivante ! Elle est notre matrice. A ces " rendez-vous de l'histoire ", c'est bien en citoyens du XXI e siècle que nous avons rendez-vous avec nous-mêmes.
Dans notre univers contemporain, complexe et mouvant, se développe une " soif des origines " à laquelle l'historien répond, en retissant les fils rompus. L'histoire nous resitue dans un pays, un milieu, une filiation. Elle éclaire notre culture, nos origines. En nous réconciliant avec nos racines, elle nous offre une identité, et bien souvent, une dignité.
Qu'on ne voit là aucun passéisme !
De plus en plus d'entreprises, par exemple, commandent aux chercheurs une étude de leur propre histoire. Elles ne le font pas seulement par attachement patrimonial. Elles cherchent à y discerner la logique de leur développement. Elles y lisent leurs erreurs et leurs succès. A la lumière de ces travaux, elles font le tri entre l'essentiel et le conjoncturel, entre continuités utiles et héritages obsolètes.
La recherche historique se présente, de ce point de vue, comme essentiellement dynamique. Elle nous tend le miroir d'hier pour mieux nous connaître aujourd'hui.
Je ne verserai pas dans l'excès qui consiste à y voir la clé de tout savoir. L'histoire ne se répète pas mécaniquement. Sa connaissance peut nous inspirer ; elle ne nous permet pas de prophétiser. L'homme innove, improvise et parfois se fait surprendre. Du moins l'histoire lui permet-elle de ne pas avancer en aveugle, dans un monde certes inconnu, mais pas si dissemblable de celui d'hier.
C'est pourquoi je mise sur l'histoire, autant que sur l'imagination, pour préparer la France aux défis du XXIe siècle.
On nous dit, par exemple, qu'un choc des civilisations se prépare. Certains découvrent avec une angoisse soudaine ce scénario qui, à mon sens, n'est fort heureusement pas écrit d'avance. L'historien, lui, se rappelle croisades, grandes invasions, colonisations et décolonisations - pour ne parler que des phases les plus saillantes
Un choc des civilisations ? Mais n'est-ce pas là, sous d'autres formes, la matière même de notre passé, y compris de notre passé pacifique, démographique, commercial ou culturel ? L'histoire ne nous fournit pas de politique clé en main face aux scénarios les plus sombres. Du moins nous arme-t-elle pour y réfléchir et pour les dissuader.
A mon sens, l'Histoire est moins une science de l'action, qu'une philosophie pour l'action.
Nous vivons dans un monde plus rapide. Le flux de l'information grossit continuellement et impose son rythme haché. La tentation est grande de se contenter d'analyses superficielles, de raccourcis, de réflexes commodes. C'est l'histoire qui nous en délivre.
Le recul historique, c'est l'atout de notre modernité.
Il y a quelques mois, le secrétaire d'Etat américain Donald Rumsfeld évoquait dans une formule fameuse la " vieille Europe ". Il ne se cachait pas d'une intention sarcastique. Prenons-le au mot : oui, nous sommes la vieille Europe, tissée de culture et pétrie d'histoire. C'est notre force et notre fierté. C'est notre expérience et notre conscience.
Dans l'univers chahuté qui est le nôtre, un danger, mesdames et messieurs, persiste. Il n'est pas né d'aujourd'hui même si son visage est changeant : c'est celui de la barbarie.
A travers le monde se produisent encore des conflits frontaliers, des guerres civiles, parfois des génocides. L'histoire nous a, pour un temps, immunisés contre de tels soubresauts, et nous qualifions les massacres qui se produisent " d'anachroniques ". Prenons le mot au sérieux : ces massacres sont le fait de peuples souvent coupés de leur histoire.
Ici où là, des pouvoirs brutaux n'ont pas seulement martyrisé les populations. Ils ont tracé droit au travers des bibliothèques, des temples, des palais. Ils ont rompu des filiations culturelles millénaires. Ils ont jeté les peuples ainsi déracinés dans de nouveaux égarements ethniques ou religieux - perpétuant l'horreur première. Ces blessures sont lentes à cicatriser. Cette barbarie ressurgira partout où nous ferons fi de l'histoire.
Mais une autre forme de " barbarie " existe. Elle n'est - fort heureusement - pas sanguinaire, mais elle est insidieuse et, je le crois, porteuse de périls : c'est celle de notre propre matérialisme.
Une chose est de brutaliser l'histoire, une autre est de la croire dépassée.
Parce que nous sommes en paix, nous nous plaçons au-dessus de ses leçons - en gestionnaires froids, pressés et parfois cyniques, de notre sort. Il y a dans nos sociétés occidentales une sorte d'indifférence spirituelle, une forme d'assèchement culturel, auxquels nous devons prendre garde. Par delà les mouvements saccadés de notre époque sachons conserver le sentiment du temps long. Respectons la mémoire des siècles.
On dit parfois que les peuples heureux n'ont pas d'histoire. Je crois plutôt que les peuples sans histoire sont des peuples malheureux.
Mesdames et messieurs,
Grandes oubliées de notre histoire, les femmes, qui sont l'objet de ces 7è rendez-vous, doivent y reprendre leur place.
A l'évidence, elles ont bien longtemps fait l'objet d'un traitement injuste. Nous savons pourtant l'intensité de leur rôle. Il ne se limite pas à quelques figures imposantes, que sais-je ? la Grande Catherine, ou la reine Victoria - cas isolés qui servent en fait de paravent. Il s'étend à des personnalités remarquables, dont beaucoup restent à découvrir. Il relève parfois de populations entières, que leur féminité distingue : de larges études ont déjà brossé le portrait de l'ouvrière. D'autres restent à faire, celui de la femme résistante, de la femme journaliste, de la femme enseignante...
Longtemps, l'Education nationale a donné de ces femmes une image biaisée. Par conformisme, par facilité, elle leur réservait une sorte de niche, au sein d'une histoire faite par d'autres, c'est à dire par les hommes. La " grande femme " était l'exception : Madame de Sévigné, seule femme de lettres, Vigée-Lebrun, seule femme peintre.
Parfois celle-ci gagnait leur reconnaissance en se faisant plus masculine que les hommes. Quelle féminité l'imagerie populaire accordait-elle à une Jeanne d'Arc en armure ? A une Marie Curie sous sa blouse noire ? Demeurée féminine, elle n'était, dans la mouvance du grand homme, qu'une ombre délicate et un peu secondaire : c'est Madame du Deffand dans la suite de Diderot, Madame du Châtelet dans celle de Voltaire. Parfois elle était épouse, comme Madame Berthelot, inséparable de son mari jusqu'aux caveaux du Panthéon. Parfois, elle était égérie, maîtresse ou favorite. Mais qu'elle sorte de ces rôles stéréotypés pour s'approcher du pouvoir, et on la qualifiait alors d'intrigante.
Bref, en se conformant à l'emprise de l'homme sur la société, l'instruction plaçait de fait les femmes hors histoire.
Depuis quelques années, l'Education nationale a, sur ces sujets, engagé sa métamorphose, même si elle n'a pas encore totalement achevé sa mutation.
L'enjeu est considérable car l'école fixe les représentations de toute la société.
Chaque jour dans nos établissements scolaires, les enfants, les adolescents font à l'école l'apprentissage délicat de la mixité. L'école de la République est une. Ne posant aucune différence entre garçons et filles, elle invite à une cohabitation harmonieuse et enrichissante.
Cet objectif suppose de rompre avec les clichés qui nourrissent encore trop souvent les comportements à l'endroit des femmes. Il ne fait aucun doute que le respect plein et entier de la femme passe notamment par une reconnaissance de sa place dans notre passé national.
Il ne s'agit pas, bien entendu, de féminiser l'histoire. Il s'agit de lui rendre, en y rétablissant la part des femmes, son intégrité.
Sans doute ces Rendez-vous de Blois contribueront-ils à cette nécessaire évolution. La qualité de leur programme autorise cet espoir. Leur cadre même y invite. En 1617, Louis XIII fit, en effet, enfermer ici Marie de Médicis. L'activité incessante de sa mère portait ombrage au roi. La mise à l'écart des femmes dans l'histoire n'a pas de meilleure illustration. Pour autant, l'affaire ne fut pas close, puisque Marie de Médicis se libéra d'elle-même. Pour bien d'autres reléguées de l'histoire, illustres ou modestes, il est temps, je le crois, de sortir aussi de l'ombre !
Mesdames et messieurs,
Sans doute l'aurez-vous compris : pour moi, les sciences humaines, et tout particulièrement l'histoire, constituent un enjeu de société. A l'aube d'un nouveau siècle, ces disciplines éclairent le chemin des questions fondamentales qui font l'honneur de la condition humaine
Notre devoir est d'instruire et de souder la communauté nationale. L'instruire, c'est lui rappeler comment elle s'est constituée. La souder, c'est expliquer aux jeunes qu'ils en seront demain, collectivement, les acteurs. L'appartenance nationale, c'est la conscience d'une destinée partagée. On a un peu moqué l'école de la Troisième République, qui parlait sans distinction de " nos ancêtres les Gaulois "... La formule prête, en effet, à sourire, mais elle pointait du doigt une vérité essentielle : l'histoire est notre ciment.
Elle nous éclaire, nous interpelle, nous oblige, nous rassemble. A cet égard, l'histoire est bien au cur de l'enjeu humaniste et républicain de la France.
(Source http://www.education.gouv.fr, le 18 octobre 2004)