Texte intégral
Déclaration de M. Ernest-Antoine Seillière le 07/09/2004 :
" Nous avons passé deux heures avec le ministre du travail pour commenter, examiner, dans une ambiance constructive, l'ensemble des sujets, très nombreux, qui aujourd'hui préoccupent les entreprises. Ils sont essentiels pour maintenir la croissance et l'emploi.
Première question, le code du travail, dont la complexité, la lourdeur, les interdits, les sanctions pénales sont une préoccupation pour toutes les entreprises de notre pays, notamment les PME. La simplification du code du travail, la nécessité de son allègement, sa modernisation, sont trois thèmes sur lesquels le ministre s'est dit décidé à avancer. Nous espérons vivement que le ministre sera en mesure de présenter au gouvernement des initiatives dans ce domaine.
Autre thème, les 35 heures. La position du MEDEF est bien connue : rendez la liberté aux entreprises de déterminer avec leur personnel la durée du travail, la rémunération des heures supplémentaires, l'organisation du temps partiel. Sortons de ces normes générales qui fâchent tout le monde. La position du MEDEF est très ferme. Nous n'avons pas, pour l'instant, d'échos du côté du gouvernement concernant nos propositions qui sont pourtant extrêmement travaillées.
Nous avons fait le point sur la négociation restructuration. Si elle n'aboutit pas, le gouvernement devra prendre ses responsabilités. La négociation est toujours en cours.
Après avoir abordé toutes ces questions, j'ai pour ma part souligné et redit que les entreprises de notre pays attendent depuis mai 2002 que l'on prenne sur les sujets essentiels, de la simplification, de la modernisation du code du travail, de la liberté du temps de travail rendu aux entreprises, des dispositions qui permettent au contrat de se substituer par rapport à la loi : Pour l'instant, rien n'a été fait.
A propos de la hausse du SMIC et du fait que les allégements de charges n'aient pas été retenus, les entrepreneurs, notamment d'entreprises de petite taille, ont le sentiment qu'ils ne sont pas entendus et compris. "
(Source http://www.medef.fr, le 9 décembre 2004)
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Interview de M. Ernest-Antoine Seillière, le 8 septembre 2004 :
Q- P.-L. Séguillon : Que pense le président du Medef et le patron privé que vous êtes de la manière dont l'Etat-actionnaire gouverne les entreprises dont il a la charge, je pense au remplacement de F. Roussely par le nouveau pdg d'EDF, après quasiment trois mois de vacance ?
R- E.-A. Seillière : Au lendemain tout de même de la privatisation de France Télécom, c'est-à-dire, une énorme administration qui est devenue une entreprise privée, je crois que le Medef ne va faire le procès de personne. Une entreprise publique, on a l'habitude de voir, en effet, certaines querelles politiques ou autres, au moment du changement de responsables. Ce que je crois, c'est que le résultat des courses...
Q-Mais est-ce mauvais pour l'image du Gouvernement, mauvais pour l'entreprise ?
R- Au final, un homme qui est parfaitement compétent, qui est du secteur, qui gérait GAZ de France, qui passe à Electricité de France, on peut dire quand même que l'on est resté dans le domaine d'une compétence, et je pense que le Medef n'a rien à dire là-dessus.
Q-Parlons du Medef, et peut-être aurez-vous des choses à dire, sur vos rencontres avec G. Larcher, qui est le ministre délégué des Relations au Travail, que vous avez rencontré après les autres organisations syndicales. De cette rencontre tirez-vous d'abord, de manière générale, la conclusion que vos relations sont meilleures avec le Gouvernement ou qu'elles sont toujours aussi tendues ?
R- Nos relations avec le Gouvernement sont, par définition, professionnelles. Nous avançons pour les entreprises que nous représentons, et il y en a des centaines de milliers, des propositions, en faisant état de leurs préoccupations. Et c'est vrai qu'à cette rentrée, notamment après les universités d'été du Medef, qui nous mettent en relation avec des milliers de petits entrepreneurs venus de la France entière, on a senti de leur part une très grande impatience, je dirais même une certaine exaspération qui se résume par une formule : pour nous, entrepreneur de terrain, qui tous les jours gérons nos entreprises face aux difficultés de la concurrence, etc., en réalité, depuis qu'il y a eu alternance, c'est-à-dire depuis deux ans et demi presque, rien n'a changé. Et cela, si vous voulez, c'est un message que nous avons entendu cinq sur cinq, et que j'ai exprimé au Gouvernement en disant : vous avez...
Q-Attendez, c'est un message qui est fondé objectivement ou qui est simplement dans la subjectivité des chefs d'entreprise ?
R- Non, "objectivement". Vous êtes chef d'entreprise...
Q-Vous pensez que rien n'a changé ?!
R- vous conduisez votre entreprise par rapport à il y a deux ans et demi, rien n'a changé !
Q-Assouplissement des 35 heures ; la suspension de la loi sur les licenciements...
R- "Assouplissement sur les 35 heures" mais attendez, tout cela n'a absolument pas touché, bien entendu, au quotidien des entreprises moyennes de notre pays qui sont des centaines de milliers. On a entamé, très lentement, avec beaucoup de circonspection, les changements que l'on juge nécessaires par rapport aux énormes difficultés mises sur les entreprises par le gouvernement précédent. Mais on a entamé tout cela, et rien ne s'est passé encore concrètement. Alors, le message est clair : allons-y, concrètement, par des décisions qui se traduisent concrètement par des changements dans les entreprises.
Q-Prenons un exemple très concret : vous avez discuté hier d'un certain nombre de sujets. D'abord des 35 heures : vous, vous proposez une solution simple, "le tout libéral", si je puis dire, que, dans les entreprises, chaque entreprise puisse discuter, s'entendre avec ses salariés sur le temps de travail, la rémunération des heures supplémentaires. Est-ce possible au regard des résistances syndicales ? Le Gouvernement peut-il aller dans votre sens ?
R- Ce que nous proposons, je ne vois pas au monde, qui peut dire que cela n'est pas possible ! Dans chaque entreprise, l'entrepreneur, l'employeur et son personnel se mettent d'accord sur la manière dont on travaille ; je dis bien "se mettent d'accord" - ne sont pas soumis à l'oukase ni de la loi, ni des règlements -, discutent et conviennent de quelque chose.
Q-Ce que vous dites vaut pour les grandes entreprises, mais cela vaut-il pour des petites entreprises où, de fait, des salariés mal syndiqués deviennent dans ce type de relations, otages du bon vouloir des patrons ?
R- Attendez"otages" !! D'abord, je vous en supplie, n'utilisez pas ces termes réservés aux assassins en Irak ! Il n'y a pas "d'otages", il n'y a pas de chantage dans les entreprises ! Il y a des propositions, des négociations, des conversations. Nous ne pouvons pas accepter ces mots-là ! Mais c'est très simple : si dans une entreprise, on ne se met pas d'accord, la loi s'applique. Nous ne sommes pas pour la suppression de la loi. Nous sommes pour la substitution à la loi qui s'impose, la volonté et le contrat négocié entre l'entrepreneur et ses salariés, dans le cadre de discussions qui sont autour du projet d'entreprises. Chacun le comprend très bien.
Q-Faute de prendre totalement en compte votre souhait, G. Larcher vous a-t-il fait des propositions acceptables ?
R- Non, il ne nous a pas fait de propositions acceptables, il a évoqué quelques évolutions techniques qui portent sur un certain nombre de sujets qui ne sont pas d'ailleurs négligeables.
Q-Par exemple ?
La manière dont on pourrait, par exemple, imputer sur un compte d'épargne-temps, valable et imputable sur la retraite, du temps de travail que l'on aurait effectivement fait et qui n'aurait pas été dans les 35 heures. Enfin, nous avons un certain nombre de sujets qui sont des corrections minimes qui peuvent être, en effet, rendre la chose moins difficile dans les entreprises. Mais cela n'est pas le changement fondamental que nous demandons, et qui implique que l'on fasse confiance aux entreprises, une à une, pour régler avec leurs salariés le problème de l'organisation du temps, bien entendu, du prix des heures supplémentaires. Pourquoi 10, pourquoi 25 ? D'où sortent ces chiffres ? Je peux convenir avec vous si nous avons un projet commun, que ce sera 30. Ou bien il y a une urgence qui fait qu'on ne peut pas payer plus de 8. Tout ceci doit maintenant "s'atomiser" en quelque sorte, au niveau des entreprises. Assez de ces grandes règles générales, sorties de je ne sais où, et s'appliquant à 2 millions d'entreprises ! Voilà notre conviction. Et nous sommes d'ailleurs convaincus que l'on en viendrait là. Pour l'instant, le Gouvernement, lui, politiquement n'ose pas aborder ce sujet, et se contente donc de mini décisions, dont, encore une fois, on peut dire qu'elles sont acceptables par le Medef, mais qui ne changeront pas du tout la compétitivité de notre pays, qui est finalement le problème.
Q-Vous pensez qu'un autre gouvernement ou qu'un N. Sarkozy serait mieux à même d'aller dans votre sens que J.-P. Raffarin ?
R- On verra. On verra comment tout ceci évolue. Mais enfin, nous ne cesserons pas, nous...
Q-Vous avez des préférences davantage politiques au point de vue de l'efficacité de l'entreprise ?
R- Non, non. Vous n'allez pas m'entraîner sur ce terrain. Nous disons la même chose à tous. Il y a peut-être, en effet, demain, des gens qui entendront mieux ce que nous disons. Nous considérons que le Gouvernement, jusqu'à présent, ne nous a pas entendus. Je crois que c'est une chose que les entrepreneurs disent avec beaucoup de force. Ils le disent avec force parce que c'est vrai.
Q-Vous avez également, avec G. Larcher, évoqué le traitement social, j'imagine des restructurations. Et hier, D. Gauthier-Sauvagnac, a expliqué que le sujet serait clos, d'une manière ou d'une autre, d'ici à la fin septembre. Question simple : préférez-vous, plutôt qu'un accord paritaire qui signifierait "discussions", que l'on passe par loi en espérant que cela vous sera plus favorable ?
R- On s'en souvient, on a mis en place des dispositifs sur les restructurations, c'est-à-dire, sur la nécessaire évolution des entreprises quand il y a des problèmes, d'un système, là aussi, à peu près unique au monde, qui bloque tout, qui empêche les entreprises d'évoluer, et qui ont été mis en place, souvenez-vous, à la fin du gouvernement Jospin pour des raisons purement politiques. Arrive l'alternance, on aurait été en droit de dire : on supprime ces dispositifs jugés par tous inapplicables. Pas du tout. On les suspend, ce qui est déjà étrange. Et ensuite, les ayant suspendus, on compte sur les partenaires sociaux pour se mettre d'accord sur les sujets les plus difficiles de la relation dans l'entreprise. Alors...
Q-Vous êtes un partisan de la négociation social ?
R- Nous avons tenté, nous avons négocié pendant 18 mois, nous sommes actuellement pratiquement arrivés à la fin de la négociation, et nous ne sommes pas du sentiment que l'on arrivera à un accord. Je crois que c'est au-dessus de la force des partenaires sociaux d'y arriver. La loi a imposé des choses, que la loi les modifie. Que le Gouvernement prenne ses responsabilités, c'est lui qui est responsable de l'intérêt général dans notre pays, qui doit mettre les entreprises en condition de réussir. On sait que ceci les empêche de réussir, qu'il fasse le nécessaire, c'est ce que nous avons dit à M. Larcher avec beaucoup de force, si, comme nous le pensons, bien entendu, les négociations n'aboutissent finalement pas.
Q-D'une manière générale, vous trouvez ce "pauvre"- je reprends votre expression - "ce pauvre J.-P. Raffarin", trop timide, trop lent, trop attentiste ?
R- Je me suis excusé auprès de Monsieur Raffarin, par une lettre personnelle que la presse a publiée, sur l'utilisation d'un adjectif qui est blessant et que je ne voulais pas être le contexte était passionné, mais peu importe. Donc, je ne reprendrai pas aucun adjectif pour qualifier ce que fait le chef du Gouvernement. Nous avons en réalité aujourd'hui à lui demander, puisqu'il est en position de mener son gouvernement, de mettre en uvre très rapidement, sur l'évolution du Code du travail, sur les 35 heures, et sur les prélèvements - souvenez-vous, les allégements de charges finalement qui n'ont pas été donnés aux entrepreneurs -, nous lui demandons d'agir concrètement, vite et dans l'urgence. Car ce qui est en cause, c'est la réussite économique de notre pays, la croissance et l'emploi.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 8 septembre 2004)
" Nous avons passé deux heures avec le ministre du travail pour commenter, examiner, dans une ambiance constructive, l'ensemble des sujets, très nombreux, qui aujourd'hui préoccupent les entreprises. Ils sont essentiels pour maintenir la croissance et l'emploi.
Première question, le code du travail, dont la complexité, la lourdeur, les interdits, les sanctions pénales sont une préoccupation pour toutes les entreprises de notre pays, notamment les PME. La simplification du code du travail, la nécessité de son allègement, sa modernisation, sont trois thèmes sur lesquels le ministre s'est dit décidé à avancer. Nous espérons vivement que le ministre sera en mesure de présenter au gouvernement des initiatives dans ce domaine.
Autre thème, les 35 heures. La position du MEDEF est bien connue : rendez la liberté aux entreprises de déterminer avec leur personnel la durée du travail, la rémunération des heures supplémentaires, l'organisation du temps partiel. Sortons de ces normes générales qui fâchent tout le monde. La position du MEDEF est très ferme. Nous n'avons pas, pour l'instant, d'échos du côté du gouvernement concernant nos propositions qui sont pourtant extrêmement travaillées.
Nous avons fait le point sur la négociation restructuration. Si elle n'aboutit pas, le gouvernement devra prendre ses responsabilités. La négociation est toujours en cours.
Après avoir abordé toutes ces questions, j'ai pour ma part souligné et redit que les entreprises de notre pays attendent depuis mai 2002 que l'on prenne sur les sujets essentiels, de la simplification, de la modernisation du code du travail, de la liberté du temps de travail rendu aux entreprises, des dispositions qui permettent au contrat de se substituer par rapport à la loi : Pour l'instant, rien n'a été fait.
A propos de la hausse du SMIC et du fait que les allégements de charges n'aient pas été retenus, les entrepreneurs, notamment d'entreprises de petite taille, ont le sentiment qu'ils ne sont pas entendus et compris. "
(Source http://www.medef.fr, le 9 décembre 2004)
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Interview de M. Ernest-Antoine Seillière, le 8 septembre 2004 :
Q- P.-L. Séguillon : Que pense le président du Medef et le patron privé que vous êtes de la manière dont l'Etat-actionnaire gouverne les entreprises dont il a la charge, je pense au remplacement de F. Roussely par le nouveau pdg d'EDF, après quasiment trois mois de vacance ?
R- E.-A. Seillière : Au lendemain tout de même de la privatisation de France Télécom, c'est-à-dire, une énorme administration qui est devenue une entreprise privée, je crois que le Medef ne va faire le procès de personne. Une entreprise publique, on a l'habitude de voir, en effet, certaines querelles politiques ou autres, au moment du changement de responsables. Ce que je crois, c'est que le résultat des courses...
Q-Mais est-ce mauvais pour l'image du Gouvernement, mauvais pour l'entreprise ?
R- Au final, un homme qui est parfaitement compétent, qui est du secteur, qui gérait GAZ de France, qui passe à Electricité de France, on peut dire quand même que l'on est resté dans le domaine d'une compétence, et je pense que le Medef n'a rien à dire là-dessus.
Q-Parlons du Medef, et peut-être aurez-vous des choses à dire, sur vos rencontres avec G. Larcher, qui est le ministre délégué des Relations au Travail, que vous avez rencontré après les autres organisations syndicales. De cette rencontre tirez-vous d'abord, de manière générale, la conclusion que vos relations sont meilleures avec le Gouvernement ou qu'elles sont toujours aussi tendues ?
R- Nos relations avec le Gouvernement sont, par définition, professionnelles. Nous avançons pour les entreprises que nous représentons, et il y en a des centaines de milliers, des propositions, en faisant état de leurs préoccupations. Et c'est vrai qu'à cette rentrée, notamment après les universités d'été du Medef, qui nous mettent en relation avec des milliers de petits entrepreneurs venus de la France entière, on a senti de leur part une très grande impatience, je dirais même une certaine exaspération qui se résume par une formule : pour nous, entrepreneur de terrain, qui tous les jours gérons nos entreprises face aux difficultés de la concurrence, etc., en réalité, depuis qu'il y a eu alternance, c'est-à-dire depuis deux ans et demi presque, rien n'a changé. Et cela, si vous voulez, c'est un message que nous avons entendu cinq sur cinq, et que j'ai exprimé au Gouvernement en disant : vous avez...
Q-Attendez, c'est un message qui est fondé objectivement ou qui est simplement dans la subjectivité des chefs d'entreprise ?
R- Non, "objectivement". Vous êtes chef d'entreprise...
Q-Vous pensez que rien n'a changé ?!
R- vous conduisez votre entreprise par rapport à il y a deux ans et demi, rien n'a changé !
Q-Assouplissement des 35 heures ; la suspension de la loi sur les licenciements...
R- "Assouplissement sur les 35 heures" mais attendez, tout cela n'a absolument pas touché, bien entendu, au quotidien des entreprises moyennes de notre pays qui sont des centaines de milliers. On a entamé, très lentement, avec beaucoup de circonspection, les changements que l'on juge nécessaires par rapport aux énormes difficultés mises sur les entreprises par le gouvernement précédent. Mais on a entamé tout cela, et rien ne s'est passé encore concrètement. Alors, le message est clair : allons-y, concrètement, par des décisions qui se traduisent concrètement par des changements dans les entreprises.
Q-Prenons un exemple très concret : vous avez discuté hier d'un certain nombre de sujets. D'abord des 35 heures : vous, vous proposez une solution simple, "le tout libéral", si je puis dire, que, dans les entreprises, chaque entreprise puisse discuter, s'entendre avec ses salariés sur le temps de travail, la rémunération des heures supplémentaires. Est-ce possible au regard des résistances syndicales ? Le Gouvernement peut-il aller dans votre sens ?
R- Ce que nous proposons, je ne vois pas au monde, qui peut dire que cela n'est pas possible ! Dans chaque entreprise, l'entrepreneur, l'employeur et son personnel se mettent d'accord sur la manière dont on travaille ; je dis bien "se mettent d'accord" - ne sont pas soumis à l'oukase ni de la loi, ni des règlements -, discutent et conviennent de quelque chose.
Q-Ce que vous dites vaut pour les grandes entreprises, mais cela vaut-il pour des petites entreprises où, de fait, des salariés mal syndiqués deviennent dans ce type de relations, otages du bon vouloir des patrons ?
R- Attendez"otages" !! D'abord, je vous en supplie, n'utilisez pas ces termes réservés aux assassins en Irak ! Il n'y a pas "d'otages", il n'y a pas de chantage dans les entreprises ! Il y a des propositions, des négociations, des conversations. Nous ne pouvons pas accepter ces mots-là ! Mais c'est très simple : si dans une entreprise, on ne se met pas d'accord, la loi s'applique. Nous ne sommes pas pour la suppression de la loi. Nous sommes pour la substitution à la loi qui s'impose, la volonté et le contrat négocié entre l'entrepreneur et ses salariés, dans le cadre de discussions qui sont autour du projet d'entreprises. Chacun le comprend très bien.
Q-Faute de prendre totalement en compte votre souhait, G. Larcher vous a-t-il fait des propositions acceptables ?
R- Non, il ne nous a pas fait de propositions acceptables, il a évoqué quelques évolutions techniques qui portent sur un certain nombre de sujets qui ne sont pas d'ailleurs négligeables.
Q-Par exemple ?
La manière dont on pourrait, par exemple, imputer sur un compte d'épargne-temps, valable et imputable sur la retraite, du temps de travail que l'on aurait effectivement fait et qui n'aurait pas été dans les 35 heures. Enfin, nous avons un certain nombre de sujets qui sont des corrections minimes qui peuvent être, en effet, rendre la chose moins difficile dans les entreprises. Mais cela n'est pas le changement fondamental que nous demandons, et qui implique que l'on fasse confiance aux entreprises, une à une, pour régler avec leurs salariés le problème de l'organisation du temps, bien entendu, du prix des heures supplémentaires. Pourquoi 10, pourquoi 25 ? D'où sortent ces chiffres ? Je peux convenir avec vous si nous avons un projet commun, que ce sera 30. Ou bien il y a une urgence qui fait qu'on ne peut pas payer plus de 8. Tout ceci doit maintenant "s'atomiser" en quelque sorte, au niveau des entreprises. Assez de ces grandes règles générales, sorties de je ne sais où, et s'appliquant à 2 millions d'entreprises ! Voilà notre conviction. Et nous sommes d'ailleurs convaincus que l'on en viendrait là. Pour l'instant, le Gouvernement, lui, politiquement n'ose pas aborder ce sujet, et se contente donc de mini décisions, dont, encore une fois, on peut dire qu'elles sont acceptables par le Medef, mais qui ne changeront pas du tout la compétitivité de notre pays, qui est finalement le problème.
Q-Vous pensez qu'un autre gouvernement ou qu'un N. Sarkozy serait mieux à même d'aller dans votre sens que J.-P. Raffarin ?
R- On verra. On verra comment tout ceci évolue. Mais enfin, nous ne cesserons pas, nous...
Q-Vous avez des préférences davantage politiques au point de vue de l'efficacité de l'entreprise ?
R- Non, non. Vous n'allez pas m'entraîner sur ce terrain. Nous disons la même chose à tous. Il y a peut-être, en effet, demain, des gens qui entendront mieux ce que nous disons. Nous considérons que le Gouvernement, jusqu'à présent, ne nous a pas entendus. Je crois que c'est une chose que les entrepreneurs disent avec beaucoup de force. Ils le disent avec force parce que c'est vrai.
Q-Vous avez également, avec G. Larcher, évoqué le traitement social, j'imagine des restructurations. Et hier, D. Gauthier-Sauvagnac, a expliqué que le sujet serait clos, d'une manière ou d'une autre, d'ici à la fin septembre. Question simple : préférez-vous, plutôt qu'un accord paritaire qui signifierait "discussions", que l'on passe par loi en espérant que cela vous sera plus favorable ?
R- On s'en souvient, on a mis en place des dispositifs sur les restructurations, c'est-à-dire, sur la nécessaire évolution des entreprises quand il y a des problèmes, d'un système, là aussi, à peu près unique au monde, qui bloque tout, qui empêche les entreprises d'évoluer, et qui ont été mis en place, souvenez-vous, à la fin du gouvernement Jospin pour des raisons purement politiques. Arrive l'alternance, on aurait été en droit de dire : on supprime ces dispositifs jugés par tous inapplicables. Pas du tout. On les suspend, ce qui est déjà étrange. Et ensuite, les ayant suspendus, on compte sur les partenaires sociaux pour se mettre d'accord sur les sujets les plus difficiles de la relation dans l'entreprise. Alors...
Q-Vous êtes un partisan de la négociation social ?
R- Nous avons tenté, nous avons négocié pendant 18 mois, nous sommes actuellement pratiquement arrivés à la fin de la négociation, et nous ne sommes pas du sentiment que l'on arrivera à un accord. Je crois que c'est au-dessus de la force des partenaires sociaux d'y arriver. La loi a imposé des choses, que la loi les modifie. Que le Gouvernement prenne ses responsabilités, c'est lui qui est responsable de l'intérêt général dans notre pays, qui doit mettre les entreprises en condition de réussir. On sait que ceci les empêche de réussir, qu'il fasse le nécessaire, c'est ce que nous avons dit à M. Larcher avec beaucoup de force, si, comme nous le pensons, bien entendu, les négociations n'aboutissent finalement pas.
Q-D'une manière générale, vous trouvez ce "pauvre"- je reprends votre expression - "ce pauvre J.-P. Raffarin", trop timide, trop lent, trop attentiste ?
R- Je me suis excusé auprès de Monsieur Raffarin, par une lettre personnelle que la presse a publiée, sur l'utilisation d'un adjectif qui est blessant et que je ne voulais pas être le contexte était passionné, mais peu importe. Donc, je ne reprendrai pas aucun adjectif pour qualifier ce que fait le chef du Gouvernement. Nous avons en réalité aujourd'hui à lui demander, puisqu'il est en position de mener son gouvernement, de mettre en uvre très rapidement, sur l'évolution du Code du travail, sur les 35 heures, et sur les prélèvements - souvenez-vous, les allégements de charges finalement qui n'ont pas été donnés aux entrepreneurs -, nous lui demandons d'agir concrètement, vite et dans l'urgence. Car ce qui est en cause, c'est la réussite économique de notre pays, la croissance et l'emploi.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 8 septembre 2004)