Texte intégral
Je suis très heureux de cette occasion de rencontrer de jeunes Palestiniens qui, de surcroît, apprennent le français comme d'ailleurs nous avons la chance d'accueillir dans différentes universités en France des jeunes Palestiniens qui étudient grâce à des bourses ; il y a, en tout, à peu près quatre-vingt-dix bourses. C'est une coopération très concrète et très humaine à laquelle j'attache beaucoup d'importance.
Je suis très content de visiter ce tout nouveau centre pour plusieurs raisons. (...)
Je suis d'abord très heureux de vous saluer. Je pense qu'un ministre des Affaires étrangères, un homme politique qui vient d'un autre pays doit également passer devant les gens, il doit pas seulement voir les images à la télévision de réunions avec des gens toujours très sérieux. J'ai toujours essayé dans ma vie politique d'avoir une approche humaine et humaniste et puis de rencontrer des gens. C'est pour cela que j'ai décidé de venir dormir à Ramallah, passer une nuit, essayer de comprendre même si c'est très bref malheureusement, mais de vivre un peu plus près des problèmes et des difficultés que vous avez pendant vingt-quatre heures et donc je suis très heureux de donner cette dimension culturelle et humaniste supplémentaire à cette visite dans une région qui a en effet besoin de cette dimension humaine, culturelle, personnelle dans la tragédie que vous vivez ici tous les jours. C'est donc la première raison et cette raison, vous la trouverez partout où je vais, dans n'importe quelle région du monde ou d'Europe, j'ai toujours eu le souci d'aller à la rencontre des gens.
La deuxième raison, c'est que c'est un centre culturel franco-allemand et, depuis que je suis engagé dans la vie politique, cela fait maintenant assez longtemps, j'ai dans mon bureau au ministère des Affaires étrangères une très belle photo qui est la raison de mon engagement personnel : elle représente la poignée de main entre le Général de Gaulle et le chancelier fédéral allemand Konrad Adenauer. On pourrait d'ailleurs trouver d'autres photos de François Mitterrand avec le chancelier Helmut Kohl et plus récemment de l'accolade sur les plages de Normandie entre Jacques Chirac et Gerhard Schroeder. Et pour moi, cette poignée de main initiale entre le chancelier allemand et le chef de la résistance française, c'est la raison de l'engagement, et j'étais ce jour-là, je le dis quelquefois, à la fois gaulliste et européen, et je n'ai pas changé.
C'est aussi important que, pour la vie quotidienne de nos deux pays, on ait des occasions de faire des choses ensemble. Et c'est une des premières réalisations, symboliques. (...) Je vais donner une impulsion importante avec mon collègue Joschka Fischer aux initiatives et réalisations communes.
Nous devons avoir un réseau, non pas unique, mais avoir en commun le plus de consulats possible. J'imagine qu'on peut avoir aussi des ambassades conjointes, non pas totalement uniques, mais conjointes. Par exemple, je vais aller au Mozambique poser la première pierre d'une ambassade commune franco-allemande, dans le même bâtiment. Alors il y a le travail du consulat, d'une ambassade, mais il y a aussi cette action culturelle d'apprentissage de l'allemand et du français, d'ouverture vers les autres, c'est-à-dire vers vous ici, de nos deux cultures, qui sont de très anciennes cultures européennes, qui ont rayonné, qu'il s'agisse de la littérature, de la musique ou d'autres arts. Donc je trouve très important que nous fassions ensemble des choses, pas seulement parce que nous avons été longtemps des ennemis. Français et Allemands se sont faits plusieurs fois des guerres tragiques. Victor Hugo disait que des guerres entre Européens, c'était des guerres civiles, des guerres civiles entre Européens.
Donc c'est la preuve aussi qu'il n'y a pas de fatalité parce que je trouve très important que Français et Allemands, qui ont été si souvent en guerre les uns contre les autres, aient décidé de faire une paix définitive et de construire ensemble le projet européen, avec d'autres, avec les Italiens, les Belges, les Luxembourgeois ; maintenant nous sommes vingt-cinq, dont dix pays qui ont été privé pendant cinquante ans de démocratie parce qu'ils étaient de l'autre côté du "rideau de fer". C'est la preuve qu'il n'y a pas de fatalité. Je veux aussi que vous interprétiez cela, dans la situation où se trouvent votre pays et votre peuple, dans la situation de très grande difficulté pour vous dans la vie quotidienne, comme la preuve que c'est possible.
Je veux vous dire cela, notamment à vous qui êtes les plus jeunes et qui devez regarder devant vous. Voilà, donc je suis très heureux de cette preuve, si je puis dire, par rapport à ce que nous sommes, nous Français et Allemand, ce que nous avons fait et qui tient sa promesse, la promesse de Robert Schuman. (...) C'était un homme politique français qui a été ministre des Affaires étrangères et dans nos bureaux à Paris, juste à côté de mon bureau, il y a le Salon de l'horloge et dans cette pièce le 9 mai 1950, Robert Schuman a lancé sa déclaration qui a été la première étape du projet européen, en disant aux Français, aux Allemands et à quelques autres, "mettons notre charbon et notre acier ensemble, et faisons un charbon et un acier européen, et non pas allemand ou français". C'était incroyable de dire cela, en 1950, cinq ans après l'ouverture des camps de concentration et la fin de la guerre mondiale. Cinq ans après seulement. Et cela a marché. Dans cette déclaration, il a parlé de la paix en disant que pour la faire, il faut être de bonne volonté mais il faut aussi avoir des intérêts communs. Voilà comment on a créé ce premier marché commun du charbon et de l'acier et ensuite un marché commun pour tout le reste ; et puis un marché unique, et une monnaie unique. Cinquante ans. Mais ce projet a tenu sa promesse. Je trouve très important qu'on ait ce souvenir de Robert Schuman, que cette mémoire soit ici dans un centre culturel franco-allemand.
Je remercie toute l'équipe, ceux qui sont dans cette pièce et ceux qui n'y sont pas, ceux qui travaillent avec vous. Je vous remercie beaucoup de faire vivre ce centre au service des jeunes Palestiniens. Vous serez toujours les bienvenus, si vous le pouvez évidemment, en France. En tout cas je suis très heureux de cette visite que j'ai faite ici à Ramallah. Je suis très heureux d'avoir rencontré le président Arafat et de l'avoir retrouvé hier soir pour une longue discussion et de voir avec lui comment faire repartir dans la bonne direction ce processus de paix entre Israéliens et Palestiniens qui est aujourd'hui bloqué. Et je suis venu lui dire, de la part du président de la République, que nous comptions sur lui, que nous avions besoin de lui pour faire repartir ce processus ; naturellement, il faut aussi que du côté israélien il y ait des signes qui aillent dans la même direction.
Et là aussi je pense, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, qu'il n'y a pas de fatalité. On ne doit baisser les bras, même si c'est difficile, même si quelquefois, on a des raisons de désespérer. Nous sommes là, c'est ce que je suis venu dire comme ministre français des Affaires étrangères. Voilà. Je suis à votre disposition si vous avez des questions.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 2 juillet 2004)
Je suis très content de visiter ce tout nouveau centre pour plusieurs raisons. (...)
Je suis d'abord très heureux de vous saluer. Je pense qu'un ministre des Affaires étrangères, un homme politique qui vient d'un autre pays doit également passer devant les gens, il doit pas seulement voir les images à la télévision de réunions avec des gens toujours très sérieux. J'ai toujours essayé dans ma vie politique d'avoir une approche humaine et humaniste et puis de rencontrer des gens. C'est pour cela que j'ai décidé de venir dormir à Ramallah, passer une nuit, essayer de comprendre même si c'est très bref malheureusement, mais de vivre un peu plus près des problèmes et des difficultés que vous avez pendant vingt-quatre heures et donc je suis très heureux de donner cette dimension culturelle et humaniste supplémentaire à cette visite dans une région qui a en effet besoin de cette dimension humaine, culturelle, personnelle dans la tragédie que vous vivez ici tous les jours. C'est donc la première raison et cette raison, vous la trouverez partout où je vais, dans n'importe quelle région du monde ou d'Europe, j'ai toujours eu le souci d'aller à la rencontre des gens.
La deuxième raison, c'est que c'est un centre culturel franco-allemand et, depuis que je suis engagé dans la vie politique, cela fait maintenant assez longtemps, j'ai dans mon bureau au ministère des Affaires étrangères une très belle photo qui est la raison de mon engagement personnel : elle représente la poignée de main entre le Général de Gaulle et le chancelier fédéral allemand Konrad Adenauer. On pourrait d'ailleurs trouver d'autres photos de François Mitterrand avec le chancelier Helmut Kohl et plus récemment de l'accolade sur les plages de Normandie entre Jacques Chirac et Gerhard Schroeder. Et pour moi, cette poignée de main initiale entre le chancelier allemand et le chef de la résistance française, c'est la raison de l'engagement, et j'étais ce jour-là, je le dis quelquefois, à la fois gaulliste et européen, et je n'ai pas changé.
C'est aussi important que, pour la vie quotidienne de nos deux pays, on ait des occasions de faire des choses ensemble. Et c'est une des premières réalisations, symboliques. (...) Je vais donner une impulsion importante avec mon collègue Joschka Fischer aux initiatives et réalisations communes.
Nous devons avoir un réseau, non pas unique, mais avoir en commun le plus de consulats possible. J'imagine qu'on peut avoir aussi des ambassades conjointes, non pas totalement uniques, mais conjointes. Par exemple, je vais aller au Mozambique poser la première pierre d'une ambassade commune franco-allemande, dans le même bâtiment. Alors il y a le travail du consulat, d'une ambassade, mais il y a aussi cette action culturelle d'apprentissage de l'allemand et du français, d'ouverture vers les autres, c'est-à-dire vers vous ici, de nos deux cultures, qui sont de très anciennes cultures européennes, qui ont rayonné, qu'il s'agisse de la littérature, de la musique ou d'autres arts. Donc je trouve très important que nous fassions ensemble des choses, pas seulement parce que nous avons été longtemps des ennemis. Français et Allemands se sont faits plusieurs fois des guerres tragiques. Victor Hugo disait que des guerres entre Européens, c'était des guerres civiles, des guerres civiles entre Européens.
Donc c'est la preuve aussi qu'il n'y a pas de fatalité parce que je trouve très important que Français et Allemands, qui ont été si souvent en guerre les uns contre les autres, aient décidé de faire une paix définitive et de construire ensemble le projet européen, avec d'autres, avec les Italiens, les Belges, les Luxembourgeois ; maintenant nous sommes vingt-cinq, dont dix pays qui ont été privé pendant cinquante ans de démocratie parce qu'ils étaient de l'autre côté du "rideau de fer". C'est la preuve qu'il n'y a pas de fatalité. Je veux aussi que vous interprétiez cela, dans la situation où se trouvent votre pays et votre peuple, dans la situation de très grande difficulté pour vous dans la vie quotidienne, comme la preuve que c'est possible.
Je veux vous dire cela, notamment à vous qui êtes les plus jeunes et qui devez regarder devant vous. Voilà, donc je suis très heureux de cette preuve, si je puis dire, par rapport à ce que nous sommes, nous Français et Allemand, ce que nous avons fait et qui tient sa promesse, la promesse de Robert Schuman. (...) C'était un homme politique français qui a été ministre des Affaires étrangères et dans nos bureaux à Paris, juste à côté de mon bureau, il y a le Salon de l'horloge et dans cette pièce le 9 mai 1950, Robert Schuman a lancé sa déclaration qui a été la première étape du projet européen, en disant aux Français, aux Allemands et à quelques autres, "mettons notre charbon et notre acier ensemble, et faisons un charbon et un acier européen, et non pas allemand ou français". C'était incroyable de dire cela, en 1950, cinq ans après l'ouverture des camps de concentration et la fin de la guerre mondiale. Cinq ans après seulement. Et cela a marché. Dans cette déclaration, il a parlé de la paix en disant que pour la faire, il faut être de bonne volonté mais il faut aussi avoir des intérêts communs. Voilà comment on a créé ce premier marché commun du charbon et de l'acier et ensuite un marché commun pour tout le reste ; et puis un marché unique, et une monnaie unique. Cinquante ans. Mais ce projet a tenu sa promesse. Je trouve très important qu'on ait ce souvenir de Robert Schuman, que cette mémoire soit ici dans un centre culturel franco-allemand.
Je remercie toute l'équipe, ceux qui sont dans cette pièce et ceux qui n'y sont pas, ceux qui travaillent avec vous. Je vous remercie beaucoup de faire vivre ce centre au service des jeunes Palestiniens. Vous serez toujours les bienvenus, si vous le pouvez évidemment, en France. En tout cas je suis très heureux de cette visite que j'ai faite ici à Ramallah. Je suis très heureux d'avoir rencontré le président Arafat et de l'avoir retrouvé hier soir pour une longue discussion et de voir avec lui comment faire repartir dans la bonne direction ce processus de paix entre Israéliens et Palestiniens qui est aujourd'hui bloqué. Et je suis venu lui dire, de la part du président de la République, que nous comptions sur lui, que nous avions besoin de lui pour faire repartir ce processus ; naturellement, il faut aussi que du côté israélien il y ait des signes qui aillent dans la même direction.
Et là aussi je pense, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, qu'il n'y a pas de fatalité. On ne doit baisser les bras, même si c'est difficile, même si quelquefois, on a des raisons de désespérer. Nous sommes là, c'est ce que je suis venu dire comme ministre français des Affaires étrangères. Voilà. Je suis à votre disposition si vous avez des questions.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 2 juillet 2004)