Texte intégral
J.-J. Bourdin-. J.-P. Raffarin était sur Europe 1 tout à l'heure. Le Premier ministre a déclaré - je le cite - : "Nous allons encore avoir de mauvais chiffres du chômage pendant quelques mois. Ensuite, la situation ira mieux". Ce n'est pas très encourageant !
- "Il y a une situation économique qui est en voie d'amélioration, on le voit tous les jours. Les chiffres de la croissance pour 2004 sont nettement supérieurs aux prévisions du Gouvernement. Il faut maintenant que cette croissance crée des emplois. Vous savez que l'on est en train de préparer une loi sur l'emploi, pour essayer de faire sauter un certain nombre des verrous qui bloquent les choses. C'est une constante dans notre pays, maintenant, depuis plusieurs années : même avec une croissance relativement élevée, on crée moins d'emplois que les autres. Donc, il faut s'attaquer à ce sujet aujourd'hui."
Est-il vrai que vous allez postuler pour le Sénat ? Avez-vous envie de devenir sénateur ?
- "Ce ne sont pas vraiment des sujets qui méritent qu'on s'y attarde..."
Je vous pose quand même la question !
- "Il y a une situation politique dans la Sarthe un peu compliquée, avec beaucoup de désordre dans la majorité. Je fais mon devoir, je remets de l'ordre. Mais naturellement, cela n'a pas de conséquences sur mon engagement au sein du Gouvernement."
Vous êtes tenté ?
- "Ce n'est pas une question de tentation, c'est une question devoir."
Donc, vous serez sénateur, si j'ai bien compris ?
- "Je serai candidat !"
A l'UMP, franchement, est-ce que N. Sarkozy peut cumuler un poste de ministre et la présidence de l'UMP ?
- "Il faut bien voir que la chose la plus importante dans ce débat, c'est que ce sont les militants qui vont choisir leur président et personne d'autre"
Que disent les militants, aujourd'hui ?
- "Je ne sais pas ce qu'ils disent, parce qu'après tout, je n'ai pas de sondage sur les militants, mais on voit bien que la N. Sarkozy est assez populaire chez les militants. Et c'est très important de rappeler cela, parce que les militants et quelques-uns d'entre nous, nous nous sommes beaucoup battus, dans le passé, pour que la démocratie s'installe dans nos formations politiques. Personne n'acceptera de recul sur ce sujet. A partir de là, la question de savoir si le président de l'UMP peut être au Gouvernement ou pas, c'est une question qui ne mérite pas vraiment de commentaires, puisqu'elle appartient à un seul homme, le président de la République. C'est lui qui choisit le Gouvernement. Si le président de la République estime qu'il n'est possible d'être à la fois chef de parti et membre de Gouvernement, il en tirera toutes les conséquences. Donc, on peut toujours commenter à l'infini cette décision, elle lui appartient. Je pense que l'essentiel n'est pas là. L'essentiel, ce sont deux choses auxquelles on ne répond pas aujourd'hui : c'est quel est le projet politique que les différents candidats à l'UMP veulent proposer aux militants, parce que derrière ce projet politique pour notre pays, puisque nous sommes la majorité. Deuxièmement, quel mode de fonctionnement pour l'UMP ? Un mode de fonctionnement démocratique, avec des courants, avec des sensibilités, avec des débats, avec des synthèses ? Ou un mode de courant plus autoritaire, sur un modèle plus classique à droite ? Il faut que les candidats maintenant, le plus vite possible, se déclarent, s'engagent dans ce débat pour que les militants puissent choisir ce qu'ils feront demain."
N. Sarkozy s'est plus ou moins déclaré - pas encore officiellement, mais il est tenté, encore une fois. S'il se déclare, est-ce que vous le soutiendrez ?
- "Cela dépend des réponses qu'il apportera à ces deux questions. Si j'ai le sentiment que sur le mode de fonctionnement - et j'ai entendu certains de ses lieutenants dire, "pas de courant, tous en rang derrière le chef" - et deuxièmement, si je n'ai pas de réponse aux questions de fond, et en particulier aux valeurs que je défends - je considère que les valeurs républicaines, les exigences du gaullisme doivent être au cur du projet de l'UMP -, à ce moment-là, je ferai entendre mon message, c'est-à-dire que je serai moi-même candidat."
Sinon, vous soutiendrez Sarkozy ?
- "Sinon, je soutiendrai le candidat qui répondra positivement à ces questions. Et si Nicolas le fait, je le soutiendrai."
Si vous devez faire un choix entre J.-P. Raffarin et N. Sarkozy, vous faites lequel ?
- "Ce n'est pas une question d'hommes, c'est une question de projet politique et de valeurs. Il y a aujourd'hui, au sein de l'UMP, des hommes qui défendent plutôt les idées libérales, il y a des centristes, il y a des gaullistes, avec toutes les nuances que cela représente. Moi, j'ai des convictions, que j'ai déjà affirmées dans des combats politiques, y compris au sein du RPR, qui sont les convictions que l'on pourrait résumer avec les valeurs de la République et une démocratie sociale avancée. Je défendrai ceux qui défendent ces convictions."
Vous n'avez pas totalement répondu à ma question : est-ce qu'un président de l'UMP peut-être en même temps ministre ?
- "Je n'ai pas répondu à la question, parce que le président de la République a dit "non", et que c'est lui qui décide."
Donc, c'est lui qui décide, mais vous, à titre personnel, vous pensez... ?
- "Je pense qu'il y a une logique à cette position du Président. Il y a une cohérence à ce qu'il n'y ait pas de membre du Gouvernement qui soit en même temps, finalement, chef de la majorité. Simplement, cette règle pourrait être énoncée une fois pour toute et ne plus bouger."
Si on continue comme cela, est-ce que l'UMP va dans le mur ?
- "Oui, l'UMP va dans le mur si on continue à concentrer nos efforts sur les débats comme celui qui nous venons d'avoir à l'instant et si on oublie complètement les problèmes des Français, c'est-à-dire le projet de société que l'UMP doit porter. On a eu, après l'élection présidentielle, pendant deux ans, une action gouvernementale qui a été soutenue par le projet, qui était celui du président de la République. Il faut maintenant réactualiser ce projet, d'abord parce qu'il y a eu des élections, où on a subi des défaites, ensuite parce que le monde change aussi autour de nous. Et c'est l'UMP qui doit être le moteur de la réflexion sur ce projet politique. Si rapidement, les projecteurs ne se tournent pas vers ce débat-là, et restent concentrés sur des batailles de personnes et sur des rivalités de clans, alors, oui, l'UMP sera battue aux élections."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 29 juin 2004)