Déclaration de Mme Catherine Vautrin, secrétaire d'Etat à l'intégration et à l'égalité des chances, sur l'action des Chambres de commerce et d'indutrie en faveur de l'emploi des jeunes, Juan-Les-Pins le 1er septembre 2004.

Prononcé le 1er septembre 2004

Intervenant(s) : 

Circonstance : 8ème Université d'été des Chambres de commerce et d'industrie, à Juan-Les-Pins le 1er septembre 2004

Texte intégral

Monsieur le Président de l'ACFCI,
Monsieur le Président du Conseil général,
Monsieur le Député-Maire,
Mesdames et Messieurs les Présidents et membres des Chambres de Commerce et d'Industrie,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,
Réconcilier les Français et l'entreprise, c'est le thème de votre université d'Eté et l'une des préoccupations constantes des Chambres de Commerce et d'Industrie.
C'est aussi une priorité essentielle du Gouvernement. Car il s'agit d'une exigence pour l'emploi et la croissance économique et, ce faisant, pour la cohésion sociale.
Votre Ministre de tutelle, Nicolas SARKOZY, vous dira toutes les actions mises en oeuvre par le Gouvernement depuis maintenant plus de deux ans pour relancer la croissance.
Accompagner le développement des entreprises et soutenir les créateurs et repreneurs de société, mais aussi tout faire pour que les Français profitent au mieux de la croissance économique retrouvée, c'est l'action quotidienne et la feuille de route de l'ensemble des membres du gouvernement.
Pour ma part, votre invitation m'a d'autant plus touchée que j'ai été, quand je siégeais à l'Assemblée Nationale, le rapporteur de la loi " création/reprise " sur l'initiative économique aux côtés d'Hervé NOVELLI, qui présidait la Commission spéciale et dont je salue la présence parmi vous et que, Secrétaire d'Etat à l'Intégration et à l'Egalité des chances, j'ai notamment la responsabilité de construire des passerelles entre le monde de l'entreprise et les quartiers.
Je m'appuie pour ce faire sur quelques principes simples :
. La conviction, que nous partageons tous ici, qu'il n'y a pas de justice sociale sans efficacité économique. Et c'est d'ailleurs tout le sens du plan de cohésion sociale que nous avons présenté avec Jean-Louis BORLOO il y a quelques semaines : refonder la cohésion sociale sur le retour à l'activité des publics les plus fragiles, et plus largement réconcilier l'économique et le social.
. Ensuite la conviction, que je voudrais vous faire partager, que les entreprises ont toute leur place dans les quartiers difficiles.
Jean-Louis BORLOO, depuis plus de deux ans, s'est employé à relancer l'économique dans les quartiers, en créant 41 nouvelles Zones Franches Urbaines ou ... en signant avec l'ACFCI, en février 2004 et dans le cadre de la relance du dispositif des Zones Franches, une importante convention de partenariat ministère de la ville/chambres de commerce en direction des quartiers sensibles.
. Et enfin, l'implication sociale des Chambres de Commerce et d'Industrie et leur rôle en matière de réduction des inégalités territoriales et de promotion de l'égalité des chances.
Réconcilier les entreprises et les habitants des quartiers sensibles est une dimension essentielle de la rénovation urbaine.
Car il n'y aura pas de rénovation urbaine durable sans développement économique.
Il n'y aura pas de véritable renaissance des quartiers si les entreprises ne s'y installent pas ou s'en retirent, ou encore renoncent à y recruter de la main-d'oeuvre.
Il n'y aura pas durablement de nouveau départ et de seconde chance pour ces quartiers si on ne leur donne pas les moyens de devenir des lieux d'initiative et de création de richesse, des foyers de vie économique.
Les ZFU marchent et elles répondent à de vrais besoins, car depuis leur création en 1997 elles ont permis de créer 50 000 emplois dont 35 000 créations nettes et ont profité à ce jour à près de 20 000 entreprises, nouvelles ou reprises.
Bien sûr, il s'agit souvent de petites entreprises mais c'est le plus souvent une opportunité pour une personne au chômage de s'autonomiser en créant son emploi - avant, le cas échéant, d'en offrir à d'autres personnes en développant son activité. Dans ces entreprises, 30 % des salariés sont issus des quartiers dans lesquels elles se sont installées.
Dans ces quartiers où 32 % des habitants ont moins de 20 ans et où le taux de chômage des 15-24 ans est de 44 %, soit plus de 4 fois le taux de chômage national et plus de 2 fois la moyenne nationale pour cette classe d'âge, la nécessité s'impose d'une approche novatrice pour amener ces jeunes vers l'emploi. Et c'est tout le sens du plan développé par Laurent HENART qui consiste à accompagner 800 000 jeunes vers l'emploi durable, par la voie de l'apprentissage et dans le secteur marchand.
Par le biais de l'alternance entre les organismes de formation et l'entreprise que permet l'apprentissage, ces jeunes pourront accéder à l'emploi en étant à la fois mieux formés et directement opérationnels. C'est dire si les CCI auront, une fois encore, un rôle pivot dans cette approche de l'accès à l'emploi.
La croissance économique, les évolutions démographiques, l'accès des jeunes à l'emploi, les outils de la politique de la ville sont autant de leviers essentiels pour attirer les entreprises vers les quartiers.
J'en viens maintenant au rôle des Chambres de Commerce et d'Industrie et du partenariat que je souhaite amplifier avec vous.
Les CCI sont en première ligne dans la défense des intérêts des entreprises, dans la promotion de l'esprit d'entreprise, dans la valorisation de l'image des entrepreneurs.
Elles s'y emploient avec pragmatisme, avec une parfaite connaissance du tissu industriel et commercial local, avec un sens accompli de l'intelligence économique et de la meilleure façon de la faire prospérer.
Vous êtes le 2ème acteur de la formation en France après l'Education Nationale. C'est dire que votre rôle pour former et orienter les jeunes vers le monde de l'entreprise est absolument capital.
Les Chambres s'imposent comme un acteur essentiel de l'égalité des chances dans notre pays.
Je pense en particulier aux programmes très innovants développés en direction des jeunes des quartiers par certaines grandes écoles de gestion relevant de la tutelle des CCI.
Tel est le cas de l'ESSEC avec l'opération " Une prépa, une grande école, pourquoi pas moi " lancée sous l'impulsion de la CCI de Versailles - que le Président BERNARDIN connaît bien ! - avec le soutien du ministère de la ville (DIV), et qui a permis de donner un contenu très concret au concept, parfois abstrait, de responsabilité sociale des entreprises. Cette opération particulièrement originale et porteuse a d'ailleurs été saluée par le Premier Ministre qui m'a demandé de l'accompagner le 9 juin dernier à Cergy-Pontoise pour échanger en direct avec les responsables et les bénéficiaires du programme.
Ce dispositif est basé sur la conviction que les entreprises, parce qu'elles sont inscrites dans un contexte géographique et social déterminé qu'elles influencent, peuvent contribuer à rétablir l'égalité des chances sur certains territoires.
Je travaille actuellement à l'extension de ce dispositif afin que, dans un avenir le plus proche possible, l'ensemble des écoles de commerce et de gestion soient partie prenante de cette mobilisation nationale pour l'égalité des chances dans les quartiers.
Très concrètement, je fais le souhait que chaque Chambre de commerce, en liaison avec les Etablissements d'enseignement supérieur dont elles ont la responsabilité (je pense notamment aux Ecoles supérieures de commerce), se dote d'une structure d'accompagnement des jeunes des quartiers vers la réussite.
Je veillerai à ce que les moyens soient mis en oeuvre et les partenariats nécessaires finalisés pour mener à bien cette grande entreprise.
Il faut que les jeunes, tous les jeunes, sachent que l'entreprise est à leur portée, qu'ils ne sont pas condamnés à rester à ses portes, que le monde du travail ne leur est pas fermé. De leur côté, les entreprises doivent se convaincre qu'elles peuvent accueillir des jeunes des quartiers en leur sein.
Je travaille actuellement, en lien avec des groupes français et internationaux, à ce que les entreprises s'ouvrent à ces nouveaux talents, et que les jeunes des quartiers aient la possibilité de découvrir le monde de l'entreprise.
Imagine-t-on la difficulté qu'ont ces jeunes dont l'adresse ou le parcours scolaire mentionne Trappes, Montfermeil, Vaulx-en-Velin ou le Mirail, à trouver ne serait-ce qu'un stage en entreprise ? L'idée est de leur permettre de découvrir l'entreprise et ses pré-requis, première démarche d'un parcours de formation.
C'est la raison pour laquelle je compte distinguer, par la création d'un label " Entreprise responsable " ou d'un club de " dirigeants citoyens ", les entreprises qui entreront dans cette démarche.
Ce label récompensera les entreprises qui, dans le cadre des trois jours de stage obligatoire en classe de 3e, s'engageront dans un parcours d'accueil des élèves des quartiers sensibles.
Cette approche ne fera que des gagnants : gagnants les jeunes qui découvriront l'entreprise ; gagnantes les entreprises qui disposeront à terme de personnel mieux formé ; gagnante la cohésion sociale qui s'en trouvera renforcée.
Jeunes des quartiers et entreprises, c'est possible !
C'est possible lorsque les entreprises font le pas de l'implantation dans les quartiers.
C'est possible lorsque les initiatives des jeunes dans le domaine économique sont récompensées. Et je pense notamment à l'opération " Talents des Cités " que nous allons développer et amplifier avec Jean-Louis BORLOO.
C'est possible lorsque l'entreprise est, au sens littéral, " citoyenne ", c'est-à-dire, tout simplement, présente dans les Cités.
Et dans cette optique, mon souhait le plus cher est que les CCI renforcent leur stratégie d'accompagnement des entreprises dans ces territoires, en s'appuyant sur l'expertise réelle qu'elles ont déjà acquise dans le domaine de la politique de la ville.
C'est enfin possible lorsque les entreprises, présentes ou non dans ces territoires au potentiel très riche malgré les difficultés socioéconomiques existantes, jouent le jeu de la diversité et d'un recrutement ouvert sur de nouveaux profils, de nouvelles origines, de nouvelles richesses individuelles et professionnelles.
La Charte de la diversité que nous allons mettre en place s'inscrit dans cette perspective à laquelle je vous demande d'être très attentifs. Il en va de la réintégration sur le marché du travail et dans le pacte social d'une partie de la population de notre pays actuellement reléguée dans des zones privées d'activité économique.
Mesdames, Messieurs,
Réconcilier les Français et l'entreprise est une exigence essentielle pour la vitalité économique et la cohésion sociale dans notre pays. Ce sera mission impossible si nous ne commençons pas par réconcilier l'économique et le social.
Ce le sera tout autant si nous ne redoublons pas d'efforts en direction des jeunes. Ils sont les salariés, les créateurs d'entreprise, les acteurs économiques de demain.
Et les quartiers dans lesquels ils sont si nombreux à vivre sont les premiers réservoirs d'emplois et de talents de demain.
Nous devons tout mettre en oeuvre pour résorber la fracture entre l'entreprise et les quartiers ces quartiers dont le premier handicap est précisément qu'ils sont, si souvent, privés d'entreprises et dépourvus du goût d'entreprendre.
Les CCI sont bien sûr partie prenante dans ce plan de cohésion républicaine.
Une économie forte de toutes les initiatives individuelles et collectives, accompagnée d'une maîtrise des dépenses publiques, dans une société tournée vers plus de justice sociale, c'est le sens de notre mobilisation.
En conclusion, je voudrais redire que la puissance de l'investissement, la force de la consommation et le dynamisme des exportations constituent le " triangle d'or " de la croissance économique. Cette croissance doit s'inscrire dans un contexte social juste et responsabilisant.
C'est toute l'ambition du Plan de cohésion : transformer la croissance économique en emplois. Je le défendrai à la place qui est la mienne, avec conviction et détermination, pour que tous les éléments du carré magique d'une croissance durable soient réunis :
- investissement
- consommation
- exportations
- cohésion sociale retrouvée.
Réussir ce carré magique, c'est contribuer à la réconciliation des Français avec l'entreprise. C'est notre ambition et tout le sens de notre engagement.
(source http://www.ville.gouv.fr, le 9 septembre 2004)