Déclaration de M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères, lors de la conférence de presse conjointe avec M. Solomon Passy, ministre bulgare des affaires étrangères, sur les relations franco-bulgares, l'adhésion de la Bulgarie à l'Union européenne, la condamnation à mort des infirmières bulgares en Libye, la crise politique en Ukraine et la francophonie en Bulgarie, Sofia le 6 décembre 2004.

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Circonstance : Voyage de Michel Barnier en Bulgarie le 6 décembre 2004 : participation à la réunion du Conseil ministériel de l'OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) et entretiens bilatéraux, à Sofia le 6

Texte intégral

Merci beaucoup, Cher Solomon, pour ce dialogue entre nous. Je suis heureux de te retrouver ici dans cette capitale de la Bulgarie. Il s'agit la première visite d'un ministre des Affaires étrangères français à Sofia depuis cinq ans. Je suis déjà venu ici dans d'autres fonctions, comme commissaire européen, pour aider ce pays sur le chemin difficile et important de l'adhésion à l'Union européenne. C'est dans cet esprit que j'ai transmis au président et au Premier ministre bulgares, qui m'ont reçu tout à l'heure, le message d'amitié et de soutien du président de la République, Jacques Chirac. La France continuera d'accompagner la Bulgarie et la Roumanie, notamment pour le cap important du 17 décembre, afin qu'une date soit fixée le plus tôt possible en 2005 pour la signature du traité d'adhésion de ces deux nouveaux pays membres. Mais aussi, après, une fois ces pays rentrés dans l'Union, pour que leur adhésion soit réussie au bénéfice des citoyens.
S'agissant de l'OSCE, la Bulgarie a réalisé un travail très important sous l'impulsion du gouvernement et notamment de Solomon Passy pour conduire cette présidence depuis janvier et pour organiser cette grande conférence de Sofia. Je voudrais publiquement remercier et féliciter mon collègue et ami Solomon Passy et toute son équipe. L'OSCE est importante pour nous tous, pour la diplomatie bulgare, qui a montré son rayonnement et son dynamisme, ainsi que pour la place que tient ce pays et qu'il tiendra, s'agissant notamment de la stabilité des Balkans.
Je vais enfin dire un mot d'un sujet largement évoqué ici, la situation de l'Ukraine. La France avec les autres pays européens et par la voix de notre Secrétaire général du Conseil, Javier Solana, a suivi des principes : non pas un camp contre l'autre, un candidat contre l'autre, mais des principes. Ces principes sont celui de la démocratie avec des élections transparentes et équitables, celui du refus de la violence, celui de l'unité territoriale de l'Ukraine et celui de la stabilité régionale. Ce sont les principes qui nous animent à travers l'Union européenne. Les institutions ukrainiennes ont pris la décision lucide de trouver une issue politique et pacifique à cette crise avec un nouveau deuxième tour. Nous pensons que, dans le cadre de l'OSCE, toute l'aide doit être apportée pour accompagner la bonne préparation, impartiale, de ces élections. Et la France a annoncé ce matin par ma voix qu'elle était prête à contribuer financièrement à cet effort exceptionnel de l'OSCE.
Merci beaucoup.
Q - Sur le sort des infirmières bulgares condamnées à mort en Libye, comparant cette affaire avec celle du boeing d'UTA pour la France et présentant les dernières propositions du ministre des Affaires étrangères libyen comme un "marchandage".
R - D'abord, je ne retiendrais pas le mot de marchandage. Je ne comparerais pas deux situations qui ne sont pas comparables. J'ai évoqué cette question lors de mon entretien avec M. Passy et, avant, avec le président de la République et le Premier ministre. Je veux également confirmer que la situation des infirmières bulgares a été abordée à Tripoli à deux reprises, lorsque je suis allé moi-même en visite officielle il y a quelques semaines et quand le président de la République, M. Chirac, est allé en Libye plus récemment. Nous avons évoqué cette affaire non seulement en tant que responsables français, mais aussi en tant que responsables européens parce que nous considérons que cette situation touchant la Bulgarie intéresse toute l'Union européenne. Nous avons exprimé aux autorités libyennes d'abord notre souci de respecter les institutions souveraines de la Libye et dit que, dans le cadre de cette souveraineté, une solution devait être trouvée, non seulement pour les infirmières bulgares mais aussi pour les enfants et les familles touchés par cette terrible maladie. Sur ces deux sujets, nous pensons que la solidarité européenne doit s'exprimer et que l'Union européenne doit intervenir, aux côtés de la Bulgarie, pour proposer des solutions aux autorités libyennes. Toute information que nous recevrons de Libye sera naturellement transmise aux autorités de Sofia.
Q - Sur les positions respectives de l'Union européenne et de la Russie sur la situation en Ukraine.
R - Je veux bien redire les principes qui guident notre action et qui doivent accompagner la parole et l'action de Javier Solana dans la crise ukrainienne. Ces principes et cette action doivent être compris par nos partenaires et amis russes pour ce qu'ils sont. A aucun moment, ils ne doivent être pris pour un signal inamical à l'égard de la Russie, mais comme un certain nombre de principes auxquels nous tenons. S'agissant de la démocratie, de la transparence et de l'équité des élections, le peuple ukrainien a le droit de demander que sa volonté soit respectée. C'est dans ce sens que le président Koutchma s'est exprimé il y a quelques jours et que la Cour suprême vient de décider que soit réorganisé un deuxième tour. Le deuxième principe, c'est le refus de la violence, c'est-à-dire une solution politique et pacifique. Le troisième principe est celui de l'unité territoriale. Le quatrième principe qui concerne directement le partenariat et le voisinage avec ce grand pays qu'est la Russie, c'est la stabilité régionale. Et s'il y a eu des incompréhensions sur tel ou tel aspect de cette attitude, je pense que la manière dont je le dis devrait permettre de lever ces incompréhensions.
Q - Sur la francophonie en Bulgarie. Comment l'encourager ?
R - Nous sommes très heureux que la Bulgarie et la Roumanie comme d'autres pays d'Europe orientale, la Géorgie, l'Albanie, soient membres à part entière, membres associés ou observateurs de la Francophonie qui vient d'ailleurs de tenir son sommet la semaine dernière à Ouagadougou. J'y ai accompagné le président Chirac. J'ai observé d'ailleurs au cours de ce sommet que la Francophonie ne se comportait pas seulement comme un espace de partage d'une langue ou d'une certaine idée de la diversité culturelle mais aussi comme un espace où l'on parle politique.
Que peut-on faire ? Multiplier les échanges. Recevoir des étudiants. Ouvrir des centres culturels comme celui que la Bulgarie vient d'ouvrir à Paris et le nôtre qui va, je l'espère, s'agrandir à Sofia. Réaliser des expositions. Faire en sorte que la langue française soit pratiquée par un plus grand nombre de jeunes Bulgares. C'est dans ce sens que notre Ambassadeur et ses services intensifieront leur action.
Q - Quelle sera la contribution de la France pour l'observation des élections en Ukraine ?
R - Notre contribution n'est pas fixée mais sera de plusieurs centaines de milliers d'euros.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 décembre 2004)