Interviews de M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat chargé de l'assurance maladie, le 8 juillet 2004 sur l'internet et le 12 à BFM, sur la réforme de l'assurance maladie, la maitrise des dépenses de santé et la contribution forfaitaire de un euro par consultation médicale.

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Média : BFM

Texte intégral

Chat vidéo le 8 juillet 2004
Président : L'assurance maladie doit-elle vraiment être réformée ?
Xavier Bertrand : Oui, car autrement, on ne gardera pas notre sécurité sociale à la française ! Le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, depuis quelques mois, réunit l'ensemble des acteurs du système de santé : les politiques, les syndicalistes, les professionnels de la santé Il nous a dit que si d'ici 2020 il n'y avait pas de réforme, soit on passerait de 76 % des dépenses de santé remboursées à 51 %, ce qui signifie la privatisation du système, et ça je n'en veux pas ; soit on garderait le même niveau de remboursement mais pour cela il faudrait doubler la CSG maladie, c'est-à-dire amputer le pouvoir d'achat des Français, et ça non plus je n'en veux pas. Pour éviter ces deux scénarios de l'apocalypse, il faut donc réformer l'assurance maladie. C'est ce qu'on fait avec Philippe Douste-Blazy.
Toto : L'assurance maladie est un vrai droit fondamental, est-on en droit de la modifier ?
Xavier Bertrand : Bien sûr. Il ne faut pas la modifier, il faut la moderniser. La sécurité sociale à la française, c'est un système unique au monde, très original, où l'on contribue selon ses moyens et où l'on est soigné en fonction de ses besoins. Si on veut garder ce droit, il faut qu'on le modernise. Pourquoi ? Nous vivons de plus en plus longtemps, c'est très bien, mais cela a des conséquences. Nous dépensons davantage pour notre santé. Il n'y a pas besoin de révolutionner les choses. Si chacun fait un petit effort, on peut obtenir un grand résultat. C'est donc notre devoir de moderniser l'assurance maladie.
Gontran : Bonjour M. le ministre. Vendredi dernier, j'ai assisté au débat parlementaire et je suis étonné d'avoir entendu de la part de l'opposition que votre projet ne prenait pas en compte l'hôpital. Que pouvez-vous nous dire sur ce point ?
Xavier Bertrand : Ils ont tort. L'hôpital est concerné par la réforme " hôpital 2007 ", mise en place par Jean-François Mattei, qui prévoit 10 milliards d'euros d'investissements pour les hôpitaux d'ici 2007. Il y a aussi la tarification à l'activité. Mais on s'est aussi aperçu qu'on peut dépenser mieux à l'hôpital. Exemple : les feuilles de températures au bout du lit. Selon l'hôpital qui les achète, on les paye de 1 à 5 fois plus cher. C'est pareil pour l'oxygène médical : on le paye de 0,33 à 1,90 le m3. Cela montre qu'on peut faire des économies sans diminuer la qualité des soins. Il faut dépenser mieux pour soigner mieux !
Nico59 : Peut-on venir à un système anglais ?
Xavier Bertrand : Non, surtout pas, je ne veux ni d'un système anglais, ni d'un système à l'américaine. En Angleterre, il y a des files d'attente interminables pour se soigner et les plus riches viennent se faire opérer en France ! Aux Etats-Unis, il y a une médecine pour les riches et une pour les pauvres, et je n'en veux pas non plus. On peut sauver le système de sécu à la française, il a de l'avenir. Je crois à l'exception française !
Président : Je ne comprends rien à cette réforme, pouvez-vous expliquer les grandes lignes ?
Xavier Bertrand : Il y a trois grandes lignes dans cette réforme.
Premier pilier : le pilotage du système, la gouvernance. Aujourd'hui, le système n'est pas piloté. L'Etat doit d'abord donner des objectifs de santé publique. Il faut voter ce que seront les dépenses de santé pour une année. Ensuite, les partenaires sociaux et les professionnels de santé doivent se sentir responsables de ces sommes votées. Idem pour les Français, qui doivent se sentir concernés. Une haute autorité de santé doit aussi dire si un médicament est bon, définir des protocoles de soins
Second pilier : le financement. On a souhaité demander un effort à tous les acteurs, de 5 milliards d'euros par an. C'est le fameux " un euro " demandé aux patients au titre de la responsabilisation. C'est aussi un effort sur la CSG sur les retraités imposables, sur les entreprises, sur les actifs salariés, sur les jeux, sur les produits financiers
Le troisième pilier, c'est l'organisation de notre système de soins. Il faut arrêter les abus, les gaspillages, les excès. On peut aussi être mieux soigné en faisant appel au médecin traitant et au dossier médical personnel. Enfin, en matière de médicaments, on peut réaliser 2,3 milliards d'euros d'économies. Tout ceci mis bout à bout nous permettra de revenir vers l'équilibre en 2007, avec un plan à hauteur de 15 milliards d'euros.
Sonia : Quelles sont les résistances que vous rencontrez dans la mise en place de votre réforme ?
Xavier Bertrand : Beaucoup moins de résistance qu'on ne le pense et que ne le disent les opposants à la réforme. Avec Philippe Douste-Blazy, on a vraiment joué la carte du dialogue social. Ils ont compris que ce qu'on propose, c'est de garder le même système de sécu à la française. Cela tout le monde l'a compris. Il reste des questions : comment ça va se passer avec le dossier médical personnel, pourrai-je choisir mon médecin traitant... Mais je crois que chacun a compris qu'on pouvait sauver la sécu, si chacun y met du sien.
Nanie : Comment et pourquoi doit-on passer obligatoirement par le médecin traitant pour des problèmes de l'ordre d'un spécialiste ? Par exemple pour des problèmes gynécologiques, je me vois plutôt mal aller voir mon médecin traitant, je pense que ses capacités sont assez limitées à ce niveau. Je voudrais savoir si la loi qui a été votée englobe le cas que je viens de vous citer ?
Xavier Bertrand : Pour le gynécologue, elle ne change rien à son habitude. Ce sera pareil pour le pédiatre, l'ophtalmo... L'idée du médecin traitant, qui a vocation à être un généraliste mais peut être un spécialiste, c'est celui qui me connaît le mieux, en qui j'ai confiance et le mieux placé pour me conseiller. Il est donc préférable d'aller voir le généraliste d'abord chaque fois que c'est possible. Bien sûr, il y a des professions pour lesquelles le bon sens impose d'aller directement voir un spécialiste, comme dans le cas du gynécologue.
Lila : N'avez-vous pas peur que votre action vous rende impopulaire auprès des Français car la réforme de l'assurance maladie est un dossier explosif ?
Xavier Bertrand : Le politique ne doit pas trop se poser la question de la popularité. Notre boulot, c'est de prendre notre courage politique à deux mains et de faire face aux défis. De toute façon, la sécurité sociale ne peut pas continuer comme ça. Il ne faut pas baisser les bras et faire face nos responsabilités. Il faut surtout expliquer les choses et pourquoi on fait tel ou tel choix. Je préfère la pédagogie à la démagogie, donc je n'ai pas peur de l'impopularité.
Docteur : Comment allez-vous impliquer le corps médical dans la réforme ?
Xavier Bertrand: En les plaçant comme tous les acteurs face à leurs responsabilités. Il faut que les professionnels de santé nous aident, qu'ils jouent la carte de la formation médicale continue, qu'ils prescrivent moins de médicaments, qu'ils aillent vers l'évaluation des pratiques professionnelles... Sur la question des arrêts de travail abusifs, ils doivent nous aider aussi. Il faut qu'ils s'engagent. Sans eux rien n'est possible. Je sens qu'ils ont la volonté d'avancer et de bouger. Les mentalités évoluent dans le bon sens.
Poison : Demander aux Français de gagner en maturité et d'oublier leur intérêt immédiat et particulier, n'est-ce pas ça la vraie difficulté ?
Xavier Bertrand : Difficile oui, impossible absolument pas. Les Français ont compris que la réforme était obligatoire et urgent. On ne peut plus attendre : chaque minute qui passe, le trou de la sécu augmente de 23 000 euros. Les Français se disent : si on me demande des efforts mais qu'on en demande aussi aux médecins, aux laboratoires pharmaceutiques, aux entreprises, et que c'est pour un système où il n'y a plus d'abus et d'excès, alors je veux bien aller dans cette direction. Si l'on explique bien les choses, je pense que chacun est capable de faire cette évolution des mentalités et des comportements.
Martin : Pourquoi ne pas avoir poussé la logique de responsabilisation du patient jusqu'à son terme, en ne prenant plus du tout en charge les conséquences coûteuses et évitables des pathologies liées à des addictions diverses (cigarette, alcool, drogue) ?
Xavier Bertrand : Il vaut mieux jouer la carte de la prévention, je crois. C'est un choix philosophique. Faut-il mieux la sanction ou l'incitation ? Par nature et par philosophie, et c'est aussi celle de l'UMP, je suis davantage pour l'incitation et la prévention. C'est quoi, un comportement à risques ? A partir de combien de cigarettes par jour un fumeur a-t-il vraiment un comportement à risques ? Il existe déjà une taxation sur le tabac, l'alcool Cela créerait une sorte de " double peine ". Non, je crois qu'il faille choisir la voie de la prévention.
Gudule : Moi je ne vais pratiquement jamais chez le médecin, je ne prends pratiquement jamais de médicaments... Pourquoi devrais-je subir la réforme, comme tout le monde ?
Xavier Bertrand : En quoi Gudule va-t-il subir la réforme ? S'il ne va jamais chez le médecin, il n'aura pas à changer son comportement ! Mais le jour où il sera malade et hospitalisé, il pourra le faire. L'assurance maladie n'est pas un système individualiste, mais un système de solidarité. Si demain on a des ennuis de santé, on doit pouvoir être bien soigné. Il faut donc se demander si le comportement que l'on a est bon pour notre système de santé. Un jour ou l'autre, on a besoin de notre système de santé ! On a donc des droits mais aussi des devoirs.
Kat : Personne n'évoque l'énorme trou provoqué par la CMU : même le personnel de la sécurité sociale est scandalisé. La CMU telle qu'elle existe aujourd'hui entraîne des dérives et des abus. Avez-vous le projet de réformer cela aussi ?
Xavier Bertrand : Il faut tordre le cou aux idées reçues. J'entends trop de choses qui ne sont pas vraies. Il y a trop de rumeurs ! J'ai demandé à des amis médecins, j'ai fait faire de nombreuses études, pour connaître la réalité des choses. Chiffres sur la table, il y autant d'excès pour des personnes qui sont à la CMU que pour des personnes qui n'y sont pas. Les personnes qui sont à la CMU bénéficient d'un régime obligatoire et d'une part de CMU complémentaire. Mais on parle de personnes qui gagnent moins de 566 euros par mois ! Ces personnes doivent aussi être responsabilisées, avoir ce comportement qui évolue, mais pas moins, pas plus que les autres. N'opposons pas les Français les uns aux autres. Je le répète : on parle de gens qui gagnent moins de 566 euros par mois par personne et 182 euros de plus par personne à charge.
Docteur : Vous inspirez-vous pour votre réforme de systèmes qui marchent en Europe ou à l'étranger ?
Xavier Bertrand : Il n'y a pas d'exemple type, car le système français est très original. Le choix que les Allemands ont fait, par exemple, nous ne l'avons pas repris. Ils ont "déremboursé" massivement un certain nombre de médicaments. Ils ont transféré des activités médicales aux complémentaires. Nous, nous n'avons rien transféré du régime obligatoire aux régimes complémentaires. En clair, nous n'avons pas refilé le bébé aux mutuelles. Cela a souvent été le cas dans les sept plans successifs depuis 1977. On demande des efforts, c'est vrai, mais pour garder le même système. Chaque système correspond à l'histoire et à la sociologie particulière du pays. Il n'y a pas de recette type ou idéale Mais il nous semble que ce que nous sommes en train de faire aujourd'hui correspond le mieux aux besoins et aux perspectives du système français.
Balotin : Aujourd'hui, tout le monde est d'accord sur la nécessité d'une réforme... Mais n'y a-t-il qu'une seule réforme possible ?
Xavier Bertrand : Il y a certainement d'autres réformes possibles, mais je n'entends pas beaucoup de contre-projets de la part des socialistes. S'ils avaient des idées, ça se saurait ! Ils ont manqué de courage et d'idées. Mme Aubry dit que le projet socialiste sera prêt fin 2005 : ce n'est pas sérieux ! Les communistes, eux, ont un projet : revoir complètement le financement de la sécurité sociale de façon à régler les problèmes. Cela a le mérite d'exister, mais c'est un peu court, car solliciter davantage l'argent des entreprises ou des particuliers, ce n'est pas bon pour l'emploi, la croissance et le pouvoir d'achat. Le problème ce n'est pas de lever des impôts, c'est avant tout que l'on modifie notre comportement. C'est la seule clé du succès. Cette fois-ci, la responsabilisation est le fil conducteur de la réforme.
Zorro : Vous travaillez sur la énième réforme de l'assurance maladie. Comment pouvez-vous prétendre que celle-ci sera la bonne et pas un simple replâtrage dont le principal objectif serait de ne mécontenter personne ?
Clara : Pensez-vous qu'une réforme pourra régler durablement le gouffre de l'assurance maladie ? Ne faudrait-il pas revoir tout le système ?
Xavier Bertrand : Moi je suis attaché à notre système, où l'on cotise selon ses moyens et où l'on est soigné selon ses besoins, je veux le préserver. Même si aujourd'hui je vais peu chez le médecin, demain si je suis malade, je veux être bien soigné et avoir les meilleurs médicaments possibles. Encore une fois, il faut évoluer dans notre comportement et nos pratiques. Nous sommes vices champions du monde et champions d'Europe de la consommation de médicaments. Nous en consommons deux fois plus que les Pays-Bas et une fois et demi plus que les Allemands et les Espagnols. On n'est pourtant pas plus malade qu'eux ! On a juste pris de mauvaises habitudes. Trois quarts des boîtes de médicaments qui sont ouvertes ne sont jamais terminées. Pire : une boîte sur cinq, prescrite par le médecin et vendue par le pharmacien, n'est jamais ouverte ! 15 % des examens sont faits en double. On peut donc faire des économies formidables, si on évolue. Le maître mot est la responsabilisation. Il ne s'agit pas d'un replâtrage, car le système n'est pas cassé, il faut juste le soigner.
Nanie : Est-ce que les 1 vont être remboursés par les mutuelles ?
Xavier Bertrand: Non, surtout pas. Nous ne le voulons pas. Cet euro va permettre de prendre conscience que la santé a un coût, que derrière les 20 euros de la consultation chez le médecin, il y aura 80 euros de dépensés en moyenne, en analyses ou médicaments. Si la santé n'a pas de prix, elle a bien un coût. Cet euro permettra de s'en rendre compte. S'il était pris en charge par les mutuelles, elles augmenteraient leurs tarifs et on ne se rendrait même pas compte de ce que ça représente.
Anthonump : Est-ce que tout le monde, y compris les plus démunis, sera concerné par les 1 ?
Xavier Bertrand : Non. Car un euro, ce n'est pas pareil si on gagne 566 ou 5660 euros par mois. Dans des familles, à la fin, plusieurs consultations chez le médecin, cela finit par représenter beaucoup. Il y a d'autres façons de responsabiliser : le dossier médical personnalisé, le passage chez le médecin traitant Les bénéficiaires de la CMU, les enfants de moins de 16 ans et les femmes enceintes n'auront pas à payer ce 1 .
Sonia : Pensez-vous que la proposition d'une carte regroupant les informations des carnets de santé soit une nouveauté vraiment utile ?
Xavier Bertrand : C'est indispensable. Exemple : vous avez une syncope dans la rue, on vous emmène inconscient aux urgences. Qu'est-ce qu'on sait de vous ? Rien, pas même votre groupe sanguin ou vos allergies à tel ou tel médicament. Demain, avec la carte vitale qui donnera l'accès à votre dossier médical personnel, l'urgentiste pourra savoir qui vous êtes, éviter de refaire une analyse de sang pour connaître votre groupe sanguin (ce qui est aussi une économie), voir s'il y a des antécédents médicaux... Bref, c'est un gain de temps et d'argent énorme. Chez moi, j'ai regardé mon dossier médical papier, j'avais un dossier de 20 cm d'épaisseur, alors que je n'ai pas de problèmes de santé particuliers, mis à part quelques kilos en trop ! La carte vitale, c'est plus pratique, c'est bon pour ma santé et cela permettra de faire des économies. Pourquoi se priver ?
Nanie : Qui aura accès à la carte vitale ?
Xavier Bertrand : Le patient et son médecin traitant. Personne d'autre, ni l'employeur, ni l'assureur, ni la médecine du travail. C'est le patient qui décidera à qui il veut ouvrir son dossier médical personnel. On est dans une logique de confiance entre le médecin et le patient.
Ludovic : Pourquoi ne pas établir le principe d'une cotisation plus importante pour les plus aisés ?
Xavier Bertrand : Cela se fait aujourd'hui. La CSG est proportionnelle au revenu. Plus vous gagnez d'argent, plus vous cotisez pour le régime de sécurité sociale.
Nanie : Pourquoi les cotisations ont-elles toujours augmenté alors que le trou de la sécu a toujours augmenté lui aussi ? Il y a un illogisme dans le processus.
Xavier Bertrand : Au contraire ! C'est lié au progrès médical. On vit de plus en plus longtemps : c'est une formidable nouvelle, car on profite de ses parents, de ses grands-parents, de la vie plus longtemps. Mais avec le vieillissement, on est aussi soignés plus longtemps et cela coûte très cher. Aujourd'hui, les IRM permettent d'en savoir plus sur nos maladies et donc d'être mieux soigné, mais cela coûte cher aussi. Aujourd'hui, quand la sécurité sociale rembourse 100 euros, cela coûte en réalité 111 euros. S'il y a un trou de la sécu, c'est parce qu'on dépense plus vite qu'il n'y a de rentrées d'argent. Ce n'est pas illogique. Mais on s'est un peu habitué à vivre avec " le trou de la sécu ", dont on entend parler depuis toujours. Mais depuis 2002, le trou n'est plus en milliards de francs mais en milliards d'euros. On a augmenté de 6,56 fois son montant ! Mais ce n'est pas parce que les chiffres sont impressionnants qu'on ne peut ou qu'on ne doit rien faire. Chacun doit se demander ce qu'il peut faire : évoluer dans son comportement, faire confiance à son médecin, se poser des questions simples.
Ludovic : Vous savez bien que si les patients ne sont pas menacés - au bon sens du terme -, il n'y aura pas de changement de comportement.
Xavier Bertrand : Je ne le pense pas. Ce qu'il faut bien montrer, c'est ce qui va se passer si on ne fait rien. La menace, elle est pour le système de santé. Si on explique bien pourquoi et comment on fait les choses, je suis persuadé que cela peut marcher. Les gens ont compris, je crois, que chacun doit y mettre du sien. Ce n'est pas impossible. Je mise sur la pédagogie. Je suis persuadé que cela va marcher. Pour mieux connaître et comprendre cette réforme, vous pouvez aller sur le site www.assurancemaladie.sante.gouv.fr ou appeler le 0 825 396 396. C'est un numéro indigo, où vous aurez toutes les réponses à vos questions. Merci à tous

(source http://www.u-m-p.org, le 9 juillet 2004)
BFM - le 12 juillet 2004
Q- V. Lecasble-. Vous étiez hier encore à l'Assemblée nationale ; les députés qui travaillent le dimanche, on n'a pas vu cela depuis un certain temps. Depuis 1998, il paraît ?
R- "On attaque ce matin à nouveau le débat à 9h30. Et on va entamer la centième heure de débat dès le début de la matinée."
Q- On a envie de savoir comment cela se passe. D'abord est-ce que l'on va tenir les délais, oui ou non ? La session se termine le 29 juillet ; est-on dans les clous ?
R - "Ce sont les parlementaires qui ont maintenant la maîtrise de la conduite des débats. Cela avance lentement, mais cela avance sûrement."
Q- 55,7 amendements de l'heure, a calculé J.-L. Debré
R - "On ne risque pas l'excès de vitesse, mais cela avance lentement mais sûrement. Il nous reste 3.020 amendements à examiner ce matin. Il est vrai que je préfère les amendements de fond, qui permettent d'aller au fond du débat, mais l'opposition a aussi la responsabilité de son attitude. Mais on arrive à avoir le débat, on arrive aussi à avoir des points de convergence. Il y a un certain nombre d'amendements qui ont été adoptés"
Q- Y compris des amendements socialistes ?
R - "Oui, et même parfois à l'unanimité. Ce qui montre que le Gouvernement est ouvert. Nous avons été ouvert sur toute la partie du dialogue social, tout ce débat social avec les partenaires sociaux, avec les professionnels de santé. Nous restons également ouvert dans le débat parlementaire."
Q- Vous trouvez donc que l'opposition travaille correctement ? Il n'y a pas d'obstruction ?
R - "Je n'ai pas à porter de jugement sur ce qu'ils font. Je pense qu'il vaudrait mieux se concentrer sur des points de fond. On va avoir le débat sur la gouvernance, le débat, également, sur le financement. Je crois qu'il serait bien, aussi, que chacun fasse valoir quelles sont ses idées en la matière, parce que notamment, concernant les socialistes, s'ils avaient vraiment des idées pour réformer l'assurance maladie, il ne fallait surtout pas qu'ils se gênent quand ils étaient aux affaires, au pouvoir. Aujourd'hui, on a du mal..."
Q- On ne va pas y revenir, cela fait un certain temps quand même maintenant !
R - "Oui, mais c'est vrai quand même que l'on a aujourd'hui un déficit de 13 milliards d'euros pour la seule année. Quand il avait la croissance, quand il y avait les recettes liées à la croissance, il aurait été bien de faire ce travail de modernisation."
Q- Pour terminer sur la méthode, si vous le voulez bien : il n'y aura pas de 49-3 ? On n'en parle pas ?
R - "On a effectivement le temps d'aller jusqu'au bout du débat. Je souhaite, après avoir joué le jeu du dialogue social, effectivement aller au bout du débat parlementaire."
Q- La gauche avait dit qu'il fallait retirer la décentralisation et qu'elle ne vous embêterait pas sur la Sécu. Vous n'avez pas retiré la décentralisation, J.-P. Raffarin y vient ce matin. Et donc, ils ont envie de vous embêter sur la Sécu...
R - "Je ne pense pas qu'il y ait de marchandage possible en la matière. Je ne sais pas comment on pourrait dire "il faut enlever tel texte pour que l'on soit sympa sur tel autre texte" ! Non, il faut savoir s'il y a des idées, s'il y a des propositions, s'il y a du débat. Je suis aujourd'hui sur ce thème de l'assurance maladie ; nous sommes disponibles, avec P. Douste-Blazy, pour le Parlement. Et puis, il y a encore des choses à voir et à dire."
Q- Certaines mesures ont été adoptées, qui sont déjà importantes : le dossier médical personnalisé par exemple, mais personne n'a l'air de savoir combien cela va rapporter. P. Douste-Blazy disait 5 milliards, il dit 3,5 ; Dubernard dit "on sera contents si on parvient à compenser les dépenses par les recettes" ; où en est-on exactement ?
R - "Ce que l'on dit, avec P. Douste-Blazy, c'est que le dossier médical personnel, ce n'est pas avant tout pour faire des économies. C'est pour jouer la carte de la qualité des soins. C'est pour que l'on sache pertinemment comment est révélée notre histoire médicale..."
Q- Donc, cela ne rapportera rien ?
R - "Non, le but du jeu, avant tout, c'est de savoir exactement quel est votre état de santé, quels sont les problème de santé que vous pouvez avoir, quelles sont les incompatibilités que vous pouvez avoir des traitements. C'est cela avant tout, le dossier médical personnel."
Q- On l'a bien compris, mais on croyait qu'il y aurait des économies
R - "Qu'après, que cela amène des économies, c'est évident parce qu'il faut savoir que dans ce pays, 15 % des examens qui sont faits le sont en double. Ils sont redondants, ils sont inutiles. 15 % d'examens, cela fait par exemple 2 à 2,5 milliards d'économies. Derrière, le dossier médical personnel permet de meilleures prescriptions. Et nous sommes persuadés qu'avec le dossier médical personnel, avec le médecin traitant, avec les engagement des professionnels de santé, ce sont 3,5 milliards d'euros d'économies en 2007, que nous pouvons réaliser."
Q- Donc, vous confirmez le chiffre de P. Douste-Blazy : 3,5 milliards. Dubernard n'est pas sympa de dire que l'on va voir du mal, de dire que cela va coûter de l'argent et de [s'interroger] si l'on a les recettes suffisantes ?
R - "C'est bien évidemment un investissement en attendant, parce qu'il faut mettre en place ce dossier médical personnel. Mais si on joue la qualité des soins et si, en plus, on a des économies, le jeu en vaut la chandelle. C'est un investissements utile pour la santé et aussi pour l'économie de notre système de santé."
Q- Continuons sur les mesures : on va mettre une photo sur la carte Vitale. Cela va coûter 30 millions d'euros ou 200 millions d'euros ?
R - "Cela va coûter 35 millions d'euros, parce qu'il faut toujours se méfier des chiffres abracadabrantesques que l'on peut nous sortir, que certains services peuvent nous sortir. Nous avons un rapport officiel de l'IGAS, qui nous dit que si on profite du renouvellement de la carte Vitale, on peut avoir cette photo pour 35 millions d'euros. J'y tiens particulièrement, parce que la carte Vitale va devenir une carte d'identité pour sa santé. Et sur une carte d'identité, vous avez votre photo. C'est aussi simple que cela. La carte Vitale va aussi devenir la clef d'entrée dans ce dossier médical personnel confidentiel."
Q- Plus globalement, et plus politiquement, la gauche dénonce la mise en place d'un système qui va légitimer les déremboursements et le déconventionnement. Elle dit que la haute autorité ne sera pas indépendante. Que répondez-vous à la gauche ?
R - "C'est faux, c'est n'importe quoi ! Je trouve que d'avoir de tels propos, ce n'est pas seulement un erreur, c'est une faute politique, surtout quand on n'a rien à proposer en face. Je porte un jugement sévère, parce que dans ce débat, il faut savoir que la mission présidée par J.-L. Debré, a bien montré que nous parlons du même système de santé. Nous sommes attachés, les uns et les autres, aux mêmes principes. Seulement, dans ce débat, concernant les idées, notamment des socialistes, c'est "Waterloo, morne plaine" ! Nous n'avons pas vu depuis le début, de vraies propositions socialistes. A chaque fois, ils sont d'accord sur les principes, ils sont d'accord sur le dossier médical personnel, sur le médecin traitant. D'ailleurs, je vous signale que plus des trois quarts des Français sont aussi d'accord là-dessus. Et puis, quand on arrive aux modalités, ils sont beaucoup plus gênés aux entournures. Ils ont du mal à aller jusqu'au bout des choses. En tout cas, il y a ceux qui proposent, qui avancent - c'est le cas du Gouvernement et de sa majorité -, et il y a ceux qui se contente de critiquer. Ce n'est pas seulement une erreur, c'est une faute politique de leur part."
Q- Quand J.-M. Le Guen dit que plus on est malade, plus on va payer, puisqu'il y aura une contribution forfaitaire d'un euro par patient qui va être instaurée, il a raison là-dessus quand même ?
R - "Bien sûr que c'est faux ! Encore une fois, J.-M. Le Guen tonne, il s'emporte dans cet hémicycle, mais seulement, pour le reste, il n'y a pas vraiment de propositions crédibles. Nous avons fait voter un amendement pour plafonner le un euro ..."
Q- à 50 euros ! Cela fait quand même pas mal, cela commence à faire cher !
R - "Savez-vous quelle est la moyenne des consultations dans ce pays ? Nous allons, en général, voir un professionnel de santé huit fois dans l'année. Donc, cela nous permet, avec ce plafonnement, d'éviter que ceux qui sont le plus malades, puissent, encore une fois, être pénalisés."
Q- 50 euros, cela fait beaucoup quand même ! Vous êtes d'accord là-dessus ?
R - "Regardez combien de personnes vont être concernées, en définitive, par le un euro, dans la mesure où nous allons huit fois dans l'année, en général, voir un médecin. Cela fait huit euros à l'année, sans oublier que les enfants ne sont pas concernés, ainsi que les personnes avec la CMU et que les femmes enceintes..."
Q- La double peine sur les arrêts maladie injustifiés, cela fait beaucoup ?
R - "Qu'est-ce que vous appelez "la double peine" ?"
Q- Il va y avoir une sanction et vous allez vraiment vérifier...
R - "Peut-on un court instant rappeler de quoi on parle ? Il y a des arrêts de travail qui sont abusifs, eh bien on veut mettre un terme aux arrêts de travail abusif. Je préfère mettre un terme à des abus, en pouvant préserver le système. On ne peut pas se satisfaire qu'il y ait 6 à 10 % d'arrêts de travail abusifs dans ce pays. Ce sont les autres qui payent pour ces arrêts de travail abusifs."
Q- Donc, il va falloir vérifier et sanctionner, les deux ?
R - "Si vous avez été en arrêt de travail et que vous avez touché des sommes que vous n'auriez pas dû toucher, eh bien il faut aussi que cela s'arrête, tout simplement."
Q- N. Sarkozy a donné une très longue interview au Monde, samedi, à quelques jours du discours de J. Chirac, le 14 juillet. Ce n'est pas bien ce qu'il a fait ?!
R - "Je n'ai pas à porter de jugement. J'ai lu ce qu'a dit N. Sarkozy. Je vois toujours une grande différence entre ce que je peux lire sur les rapports au sein du Gouvernement et ce que je peux vivre. Dans ce que je vis, je vois qu'il y a vraiment une solidarité gouvernementale et que tout le monde travaille dans le même sens."
Q- Donc, mercredi, tout le monde sera à la garden party de l'Elysée ? il parait même qu'il y aura tous les secrétaires départementaux de l'UMP, pour montrer que la chiraquie tient l'UMP... C'est vrai ?
R- "Je ne sais pas. Mais le secrétaire d'Etat à l'Assurance maladie y sera et je serai attentif à ce que dira le président de la République."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 13 juillet 2004)