Déclaration de M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, sur les grandes orientations du plan national Santé-Environnement, notamment pour limiter l'impact des particules fines, des substances toxiques d'origine industrielle et des pesticides, à l'Assemblée nationale le 9 décembre 2004.

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Circonstance : 2emes Rencontres parlementaires sur la "Santé - Environnement" sur le thème des pollutions chimiques, à l'Assemblée nationale le 9 décembre 2004

Texte intégral

Monsieur le Président,
Madame la Présidente,
Mesdames, Messieurs les parlementaires,
Mesdames, messieurs les professeurs et médecins,
Mesdames, Messieurs les directeurs,
Mesdames, Messieurs,
Votre présence aujourd'hui montre que vous êtes préoccupés par l'impact des pollutions chimiques sur la santé et vous avez raison.
Il s'agit, pour moi aussi, d'un enjeu essentiel. C'est une priorité d'action que j'ai fixée pour le ministère de l'écologie et du développement durable.
Il s'agit véritablement d'une question de société sur laquelle nos concitoyens sont de plus en plus sensibles. La déclaration de l'association UFC - Que choisir, il y a quelques semaines, sur les émissions de benzène et autres substances cancérigènes des désodorisants en est un exemple.
Permettez-moi donc, Madame la présidente Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, de vous féliciter chaleureusement de l'organisation de ces rencontres parlementaires.
Vous pourrez témoigner en tant qu'élu, scientifique, médecin ou association de ce que vous constatez concrètement sur le terrain.
Car les faits sont là. L'impact des produits chimiques sur la santé est une réalité.
en France, près de 30 000 décès prématurés sont attribuables à une exposition chronique aux différents polluants chimiques de l'air extérieur.
de manière plus globale, les experts scientifiques de la commission d'orientation du plan national santé-environnement estiment de 7 à 20 % les cancers imputables à des facteurs environnementaux dont les produits chimiques.
Après avoir su vaincre les grandes maladies infectieuses, peste, choléra ou tuberculose, nous devons prendre garde à ne pas créer de nouvelles formes d'épidémies qui seraient dues à des facteurs environnementaux.
Il ne s'agit pas de dire non au progrès, mais de s'inscrire dans un esprit de développement durable.
Nous sommes là au cur même du principe de précaution qui sera introduit dans la charte de l'environnement.
On a beaucoup entendu de choses sur ce principe.
Mais qu'en est-il réellement ?
La charte pose simplement la définition juridique de ce principe, ce qui va clarifier les choses.
Lorsqu'un projet risquera d'avoir des dommages graves et irréversibles sur l'environnement, mais en l'absence de certitude scientifique, les autorités publiques devront prendre des mesures transitoires et proportionnées et les accompagner d'un effort d'évaluation des risques.
La Charte de l'environnement va ainsi stimuler la recherche. Le principe de précaution sera véritablement un principe d'action.
C'est dans cet état d'esprit et face à ce défi collectif des impacts sur la santé de notre environnement, que le Premier ministre a présenté, le 21 juin 2004, un plan national santé-environnement.
Ces actions bénéficieront au-delà de la santé humaine à la préservation de la vitalité et de la diversité de la faune et de la flore.
Permettez-moi de vous présenter trois des domaines qui me paraissent particulièrement importants :
les particules fines,
les substances toxiques d'origine industrielle
les pesticides
Tout d'abord, quel est l'impact sanitaire des particules et que pouvons nous faire ?
Une étude récente de l'Agence Française de Sécurité Sanitaire Environnementale évalue entre 6 500 et 9 500 le nombre de décès attribuables aux particules fines en milieu urbain. C'est considérable.
C'est pourquoi, j'ai engagé des actions fortes notamment dans le domaine des transports.
J'ai indiqué lors du Conseil des Ministres de l'Environnement du 14 octobre dernier, au nom du gouvernement, que la France était favorable à une généralisation des filtres à particules en 2010, dans le cadre de la norme européenne sur les transports routiers Euro V. Il nous fallait franchir ce pas.
Je félicite les constructeurs automobiles qui sont désormais d'accord pour cette généralisation.
En complément de ces progrès je souhaite développer l'effort sur les véhicules déjà en circulation et notamment les bus.
Des tests effectués par l'ADEME ont montré qu'il était possible d'équiper en filtres à particules des bus diesels en circulation. Les gains en terme de réduction des émissions de particules sont significatifs : 90 % d'émission en moins.
Je ne veux plus qu'un bus pollue en ville.
J'ai donc souhaité équiper tous les bus qui peuvent l'être en filtre à particules. Ainsi pour 2005, 9 M viennent d'être ajoutés à mon budget à ce titre dans le projet de loi de finance rectificative déposé devant le parlement.
Au-delà il faudra se pencher sur les autres sources de particules, notamment dans le bâtiment.
J'ai déjà obtenu qu'un crédit d'impôt de 25% pour l'équipement en chaudières à condensation soit inscrit en loi de finances. Cela contribuera à la réduction des pollutions en ville dues aux émissions en particules des chaudières à fuel.
Deuxièmement, l'exposition des populations aux substances chimiques
Il s'agit d'un sujet essentiel sur lequel je suis, au nom du gouvernement, totalement engagé, notamment au niveau européen à travers le projet de directive REACH. Il s'agit d'évaluer plus de 30 000 substances chimiques, actuellement sur le marché en commençant par les plus dangereuses.
En matière de substances toxiques d'origine industrielle, j'ai déjà fixé cet été des objectifs de réduction des émissions ambitieux aux préfets : 85 % pour les dioxines, 65 % pour le plomb, 50 % pour le cadmium, 35 % pour le benzène.
Dans le domaine des incinérateurs, de nouvelles normes d'émission sont applicables au 28 décembre 2005 notamment en matière de dioxine. Je serai extrêmement ferme sur ce point. Les incinérateurs qui ne seront pas aux normes, seront fermés.
Enfin, en ce qui concerne les pesticides, quel est le niveau d'imprégnation de notre environnement ?
Le dernier rapport de l'Institut français de l'Environnement publié cette année montre que 75 % des rivières contiennent des pesticides ainsi que 50 % des nappes souterraines.
C'est très important. Au-delà des eaux, des traces de pesticides sont également présentes dans l'air, certains sols et aliments.
C'est pourquoi dans le cadre du projet de loi sur l'eau que je présenterai en conseil des ministres en début d'année prochaine, des mesures ambitieuses ont été
inscrites :
une redevance sur les pesticides remplacera l'actuelle taxe générale sur les activités polluantes. Elle sera perçue au niveau des agences de l'eau, qui en contrepartie développeront des actions locales pour réduire les pollutions notamment en amont des captages d'eau potable,
un contrôle des pulvérisateurs agricoles sera mis en place.
Voici donc au moins trois domaines, les particules, les substances toxiques et les pesticides pour lesquels j'entends être résolument engagé.
Et si le plan national santé environnement constitue un élément fondateur et interministériel fort pour appréhender de façon globale le sujet, je serai très attentif à toutes vos propositions dans ces domaines, car il nous faudra aller encore plus loin.
Des crédits nouveaux ont été votés par le Parlement pour 2005 pour ce plan. Il s'agit de 10 millions d'euros pour le ministère de l'écologie et du développement durable.
Mais, pour le mettre en oeuvre, nous aurons besoin d'une expertise scientifique précise et renforcée et d'un engagement fort des élus.
Je sais que je peux compter sur vous, élus, médecins, experts et associations mais aussi vous les industriels pour répondre à ce défi.
L'écologie a besoin de vous.
Et je tiens encore une fois à remercier le président de l'Assemblée nationale, Jean-Louis DEBRE, et la présidente du groupe d'études " santé et environnement ", Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, pour l'impulsion qu'ils donnent à ce sujet et la réflexion qu'ils engagent aujourd'hui. Je suis sûr qu'elle sera précieuse pour l'action du gouvernement.
Je vous souhaite de très bons travaux.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.environnement.gouv.fr, le 9 décembre 2004)